Tours, le pari de Millette

 

Bilan 2001-2002 : la meilleure saison depuis la montée en D1

Après trois saisons plus qu'en demi-teinte, l'ASGT s'est offert cette année une belle troisième place dans le championnat de D1, en battant Epinal par un but en or dans la prolongation du match retour.

Une juste récompense pour une équipe reconstruite presque entièrement par Bob Millette, de retour aux commandes de l'ASGT et renouvelé dans ses fonctions par un contrat de quatre ans.

Après un début de saison plutôt difficile compte tenu du renouvellement important des joueurs, l'amalgame s'est créé peu à peu. Millette a su dénicher quelques perles rares, et, en s'appuyant sur une ossature de vieux grognards (Périnet, Fayault, Gleize), il a réussi à recomposer une équipe proposant un jeu rapide et spectaculaire, reposant sur une défense à nouveau efficace.

Suite à la décision des instances du hockey français de fusionner les championnats Élite-D1, le président Bonneau a décidé de franchir le pas. "Nous profitons donc de l'occasion qui nous est offerte en intégrant ce Super 16. Cependant, il nous faut pas se voiler la face, on sait que ce futur championnat sera plus proche du niveau de la Division 1 que de l'Élite".

Pour autant, le recrutement de cette année reste très important avec pas moins de neuf arrivées, et tout ne semble pas complètement bouclé encore.

Cependant, les matches de préparation révèlent déjà une équipe au fort potentiel offensif : victoire à l'extérieur contre Angers (S16) 5-4, victoire contre Neuilly (D1) 16-1, victoire contre Clermont-Ferrand (S16) en Auvergne 8-1. Les joueurs semblent avoir trouvé leurs marques plus rapidement notamment grâce à une préparation physique individuelle des joueurs plus importante cet été.

L'objectif déclaré par le coach Bob Millette reste le maintien. Il souhaite ne pas brûler les étapes trop vite et se donne trois ans pour permettre à Tours de jouer enfin un rôle dans la course à la coupe Magnus.

L'effectif 2002/03

Le budget précédent s'élevait à près de 488 000 euros. Le président Bonneau espère cette année une augmentation de 12,5% et compte beaucoup sur la relance du partenariat et du sponsoring pour accroître celui-ci. La masse salariale, toujours l'an dernier, était autour de 183 000 euros. Les collectivités locales ont promis un soutien supplémentaire.

Compte tenu du budget, des desiderata des joueurs après la saison passée, Millette a dû recomposer une équipe en souhaitant garder une certaine ossature. Pour des raisons personnelles, par choix, plusieurs joueurs ne poursuivent pas l'aventure avec les Diables noirs : Marcel Skokan (A), David Renou (D), David Waddleton (G) et Franck Demeocq (A). Serge Saint-Denis (A), Gilbert Lefrançois, Kamil Stasnty (A) et Stanislav Picha (A). L'emblématique Scott Goldman repart aux Etats-Unis malgré les offres de Millette pour qu'il revienne à Tours. Il semblerait qu'il raccroche et reprenne les restaurants de ses parents à Philadelphie.

Gardiens : Millette a renouvelé sa confiance au jeune Slovaque Vladimir Hiadlovsky junior. Ce dernier avait assuré la quasi totalité des matches de la saison dernière. Peu inquiété par un second gardien qui ne semblait pas avoir la confiance de l'entraîneur, Hiadlovsky s'est installé confortablement dans son poste et ne semble pas toujours s'être remis en question. Côté jeu, très rapide, il s'est appuyé sur une solide défense et a fait échouer nombre d'attaques adverses ce qui en a fait un des chouchous du public de la rue de l'Elysée. Par contre, on ne saurait trop insister sur ses sorties fantasques, ses relances parfois déroutantes pour ses équipiers, et ses mauvais gestes à l'égard des adversaires parfois indignes d'un sportif.

Gageons qu'avec l'arrivée du deuxième gardien, véritable concurrent (Millette l'a clairement déclaré : pas de titulaire indétrônable), Hiadlovsky saura se remettre en cause et devenir enfin le grand gardien qu'il pourrait être en "purifiant" son jeu de ses petites manies agaçantes.

C'est sans doute pour cela que le coach est allé chercher un deuxième gardien pouvant provoquer l'émulation chez le Slovaque. Thierry Noël (24 ans, 1,83 m, 85 kg) en provenance de La Chaux-de-Fonds (Suisse), fait peser dans la balance son expérience, ce qui ne sera pas négligeable cette année dans le Super 16 face aux grosses armadas de l'ex-Elite. Les Diables Noirs sont ainsi dotés de deux bons gardiens pour affronter les canonniers adverses. Ils disposeront, pour cela, en premier rempart d'une défense solide qui a déjà fait ses preuves l'an dernier.

La défense : à l'intersaison, Millette en avait fait rapidement une priorité, en disant qu'il souhaitait faire resigner d'abord les joueurs qui formaient sa colonne vertébrale. Parmi eux, les quatre défenseurs, qui ont assuré la plupart des matches, avec brio d'ailleurs, la saison passée.

A commencer par l'immense Marcel Simak (25 points en 33 matches la saison dernière) qui a pris sur ses épaules une part plus qu'impressionnante du travail défensif des Diables. Sobre, précis, toujours bien placé, armé d'un shoot énorme, le Slovaque en impose avec sa masse physique dont il use paradoxalement assez peu face aux attaquants. Joueur complet et très correct, avec des temps de glace fabuleux l'an passé (près de quarante minutes parfois !), il sera encore l'un des piliers de la défense tourangelle.

Le coach pourra aussi compter sur trois autres défenseurs déjà présents la saison passée : le Français Olivier Vandecandelaere (11 points la saison dernière), puissant et agressif dans le bon sens du terme, et les deux autres Slovaques Pulscak et Supuka (14 points en 2001-2002), deux joueurs essentiels dans le système de Millette. Excellents défenseurs, ils possèdent un très gros patinage, une vision du jeu remarquable qui a souvent fait le bonheur des attaquants dans la dernière passe décisive. Ils étaient souvent à l'origine des buts en infériorité numérique que Tours a marqués à plusieurs reprises, contre le cours du jeu.

Pour compléter son système, Millette a fait signer deux autres défenseurs. C'est ainsi que l'ASGT disposera pour la première fois de trois lignes défensives complètes et équilibrées.

Jean-François Jodoin, le solide défenseur canadien en provenance de Rouen, qui apportera son expérience de l'Elite, et le jeune Slovaque Vladimir Konopka verrouillent le dispositif. Si Millette semble ne pas avoir encore défini complètement les associations défensives, les nouveaux n'ont pas tardé à prendre leurs marques : Konopka a marqué à deux reprises contre Angers et Neuilly. Le coach ne tarit pas d'éloges concernant cet ex-international junior et le compare déjà, malgré son jeune âge, au vieux briscard Pulscak. Comme l'an passé, la défense semble encore la rampe de lancement idéale pour permettre aux attaquants de briller.

L'attaque : déjà l'an passé, l'attaque tourangelle a brillé grâce à des individualités rapides et très adroites. On se souvient du "bondissant" Goldman, de l'excellent Stastny, qui, associé à son comparse Picha, a été le dernier buteur à offrir la victoire lors d'un but en or contre Epinal, en infériorité numérique, pour la troisième place du championnat de D1. Ces trois-là sont partis vers d'autres cieux.

Pour autant, le coach Millette n'est pas resté les bras croisés. Il a su faire re-signer les cadres tourangeaux, qui ont tous déjà connu l'élite : François Gleize, capitaine courage, qui retrouve ainsi l'élite, un peu plus de 10 ans après, Paul Fayault, le remuant attaquant de poche des Diables, et l'expérimenté Norbert Périnet, ancien défenseur, reconverti par Millette en attaquant harceleur de défense.

Le gros coup du coach canadien est d'avoir réussi à faire venir son compatriote Julien Desrosiers qui a fait les beaux jours de Strasbourg (et les malheurs de Tours notamment avec cinq buts marqués à Hiadlovsky en deux rencontres !). Meilleur buteur de D1 avec 24 buts, trois fois buteur contre Neuilly et une fois contre Angers pendant les matches amicaux, Desrosiers sera secondé par plusieurs attaquants qui doivent compenser les départs.

Ainsi ont signé : Jean-François Gamelin, centre, "très bon passeur" d'après Millette, un temps associé avec Dominique Perna (qui finalement ne fera pas partie de l'effectif : blessé à une épaule pendant l'été, il sera indisponible pour une bonne partie de la saison et a été lâché par Millette), Marcel Paulovsky, qui jouait la saison passée en Allemagne, Sébastien Decaens, Franco-Canadien ("C'est un garçon qui a de la classe, qui n'est pas là pour sa fiche personnelle. C'est un leader qui a la tête bien pleine" dit de lui Millette) et enfin Zdznek Novosad, un jeune Slovaque de 24 ans.

Tous ont déjà prouvé leur intégration au sein des Diables en inscrivant de nombreux buts dans les matches de préparation.

Pour autant, le recrutement est-il définitivement bouclé ? Millette se réserve encore le droit de changer une ou deux unités. Le camp d'entraînement à Romorantin au mois d'août a permis au coach de se faire une idée des joueurs ; l'effectif semble donc désormais presque arrêté.

 

Les points forts

Robert Millette : c'est un meneur d'hommes indéniablement. Il a su l'an passé créer rapidement un amalgame entre des joueurs venus d'horizons très différents. Son carnet d'adresses lui permet de dénicher de très bons joueurs en Europe ou outre-Atlantique. Il exige une préparation physique importante. Fin tacticien, il sait observer les lignes adverses et composer selon l'opposition qu'il a en face de lui ; à plusieurs reprises il est capable de modifier ses blocs pour surprendre l'adversaire. Très présent sur le banc, il sait motiver ses joueurs en leur imposant une stricte discipline dans les schémas tactiques. Seul petit bémol : il impose un style nord-américain basé sur le défi physique, ce qui n'est pas toujours du goût des adversaires et des arbitres...

La défense : ce fut la grande révélation de l'année dernière. Devant Hiadlovsky, parfois fantasque, un bloc défensif de deux lignes seulement a su s'imposer par un patinage énorme et une science du jeu efficace. L'effectif est reconduit dans son intégralité pour cette saison et on doit ajouter une ligne supplémentaire composée de Jodoin et Konopka. Gros frappeurs à la bleue, les défenseurs ont également des arguments à faire valoir lors des jeux de puissance.

L'état d'esprit : si Millette parvient à reconduire celui produit toute la saison par ses joueurs, il sera difficile de s'imposer à Tours. Les joueurs n'ont rien lâché. Jusqu'à la dernière minute (pour preuve, plusieurs victoires - Dijon, Strasbourg, Epinal - ont été arrachées dans les ultimes secondes), les joueurs se battent pour le résultat. Idem pour tuer les pénalités contre eux : solidarité, abnégation, don de soi, les Tourangeaux ont ainsi fait avorter bon nombre de pénalités.

La rapidité : que ce soit la vitesse des attaquants ou le coup d'œil des défenseurs pour sortir le palet rapidement, les Diables noirs ont été très efficaces grâce à leur vélocité ; et notamment, ce leur fut très utile lorsqu'ils ont été dominés en infériorité numérique. Sur une passe, le danger se reportait sur la cage adverse.

La progression physique : Millette fait travailler ses joueurs à partir d'un foncier important. Le patinage s'en ressent. La progression physique a été constante tout au long de l'année. Les Diables noirs ont su souvent faire la différence sur leur physique en fin de partie.

Les lignes offensives et défensives : peut-être pour la première fois depuis longtemps, elles sont équilibrées et "suffisantes". Pour autant, en cas de blessure ou de suspension, l'équilibre sera fragilisé.

Le public : on pourrait dire beaucoup de choses sur sa qualité. Toujours est-il que les gradins de la patinoire sont presque toujours combles les samedis soirs. Entre 1600 et 1800 personnes régulièrement sur la saison. Un soutien parfois un peu passif, un peu trop chauvin, mais qui, malgré tout, incite les joueurs à tout donner.

 

Les points faibles

La recomposition de l'équipe à presque 50%. De nouveau, tout est à rebâtir pour Millette pour trouver les bonnes associations et les bons schémas tactiques. Pour autant, les matches de préparation ont montré que, à ce niveau, les Diables noirs sont mieux affûtés que la saison passée.

L'impuissance dans le power-play : la domination territoriale des Diables dans ce secteur de jeu contrastait avec l'impuissance des artilleurs à déclencher le moindre shoot. Pourtant les arguments ne manquent pas. On a pu constater une certaine amélioration en fin de saison mais c'est sûrement un angle de travail pour Millette.

L'indiscipline : liée parfois à un système de jeu physique, voulu par le coach, les joueurs se laissent aller à trop de fautes inutiles. L'an passé, les Diables noirs ont su compenser par une défense solidaire de tous les instants. Mais cela laissait des traces physiques indéniables.

La profondeur du banc : contrepartie du point fort ci-dessus, l'effectif tourangeau est complet mais pas extensible. Sera-t-il suffisant pour une saison entière à ce niveau ?

Les installations sportives : comme chaque année, la question est : lâchera, lâchera pas ? L'an passé, les Diables noirs avaient été obligé de s'exiler à Romorantin et à Orléans pour s'entraîner et disputer les matches de championnat à cause du système défectueux des installations. Il a été décidé de procéder à la mise en place d'un tapis de glace, non sans mal. Après un mois et demi d'attente, les joueurs ont retrouvé leurs quartiers. Cette année, compte tenu de l'ampleur des travaux, un nouveau tapis a été installé pour l'année, en attendant la totale réfection du système prévu pour avril 2003.

E. O'Grady

 

 

PS : À dix jours de la reprise, Tours a engagé une ligne d'attaque complète supplémentaire, avec le jeune Slovaque Peter Bohunicky, l'international israélien Alon Eizenman (qui apporte ainsi une petite touche exotique, même si en pratique il est originaire de Toronto) et le vétéran italo-canadien Dino Grossi, qui, après un passage à Milan et Brunico, revient en France avec l'intention de finir sa carrière en remportant une troisième coupe Magnus en plus de celles déjà acquises avec Brest et Reims.

 

 

Départs : Waddleton (USA), Stastny, Picha, Skokan, Renou (arrêt), Goldman (arrêt), Lefrançois, Saint-Denis, Othon, Déméocq, Laurier.

Arrivées : T. Noël (Chaux-de-Fonds, SUI), Jodoin (Rouen), Konopka (Zvolen, SVK), Gamelin (Université du Vermont, USA), Desrosiers (Strasbourg), Leroy (Angers), Paulovsky (Mittelrhein Neuwied, ALL), Novosad (Presov, SVK), Decaens (Université d'Ottawa, CAN).

Effectif

Gardiens : Vladimir Hiadlovsky (23 ans, SVK), Thierry Noël (24 ans, SUI/FRA).

Défenseurs : Frantisek Pulscak (30 ans, SVK), Marcel Simak (29 ans, SVK), Jan Supuka (22 ans, SVK), Olivier Vandecandelaere (22 ans), Jean-François Jodoin (31 ans, CAN), Vladimir Konopka (22 ans, SVK).

Attaquants : François Gleize (31 ans), Paul Fayault (29 ans), Norbert Périnet (36 ans), Jean-François Gamelin (22 ans, CAN), Julien Desrosiers (22 ans, CAN), Nicolas Leroy (22 ans), Marcel Paulovsky (32 ans, SVK), Zdenek Novosad (24 ans, SVK), Sébastien Decaens (25 ans, CAN/FRA) + Peter Bohunicky (22 ans, SVK), Alon Eizenman (23 ans, ISR/CAN), Dino Grossi (32 ans, CAN/ITA).

Entraîneur : Robert Millette (CAN).

 

 

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