Politique et passion

 

À l'orée de la saison 2003/04, Karlos Gordovil déclarait que chaque rencontre au sein de cette poule ouest serait un match de play-offs. Avec une défense renforcée par des joueurs sans grosse référence au plus haut niveau et une attaque quasiment similaire à celle de la saison passée, l'objectif d'une qualification en poule Magnus semblait difficile voire impossible. Malgré un début difficile et un changement d'entraîneur (remplacement du duo Gordovil/Dostal par Lutaud), l'Hormadi dès la cinquième journée accélérait le rythme en s'appuyant sur une défense organisée et une attaque homogène, en battant deux fois Rouen étrillant Angers chez eux le pari fut gagné. Le mélange d'enthousiasme et de rigueur de la troupe de Jean-Michel Lutaud n'a eu cesse de ravir les supporters de la Barre, la fréquentation s'en est inévitablement ressentie. La poule Magnus fut plus difficile, mais la venue des play-offs avec la confrontation face à l'épouvantail mulhousien fit souffler un vent de passion déjà présent lors de la saison 1999-2000.

La victoire en quart de finale contre les Scorpions obtenue au forceps ressemblait au duel David contre Goliath, la troisième place remportée sur un score fleuve permettait à Jean-Christophe Filippin de clore sa carrière sur la deuxième meilleure performance de l'histoire du club. L'avant-saison de l'Hormadi fut à nouveau agitée par des difficultés financières importantes qui sont malheureusement légion depuis 2000, le club a du mal à boucler un budget cohérent, la prospection de nouveau partenaires et quasiment inexistante, les sponsors restent les mêmes d'une saison à l'autre au gré des enjeux politico-financiers. Les "gros" sponsors sont choyés mais ne restent que le temps nécessaire à leurs intérêts, et les "petits" qui eux sont là depuis des années sont bien souvent négligés. La présidence officielle du club ressemble à une partie de chaises musicales, et les hommes changent quasiment tous les deux ans. Il est évident que ce contexte savamment entretenu ne séduit pas les investisseurs qui préfèrent se tourner vers d'autres sports plus porteurs (le rugby), et pourtant hormis le Biarritz Olympique qui est auréolé d'un titre de champion, l'Aviron Bayonnais qui est monté cette saison en Top 16 ne jouit pas de la même aura dans son domaine que l'Hormadi. Le seul nouveau partenaire de cette saison est venu tout seul, en effet le père Dodu (deux panneaux derrière les buts et un logo illisible et délavé sous la glace) est arrivé avec le transfert depuis Brest du gardien Gabriel Bounoure.

Face à ces difficultés financières, les dirigeants ont enfin compris qu'ils pouvaient puiser dans le réservoir de l'Anglet Hormadi Amateur, mais il semble que cette prise de conscience soit bien (trop) tardive. En effet, la section amateur a connu à son tour des problèmes financiers (inhérents au changement d'équipe ?) doublé par un désaffection massive de ses jeunes (le chiffre de 120 départs ou arrêts en quatre ans est avancé). Pour la première année depuis la création de cette section, une catégorie ne sera pas représentée (minimes), et le partenariat avec le club voisin de Bordeaux s'est avéré nécessaire pour aligner une équipe complète en espoir comme en cadet élite. L'intégration homéopathique des jeunes pousses de l'Hormadi en équipe première a eu logiquement raison de la patience de ces derniers qui ont arrêté ou changé de club, seuls Xavier Lasalle ou Raphaël Larrieu ont ces derniers années réussi à se faire une place au soleil.

Les gardiens : logique sportive ou pas ?

Depuis deux ans, le Québécois Jean-Ian Filiatrault s'est imposé dans les buts comme un gardien sobre et efficace, en privilégiant la technique et le placement aux arrêts-photos auquel son prédécesseur nous avait habitué. La venue de ce gardien d'une ligue où il disputait allègrement une soixantaine de rencontres est bien évidement conditionnée par le fait de disputer sauf accident tout le championnat. Les doublures se sont succédées, de Guillaume Drouot (parti l'an passé en Avignon) en passant par Benoît Sanchez (parti dans le nouveau club de Pau cette saison).

Et c'est bien là que le bât blesse car Gabriel Bounoure est venu avec l'espoir de disputer la moitié des rencontres, tout comme il le faisait dans l'équipe Père Dodu de Brest. Mais voilà, l'ex-cerbère des Albatros n'a pas vraiment la même assurance que l'actuel numéro un angloy, il n'est pas évident que la cohabitation soit facile et que la logique sportive soit vraiment respectée.

La défense prend des kilos

Ce secteur de jeu fut la grande satisfaction de la saison passée, les duos slovaques et canadiens ont fonctionné à merveille. Daniel Sedlak a su s'affirmer comme le leader qui manquait et son slap a fait des ravages. Son compatriote Lubomir Duda, bien discret à Besançon, a été l'assurance tous risques en défense lorsque son partenaire montait à l'offensive, sans pour autant se montrer maladroit lorsqu'à son tour il montait. La paire canadienne David Saint-Onge - Pascal Bédard a bien fonctionné, alliant vitesse et travail contre la bande.

Mais voilà, seul le duo slovaque est resté, et pour pallier le départ des Québécois le club a fait appel à Jean-Benoît Deschamps et Roman Marakhovsky. Le premier nommé avait fait un passage éclair le temps d'une rencontre amicale à l'Hormadi, au vu de ces statistiques et de son gabarit il ne fera pas bon s'y frotter. Gageons que le rugueux Canadien n'ira pas trop souvent visiter les geôles de France et de Navarre. Le défenseur ukrainien a fait une bonne saison à Villard-de-Lans l'an passé en alliant physique et technique, ces deux qualités de jeu seront bien appréciées dans le secteur défensif angloy. Déjà regretté dans le Vercors, espérons qu'il en soit vite de même au Pays Basque.

Le départ à la retraite du capitaine Jean-Christophe Filippin laissera un temps de glace intéressant à Julien Hitze, le retour de Thomas Molia après une saison à Bordeaux assurera de la profondeur dans ce secteur de jeu aux Basques. Cependant l'association avec l'inconstant Mickaël Wiart n'est pas forcement très rassurante, Thomas Molia a peut-être dans ce contexte une place à se faire.

A priori, le secteur défensif devrait savoir varier les styles de jeu, un bloc Duda-Sedlak technique et offensif complété par un bloc Deschamps-Marakhovsky plus physique et défensif, l'inconnue réside dans le bloc Wiart-Hitze-Molia qui manque un peu d'expérience de jeu.

L'attaque : trois blocs homogènes

L'offensive angloy a l'an passé connu une petite baisse, le premier bloc moins prolixe que les saisons passées avait été relayé par une montée en régime des deux autres lignes. La petite fausse note fut quand même le manque d'intégration d'une quatrième ligne de junior (Pousset-Lasalle-Cantos) ou d'incorporation du plus talentueux des juniors Xavier Lasalle sur la deuxième ou la troisième ligne.

Ce secteur a perdu deux joueurs (Jérôme Patard et Antoine Amsellem) pour un seul recrutement (Pavol Zdrahal), mais les circonstances propulseront sur le devant de la scène de jeunes joueurs qui jusque là n'avaient pu s'exprimer en équipe première (Julien Pousset et Thomas Decock). L'an passé, le rendement de David Dostal en début de saison avait posé quelques interrogations, le virevoltant Michal Garbocz avait connu une baisse de régime, ce qui s'explique en partie par le sacrifice au travail défensif de ce premier trio par définition ultra-offensif.

Le deuxième bloc, à l'image de Xavier Daramy, a franchi un nouveau cap et si Stanislas Solaux se décide à jouer un peu moins personnel la progression devrait logiquement continuer. Le solide Pavol Zdrahal, venu du deuxième niveau tchèque, présente des statistiques et un passé en Extraliga intéressant, son physique et sa technique seront d'un apport non négligeable.

Le troisième bloc a fait une très bonne saison, le trio Courally-Aubry-Maréchal a su s'acquitter des tâches défensives tout en se montrant travailleur et opportuniste devant le but. Cette saison, il apparaît possible et même nécessaire de faire jouer un quatrième bloc ou d'incorporer dans les trois autres des joueurs comme Julien Pousset (au gabarit intéressant) ou le prometteur Thomas Decock, et il ne faudra surtout pas laisser le talentueux Xavier Lasalle faire banquette. Au vu de la sinistrose actuelle du hockey mineur angloy, ce serait un signal fort qui pourrait relancer les vocations.

Remettre de l'ordre dans un club en pleine dérive

Le président de la Commission Nationale d'Aide et de Contrôle de Gestion, Bernard Bourandy, déclarait dans un article publié sur le site de la fédération : "En ce qui concerne Anglet, la CNACG a souhaité donner le feu vert de la dernière chance mais en cas d'écart, il n'y aura plus de discussion possible." On ne peut être plus clair. L'épée de Damoclès qui est au-dessus du club basque depuis plusieurs années ne tient désormais plus à grand-chose.

Le contexte politique du club est connu de tous, il est nécessaire que l'Hormadi soit à nouveau dirigé par des passionnés désintéressés pour qui le seul leitmotiv soit la progression du club. La situation est vraiment grave car non seulement l'avenir de l'équipe première ne tient qu'à un fil, mais la fondation qu'est le hockey mineur vacille également. La brillante troisième place obtenue par le club la saison dernière est l'arbre qui cache la forêt, visiblement seuls les résultats comptent pour le supporter angloy, et les joueurs dans un pareil contexte ont énormément de mérite à se battre ainsi.

Thierry Duvignau

 

Départs : Lutaud (entraîneur, Pau), Sanchez (Pau), Saint-Onge (Canada), Bédard (Odessa, CHL), Jean-Christophe Filippin (retraite), Amsellem (Saint-Hyacinthe, LNAH), Patard (Saint-Hyacinthe, LNAH), Ladonne (roller), Cantos (Pau).

Arrivées : Bounoure (Brest), Deschamps (Laval, Québec), Marakhovsky (Villard-de-Lans), Molia (Bordeaux), Zdrahal (Ustí nad Labem).

Effectif :

Gardiens : Jean-Ian Filiatrault (CAN, 30 ans), Gabriel Bounoure (23 ans).

Défenseurs : Zdenek Sedlak (SVK, 33 ans), Lubomir Duda (SVK, 29 ans), Jean-Benoît Deschamps (CAN, 25 ans), Roman Marakhovsky (UKR, 25 ans), Julien Hitze (23 ans), Mickaël Wiart (23 ans), Thomas Molia (22 ans).

Attaquants : Michal Garbocz (POL, 31 ans), David Dostal (31 ans), Pavel Zdrahal (TCH, 33 ans), Stanislas Solaux (28 ans), Xavier Daramy (23 ans), Xavier Lasalle (20 ans), Géraud Maréchal (24 ans), Julien Aubry (25 ans), Nicolas Courally (23 ans), Raphaël Larrieu (23 ans), Julien Pousset (22 ans), Thomas Decock (18 ans), Xavier Idiart.

Entraîneur : Karlos Gordovil.

 

Retour à la rubrique articles