Suisse 2004/05 : bilan

 

Résultats du championnat suisse

 

Au lieu de profiter pleinement de la présence de stars de grande classe en son sein, le hockey suisse a vécu une des pires saisons de son histoire, en procédant à un incroyable va-et-vient de joueurs dans l'anarchie la plus complète. Cette foire aux bestiaux a encore aggravé un climat qui tient maintenant plus de la lutte d'influence que de la compétition sportive, où les arrangements en coulisses ont pris le pas sur ce qui se passe sur la glace. Depuis quelques saisons, la LNA donne le sentiment que les règlements sont bidouillés (tiens, et si on jouait à treize ?) pour les besoins de tel ou tel, de quoi dégoûter ses plus fidèles suiveurs. Le hockey suisse, qui était cité fort justement en modèle, est en train de devenir un repoussoir. Le lock-out n'a fait qu'exacerber la tendance au n'importe quoi qui se dessinait déjà. Une reprise en main est plus que nécessaire.

 

Premier : Davos. Rira bien qui rira le dernier. Tous ceux qui critiquaient le HCD pour son pari risqué ont été les premiers à raisonner à très court terme en changeant de renforts étrangers tous les quatre matins. Un seul club a gardé le même quatuor tout au long de la saison, et ce club, c'est Davos. Pour l'instabilité supposée, on repassera. Les Grisons ont adopté une stratégie, en misant sur un lock-out NHL qui durerait toute l'année, et ils s'y sont tenus jusqu'au bout. C'est le seul club qui a su profiter de la situation en présentant durablement des joueurs spectaculaires, le seul qui a su faire grimper sa moyenne de spectateurs, le seul qui retirera un vrai bénéfice de cette saison, en l'occurrence un titre de champion à son palmarès. Dans le même temps, les autres ont surtout montré au grand jour leur versatilité.

Au début, pourtant, le pari n'avait rien d'évident. Il a fallu gérer les humeurs de Joe Thornton, qui donnait parfois l'impression d'être là sans être là, puis réussissait soudain une passe exceptionnelle quand il s'était fait oublier. Mais lorsque ça comptait vraiment, pour les play-offs, puis aux championnats du monde où son duo avec Nash a failli amener à lui seul le Canada au titre, il a parfaitement répondu présent, et son état d'esprit n'a plus fait débat. Les deux ailiers Rick Nash - en puissance - et Niklas Hagman - en patinage - ont aussi su élever le niveau de la LNA, sans qu'il y ait eu besoin que les trois joueurs évoluent forcément ensemble. Car ils n'étaient pas seuls. Reto von Arx et Michel Riesen sont plus que jamais des piliers offensifs. Le quatrième étranger, le discret mais indispensable Josef Marha, toujours fidèle au poste là où il peut être utile, a été justement récompensé par le but en prolongation qui a donné le titre à Davos. Surtout, le jeune gardien Jonas Hiller - transformé de point d'interrogation en point fort - a constitué l'insolente révélation de la saison.

 

Deuxième : Zurich. Des saisons de transition comme celle-là, on connaît beaucoup de clubs qui rêveraient d'en vivre. Contraints à un exil d'un an dans une petite patinoire le temps que le Hallenstadion resurgisse de terre, les ZSC Lions ont suivi leur petit bonhomme de chemin jusqu'à la finale. Randy Robitaille - pas aussi médiatisé que ses confrères de NHL parce qu'il avait eu l'idée originale de signer un vrai contrat ferme au lieu de jouer les stars qui daignent accorder aux pauvres mortels suisses l'honneur de leur présence pendant le lock-out en se faisant prier chaque matin pour rester - s'est imposé tout simplement comme le meilleur marqueur du championnat, et de loin. Et le jeu de puissance zurichois, mené à la baguette par l'impeccable défenseur Mark Streit, a dominé son sujet... sauf en finale.

Car les Lions ont eu le bon goût de s'arrêter juste à temps. Il est vrai qu'il aurait été impoli de contrevenir aux plans du staff, qui avait bien précisé que le titre n'était pas pour cette année, que ce serait beaucoup trop tôt. Les Zurichois ont donc été très sages. Certains leur ont reproché de l'être un peu trop, de manquer d'agressivité, notamment parce qu'ils n'avaient pas réagi après le dernier écart de conduite de Thornton, une agression sur leur éternel gardien finlandais Ari Sulander en fin de saison régulière. Qu'on se rassure. Bientôt, plus personne n'osera traiter les Lions de petits chatons. Car, rappelons-le, c'était juste une saison de transition, une sieste passagère. Dans la jungle, terrible jungle, le lion va se réveiller... avec un sacré appétit.

 

Troisième : Zoug. Enfin, le recrutement du EVZ a été réussi. À une exception près. Le défenseur américain Brett Hauer, s'il a montré sa capacité à créer du jeu lors des championnats du monde, avait été bien plus discret pendant la saison, qu'il a terminé en tribunes comme étranger surnuméraire. Ce n'est pas grave, car son compatriote Barry Richter a parfaitement compensé cette carence en prenant le rôle du défenseur offensif régisseur. Donc, le recrutement a été réussi. Parce que Lars Weibel a enfin donné à Zoug un appui solide dans les cages. Et surtout parce qu'Oleg Petrov a su montrer toute sa classe sans que son talent trop voyant ne soit préjudiciable au collectif.

Avec cette place de demi-finaliste, les dirigeants zougois ont enfin eu un retour sur investissement présentable. Maintenant que les querelles en coulisses et les vestiaires plombés semblent appartenir au passé, Zoug peut redevenir un club majeur de LNA. Il a retrouvé la stabilité grâce au travail déterminé de l'exigent Sean Simpson, et il a tout pour réussir. Les moyens financiers, bien sûr. Une bonne ambiance, ce qui est nouveau. Mais aussi un centre de formation qui est le meilleur du pays derrière celui de Kloten.

 

Quatrième : Berne. Trop de patience ou trop d'impatience ? Quelle est la raison du ratage des champions en titre ? D'un côté, on s'est fourvoyé en faisant confiance à Alan Haworth, l'entraîneur-adjoint de l'an passé qui a voulu trop en faire et s'est cramé, si bien qu'il a fallu se résoudre à le virer début novembre, de même un peu plus tard que le Canadien Rich Brennan, qui, à force de se convaincre qu'il était le meilleur défenseur de l'équipe, n'a jamais voulu comprendre ce qu'on attendait d'un renfort étranger en LNA. De l'autre, on a agi dans l'urgence en consommant pas moins de dix étrangers pour quatre places, alors qu'on avait promis ne pas vouloir de "touristes de NHL". Résultat, si le sens du jeu de Daniel Brière a pu s'exprimer, la reconstitution des duos qu'il formait en équipe de Canada avec Dany Heatley (qui a mordu à l'hameçon des millions de Kazan alors que les Bernois étaient dos au mur pour la qualification) ou aux Buffalo Sabres avec Jean-Pierre Dumont (devant remplacer Heatley dont il n'a pas l'opportunisme) n'a jamais fonctionné

Le vrai problème, c'est qu'il n'y a jamais eu de cap clairement fixé et expliqué. Le bateau s'est mis à tanguer de plus en plus, et tout le monde a fini par avoir le mal de mer, sans qu'il y ait personne à la vigie pour indiquer où sont les eaux calmes. Toutes les décisions ont semblé tomber au mauvais moment, comme la reconduction de contrat de Sébastien Bordeleau - même s'il a justifié ensuite qu'il la méritait par sa bonne fin de saison - qui a fait grincer des dents certains joueurs suisses encore sur liste d'attente. Des non-dits, des rancœurs, des caractères à fleur de peau... L'entraîneur et ancien directeur de théâtre Alpo Suhonen a fait irruption en plein psychodrame. Il a quand même amené l'équipe in extremis en play-offs et éliminé le favori. Les fidèles supporters, qui sont venus à plus de quinze mille en moyenne malgré cette saison noire, n'en demandaient pas plus, rassérénés.

 

Cinquième : Lugano. Pour la première fois depuis l'introduction des play-offs en Suisse il y a près de vingt ans, on a donc retrouvé quatre clubs alémaniques en demi-finale... Qu'est-il donc arrivé au HCL, d'habitude très stable, grâce au soutien d'un matelas de billets capable d'amortir les chocs ? Il n'a pu vraiment s'appuyer que sur deux étrangers, ses deux piliers finlandais Peltonen (plus aussi impérial) et Nummelin (qui a accumulé les petits pépins). Gêné aux adducteurs, Maneluk a décliné, alors que Benoît Gratton a été un flop total. Les dirigeants ont alors multiplié les recours à des pigistes au lieu d'investir au bon moment dans un vrai renfort de très gros calibre qu'ils auraient eu les moyens de s'offrir.

Lugano s'est laissé aller à la douceur de vivre sur les rives tranquilles de son lac. Pourquoi s'en faire quand on n'a pas le moindre rival en saison régulière, et qu'on ne perd qu'une seule fois à domicile, même pas face à un concurrent direct ? Cette domination trop facile n'a procuré aucun avantage, puisque les Tessinois ont dû se payer le champion en titre en quart de finale, leur bête noire Berne. De nouveau, ils ont manqué de rage et d'engagement physique face à ces Ours mal léchés qui ne se sont transformés en nounours que pour leur dire "Bonne nuit les petits". Chut ! De nouveau le marchand de sable est passé sur Lugano... Après une énième grasse matinée en saison régulière, l'envie de se lever brusquement pour les play-offs fait défaut.

 

Sixième : Genève-Servette. Le temps qu'il convainque Anschutz (qui devait de toute façon retirer ses billes de Genève à l'issue de la saison) de le laisser agir à sa guise, on s'attendait à ce que Chris McSorley dégote des joueurs de très haut niveau. La déception a été à la hauteur de l'attente. C'est Philippe Bozon, sorti de sa retraite pour dépanner, qui a encore été le meilleur étranger du GSHC, ce que l'attaquant français lui-même décrit comme une "anomalie". À part le centre créatif Andreas Johansson, les autres n'ont pas laissé un souvenir impérissable, qu'il s'agisse de Mikael Samuelsson, qui a eu bien raison de rentrer en Suède, de Derek Armstrong, qui a osé tenir tête au patron, ou encore de Shean Donovan, le finaliste de la Coupe Stanley qui n'a pas vraiment eu le temps de s'adapter.

Au lieu du super-renfort censé casser la baraque, on a vu des types de passage nantis de contrats de quelques mois. Le seul qui a été engagé dans la durée, Michal Grosek, est lui-même un joueur instable, capable de disjoncter complètement et vainqueur haut la main du classement des pénalités. En plus, la malchance s'en est mêlée. Le vétéran Geoff Sanderson, en qui McSorley croyait tenir son leader, s'est blessé au genou à l'entraînement. Finalement, tout ce qu'on retiendra de cette saison qui devait être spéciale, ce sont les émouvants adieux définitifs du Boz' et l'explosion du junior Kévin Romy, devenu international A.

 

Sixième : Ambrì-Piotta. Tout avait pourtant si bien commencé. Après onze journées, Ambrì pointait fièrement en tête du classement. Ses trois attaquants canadiens, Jeff Toms, Hnat Domenichelli et Jean-Guy Trudel, étaient alors les meilleurs de la LNA. Il n'y avait plus guère qu'une place d'étranger, celle réservée depuis cette saison à un Européen, qui pouvait poser problème. Figurez-vous que, pour cet unique poste, sept joueurs différents se sont succédé ! Parmi eux, Harijs Vitolins, le vétéran letton qui devait faire juste une pige pendant une suspension du trop nerveux Trudel, mais qui est resté un match de plus - à l'occasion d'une victoire 6-2 sur Lausanne - puisqu'il était "communautaire"... Sauf que cette définition ne devait pas recouvrir les nouveaux entrants dans l'Union Européenne comme la Lettonie. La ligue l'avait expliqué aux clubs par e-mail, et elle donna donc match perdu au HCAP par forfait, mais le règlement de la compétition, lui, n'était pas clair sur ce point.

Ambrì-Piotta engagea donc un recours, et pendant des semaines, la lutte pour les play-offs devint un gigantesque bazar où se côtoyaient deux classements différents, l'un dans le cas où le HCAP serait débouté, l'autre dans le cas où il obtiendrait gain de cause. Entre-temps, le sympathique club villageois s'était aliéné tout le monde du hockey suisse, ligué contre l'empêcheur de tourner en rond. On a ainsi vu une équipe déjà éliminée (Fribourg) prêter un joueur (Rhodin) à une autre (Genève) pour un match décisif pour se qualifier en play-offs, afin de faire barrage à Ambrì. Puisque les règlements indolents de la ligue "professionnelle" le permettent, allons-y pour la foire d'empoigne générale. Si responsabilité et rigueur étaient des vertus suisses, elles ne le sont plus dans le hockey sur glace... Finalement, le recours - gagné - d'Ambrì n'a rien changé à la qualification, mais il a bouleversé l'ordre des quarts de finale. Le HCAP a affronté Zurich au lieu de tomber sur Lugano. Cela ne l'a pas plus avantagé, mais par contre ça a provoqué la perte de son rival cantonal, opposé du coup à Berne...

 

Huitième : Rapperswil-Jona. Puisqu'Ambrì a gaspillé son capital sympathie, le SCRJ a tout pour devenir le nouveau chouchou du hockey suisse. Ce petit club progresse doucement mais sûrement, année après année, et son équipe qui met beaucoup de cœur suscite une affection naturelle. Rapperswil a retrouvé les play-offs, même s'il n'a rien pu faire contre Davos, surtout en l'absence de son meilleur marqueur Stacy Roest, qui avait pris un coup sur l'os de la hanche juste avant les play-offs. De plus, les jeunes joueurs y progressent, grâce à l'attribution systématique d'un "mentor" expérimenté qui prend un jeune sous son aile et souvent sur sa ligne. Cela donne des découvertes inattendues. Le défenseur Cyrill Geyer a ainsi rejoint l'équipe nationale, alors que le joueur originaire de Coire n'était passé par aucune sélection junior.

Cependant, il peut arriver que le "gentil petit club" révèle un visage de "grand club méprisant" avec plus petit que soi. C'est ce qui s'est produit alors que le SCRJ vient de décider de se baptiser "Lakers". Pourquoi lui et pas Genève, Lugano ou Zoug, car ce ne sont vraiment pas les lacs qui manquent en Suisse ? Peut-être parce que les autres auraient trouvé que cette idée manquait vraiment d'originalité ? Elle en avait déjà plus de la part du petit club amateur de basketball de Rapperswil-Jona, qui s'appelait justement "Lakers". C'était un clin d'œil amusant au nom curieux des célèbres Los Angeles Lakers (qui l'avaient récupéré en même temps que la franchise NBA de Minneapolis, car il y a autant de lacs près de la métropole californienne que de jazzmen dans l'Utah). La transposition au hockey n'a pas cette malice, c'est même un plagiat éhonté puisque les "pros du marketing" ont emprunté le nom sans même consulter leurs collègues du basket. Ceux-ci l'ont appris par la presse, et ils sont scandalisés de ce vol d'identité. Ils craignent à terme d'être pris pour les copieurs (!), tant ils sont éclipsés médiatiquement par leurs voisins professionnels du hockey, qui ne se sont pas gênés pour communiquer largement sur leur changement de nom "créatif".

 

Neuvième : Kloten. Les Flyers ont rarement eu de la chance avec leurs étrangers, et le lock-out n'y a rien changé. Après Jokinen, on a vu se succéder Patrice Brisebois, aux prises avec des problèmes de dos chroniques, Jeff Halpern, qui a dû rentrer aux États-Unis après la mort de sa mère dans un accident de la route, puis Rod Brind'Amour, arrivé pour les play-out où Kloten avait de toute façon une marge d'avance sur les autres. Ce n'est guère mieux pour ceux qui disposaient d'un contrat pour la saison. Domenic Pittis est le seul des trois nouveaux arrivants nord-américains à s'être imposé, grâce à son tempérament de leader. Guolla, trop souvent blessé, et Pollock, qui n'a jamais réédité ses performances d'AHL, n'ont pas convaincu.

Le scénario que les supporters et dirigeants ne voulaient pas envisager, celui d'une deuxième non-qualification en play-offs, a donc pris corps. Les Aviateurs avaient trop de hauts et de bas, capables de gagner à Lugano mais aussi de sombrer 10-1 dans un match décisif à Berne. C'est ce même club qui, en plus, a privé Kloten du titre junior élite. Mais les Flyers se relèveront sans doute, car ils restent malgré tout la référence en matière de formation. Les Bernois, qui avaient aligné un quatrième bloc de juniors cette saison, ont juré qu'on ne les y reprendrait plus. C'est encore à Kloten qu'un jeune a le plus de chance de percer.

 

Dixième : Langnau. Après la résurgence du cancer de Jim Koleff et l'intérim raté de son adjoint Dave Chambers, le SCL peut remercier son club partenaire de LNB Viège de lui avoir gentiment prêté, non pas un joueur, mais son populaire entraîneur Bruno Aegerter. Celui-ci a sauvé ce qui pouvait encore l'être, à savoir le maintien. Sauf qu'initialement, les Tigers étaient censés atteindre pour de bon les play-offs cette année. Au bilan, ils n'ont même pas réussi à passer la barre des cent buts en saison régulière, une misère que personne n'avait plus connu depuis quatre ans...

Ce qui était autrefois un club formateur en est devenu la totale antithèse, jusqu'à la caricature. Il a consommé 42 joueurs (!), une main-d'œuvre jetable qui n'a obtenu aucun résultat probant, puisque le chacun pour soi a régné dans le vestiaire. L'expérimenté Pierre-Alain Ançay, qui croyait avoir tout vu, a décrit dans Top Hockey cette gestion très particulière d'une équipe : "Il y avait beaucoup de chefs dans l'équipe mais pas d'indiens. Douze étrangers ont débarqué dans l'équipe. Parfois, il fallait même faire attention à ne pas trop se lier d'amitié avec un, car le soir même, il pouvait déjà disparaître. Parfois, ils bénéficiaient de cinquante minutes pour satisfaire l'entraîneur. C'était n'importe quoi. Ce milieu du hockey ne me convient pas."

 

Onzième : Fribourg-Gottéron. Faute d'avoir les moyens de leurs concurrents, les Dragons ont un des contingents suisses les plus faibles de LNA, et cela sera encore plus vrai l'an prochain car le grand talent local Valentin Wirz n'a pas pu résister au champ gravitationnel de Lugano. Par conséquent, ils sont assez dépendants de leurs étrangers. Or, le trio magique de la saison passée a connu un bug, celui de Mikael Karlberg, dont le compteur est resté bloqué à six maigres buts. Le nouvel entraîneur Mike McParland (qui a remplacé le duo russe Popikhin/Malkov début décembre) lui a donc montré la porte fin janvier. Le défenseur Richard Lintner a lui été conservé, mais les interrogations du début de saison à son sujet ont été plus que justifiées. Alors, les Fribourgeois se sont lancés eux aussi dans une vague d'acquisitions. Les différents étrangers de passage n'ont pas tous laissé un souvenir impérissable... hormis Shantz sur le visage de Landry.

Oui, le maintien a été acquis, mais il l'a été parce qu'on a trouvé pire que soi. Les Fribourgeois sont soulagés, mais la saison écoulée ne rend donc pas particulièrement fier. Le comportement du directeur sportif Roland von Mentlen non plus. Pendant les barrages de maintien, au lieu de se préoccuper de ramener la sérénité dans son équipe et de rappeler les principes de l'esprit sportif, il s'est transformé en lobbyiste acharné de la LNA à quatorze clubs, dont il était pourtant un opposant convaincu un an plus tôt... En fin de compte, on se dit que le gardien David Aebischer - qui a dû ronger son frein comme n°2 à Lugano alors qu'il venait auparavant d'être enfin n°1 en NHL - et son club formateur Gottéron auront tous deux des regrets de ne pas avoir réussi à s'entendre financièrement l'été dernier. Ils auraient pu revivre une si belle histoire ensemble...

 

Douzième : Lausanne. Un immense gâchis, malheureusement prévisible. Le LHC a confirmé sa réputation de club ingérable. Se débarrasser des anciens dirigeants n'a pas évacué les problèmes. Le conte de fées aura duré deux semaines, le temps d'un début de championnat idéal. Puis on s'est remis à rêver avec l'arrivée de Martin Saint-Louis. Mais le meilleur joueur de NHL de la saison précédente n'a rien pu faire pour relever une équipe en plein doute, et quand il a dû repartir auprès de sa femme enceinte, les Lausannois n'étaient pas plus avancés, au contraire. Le nouveau directeur général Silvio Caldelari - l'atypique Valaisan a gardé ses boucles d'oreille mais s'est quand même acheté des costumes pour se conformer à sa nouvelle situation - devait apporter avec sa gouaille un ton neuf et indépendant, hors de tout réseau d'influence. Excédé par l'ingérence du conseil d'administration dans ses décisions, il a finalement jeté l'éponge dès la fin janvier. Et on se demande bien quel doux dingue osera maintenant prendre les commandes de ce club relégué en LNB, mal en point sportivement et financièrement, qui n'a jamais intégré la moindre relève.

La première erreur de la saison écoulée a été le changement d'entraîneur de la fin octobre. À qui confier ce poste dont personne ne voulait, tant cette équipe paraissait d'avance condamnée à la descente ? Comme si on n'avait pas retenu la leçon de l'an passé, où le mal-aimé Riccardo Fuhrer avait mis les nerfs de tout le monde à bout, c'est l'excessif Bill Stewart qui a été engagé. Il a provoqué la même overdose, sauf qu'il a fallu supporter ses frasques en plus. Le "cow-boy" qui joue du couteau devant ses joueurs et casse ce qui lui tombe sous la main en a encore rajouté à sa collection. Son message placardé sur la porte du vestiaire des arbitres lors de la lamentable série contre Fribourg, pour les "alerter" contre les provocations adverses, paraît presque une bagatelle. Car l'entraîneur canadien a été dépassé dans l'outrance par ses propres dirigeants, devenus la risée du pays après avoir diffusé dans un communiqué officiel une photo truquée d'Éric Landry, affublé d'une cicatrice retouchée et agrandie pour les besoins de la cause, à savoir mettre en cause son agresseur qui l'avait impunément chargé contre la bande. Cette fois, le LHC a réussi à atteindre le comble du ridicule.

Marc Branchu

 

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