Russie 2006/07 : présentation

 

Autrefois, la contrepartie du pouvoir exercé par Aleksandr Steblin sur le hockey russe, c'est qu'il était l'obligé des clubs qui le désignaient à chaque élection alors que tous les observateurs critiquaient son action. La victime de ce clientélisme, c'était l'équipe nationale. Le nouveau président de la fédération Vladislav Tretiak, candidat unique désigné "d'en haut", n'a plus à être redevable envers les clubs, et il veut donc rééquilibrer l'équilibre des forces en faveur de l'équipe nationale et de la formation des jeunes.

Mais il n'a pas tardé à rencontrer une forte opposition, et au-delà de la ligne dure initiale, on a enregistré quelques reculades. Tretiak avait déjà concédé une diminution de moitié des taxes sur les joueurs étrangers (finalement 750 000 roubles, et 4,5 millions de roubles pour les gardiens), mais on peut considérer cela comme une négociation classique où l'on avance de prime abord un chiffre plus haut que l'objectif réel. Plus significatif, il a dû céder à la volonté des clubs en ne signant toujours pas l'accord IIHF/NHL, ce qui n'a pourtant pas empêché le départ de Malkin. Et enfin, Tretiak a cédé à nouveau en n'imposant pas les play-offs à huit clubs, et en revenant à seize dans un souci évident de faire plaisir à tout le monde.

Cela n'a pas calmé la contestation. Du point de vue des clubs, on a remplacé la PHL, ligue qui promettait de prochaines ressources globales de sponsoring, par un retour dans le giron de la fédération qui ne promet que... des amendes. La nouvelle structure fédérale dérange d'autant plus que Tretiak, pris au quotidien par ses fonctions de député, est rarement joignable et délègue l'essentiel de la gestion à Sergei Arutyunyan, un juriste de seulement 28 ans dont le pouvoir agace prodigieusement les vénérables dirigeants de clubs. Et pendant ce temps-là en coulisses, Fetisov joue toujours un rôle ambigu, prêt à ressortir des cartons son projet de ligue asiatique.

Le marché des transferts a été bien plus calme qu'à l'accoutumée, en raison de la situation longtemps dans l'expectative vis-à-vis de la NHL, et surtout à cause la limitation de la masse salariale à 300 millions de roubles, soit environ 9 millions d'euros. Cette mesure-ci n'est pas une initiative de la fédération, car avant qu'on lui retire sa délégation, la PHL avait déjà lancé le projet en constatant que 80% à 90% des budgets des clubs partaient dans les salaires. Les problèmes financiers de nombreuses équipes, et le jet d'éponge du plus populaire d'entre eux, le Spartak, montrent combien il est urgent que les clubs russes se structurent et fondent une base solide.

Parmi les nouveautés de cette saison, les consignes internationales de sévérité contre l'accrochage et l'obstruction seront désormais appliquées en Russie, et l'on suivra avec attention le travail des arbitres, qui ont vu leurs rémunérations revalorisées de 20% cet été.

Il faut aussi saluer la mise en place de contrôles anti-dopage beaucoup plus sérieux. Ils existaient déjà, mais sur des matches choisis par la PHL... Maintenant, les inspecteurs auront libre choix des rencontres où ils mettront en place leurs tests, mais surtout, ils effectueront de nombreux tests hors compétition, suivant ainsi complètement les recommandations de l'Agence Mondiale Antidopage. Une décision qu'on ne peut manquer de rapprocher des déclarations d'Andrei Nazarov cet été sur les dates des contrôles connues à l'avance en NHL. L'agence russe antidopage a d'ailleurs conclu un accord avec son homologue canadienne pour que les sélectionnables en équipe de Russie soient contrôlés sur le sol canadien. En collaborant avec les autorités antidopage nationales et mondiales, ce que refuse la NHL, les Russes donnent ainsi la leçon sur un terrain où on ne les attendait pas.

 

S'il y a un club qui illustre un changement de mentalités dans le hockey russe par rapport à l'escalade salariale, c'est bien Ak Bars Kazan. Deux ans après avoir recruté quelques-uns des meilleurs joueurs de la planète pour connaître un échec retentissant, les Tatars, confortés par leur succès dans les play-offs 2006, investissent désormais à long terme dans leur infrastructure. Après avoir construit des patinoires aux quatre coins de la République du Tatarstan, la compagnie pétrolière Tatneft bâtit maintenant une "cité du hockey" à Kazan. Elle rémunère correctement ses meilleurs formateurs (Aleksandr Dyumin notamment) et n'hésite plus à travailler ses points faibles, qui sont les mêmes que ceux du hockey russe : le Canadien Vincent Riendeau a ainsi été engagé pour donner un cours de deux semaines à tous les gardiens du club.

Cela ne signifie pas pour autant que l'équipe première a perdu l'ambition. Beaucoup de choses dépendaient de la décision du meilleur joueur du championnat Aleksei Morozov. Quelques jours avant la date où il serait devenu agent libre en NHL, il a mis fin au suspense en signant un contrat de trois ans à Kazan et en annonçant son objectif de gagner la Coupe d'Europe des Champions. Le cinq majeur a été conservé, et le plus dur à garder n'a pas été le meilleur : Vitali Proshkin, souvent objet de raillerie de la part des supporters russes, a voulu faire fructifier sa belle saison en première ligne en négociant longtemps son contrat. Le trio offensif Zaripov-Zinoviev-Morozov est redoutable, la défense a été renforcée par l'arrivée de Jan Novak du Slavia Prague. Le seul départ important est celui de Fred Brathwaite qui souhaitait rentrer en Amérique du nord, mais Kazan n'a pas forcément perdu au change avec le sens de l'anticipation du gardien finlandais Mika Noronen.

 

Cette année, le Khimik Moskovskaïa oblast met les grands moyens. Il tient à se faire un nom au-delà de ses frontières, en se faisant inviter à la Coupe Spengler, et bien sûr avec l'organisation des championnats du monde à Moscou... et à Mytishchi. On s'occupe déjà d'expliquer aux étrangers que la ville de Moscou et la région de Moscou ne sont pas la même chose, ni les mêmes interlocuteurs pour l'organisation. Il est vrai que la différence est nette : la capitale a laissé pour le moment s'éteindre le Spartak, alors que le gouverneur de la banlieue Gromov, même s'il ne respecte pas plus ses clubs, leur histoire et leurs supporters, met de l'argent dans le hockey, du moins dans sa vitrine, la patinoire de Mytishchi et son club résident, le Khimik.

Si Morozov n'a pas cédé aux sirènes chimiques, des noms très populaires auprès du public moscovite ont été recrutés : deux Spartakistes, le jeune gardien Konstantin Barulin (qui devra s'imposer à Vitali Kolesnik, le gardien du Kazakhstan de retour de Colorado) et le centre talentueux et convoité Ilya Zubov, plus le défenseur international du Dynamo Dmitri Bykov et quatre joueurs du CSKA, dont l'idole Sergei Mozyakin qui a eu droit à un pont d'or.

L'attaque reçoit en plus le renfort de Pavel Vorobiev, mécontent de la façon dont le staff des Chicago Blackhawks traitait les joueurs russes, et surtout de Nikolaï Zherdev, qui restera au Khimik tant que Columbus ne reverra pas à la hausse sa proposition de contrat. Cette attaque hautement talentueuse est confiée... au maître de la défense Piotr Vorobiev. Il s'agit certes d'un nom célèbre, mais pas forcément le plus annonciateur de spectacle. La combinaison des qualités techniques et du cynisme tactique emmènera-t-elle l'armada de Gromov au titre ?

 

Comment le Metallurg Magnitogorsk va-t-il digérer le départ d'Evgeni Malkin ? Initialement, cela n'aurait pas dû trop déstabiliser le groupe, car il s'y était préparé. Mais apprendre qu'il avait signé une prolongation de contrat avait déclenché une certaine euphorie, qui est bien vite retombée lorsque le joueur a pris la poudre d'escampette à l'aéroport de Helsinki. L'entêtement du manager Gennadi Velichkin, qui avait milité pour la non-signature de l'accord IIHF/NHL puis insisté auprès de Malkin jusqu'à ce qu'il accepte à contrecœur de rester jusqu'en mai 2007, n'a pas servi sa cause. Magnitka n'a pas récupéré les (maigres) 200 000 dollars de compensation fixés par l'accord IIHF, et les chances qu'il en obtienne plus sont faibles. Même s'il a obtenu gain de cause en Russie, il est peu probable qu'il force le verrou de la juridiction américaine. Il a déjà pu constater que même le terrain médiatique ne se laisse pas pénétrer : il a envoyé une lettre en anglais à toute la presse nord-américaine pour exposer sa version des faits et expliquer la nécessité de financer la formation à travers un système de transferts. Son courrier n'a été publié nulle part, hormis un bref extrait sur le site de TSN. Les deux mondes continuent de s'ignorer et la fuite de Malkin n'a fait que renforcer les clichés anti-russes.

Après Malkin, c'est le centre n°2 Evgeni Kaïgorodov qui est parti à son tour en NHL, attiré par Ottawa qui lui a promis une place en deuxième ligne (!). Un départ moins médiatique et moins problématique, puisqu'il a eu la bénédiction du club et n'a pas eu à filer en douce, mais embêtant pour la profondeur d'effectif. Comme Stanislav Chistov - qui était en fin de contrat - est retourné à Anaheim, l'attaque a paru bien diminuée, jusqu'au recrutement de Jan Marek. Le meilleur marqueur de l'Extraliga tchèque en est à sa première expérience à l'étranger, et il faudra qu'elle soit pleinement réussie pour qu'ils compensent tous les départs. Mais il faut se souvenir que Magnitogorsk avait terminé la saison régulière avec 29 points d'avance : même si cette équipe paraît moins forte que sa devancière, elle reste évidemment candidate au titre.

 

Le Lokomotiv Yaroslavl est l'autre équipe concernée par des départs imprévus en NHL, puisque les internationaux Andrei Taratukhin et Aleksei Mikhnov ont fait eux aussi jouer la clause des quinze jours de préavis inscrits dans le code russe du travail pour casser leurs contrats en cours. Le Loko a procédé de façon plus souple que Magnitka : il est resté en très bons termes avec les deux joueurs, tout en promettant de faire valoir ses droits vis-à-vis de leur nouveau club Edmonton pour obtenir une compensation.

Pour autant, le club ne veut plus se contenter du bon travail effectué par Vladimir Yurzinov auprès des jeunes, surtout pour qu'il profite à d'autres. Les autorités provinciales ont fixé des objectifs plus ambitieux, reconquérir le titre. Cela implique de chercher des recrues en NHL : le joueur formé au club Denis Grebeshkov, l'énergique Sean Bergenheim, auteur de débuts prometteurs en équipe de Finlande aux derniers Mondiaux, et le robuste Evgeny Artyukhin ("C'est un joueur sur lequel nous avons investi beaucoup de ressources humaines et financières. Cette décision [de signer ailleurs] nous crache au visage", a déclaré le manager de son ancien club Tampa Bay, des propos qui prêtent évidemment à sourire en Russie). Cependant, laisser partir des cadres sans histoires comme But et Antipov pour leur substituer un enfant gâté aussi douteux défensivement que Fedor Fedorov est un risque par rapport à la philosophie traditionnellement collective de Yaroslavl. Cela ne va pas faciliter la tâche de Yurzinov...

Ses talents de formateur, l'entraîneur pourra les consacrer au gardien junior Semen Varlamov car le Loko s'est privé de gardien étranger (et donc de taxe). Il évolue donc avec deux Russes dans les cages, l'expérimenté Egor Podomatsky - qui n'était plus titulaire depuis deux ans à cause de la mode des gardiens canadiens - et le totalement inexpérimenté Varlamov.

 

Le changement de politique a été radical pour l'Avangard Omsk. Lorsque la limitation de la masse salariale a été connue en juin, les Sibériens ont immédiatement proposé aux deux joueurs du CSKA engagés au printemps, l'attaquant Sergei Mozyakin et le défenseur Andreï Mukhachev, de réduire leurs salaires. Comme cela ne satisfaisait pas les recrues, elles ont été laissées libres de négocier ailleurs. Ensuite, c'est le contrat du gardien canadien Norm Maracle qui a été annulé pour ne pas payer la nouvelle amende. Cela prouve en tout cas l'efficacité de cette mesure de protection des gardiens russes, puisqu'un international potentiel, Aleksandr Fomichev, redevient titulaire alors qu'il ne l'a plus été depuis son départ de Novosibirsk. Il fera équipe avec Boris Tortunov, l'ancien n°2 de Magnitogorsk.

Les limitations et les taxes instituées cette année ont peut-être bon dos : il n'est pas impossible qu'elles arrangent les dirigeants de l'Avangard, maintenant que le siège de Sibneft a déménagé à Saint-Pétersbourg (et les moyens financiers avec). Les millionnaires sibériens appartiennent au passé, le club est désormais plus sage. Sur la glace, il est également beaucoup plus prudent, passé en quelques années d'un style offensif à un hockey d'attente.

Cela restera le cas cette saison avec un effectif presque invariant. En attaque, Pavel Rosa et Denis Tyurin remplacent simplement Belkin et Svitov. Et en défense, Omsk a même perdu de la puissance à la ligne bleue avec les départs de Gusev et Guskov, ce qui est gênant l'année où les nouvelles consignes arbitrales devraient rendre les supériorités numériques plus fréquentes.

 

Le Salavat Yulaev Ufa s'annonce comme un des sérieux outsiders du championnat. Cette formation très jeune l'an passé s'est adjoint les services de joueurs de métier. En défense, les trentenaires Roman Kukhtinov et Aleksandr Boikov arrivent de la référence Magnitogorsk. En attaque, Oleg Belkin, Vladimir Antipov et le vétéran Dmitri Zatonsky ont tous une longue expérience de la Superliga. L'effectif était également un peu petit en taille, ce n'est plus le cas avec l'arrivée de deux grands Tchèques : l'attaquant Michal "Fantômas" Mikeska, héros des chansons de Pardubice, et le solide Radek Philipp, un des piliers du jeu physique de Vitkovice. Est venu s'ajouter en dernière minute le patinage surpuissant de Konstantin Koltsov, qui a commencé la pré-saison avec Kazan sans trouver d'entente avec ce club. Kazan, sûrement le modèle pour Ufa. Puisque le Tatarstan a pu conquérir un titre prestigieux, la république voisine de Bashkirie veut faire de même.

La Salavat Yulaev a fait des difficultés par le passé pour libérer ses internationaux, et il n'est pas surprenant qu'il soit un des plus fervents opposants à la fédération au sujet des taxes (notamment à cause du statut d'Andrei Mezin, qui est le gardien du Bélarus mais qui est considéré à Ufa comme "100% russe"). Juste avant le début du championnat, quatre clubs ont menacé de faire sécession d'entre eux, et Ufa était en bonne compagnie avec eux puisqu'il y côtoyait les cadors Magnitogorsk, Yaroslavl et Kazan. Les quatre mutins ont enterré la hache de guerre, mais quand les clubs ont désigné leurs nouveaux représentants, leurs dirigeants faisaient partie des huit élus...

 

Ce n'est pas la première fois que le SKA Saint-Pétersbourg annonce des ambitions en hausse, mais elles apparaissent cette fois un peu plus étayées. La légitimité vient essentiellement de l'investissement de Gazprom, qui a acheté 75% des parts du club et placé comme nouveau président son cadre très haut placé Aleksandr Medvedev, le directeur de la filiale Gazexport. La compagnie gazière a pris la direction des trois clubs sportifs de la ville (football, hockey et basket), et c'est le hockey sur glace qui a été désigné comme la principale chance de médaille cette saison. Une gageure au vu de son maigre bilan passé, mais le recrutement a été construit en conséquence.

Après Sokolov, le SKA a recruté l'autre star originaire de Saint-Pétersbourg, le capitaine de l'équipe nationale Maksim Sushinsky, que l'on qualifierait de bon recrutement s'il n'était pas si cher et si souvent blessé. Au-delà de cette recrue symbolique qui servira surtout à drainer le public sur son nom, les Pétersbourgois ont avant tout renforcé leur secteur défensif avec trois ex-internationaux, Sergei Gusev, Aleksandr Ryazantsev et le nouveau capitaine Dmitri Yushkevich. Quant au gardien de la sélection Maksim Sokolov, il est lui aussi menacé de n'être que le n°2 en club avec l'arrivée du Tchèque Martin Prusek. Au poste d'entraîneur, c'est l'énième retour aux commandes de Boris Mikhaïlov, qui aura cette fois l'obligation de réussir vu les moyens à disposition.

 

Le Dynamo Moscou a vécu une intersaison forcément agitée. En deux ans, l'ex-président Anatoli Kharchuk avait certes célébré un titre de champion de Russe et un titre de champion d'Europe, mais il avait aussi laissé le club dans la panade financière à l'issue d'une saison où les retards de salaires ont atteint des proportions scandaleuses. Si l'on ajoute les circonstances des départs d'Ovechkin et de Datsyuk, la patience des supporters avait été poussée à bout. En juillet, Kharchuk a donc bien été obligé de remettre sa démission. Et il a fallu un mois de tractations pour enfin désigner son successeur, Mikhaïl Golovkov. L'absence de capitaine à la tête du navire n'a évidemment pas facilité le recrutement.

Tous les problèmes financiers ont finalement provoqué la perte de seulement trois joueurs importants, les cadres expérimentés Sushinsky, Bykov et Skopintsev. Le cas de Grabovsky est différent puisqu'il avait décidé depuis longtemps de tenter sa chance à Montréal même s'il sait la difficulté de se faire directement une place chez les Canadiens. Dit comme cela, la curée paraît limitée, mais il faut dire que le Dynamo avait déjà subi une première vague de départs il y a un an. S'il y a peu d'arrivées hormis le spectaculaire buteur spartakiste David Ling, il reste toujours une poignée de fidèles à l'entraîneur Vladimir Krikunov. On s'y attendait pour son authentique chouchou Kharitonov, mais même des joueurs à qui il a mené la vie dure comme Kulyash et Mirnov n'ont pas été refroidis par certains propos du coach à leur égard. Les commentaires sans concession de Krikunov ne feront de toute façon plus la une des journaux maintenant que l'ex-sélectionneur est redevenu simple entraîneur du Dynamo...

 

Le CSKA Moscou a été l'un des principaux lobbyistes pour la limitation de la masse salariale, car il n'a jamais été partisan de l'envolée des salaires. Les joueurs qui ont des exigences financières trop importantes n'ont qu'à aller voir ailleurs, et c'est ce qui s'est passé à l'intersaison avec le buteur-vedette Sergei Mozyakin et la majorité de la défense. Le club militaire paraît toujours bien armé en attaque avec l'arrivée de deux éléments d'expérience, Kudermetov et Dobryshkin, qui doivent amener des solutions offensives plus variées, ainsi que du centre passeur Vadim Epanchintsev qui forme un bon modèle pour le jeune Aleksandr Nikulin. De même, l'autre espoir Denis Parshin pourra prendre exemple sur le nouveau venu Aleksei Simakov qui prouve que la taille ne fait pas tout quand on a la technique.

À l'arrière, par contre, les recrues sont plus anonymes et les jeunes déjà en place ne pourront pas compenser à eux seuls les départs. Certes le défenseur offensif Anton Belov ne cesse de progresser, mais son collègue Kirill Lyamin n'a encore à vingt ans ni le physique de Khomitsky ni le lancer de Zhdan. Quant au gardien letton Peteris Skudra, pièce essentielle du dispositif, il a subi cet été une opération du ménisque et a manqué la pré-saison.

Pour compenser les méfaits possibles de son inexpérience, le CSKA a effectué en août des tournées en Suède et en Suisse, deux pays qui ont appliqué la tolérance zéro depuis plusieurs mois. Slava Bykov incite ainsi ses hommes à s'adapter et à apprendre, mais pourra-t-il être aussi présent qu'il voudrait pour les suivre ? Comme Krikunov l'an dernier au Dynamo, il sera occupé par son poste de sélectionneur, surtout qu'il a pu prendre un de ses adjoints - Zakharkin - avec lui. Ses joueurs devront donc s'assumer un peu plus, et c'est peut-être aussi ce qu'il recherche.

 

Le ministre de l'intérieur Rachid Nourgaliev a demandé en personne que tous les problèmes financiers de son HK MVD soient réglés après les retards de paiement et la petite grève des joueurs de la saison passée (depuis quand le droit de grève existe-t-il dans la police ?). Comme cela avait notifié à la création du club, l'officine des forces de l'ordre ne peut se permettre le moindre contact avec l'argent sale ou le moindre scandale financier. Il en va de la réputation du ministère, laquelle exige également des résultats. Le HK MVD s'était d'ailleurs un peu étouffé dans son ambition l'an dernier, quand l'objectif de top-10 s'était brièvement mué en top-5 sur la foi de quelques bons résultats éphémères.

Qu'en sera-t-il cette saison ? De nombreux agents ont rendu leur plaque, notamment les frères Butsaïev. La nouvelle brigade s'appuie sur l'Ukrainien Konstantin Simchuk comme gardien de la paix dans les cages. Les recrues Klimentiev (élu meilleur joueur ukrainien 2005/06), Dudarev et Chupin présentent des états de service irréprochables puisqu'ils viennent d'obtenir le titre de champion avec Kazan. Du moins si on n'est pas trop regardant sur le casier judiciaire passé et ce contrôle positif d'Aleksei Chupin en 2002 qui avait abouti à la seule sanction du médecin d'Ak Bars... Le nouveau commissaire Nikolaï Soloviev a lui aussi un passé trouble : après avoir dévalisé Novokuznetsk dans un véritable braquage en emmenant la moitié de ses joueurs à Saint-Pétersbourg, il y a vite disparu sans laisser de traces de victoire. À lui de retrouver sa réputation d'artisan du beau jeu, mais surtout du jeu bien ordonné. C'est la moindre des choses au MVD.

 

Le Lada Togliatti a passé le plus dur. Après la réduction financière drastique et l'exode de ses joueurs à l'automne dernier, il a repris un rythme de croisière, sans son entraîneur-symbole Piotr Vorobiev, suivi au Khimik par le néo-international Kruchinin. Mais le jeune gardien Vitali Koshechkin, lui, a repoussé les offres lucratives de ce même Khimik pour rester dans son club. Koshechkin est le symbole que la Lada n'est pas mort, tout comme les nombreux anciens du club qui sont revenus (Igor Grigorenko, Yuri Butsaïev, le gardien canadien Mike Fountain).

Puisque beaucoup avaient déjà le quitté le navire en cours de saison, l'été a été calme et le club a même pu recruter : le Canadien Zenon Konopka, qui a perdu sa place sur blessure à Anaheim et a fini la saison en AHL où il a terminé troisième meilleur marqueur des play-offs, souhaite ainsi relancer sa carrière en Russie. Togliatti a également misé sur les internationaux biélorusses, la révélation Vladimir Denisov et l'ex-Brestois Viktor Kastyuchonak, que peu de monde même au Bélarus imaginait accéder à la Superliga.

Il est tout de même trop tôt pour dire que l'avenir du hockey à Togliatti est désormais assuré. Après le coup de bambou financier, il reste encore à régler la question de la patinoire. Il est en effet prévu que tous les clubs devront disposer d'une salle de 5500 places à partir de la saison 2007/08, mais les travaux de la nouvelle patinoire de Togliatti n'ont toujours pas commencé. On les annonce pour l'an prochain...

 

Le président du Sibir Novossibirsk, Vladimir Nenakhov, est poursuivi en justice par l'international ukrainien Vyacheslav Zavalnyuk (parti au Severstal) qui lui reproche de ne pas lui avoir versé son dernier mois de salaire sous prétexte d'absence aux entraînements, alors que selon lui c'est le club qui avait renvoyé les joueurs chez eux par anticipation après avoir licencié l'entraîneur.

Ce genre de péripétie ne devrait pas trop refroidir les Slovaques, qui ont l'habitude dans leurs pays des caprices de ce genre de la part des dirigeants. Erik Weissmann et Miroslav Kovacik sont en effet les nouveaux atouts offensifs du club, de même que Dmitri Nabokov qui revient dans sa ville natale en provenance du Dynamo. Un anonyme défenseur d'AHL, Matt DeMarchi, a aussi pris le chemin de la Sibérie. Le club ne paiera par contre pas d'amende pour usage de gardien étranger, puisqu'Aleksandr Vyukhin n'a plus porté le maillot de l'Ukraine depuis sept ans et est désormais considéré comme sélectionnable russe.

 

Le Severstal Cherepovets semble s'éloigner lentement mais sûrement du haut du tableau de Superliga. Parviendra-t-il à renverser la tendance ? Le départ d'Igor Grigorenko n'a pas été compensé par des buteurs. Mikhaïl Yakubov, qui avait quitté le Spartak en pleine saison en novembre pour retourner en NHL où ni Chicago ni Florida ne lui ont accordé beaucoup de temps de jeun, est un centre au gros gabarit, et le tout jeune Nikolaï Lemtyugov est surtout un travailleur plein d'abnégation. Il manque quand même un leader à cette attaque maintenant car Kovalenko est vieillissant. C'est sans doute au joueur formé au club Yuri Trubachev, le petit chouchou des supporters, de prendre ses responsabilités.

La défense a aussi perdu un élément important, le toujours difficile à passer Vassili Turkovski, et le Severstal dépendra encore plus des performances de son gardien canadien Marc Lamothe.

 

Le Vityaz Chekhov reste persuadé que son salut viendra de la NHL. Cela n'avait pas fonctionné l'an passé où Aleksandr Korolyuk s'était retrouvé bien seul, mais il devrait être plus entouré cette année avec l'arrivée d'un nom prestigieux, le double médaillé olympique Boris Mironov, défenseur qui correspond bien au style rugueux que le Vityaz a adopté. Autre arrivant de NHL, le jeune Timofei Shishkanov, à qui Saint-Louis a donné sa chance l'an passé avant de le renvoyer en AHL. On a très souvent dit de ce jeune ailier formé au Spartak qu'il avait le talent mais pas la volonté, à lui de prouver le contraire dans un club sans grande profondeur d'effectif où il pourrait occuper un rôle important.

Mais la plus grande influence nord-américaine est bien sûr le recrutement d'un entraîneur canadien, Mike Krushelnyski. C'est donc le deuxième à tenter sa chance en Russie après Dave King. Mais leurs situations sont très différentes. King est un entraîneur renommé, connaissant parfaitement le hockey international, et qui a pris en mains une très bonne équipe. Krushelnyski est surtout connu pour sa carrière de joueur - il était le coéquipier de Gretzky qu'il a accompagné d'Edmonton à Los Angeles lors de l'échange du siècle - et arrive sans trop de références dans un petit club où il doit réellement assumer une mission à haut risque. Le choc culturel est encore plus rude pour lui, même s'il a vite marqué son territoire en annulant par exemple l'habituel stage à l'étranger que font tous les clubs russes parce qu'il voulait raccourcir la pré-saison. Son regard nouveau sera-t-il plus important que sa méconnaissance de son nouvel environnement ? S'il réussit, tout le monde voudra un coach canadien ; dans le cas contraire, la mode pourrait retomber.

 

Après une saison 2005/06 complètement ratée, le Metallurg Novokuznetsk veut reprendre sa place, et l'objectif annoncé lors de la traditionnelle réunion en mairie est une place dans les dix premiers. Pour cela, volonté fédérale ou pas, exit les gardiens russes ! L'entraîneur Aleksandr Kitov fera jouer la règle de l'alternance entre le Tchèque Vladimir Hudacek (Perm) et le Biélorusse Sergei Shabanov (revenu du SKA).

Il faudra pour cela retrouver ses valeurs collectives, car l'effectif ne paie pas de mine. Le club a dû se contenter pour l'essentiel de ramasser des joueurs menacés de chômage, comme Maksim Yakutsenia (ex-CSKA) qui n'a pas passé le camp du Khimik ou encore Radulov victime de l'abandon du Spartak. Cela donne une équipe composée de vétérans trop âgés pour être convoités ailleurs, comme le capitaine Berdnikov et son assistant Potaichuk, et de jeunes encore un peu tendres.

 

Le Neftekhimik Nijnekamsk est certainement le plus malheureux des taxes décrétées par la FHR. Il venait en effet de signer des contrats à long terme avec des joueurs étrangers. Ce serait presque de quoi presque se consoler de la défection de l'attaquant slovaque Roman Kukumberg qui avait initialement signé... Mais cela ne fait pas rire du tout les Tatars. Un article très critique envers la fédération est d'ailleurs paru sur le site officiel du club, avant de disparaître quelques heures plus tard. Ce n'est pas Nijnekamsk qui jouera les premiers rôles dans la contestation, il laisse cela aux gros clubs. De toute manière, on sait bien que sa position sera la même que celle de Kazan, puisqu'elle est dictée sur tous les sujets politiques par le président du Tatarstan.

Les dirigeants de Nijnekamsk ont retrouvé le sourire en voyant leur nouveau gardien finlandais Petri Vehanen commencer la saison par deux blanchissages. Il n'y a donc guère à regretter d'avoir cherché le bon coup à l'étranger. Car il est difficile pour cette petite ville industrielle ignorée d'attirer des joueurs russes, hormis dans des cas d'espèce, comme le défenseur offensif Denis Grot qui sillonne le pays en quête de temps de jeu.

 

Le feuilleton du Spartak (exclu, puis apparemment secouru, puis revenu au point zéro quand son nouveau directeur général Vadim Melkov, qui avait trouvé des investisseurs potentiels au sein de ses réseaux personnels, est mort dans l'accident d'avion d'Irkoutsk en emportant les contacts noués dans sa tombe) a animé toutes les conversations du hockey moscovite cet été. Les Krylia Sovietov Moscou ont beaucoup moins fait la une des journaux. Pourtant les Ailes Soviétiques ont été menacées jusqu'au dernier moment d'être mises à la porte du championnat du fait de leurs retards répétés dans les versement des salaires.

L'été a été passé dans d'interminables négociations pour que la mairie de Moscou puisse racheter à un prix raisonnable (diminué de 20 à moins de 15 millions d'euros) la patinoire de Setuni appartenant à l'usine VILS, pour la mettre à la disposition du club. Dans ces discussions, le club a également obtenu un sponsor, la compagnie d'électricité Mosenergo. Tout cela est arrivé bien trop tard pour aider la constitution de l'équipe, puisqu'aucun joueur de Superliga n'a été recruté. C'est un peu le "deal" passé avec les joueurs qui ont obtenu la montée : pour les récompenser de leur patience vis-à-vis de leur paie, on s'appuie sur eux pour continuer l'aventure et maintenir les KS en Superliga avec presque le même effectif. Fidélité, confiance et solidarité : ce sont des valeurs anachroniques en Russie que portent les Krylia Sovietov.

 

Repêchés en Superliga après l'exclusion du vilain petit canard Perm, l'Amur Khabarovsk, devait compléter le championnat pour qu'il se joue à 20 clubs, mais il fait un peu tapisserie puisqu'il n'en reste finalement plus que 19 après les problèmes du Spartak. Il a effectué un recrutement opportuniste, en piochant - tiens tiens - à Perm (Danilov) et au Spartak (Ostroushko, Shulakov). Khabarovsk a évidemment terminé derrière les deux autres promus la saison dernière, mais il a clairement plus de moyens qu'eux et leur a d'ailleurs aussi piqué quelques joueurs.

Avec sa patinoire moderne de huit mille places, l'Amur annonce un budget de plus de dix millions d'euros. Reste à savoir quel pourcentage de celui-ci part en kérosène pour rejoindre l'Europe... Ce ne sont pas les déplacements qui devraient faire peur au globe-trotter estonien Toivo Suursoo, un des deux étrangers de l'équipe d'Extrême-Orient avec le gardien ex-international slovaque Pavol Rybar.

 

Le Traktor Chelyabinsk, avec son budget de 200 millions de roubles (6 millions d'euros) qui correspond tout juste au minimum désormais requis, fait figure de petit poucet. Il est monté en pensant qu'il n'y aurait pas de descente la saison prochaine, mais cette règle de trois ans - qui aurait risqué de faire monter le championnat à 22 clubs - a été remise en cause par la FHR, puisqu'il devrait y avoir trois descentes, même si la prochaine formule reste toujours floue avec toutes les exigences qui se mettent en place.

L'équipe extrêmement jeune du Traktor semble pour beaucoup condamnée à la dernière place. Mais le plus inquiétant à long terme pour ce club formateur, c'est le pillage dont il fait l'objet. Le Khimik de la région de Moscou, désireux de se constituer des équipes de jeunes à Mytishchi en partant de rien, a recruté deux jeunes joueurs du Traktor champion de Russie des moins de 16 ans (Anton Lazarev et Nikita Kokovin), et Ak Bars chasse les petits Ouraliens dès les moins de 12 ans ! Seuls les projets de Tretiak d'obliger les joueurs à signer un premier contrat dans leur club formateur pourraient sauvegarder l'école du Traktor.

Marc Branchu

 

 

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