Autriche 2007/08 : présentation

 

L'admission d'une seconde équipe slovène et d'une équipe hongroise, qui porte la Bundesliga à dix clubs, aurait pu être le fait majeur de l'intersaison. Mais l'Autriche s'est fait remarquer pour autre chose : un système original, alambiqué et surtout... controversé.

Devant la menace de certains dirigeants d'aligner autant de joueurs européens qu'ils le souhaitent, c'est une sorte de compromis a été trouvé. Ni franchement une limitation salariale, ni franchement un quota d'étrangers, c'est une méthode un peu bâtarde qui navigue un peu entre ces deux solutions connues... Chaque équipe pourra aligner, sur une feuille de match de 22 joueurs dont 2 gardiens, un maximum de 65 "points". Les étrangers se voient systématiquement attribuer 4 points. Les moins de 22 ans valent 1 point, les moins de 23 ans montent à 1,5 point et les moins de 24 ans à 2 points. Enfin, pour s'assurer de la présence des jeunes, cinq joueurs de moins de 24 ans doivent quoi qu'il arrive figurer sous la feuille de match. En ce qui concerne leur temps de jeu effectif, c'est une autre histoire...

Pour tous les autres hockeyeurs de la ligue, c'est un sondage auprès des clubs concurrents qui fixe la cote du joueur ! On fait la moyenne des réponses en enlevant la plus haute et la plus basse. Additif subtil : quand un joueur est suspendu, son équipe se voit réduire son quota d'autant. Si un étranger est dans ce cas, elle n'a donc plus que 61 points à disposition pendant la durée de la sanction. On dirait une règle de jeu de type "pool", mais c'est bel et bien le règlement en vigueur pour configurer les vraies équipes du championnat !

Enfin, dernier point qui renforce encore la complexité de ce principe et le mystère qui l'entoure : les "notes" des joueurs n'ont pour l'instant pas été publiées, malgré les promesses en ce sens. On en est réduit à des indiscrétions et à des spéculations...

Quel est le but de ce système ? Il a été pensé avant tout pour réduire la valeur marchande des meilleurs joueurs autrichiens. Les deux agents qui ont la plupart d'entre eux sous contrat faisaient monter les prix. Or, le but des quotas d'étrangers était de favoriser le développement des jeunes joueurs, pas de faire la fortune d'une poignée de stars confirmées. La conséquence la plus spectaculaire de ce changement de règles : Robert Lukas, après des négociations non concluantes avec Salzbourg, a signé... à Nitra. Un international autrichien dans le championnat slovaque, on aura vraiment tout vu !

Lukas reste cependant un cas isolé. L'effet le plus net de ce nouveau règlement, c'est - comme le craignait notamment la fédération - de contourner l'accord conclu à l'automne dernier, qui prévoyait un maximum de sept étrangers. La barrière est tombée et les imports affluent. Les joueurs autrichiens de NHL Thomas Vanek (dont le club d'origine Graz est concerné au premier chef) et Thomas Pöck viennent d'ailleurs de tirer la sonnette d'alarme. Le premier parle de catastrophe pour l'avenir du hockey autrichien, le second craint un retour à la situation de la seconde moitié des années 90, juste après l'arrêt Bosman : à cause de la disparition des limites d'étrangers, les générations 1977-1979 n'avaient plus de temps de jeu, et elles forment aujourd'hui les années creuses de l'Autriche. Tous les leaders nationaux sont issus de la génération suivante, celle qui avait éclos au moment où la ligue élite avait explosé et où une stricte limitation des étrangers avait été remise en place. Est-ce un bégaiement de l'histoire ? Ou ce système des 65 points, dont personne ne maîtrise vraiment toutes les arcanes, est-il une innovation plus savamment dosée qu'on ne le pense ?

 

Le champion en titre Salzbourg, ne connaît aucune limite, à l'image du portefeuille du milliardaire des boissons énergétiques Dietrich Mateschitz. L'effectif a comme d'habitude été renforcé. L'attaquant défensif Juha Lind a été correctement remplacé par Josh Green, qui n'est pas une star mais était statistiquement le meilleur penalty killer de NHL l'an dernier (seulement 5 buts encaissés en 150 minutes jouées en infériorité). À la place du décevant Darby Hendrickson, c'est l'international Daniel Welser qui revient de Suède. La défense a perdu son géant André Lakos (NHL... ou plutôt retour dans une AHL qu'il connaît déjà) mais a gagné trois Nord-Américains, dont Ric Jackman, qui a joué - hormis au dernier match - et gagné la finale de la dernière Coupe Stanley avec Anaheim !

On commence à s'habituer à voir débarquer des noms prestigieux chez les Red Bulls, mais ils achètent aussi les compétences autour de la glace. Tout l'encadrement bénéficie de CV impressionnants. L'entraîneur Pierre Pagé, pas un tendre, est aussi célèbre que son adjoint, l'ex-défenseur Reijo Ruotsalainen. Le nouvel entraîneur de la réserve est Jim Brithén, ex-sélectionneur du Danemark, et celui des juniors est Anders Mellinder, qui travaille depuis vingt ans dans le meilleur club formateur au monde Modo ! Comme conseiller pour le IIDM (cet "International Icehockey Development Model" que Salzbourg veut mettre en place pour devenir une référence mondiale, rien que ça...), on a engagé rien de moins que Vladimir Yurzinov, mais celui-ci ne travaille pas exclusivement pour le club autrichien puisqu'il a aussi vendu ses services en Suède à l'AIK.

Il n'empêche : le staff est au moins aussi impressionnant que celui d'un club de NHL, et Salzbourg semble vouloir de toutes les compétences possibles. L'ex-entraîneur Hardy Nilsson est en effet toujours salarié, comme... "responsable du développement international". Qu'est-ce donc ? Un placard avec un joli titre ? Non. Cela consiste surtout à faire du lobbying très actif pour faire admettre les Red Bulls en DEL. Mateschitz se sent en effet un peu à l'étroit dans les frontières de la petite Autriche ! Il a déjà fait une demande similaire pour son club de football, et la Bundesliga allemande l'a aussitôt envoyé sur les roses. Par contre, en hockey sur glace, la DEL s'est bien gardée de répondre quoi que ce soit. Si elle ne dit pas non, c'est parce que la proposition a un aspect tentant : Red Bull voudrait en effet donner son nom à la ligue allemande, qui se rêve déjà la plus puissante d'Europe avec des millions pleuvant à flots... L'argent peut faire tourner bien des têtes, surtout dans ces proportions.

Dans l'immédiat, cependant, Salzbourg doit déjà commencer par garder son titre, et le début de saison est un peu chaotique. Le centre Marco Pewal a eu la main cassée dans une collision en amical contre Ingolstadt, et il sera absent jusqu'en janvier. Un blessé remplace l'autre en défense (avant-bras cassé pour Artursson alors que la recrue Brad Fast sortait de l'infirmerie), et l'épaule du gardien Reinhard Divis est remise juste à temps pour la Coupe Continentale. Le club autrichien a bien sûr de hauts objectifs dans cette compétition : les étrangers engagés pour encadrer les jeunes en équipe-réserve, comme Rémi Royer (ex-Briançon), sont rappelés pour l'occasion, et on a vu de quoi Salzbourg était capable au complet - un peu plus en vérité car il y avait trois joueurs "à l'essai" en renfort - en menaçant sérieusement les Los Angeles Kings (6-7) puis en battant Davos (5-3) dans son tournoi "Salute" de pré-saison. Chaque opportunité de se frotter au plus haut niveau européen et mondial sera utilisée. Pour les Red Bulls, les tours de Coupe Continentale à Aalborg et à Grenoble ne doivent être que des étapes : hors de question de manquer la finale européenne cette fois ! La saison prochaine, la nouvelle Coupe d'Europe constituera un nouvel objectif...

 

Puisque les deux clubs en sont à une finale remportée chacun, Villach aimerait bien défier Salzbourg une troisième fois de suite pour "la belle". La situation financière n'est pourtant pas du tout comparable, puisque le sponsor principal Pasut s'est retiré. Il a fallu faire des économies, sans épargner des décisions encore impensables il y a peu, comme le départ à Innsbruck de l'arrière Herbert Hohenberger, coûteuse légende à 38 ans. Il n'a pas été compensé, Wolfgang Kromp a simplement été reculé à sa position d'origine alors qu'il avait été reconverti en attaque depuis l'ère Ron Kennedy.

Malgré la perte de l'organisateur défensif, l'effectif a très peu évolué, sinon que les cadres, plus tout jeunes, ont un an de plus. Le niveau a-t-il tellement monté dans le championnat que la continuité soit forcément synonyme de régression ? Le VSV annonce simplement "les play-offs" comme objectif. Pourtant, sa force vient surtout du système défensif éprouvé de Greg Holst, et cela ne change pas. La seule recrue Gert Acker devrait s'y fondre, comme travailleur sur la troisième ligne (en tout cas mieux que le vieillissant Gilbert Kühn qu'il remplace).

Il n'est jamais simple pour un renfort extérieur de s'adapter à Villach, et savoir que l'équipe en place fonctionne efficacement donne une bonne dose de certitudes. Les adversaires en ont une : ils savent qu'ils se heurteront toujours à une équipe très compacte, qui met en valeur son gardien Gert Prohaska et où chacun sait parfaitement quoi faire. La production offensive restera toutefois dépendante de la forme de Dany Bousquet.

 

Les dirigeants de Vienne ont été les principaux instigateurs de la règle des 65 points, puisque ce sont eux qui avaient menacé de rompre le gentleman agreement en vigueur jusqu'ici. Sans surprise, ils ont donc exploité le nouveau règlement pour aligner 10 étrangers. Ils ont donc maintenant une nette obligation de résultat. Ils se fixent comme objectif la finale, et peuvent difficilement faire moins. Leurs détracteurs les suivent de près.

Vienne a de toute façon besoin de spectacle et de victoires, y compris pour le projet de nouvelle patinoire multi-fonctions soutenu par le club, lassé de la lugubre Albert-Schutz-Halle. L'entraîneur Kevin Gaudet, adepte d'un hockey volontaire et agressif, a été recruté pour cela. Au lieu de compter uniquement sur le duo Wren-Craig, les Capitals disent avoir maintenant trois lignes capables de créer le danger. La nouvelle doublette canadienne est composée de Pascal Rhéaume (ex-NHL et AHL) et de Kelly Fairchild (Eisbären Berlin), et surtout, Vienne a carrément recruté l'intégralité de la première ligne de Jesenice, le redoutable trio formé d'Aaron Fox et des frères Rodman.

Les recrues défensives (Casparsson, Seeley et Björnlie) donnent moins de garanties a priori. Il faut donc espérer que le gros Philippe Lakos a effectivement progressé en patinage, sinon celui qui est parfois considéré comme le joueur plus surcoté du pays pourrait ne pas survire à la fin de l'ère Boni en sélection.

En outre, Vienne n'arrive pas depuis des années à trouver un gardien fiable. La nouvelle recrue Jean-François Labbé pourrait être l'oiseau rare. Malheureusement, il est déjà envoyé pour six semaines à l'infirmerie à cause de problèmes d'adducteurs. Or, le n°2 initialement prévu Florian Weisskircher (qui n'a guère de références et était seulement là pour "économiser des points" et rester sous la limite de 65) était déjà blessé. Les Capitals se rabattent pour l'instant sur Walter Bartholomäus, qui sort d'une saison ratée à Graz. L'éternel gardien "1 bis" de Bolzano, Günther Hell, doit cependant être testé.

 

Une saison à l'envers, c'est ce qu'a vécu Innsbruck, avec un début fantastique et une fin catastrophique (entraîneur en déshérence, blessure de Mallette, écarts de conduite de Cornacchia et Elik). On ne s'étonnera donc pas du remue-ménage à l'intersaison. C'est finalement Pat Cortina qui relève le défi de relancer l'équipe tyrolienne à l'effectif nettement remanié.

Si le productif joker Pierre Dagenais, qui tournait à deux points par match, est toujours présent, il manque en revanche le meilleur marqueur du championnat, l'enfant terrible Todd Elik, dont la vision du jeu est difficile à remplacer. Un autre gros pointeur arrive, Craig Darby, mais son implication était sujette à caution à Augsbourg : ce n'est pas sans rappeler Bob Wren qui était lui aussi un marqueur prolifique mais controversé chez le club souabe de DEL quand il était parti en Autriche.

La défense accueille un nouveau vétéran, Herbert Hohenberger, qui s'ajoute à Gerhard Unterluggauer. Le premier avait la meilleure longue passe d'Autriche, et le second le meilleur slap. Faut-il vraiment conjuguer cette phrase à l'imparfait, ou ont-ils encore ces qualités ? Avec Klimbacher, cela fait trois défenseurs internationaux dans l'équipe, tous formés à Villach. La "patte Cortina" se repère par l'engagement d'Armin Helfer, un international italien confirmé qui - chose rare - n'hésite pas à tenter sa chance à l'étranger.

Le HCI a aussi essayé d'acheter une partie du succès de Jesenice l'an passé en recrutant trois joueurs-clés de l'équipe slovène : son idole Tomaz Razingar, son travailleur complet Jean-Philippe Paré (ex-Rouen) et surtout son gardien Seamus Kotyk. Et oui, tout arrive ! Innsbruck a finalement dit au revoir à son indéboulonnable gardien Claus Dalpiaz, pour prendre une valeur plus sûre.

Ce qui inquiétait le plus les supporters, c'est que Kotyk n'avait aucune vraie doublure si jamais un malheur arrivait... Et devinez qui a été le premier à se blesser ? Gagné... Après cette application de la loi de Murphy, les dirigeants tyroliens ont prouvé qu'ils avaient moyen de réagir très rapidement : ils ont obtenu le prêt de Mikko Strömberg, le second gardien du Kärpät Oulu, pour la durée de l'indisponibilité de Kotyk.

 

Linz ne s'était jamais remis du départ totalement dénué de classe de son entraîneur Bill Stewart, qui était allé chercher un meilleur contrat à Hambourg sans même prévenir. La guerre des mots a pris ensuite plus de place que la stabilisation de l'effectif, et le défilé d'entraîneurs (Gert Kompain, Rick Nasheim, Chris Valentine) n'a pas arrêté la lente dégringolade. Jim Boni, un peu écorné par la redescente immédiate de l'équipe nationale dont il avait la charge, revient au championnat, et pas à l'endroit le plus facile : "J'ai une mission : être le premier entraîneur à rester à Linz une saison entière." Il retrouvera son ancien associé, le coach mental Chris Hamilton, destinataire de propos racistes reprochés à Stewart qui avaient constitué une partie de la polémique.

L'effectif des Black Wings a retrouvé la densité offensive qui avait fait sa force autrefois, mais avoir une pléthore d'attaquants n'est pas forcément signe d'un recrutement de qualité. Marco Charpentier, qui faisait sourciller parce qu'il arrivait de LNAH (ligue à la très faible réputation dans les contrées germaniques, un agent allemand de renom a même déclaré qu'elle était du niveau de la Bayernliga), n'a jamais pu être titulaire une seule fois. Il n'était pas étranger surnuméraire, mais c'est tout comme : ses "4 points" pesaient trop lourd pour son niveau. Il est vite rentré au Québec, dans "sa" ligue où il détient toujours le record de points en une saison.

Ce qu'il faut éviter pour la bande à Boni, c'est de ressembler à l'équipe d'Autriche à Moscou : les joueurs de l'ombre comme Raimund Divis et Gregor Baumgartner y avaient accompli leurs tâches défensives, mais les leaders offensifs présumés avaient failli. Ici, les leaders ne sont bien sûr pas autrichiens : la production offensive repose sur Rob Shearer et Brad Purdie, qui fut à une époque le meilleur joueur de DEL. Ils seront flanqués du travailleur Pat Leahy, l'an passé en AHL sauf un match de NHL à Nashville.

Si le sens du but ne se perd pas avec l'âge, ce n'est pas le cas de la vitesse de réaction. Souvent en retard au repli défensif, Linz suscite la méfiance à cause de ses papys en défense : Viktors Ignatjevs, François Groleau et maintenant Brad Tiley ont leurs meilleures années derrière eux. Puisque la DEL récupère des joueurs trop vieux pour garder une chance de jouer en NHL, et que ceux qui deviennent trop âgés pour la DEL finissent ensuite dans un pays voisin... il faut souhaiter que l'air de Haute-Autriche conserve ! Le jeune arrière québécois d'AHL Jean-François David amènera un peu de dynamisme à cette défense qui protège toujours un duo équilibré de gardiens autrichiens (Patrick Machreich et Jürgen Penker).

 

D'incessants changements d'entraîneur n'ont jamais permis à Graz d'être autre chose qu'une formation de bas de tableau. Ce n'est pas faute de s'être fixé des objectifs élevés, mais ces espoirs ont immanquablement été déçus. Cette année, pourtant, les Styriens semblent avoir les moyens de leurs ambitions. Leur budget a en tout cas été nettement revu à la hausse, et la libéralisation masquée des étrangers a été utilisée à plein. Avec huit équipes en play-offs, ils devraient enfin être de la partie.

Défenseur d'Amiens pendant moins d'une saison en 1985/86, l'actuel entraîneur Larry Sacharuk a un contrat de trois ans, ce qui est vraiment long dans un club qui change de coach tous les quatre matins. Il subit déjà les premières critiques pour sa gestion de l'effectif. Les étrangers jouent, les Autrichiens regardent : ce pourrait être la devise du moment. Le jeune Kevin Kraxner, qui a connu l'honneur d'être invité en équipe d'Autriche en février dernier, ne monte guère sur la glace qu'en infériorité. Mössmer constitue cependant un contre-exemple : il s'est fait une place en deuxième ligne à la place de T.J. Caig, pourtant soupçonné d'être le chouchou du coach puisqu'ils se sont connus il y a deux ans à Nimègue dans le championnat néerlandais.

Offensivement, Graz compte en tout cas sur une ligne de choc : avec l'international slovène Ivo Jan, on a peut-être trouvé le parfait complément au prolifique duo Greg Day - Robert Guillet. À un moment ou à un autre, ces trois-là aura besoin de soutien, qu'il vienne des autres étrangers (Steve Washburn et Tony Iob, ex-idole de Klagenfurt virée en fin de saison dernière pour une implication défensive inexistante) ou des locaux.

L'autre débat autour du coach concerne les gardiens : il persiste à faire confiance à Claus Dalpiaz, alors que beaucoup aimeraient voir à l'œuvre Bernhard Bock, considéré comme un futur grand depuis qu'il a suppléé Divis pendant ses blessures l'an dernier à Salzbourg.

En défense, c'est la fragilité des naturalisés qui a posé problème. Jiri Hala s'est encore blessé d'entrée, et même s'il fait construire une maison dans la région (à Mellach), plus grand monde ne croit qu'il puisse réintégrer l'effectif, tant il accumule de pépins physiques. L'épaule de Jamie Mattie a elle aussi lâché, et le club a recruté deux étrangers supplémentaires (Mike Stuart et Jon Coleman) en plus du trio initial (deux Américains et le capitaine de l'équipe nationale norvégienne Tommy Jakobsen).

 

Pour revivre de vrais derbys passionnés contre Jesenice sans avoir à se demander si l'équipe en face alignait son meilleur effectif, l'Olimpija Ljubljana n'avait pas d'autre choix que de franchir à son tour la frontière.

Les joueurs les plus importants seront les recrues nord-américaines. Comme la plupart des meilleurs joueurs slovènes étaient déjà à Jesenice (et n'y sont plus, soit dit en passant), et vu que Mitja Sivic est parti à Briançon, le recrutement "national" possible était limité. Terglav n'était qu'une fausse rumeur. L'Olimpija a pris ce qui restait, et aligne essentiellement des vieilles gloires comme Tomaz Vnuk (37 ans), Nik Zupancic (38 ans) et Dejan Kontrec (37 ans) : ces joueurs sont déjà connus en Autriche où ils ont évolué comme renforts étrangers. Vnuk et Zupancic étaient même membres du grand Feldkirch à la fin des années 90.

Ceux qui s'attendent à un hockey aussi exotique risquent d'en être pour leurs frais : si Jesenice a une tradition très technique proche de l'école russe, Ljubljana a toujours eu un style plus physique et plus proche de ce qu'on connaît en Autriche. Cependant, l'entraîneur Ildar Rahmatullin, né au Kazakhstan, est à l'origine un transfuge de Jesenice : cet ex-buteur porte en lui des instincts offensifs, mais a mis en place un système prudent qui met en valeur le positionnement sûr d'Alex Westlund. C'est ce gardien qui a permis à Ljubljana de devenir brièvement la première équipe étrangère à prendre la tête du classement, après une victoire aux tirs au but à Salzbourg.

Tous les billets pour la saison ont déjà été vendus. Tous ? Oui, tous, parce que c'est le nouveau riche Joze Pececnik qui les achetés. Il a l'intention de les revendre ensuite via son agence évènementielle Eventim ! Pecencik, qui a bâti une plus grosses fortunes de Slovénie en concevant des machines pour les casinos (des versions électroniques des jeux de table), a déjà fortement investi dans le football, et c'est sans doute la première étape de son implication dans le hockey.

 

Le recordman des titres Klagenfurt veut oublier deux années catastrophiques. La dernière saison n'a apporté qu'une seule consolation, avoir mis fin à l'avant-dernière journée à une terrible série de 17 défaites consécutives dans les derbys contre Villach. Pour le reste, il suffit de dire que la soi-disant meilleure équipe du KAC de l'histoire a terminé avant-dernière. Les coûteuses recrues comme Ricard Persson n'ont jamais justifié leur salaire, pas plus qu'un Jonathan Aitken dépassé, un joker qui avait été amené par Manny Viveiros, ex-défenseur promu nouvel entraîneur avec un contrat de... 5 ans ! Cerné par les critiques, le président Karl Safron a rendu son tablier début 2007 après presque dix années en fonction.

Bref, l'heure est à la remise en question totale, des fondations jusqu'au grenier. Pour redevenir le principal pourvoyeur de hockeyeurs autrichiens, le KAC annonce qu'il dépensera au moins un demi-million d'euros par an dans le hockey mineur. Le très respecté Gerald Ressmann, salué par une standing ovation à sa retraite avec Vienne en mars (il était blessé et ne pouvait jouer ce dernier match à domicile), a été appointé pour entraîner les moins de 20 ans et les moins de 17 ans.

Des bons joueurs formés à Klagenfurt, il y en a encore, et le défenseur Johannes Reichel revient ainsi après sa première expérience extérieure d'un an, à Rögle en Suède. Il amènera de la mobilité à une défense parfois statique, qui accueille par ailleurs deux défenseurs de DEL au lourd slap, Kirk Furey et surtout Jeff Tory.

Tory et le nouveau centre Andy Schneider ont connu une fin délicate en DEL où ils avaient fait de belles carrières. Que leur motivation puisse être effectivement déclinante est le principal risque pour Klagenfurt. Le nouveau buteur Mike Craig (36 ans, Vienne) n'est pas non plus de prime jeunesse. Le gardien Andrew Verner, enfin, travaille pour retrouver une meilleure condition physique. À défaut, sa doublure Hannes Enzenhofer, qui a déjà obtenu de meilleures statistiques que lui l'an dernier, lui passera devant.

Le KAC vieillissant n'est cependant pas à court d'initiatives pour faire l'actualité. Il veut imiter la NHL (Edmonton-Montréal) et la LNA (Berne-Langnau) en projetant de jouer le derby contre le VSV du 4 janvier prochain dans un stade de football, devant trente mille spectateurs.

 

Si l'Acroni Jesenice a agréablement surpris pour sa première saison en Autriche, contribuant à l'internationalisation ultérieure du championnat, il y a aussi beaucoup perdu. Vienne et Innsbruck lui ont pris tous ses meilleurs joueurs. Il faut dire que les retards de salaire ne les ont pas vraiment incités à rester...

L'été a donc été houleux. Tous les joueurs encore présents ont voté contre l'ex-président Robert Pajk et pour son successeur Dimitrij Piciga, arrivé dans le club par l'entregent du skieur Jure Kosir. La constitution de la nouvelle équipe a été retardée par le processus électoral, alors que tout était à reconstruire. Même l'entraîneur Matjaz Kopitar est parti : il a rejoint son fils Anze au sein des Los Angeles Kings, et travaillera pour leur organisation.

C'est Kim Collins qui prend la suite. Champion de LNB suisse avec Bienne, mais sans décrocher la promotion tant convoitée, il a amené des joueurs qu'il connaît, comme Derek Bekar, et devra vite reformer une attaque qui a perdu tous ses buteurs. C'est son jeu offensif élaboré qui a fait de Jesenice l'équipe la plus intéressante du championnat. Il risque désormais d'être moins typique avec des recrues provenant d'horizons différents comme le Canado-Japonais Chris Bright.

Pour maintenir les mêmes performances, il faudra donc être plus solide défensivement. La meilleure nouvelle de l'été est donc incontestablement la signature de Robert Kristan. Le gardien slovène n°1 a réussi une étonnante saison en Elitserien avec Brynäs, mais il ressentait le mal du pays et son retour a été très attendu.

 

L'admission d'un club hongrois n'était pas aussi évidente que celles des deux équipes slovènes, ne serait-ce que pour des raisons de distance. Les déplacements sont plus longs, et Innsbruck, l'équipe la plus éloignée à l'ouest, était opposée à cette inclusion. Mais dans l'ensemble, les clubs autrichiens préféraient conserver un nombre d'équipes pair et soutenaient l'idée d'un championnat à dix. C'est ainsi que, profitant du sillage de Ljubljana, l'Alba Volán Székesfehérvár s'est porté candidat pour rejoindre à son tour la ligue autrichienne : après le départ de ses concurrents slovènes, le champion hongrois n'avait plus de compétiteur à sa mesure, même en Interliga. Les trois années d'organisation de la finale de Coupe Continentale arrivaient à leur terme et l'équipe avait besoin d'un nouveau challenge pour ne pas péricliter. On lui a imposé nombre de conditions, mais le club hongrois les a remplies : il a ainsi été admis au sein de la "Erste Bank Eishockey Liga".

Le plus dur commence : y être compétitif, avec un budget minimal d'un million d'euros. Alba Volán permet souvent de donner sa chance au plus haut niveau à des juniors, comme le gardien Zoltan Hetenyi (doublure de l'international Krisztian Budai) et toute la quatrième ligne. Mais dans un championnat aussi relevé, ce développement des jeunes sera beaucoup plus ardu, car la marche est haute.

La défense ressemble à celle de l'équipe de Hongrie (le Briançonnais Szélig en moins), puisqu'elle a récupéré Andras Horvath et Viktor Tokaji. Le seul étranger, le défenseur tchèque Michal Dostal (qui remplace l'ex-Tourangeau et Dijonnais Anton Poznik), arrive de Halle en Regionalliga, le quatrième niveau allemand. Ces lignes arrières assez âgées risquent de peiner à suivre le rythme sur une saison complète.

En attaque, le duo Ocskay-Palkovics sera comme toujours le fer de lance, mais Alba Volan connaît actuellement de gros problèmes pour former une deuxième ligne compétitive. L'attaquant slovaque Gálik a été rapidement cédé à Nitra, mais c'est l'ailier québécois de 30 ans David Gosselin (ex-NHL, IHL, AHL, DEL et 2e Bundesliga), considéré comme la meilleure recrue, qui déçoit le plus. Sans étrangers de meilleur calibre, les Hongrois paraissent prédestinés à la dernière place.

Marc Branchu

 

 

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