Finlande 2007/08 : bilan de la saison

 

Les résultats du championnat finlandais

 

SM-liiga

 

Premier : Kärpät Oulu. Quatrième titre en cinq ans pour la blanche hermine, qui a plus que jamais la Finlande à sa patte. Elle attend avec impatience la nouvelle Ligue des Champions pour se mesurer à un nouveau défi, surtout après la déception de la non-qualification en finale de Coupe d'Europe cette année. Le club continue de se développer, avec la construction d'une nouvelle patinoire d'entraînement pour ses 750 licenciés, quitte à étendre sa marque un peu tous azimuts... Pas sûr que le vin "Kärpät" (?!) soit comme l'équipe un bon cru tous les ans...

Le symbole de cette culture de la victoire est Ilkka Mikkola. Ce joueur formé au club a cependant débuté en senior au TPS puis au Jokerit, où il a appris à gagner. Il est revenu au meilleur moment, pour vivre les grandes années de Kärpät. Le défenseur a été promu capitaine cette année et a sans doute connu la meilleure saison de sa carrière. Le palmarès de Mikkola est impressionnant : 8 fois champion, un record absolu... obtenu en seulement 10 saisons en senior !

Ce nouveau titre n'était cependant pas acquis. Kärpät semblait plus faible derrière, et l'on a longtemps pointé du doigt le gardien champion Tuomas Tarkki, soupçonné de n'avoir dû ses bonnes performances de l'an passé qu'à la bonne défense devant lui. Andy Chiodo est arrivé du HPK en cours de saison, et le gardien canadien semblait destiné à être titulaire en play-offs. Mais il a connu de mauvais moments en quart de finale, et Tarkki a récupéré sa place pour ne plus la lâcher. Il a même été élu pour la seconde fois meilleur joueur des play-offs.

Offensivement, en effet, il n'y a jamais eu le moindre doute sur le potentiel de Kärpät. Le trio Pesonen-Broz-Hyvönen était le meilleur de Finlande. Avec 34 buts en saison régulière, le meilleur marqueur du championnat Janne Pesonen a établi un nouveau record du club. Il s'est malheureusement blessé au poignet en quart de finale, ce qui lui a fait manquer le Mondial. Cela ne l'a pas empêché de rajouter 16 points en play-offs, où son collègue Hannes Hyvönen a égalé le record de 21 points établi autrefois... par son entraîneur Kari Jalonen.

Oui mais voilà, Jalonen, l'ancien joueur de Rouen, a décidé de quitter le club après avoir atteint tous ses objectifs. Kärpät pourra-t-il faire aussi bien avec son futur coach Matti Alatalo, qui reste sur une saison difficile avec le HPK ?

 

Deuxième : Blues Espoo. Le petit surnom sympathique donné aux Blues, c'est "muovi", plastique. Sans autre histoire que la chronique de leurs échecs répétés et des joueurs recrutés à prix d'or qui s'y sont fourvoyés, ils avaient la réputation d'être une équipe artificielle. Mais depuis deux ans, le "club en plastique" a nettement changé d'image. L'an dernier déjà, il avait reçu le trophée Aaro Kivilinna, remis au meilleur club du pays en prenant en compte l'ensemble de ses équipes, des juniors aux féminines.

C'est la première fois qu'Espoo a connu une saison pleine, sans passage à vide. La qualité d'organisation des Blues est d'autant plus remarquable qu'ils avaient une équipe jeune, relativement expérimentée, mais très volontaire dans les mises en échec. Le symbole en est Oskar Osala, un gros gabarit formé à Vaasa revenu en Finlande après deux saisons en junior majeur. Malgré un doigt cassé par un cinglage gratuit de Hirschovits en fin de saison régulière, il a marqué dix points (dont sept buts) en play-offs, égalant le vieux record d'Ojanen pour un débutant. Il a bien sûr été élu rookie de l'année.

Le meilleur joueur des Blues cette saison, c'est cependant l'étonnant défenseur Arto Laatikainen. Ce joueur formé au club est un cadre de l'équipe depuis un bon moment, mais le niveau de jeu atteint par les Blues cette année l'a clairement identifié comme un des tout meilleurs arrières du championnat, avec une fluidité de patinage époustouflante. Il est cependant jugé un peu juste physiquement pour le niveau international.

L'histoire qui illustre ce récent dynamisme d'Espoo, c'est celle de Ben Eaves. L'attaquant américain avait été engagé la saison dernière, mais il n'avait pas pu jouer en raison d'une grave blessure au genou. Le frère aîné du joueur de NHL Patrick Eaves n'a pas voulu rester ce rendez-vous manqué. Ayant passé une année en Finlande pendant son adolescence (quand son père Mike coachait le HIFK), le centre de 25 ans voulait jouer en SM-liiga. Il a recontacté les Blues et a débarqué pour une fin de saison tonitruante. Il a terminé meilleur marqueur de son équipe en play-offs, en réussissant surtout un but magnifique en prolongation du match 6 de la demi-finale, une action individuelle partie du coin où il dribble les deux défenseurs du Jokerit.

Les Blues ont ainsi réussi à se qualifier pour la finale et à décrocher un ticket pour la Ligue des Champions. Malheureusement, Kärpät était trop fort. Le gardien autrichien Bernd Brückler, maillon toujours essentiel de l'équipe, a commis une erreur coûteuse quand il s'est fait transpercer par un tir en entrée de zone d'Antti Ylönen après trente minutes de prolongation au match 2 de la finale.

 

Troisième : Tappara Tampere. Le légendaire Janne Ojanen, qui a réussi à 39 ans à boucler une dernière saison à 52 points (un point derrière l'ancienne star du championnat danois Timo Koskela), pourra partir avec l'assurance que la relève est là. Deux joueurs de vingt ans originaires de la capitale, le meneur de jeu Jori Lehterä et l'efficace centre Jonas Enlund, ont explosé cette année. Grâce à ce nouvel apport, l'attaque de Tappara est devenue subitement la deuxième du pays.

Mais cette puissance offensive venait aussi de l'arrière. Le Tappara a placé trois hommes parmi les cinq meilleurs marqueurs chez les défenseurs. Le plus prolifique a été Teemu Aalto qui a connu sa meilleure saison. Son partenaire de ligne André Benoît, champion en junior majeur puis en AHL, avait effectué deux bons camps à Montréal mais n'avait pas eu sa chance du fait de son petit gabarit. L'arrière canadien s'est donc exilé en Finlande où il a fait une grosse saison, même s'il a montré quelques limites en patinage. Même s'il n'est que troisième dans les stats, le défenseur Anssi Salmela a été excellent dans la conduite du palet et a réalisé de grands matches internationaux. Il a été mis sous contrat par les New Jersey Devils après les championnats du monde.

La blessure en quart de finale du joueur de première ligne Timo Vertala - qui revient à chaque fois au Tappara car il est moins performant dans tous les autres clubs - a fait au moins un heureux. L'espoir Nichlas Hardt, arrivé en ultime joker après avoir fini sa saison au Danemark, a pu ainsi monter sur les premiers trios et montrer de quoi il était capable. Ce nouveau talent danois a marqué trois points contre Kärpät, dans une demi-finale qui a tourné court en quatre manches. Mais c'est surtout le hat-trick de Hardt dans le match qui la troisième place qui a marqué les esprits, et offert le bronze à Tappara... La seule médaille qui manquait à la collection du vétéran Ojanen !

 

Quatrième : Jokerit Helsinki. Pour sa dernière saison finlandaise, l'entraîneur et sélectionneur canadien Doug Shedden aura finalement mieux réussi à la tête de l'équipe nationale qu'avec son club. La Finlande a terminé troisième du championnat du monde, alors que le meilleur effectif supposé de SM-liiga n'a terminé qu'à la quatrième place.

Le Jokerit disposait en effet de l'autre super-ligne du championnat, Stapleton-Santala-Leino. Comme le premier trio du Kärpät (avec le Tchèque Michal Bros), elle est bâtie autour d'un centre étranger, l'Américain Tim Stapleton. Pas toujours convaincant dans sa condition physique dans les duels à son arrivée, il a réalisé une bien meilleure seconde saison.

À ses côtés, Ville Leino a dominé la SM-liiga comme personne. Sa grande force, c'est son contrôle du palet, qu'il sait protéger dans le coin et conserver avec de magistraux demi-tours à la Nylander. Pourtant, quand il a été appelé en équipe nationale cette saison, il n'a pas eu la même efficacité (1 assist en 11 matches). Son propre coach Doug Shedden savait donc ce qu'il faisait en ne le retenant pas pour le Mondial.

Le coaching de Shedden a rarement fait l'unanimité en Finlande, et c'est la raison pour laquelle le Jokerit, malgré son effectif, était de moins en moins cité parmi les champions potentiels. Le vétéran Petri Varis n'en a pas moins atteint la barre des 40 buts en carrière en play-offs, un record de plus à son actif. La situation s'est compliquée avec la blessure au genou du gardien Jussi Markkanen. Deux mois plus tôt, Joni Puurula avait été recruté comme simple doublure, pour permettre au n°2 Hovinen de jouer en juniors. Il s'est retrouvé soudain titulaire en play-offs, considéré avec méfiance, mais il s'en est sorti mieux que prévu.

Malheureusement, le Jokerit n'a pas su tuer la série alors qu'il menait trois manches à une en demi-finale contre Espoo. Il a ensuite perdu le match pour le bronze, le seul de tous les play-offs qui n'ait pas confirmé trait pour trait la hiérarchie de la saison régulière.

 

Cinquième : JYP Jyväskylä. Le petit club du centre du pays a augmenté son budget et investi pour fêter au mieux son 60e anniversaire. Mission réussie : il n'avait plus atteint les quarts de finale depuis 2003, et pour y retourner, il a... fait revenir son ancienne première ligne de l'époque, Immonen-Virtanen-Pihlman.

Le JYP a donc misé gros sur cette saison, mais elle a commencé par une conjonction de malchance de deux recrues américaines, les frères Helminen. Ils ont eu tous deux la mâchoire cassée par un palet dévié à quelques semaines d'intervalle, l'aîné Dwight pendant la pré-saison, et son cadet Lars début octobre. Eux qui tenaient à jouer ensemble ne se sont pas arrêtés à ce coup du sort et ont bien tenu leur place, l'un en attaque et l'autre en défense.

Et puis, en décembre, un dilemme s'est présenté : une énorme somme d'argent mise sur la table par le Dynamo Moscou pour recruter le gardien Sinuhe Wallinheimo. Le genre de choix crucial qui ne sont pas toujours purement rhétoriques... Comme si un petit diable avait soufflé à l'oreille des dirigeants du JYP : "Vas-y, n'hésite pas, prend ce gros paquet de biftons !"... À l'autre oreille, le petit ange s'époumonnait : "Ne fais pas ça, ne gâche pas cette saison, une occasion unique qui ne se répresentera pas !"

Les Finlandais ont finalement cédé à la tentation. Ils ont empoché des sommes qui font rêver. Plus de 600 000 euros pour Wallinheimo en quelques mois, de quoi rembourser les traites de sa maison pour le gardien vétéran. Mais aussi plus de 400 000 euros pour le JYP, la plus grosse indemnité jamais reçue par un club finlandais... Le club n'a pas accepté à n'importe quelles conditions : il a simplement accordé un prêt pour quelques mois, en s'assurant dans le même temps que Wallinheimo resigne pour les deux prochaines saisons.

C'était quand même un gros risque. Le gardien Pekka Tuokkola était une bonne doublure, mais arriverait-il à assumer le statut de n°1 ? Il y est parvenu et a maintenu le JYP à une bonne cinquième place, protégé par des leaders défensifs (Ville Mäntymaa, Kalle Kaijomaa) qui ont abattu beaucoup de travail. Et comme en 2003, le trio Immonen-Virtanen-Pihlman et leurs collègues ont atteint les quarts de finale.

Non seulement cette saison de rêve n'a pas été gâchée, mais elle pourrait ne pas être qu'une parenthèse. Jarkko Immonen et Tuomas Pihlman, qui ne devaient faire que (re)passer, ont finalement prolongé leur contrat, Wallinheimo va revenir, et le JYP ne compte pas s'arrêter en si bon chemin.

 

Sixième : Pelicans Lahti. Si les progrès du JYP étaient attendus, personne ne s'attendait à ce que les Pelicans connaissent une saison encore meilleure que la précédente. Le club aux couleurs turquoise voit la vie en rose !

Il y a quelques années encore, la chanson qui salue chaque but des Pelicans ("We're gonna win", le titre du chanteur de rock FM canadien Bryan Adams écrit pour son club de foot favori Chelsea) était de mauvais goût, et pas sur le seul plan musical. Elle était surtout déplacée sportivement tant les paroles "Don't wanna be a loser" sonnaient comme un cri déséspéré par rapport aux performances des volatiles sur la glace.

Mais depuis que l'ex-sélectionneur Hannu Aravirta a pris en charge l'équipe, il l'a totalement transformée. Il a mis en place le deuxième meilleur powerplay de SM-liiga, avec trois unités différentes. Le plus étonnant dans ce club qui compte une douzaine de joueurs formés localement, c'est sa profondeur de banc inattendue : même la quatrième ligne joue près d'une dizaine de minutes par match avec Aravirta.

En deux ans et demi, il a fait du quasi-inconnu Matias Loppi un attaquant-vedette aux 58 points. Le HIFK, qui était son club formateur, n'en est pas revenu et l'a mis sous contrat. Le gardien Antti Niemi, quant à lui, a été approché par plusieurs clubs de NHL et a signé avec Chicago. Mais les Pelicans ont gardé leur élément le plus important : le magicien Hannu Aravirta a prolongé d'un an malgré l'intérêt de Kärpät.

 

Septième : HIFK Helsinki. "Je ne suis pas venu en Finlande pour me battre". Déclaration du défenseur tchèque Libor Ustrnul, 1m97 et 120 kg. Dans ce cas-là, mon gars, fallait pas venir au HIFK ! Ici, c'est le club de Karalahti, cet ex-international parti cette saison au Kärpät puis... en détention préventive pour son implication dans un trafic de drogue (20 mois de probation et une amende comme sentence finale, puisqu'il était un des moins "mouillés" parmi les vingt accusés du réseau du gang de motards Bandidos). Dès l'annonce du recrutement d'Ustrnul, les tabloïds avaient anticipé une échauffourée face à l'autre gros bébé Sami Helenius dans le derby de Helsinki, et les deux hommes n'ont mis que 40 secondes avant de jeter les gants, à l'instigation de Helenius. Après son match de suspension, Ustrnul n'est resté que huit rencontres avant de rentrer à Karlovy Vary...

On raille souvent les supporters du HIFK comme des gaillards "sans cerveau", amateurs surtout de ce genre de spectacle. L'entraîneur canadien Paul Baxter (1564 minutes de pénalité dans sa carrière NHL) n'a peut-être pas assez flatté leurs bas instincts car il n'encourageait pas son équipe à se servir de ses muscles. Il a récolté des pétitions appelant à sa démission. Il est vrai que le HIFK était peu agressif, dans tous les sens du terme. Le coach insistait sur la discipline défensive, mais son potentiel offensif paraissait inexploité. L'attaque s'en remettait à des actions individuelles, en particulier de l'Américain Ryan Vesce, souvent décisif aux tirs au but.

La saison du HIFK a failli être sauvée par un gardien débutant, Jani Nieminen. Profitant de la blessure des deux premiers portiers, il a joué - et gagné - trois matches en saison régulière. Quand le titulaire Per Lundell a été rétabli, il a cependant retrouvé son poste. Mais au premier match match de "pré-play-offs" contre Turku, il s'est fait sortir après quatre buts encaissés. Nieminen n'a pas concédé le moindre but en prolongation, ni dans la deuxième manche ! Le gardien de 19 ans formé au club a remis ça au premier match du quart de finale... mais il n'a rien pu faire ensuite face à l'attaque d'Espoo, et Lundell non plus quand il est revenu une fois.

C'était l'échec de trop pour le HIFK, qui disposait du deuxième budget du pays. Pour l'avoir si mal utilisé, le manager Pentti Matikainen, a été licencié après dix années de service. Son remplaçant sera un cadre d'entreprise, Jukka Valtanen, un ancien de L'Oréal Finlande dont le look propret contrastera avec la crinière et la moustache de Matikainen. Il connaît cependant le hockey pour avoir joué en junior et coaché un peu.

 

Huitième : Ilves Tampere. Un peu courts en défense, les lynx disposaient d'une attaque très homogène, mais sans grand buteur. Lorsque leur leader offensif Toni Koivisto s'est blessé juste avant les play-offs, on craignait donc qu'ils n'aillent pas très loin.

Or, ce printemps, toute la Finlande suivait le parcours d'Ilves. Les derniers moments de la carrière du recordman mondial des sélections et des participations olympiques Raimo Helminen ont éclipsé tout le reste de l'actualité sportive. En qualifiant Ilves pour les quarts de finale, le but du centre canadien Mike Bishai a permis à "Raipe" de fêter ses 44 ans en étant toujours en activité.

Les supporters du Kärpät, qui avaient déjà réservé une standing ovation pour Helminen lors du dernier match de saison régulière, ont donc pu le saluer une fois de plus par des chants à son honneur. Ilves a bien sûr été éliminé, en perdant même ses nerfs au troisième match lorsque Bishai et le Tchèque Jakub Koreis ont réussi un drôle de record : être tous deux renvoyés au vestiaire à trois minutes d'intervalle pour des... coups de tête (Materrazzi ne joue pourtant pas à Oulu).

Dans la prolongation du sixième match de la série, Hannes Hyvönen est donc rentré dans l'histoire pour avoir mis fin à la carrière de celui qu'il a appelé le "meilleur joueur finlandais de tous les temps". Une phrase de plus dans le concert de louanges qui durait depuis des semaines. Raimo Helminen a dû ressortir des vestiaires de "son" Hakametsä de Tampere pour un rappel, tel un artiste à qui l'on rend un ultime hommage avant qu'il ne quitte la scène. C'est bien de cela qu'il s'est agi en ce début 2008. "Raipe" a effectué une tournée d'adieux de plusieurs mois, et à aucun moment l'émotion n'est retombée. Le mythe n'avait cependant rien d'une icône défraîchie que l'on présente à la foule : il était encore un des meilleurs joueurs du championnat en infériorité numérique.

 

Neuvième : Lukko Rauma. Ce n'est pas Helminen (personne n'égale "Raipe", le suggérer relève du crime de lèse-majesté en Finlande), mais le défenseur Erik Hämäläinen, qui faisait partie comme lui de l'équipe championne du monde en 1995, est une légende à sa manière. La raison en est simple : il finit sa carrière avec 1001 matches de saison régulière en SM-liiga !

Ce joli record est le seul évènement de l'année à Rauma, après une saison tristounette, terminée comme la précédente dans les "pré-play-offs", ce tour de consolation sans âme désormais affublé du nom de "Wild Card play-offs". Une saison terminée sans gloire sur la glace de Tampere face à Ilves, une élimination consentie sur un unique but... maqué après une bête pénalité pour surnombre. Pas de quoi pavoiser.

 

Dixième : TPS Turku. Ayant amassé 1,4 millions d'euros de perte, le TPS a remplacé tous ses dirigeants par des "visages neufs qui ne manquent pas d'idées fraîches", selon les termes du communiqué du presse. Il faut dire que rien n'avait changé à Turku depuis le titre de 2000. Le rappel de Hannu Jortikka avait constitué la dernière étape dans la croyance illusoire que le succès reviendrait de lui-même. Le célèbre coach fait fructifier sa notoriété dans ses spots de pub à la télévision, mais il n'a plus rien du "roi Midas" qui transforme tout ce qu'il touche en or. Au contraire, il a touché le fond fin juillet, un mois après sa mise à la porte : alors qu'il était dans un bar du centre de Turku avec le vétéran Kai Nurminen, la sécurité a dû intervenir pour calmer les deux hommes.

On l'aura compris, les légendes appartiennent au passé. Le TPS a tiré un trait sur l'acquisition de stars surpayées et rajeuni nettement l'effectif. L'opération à l'épaule du grand défenseur Aki Berg, revenu seulement en janvier, a accéléré ce changement de génération.

Comme beaucoup d'autres clubs, le TPS est allé aussi chercher cette jeunesse et dynamisme aux États-Unis. Même s'il a parfois sacrifié la sécurité en zone défensive (-12) à la contribution en zone offensive (33 points dont 15 buts), l'arrière américain Lee Sweatt, tout juste sorti d'université, a beaucoup amené en powerplay et a été apprécié du public, y compris via le blog tenu par sa petite amie.

Mais la recrue de l'année, c'est l'attaquant Teemu Laine. Cet ancien joueur discret de Jokerit et Tappara a presque toujours porté le casque d'or et était un peu seul pour porter l'offensive de son équipe.

Le TPS a certes tenté de se montrer plus agressif en play-offs, en marquant deux buts en quelques minutes sur la glace du HIFK. Mais ce sursaut d'orgueil n'a pas suffi : le jeune et inconstant gardien tchèque Aleksandr Salak a encaissé deux mauvais buts et les locaux ont fini par s'imposer 5-4 en prolongation. Turku a changé de gardien (Juha Kuokkanen) pour le deuxième match, perdu 0-1 par une équipe aux leaders fatigués. Il fallait en passer là pour reconstruire.

 

Onzième : Saipa Lappeenranta. Comme au JYP, le meilleur marqueur s'appelle Jarkko Immonen, mais c'est juste un homonyme. Comme à Kärpät, le gardien s'appelle Tarkki, mais il s'agit d'Iiro Tarkki, le petit frère, qui a réussi une bonne saison. Malheureusement, ces coïncidences ne suffisent pas à imiter les succès des clubs pré-cités.

Le SaiPa a aussi subi une affaire dont il se serait bien passé. Son entraîneur Heikki Mälkiä a été arrêté pour conduite en état d'ivresse. Il avait dîné chez des amis la veille au soir et pensait que son taux d'alcoolémie était suffisamment redescendu au petit matin, ce qui n'était manifestement pas le cas. Mälkiä a dû quitter le club et s'est recasé au Danemark, où il a conduit Frederikshavn jusqu'en finale à la surprise générale.

Pour la septième fois en huit ans, le SaiPa n'a donc pas participé aux play-offs. Les blessures ne lui en ont guère laissé le loisir. Mais il fait quand même au mieux avec ses moyens, et a bouclé un budget en léger bénéfice pour la troisième année de suite.

 

Douzième : HPK Hämeenlinna. Pendant quatre ans, le HPK s'est pris pour un grand en finissant toujours dans le dernier carré, dont un titre en 2006. Malheureusement, il ne s'est jamais remis du départ de Ville Leino (devenu meilleur joueur du championnat au Jokerit), de l'international Antti Pihlström (AHL) et surtout, surtout, de Jukka Jalonen. Son entraîneur a en effet rejoint l'équipe nationale, de façon transitoire pendant un an comme adjoint de Shedden avant d'en prendre les rênes jusqu'en 2010.

Cela faisait trop de changements à absorber d'un coup. Le HPK avait tenté de recruter le petit Harri Tikkanen du SaiPa pour qu'il devienne le défenseur offensif n°1, et il l'a été... mais avec 14 points seulement. Un signe d'une équipe sans vrai leader, ni devant ni derrière.

Il faut dire que toutes les vedettes ont été vendues au fur et à mesure. Très clairement, le club a tiré une croix pure et simple sur cette saison mal embarquée ! Toni Mäkiaho, l'ex-recordman des pénalités devenu meilleur marqueur à la faveur des supériorités (qu'il aime provoquer par ses plongeons), est parti en Russie. Et en janvier, le HPK a terminé le dégraissage façon Kärcher. Il a prêté la révélation 2006/07 Mäenpää en Suède, et a laissé partir les autres cadres Uusikartano (TPS), Lundberg (Luleå), Andersson et le gardien Chiodo (Kärpät). Il a donc fini le championnat sans le moindre étranger, étant la seule équipe dans ce cas.

Une seule bonne nouvelle à retenir dans ce marasme : la progression de Jari Sailio, un joueur vif et physique de 22 ans qui a pris d'importantes responsabilités avec le départ des cadres.

Puisque les équipes nationales avaient privé le HPK de son entraîneur, il a cherché le prochain dans les équipes nationales. Après l'échec d'Alatalo, il a donné un contrat de deux ans à Jukka Rautakorpi, l'ancien responsable des moins de 20 ans

 

Treizième : KalPa Kuopio. Il aura fallu trois ans pour que KalPa quitte la dernière place, mais il y est enfin parvenu. Après avoir accumulé les défaites d'un but en début de saison, il a finalement obtenu de vrais résultats positifs au lieu de se contenter de "n'être pas loin du compte". Il a donc clairement mérité d'abandonner la lanterne rouge. Trois attaques ont marqué moins que KalPa, et deux attaques ont encaissé plus.

Dans une formation devenue compétitive, certains joueurs de premier plan ont même réussi à engranger une fiche positive. C'est le cas de Jani Tuppurainen, qui a fini à +2 après deux saisons à -24 et -18. Il était l'attaquant-vedette de l'équipe avec une bonne intensité dans l'effort et au patinage, mais il est parti en Suède à Färjestad en janvier.

Ces départs systématiques de fin de saison chez les mal-classés sont agaçants, mais ils s'expliquent par l'absence de relégation. C'est aussi pour ça que les clubs essaient de limiter la casse en préparant l'année prochaine, où seront enfin réintroduits les barrages de maintien, avec une série-couperet en sept manches entre le dernier de SM-liiga et le premier de Mestis.

 

Quatorzième : Ässät Pori. Le chiffre 13 s'est une fois de plus acharné sur l'as de pique. 13, comme la position très vite occupée au classement. L'entraîneur Jari Härkälä n'avait pas le contrôle de l'équipe qui se laissait aller à l'entraînement, et il a donc été licencié. Le retour au coaching d'Alpo Suhonen, qui était simplement commentateur télé et chroniqueur, n'a cependant pas fonctionné. Lui non plus n'a pas tiré le meilleur des joueurs. Le meilleur exemple en est le jeune défenseur offensif Tero Konttinen : après une étonnante première saison à 27 points, le a perdu peu à peu sa place à cause de son positionnement douteux et de ses relances ratées, au point qu'on l'a laissé partir au TPS sans regret.

Suhonen n'avait plus aucune chance de toute manière car Ässät a été accablé par la blessure de son joueur-clé Marko Kivenmäki. Le petit passeur de génie souffre de sévères douleurs au dos qui pourraient compromettre la suite de sa carrière. À 20 ans, Jesse Joensuu, grand gabarit fermement ancré sur ses patins dans les coins ou devant la cage, s'est donc retrouvé bien seul pour mener l'offensive.

Les supporters se consolaient avec le retour de Matt Nickerson, qui leur rappelait l'exceptionnelle année 2006 et l'accession en finale. N'ayant pu se faire une place chez les Dallas Stars, le défenseur est revenu grâce aux rallonges spécialement accordées par les sponsors. Nickerson a vite repris ses habitudes : à son sixième match, contre le TPS, il a cinglé les mains d'Erkinjutti ("désolé") puis chassé Laine autour de la patinoire ("je me souviens de lui, c'est un sale joueur, et je voulais emmener quelqu'un avec moi au vestiaire après avoir pris une pénalité de match). Malgré cela, Nickerson n'a pas battu son record de pénalités de l'époque. Il est resté cependant le chouchou du public... énervé que le club se décharge finalement de son gros salaire pendant la fin de saison en acceptant l'offre d'Ilves.

 

 

Mestis

Il faudra donc attendre l'an prochain pour qu'une vraie promotion/relégation soit remise en place entre la SM-liiga et la Mestis. En attendant, la saison en cours comptait donc pour du beurre. Les play-offs sans enjeu ont été d'un mortel ennui, confirmant exactement le classement de la saison régulière.

Dans ces conditions, on ne s'étonnera pas d'avoir assisté au train-train habituel : ce sont les deux mêmes ex-Grenoblois qui ont récolté tous les honneurs. Le centre Tero Forsell, avec 15 buts et 50 assistances, a une fois de plus terminé meilleur marqueur, avec deux points d'avance sur son ailier Jouni Virpiö (29 buts). Et le défenseur Pasi Järvinen a encore été dominant, terminant même neuvième marqueur. Avec eux, le TuTo Turku a dominé la saison de bout en bout, cette fois sans se rater dans la dernière ligne droite. Sauf qu'il n'y avait pas le moindre pompon à décrocher...

Vainqueur-surprise l'an passé, le Hokki Kajaani a encore atteint la finale, mais il avait une faiblesse dans les cages : l'ancien gardien d'élite Mikko Rämö a été envoyé en Autriche à Feldkirch en décembre, et son successeur Mikko Rossi s'est fait sortir deux fois en cours de match en play-offs (troisième manche de la demi-finale et première manche de la finale) au profit de la doublure Ari Reunanen, un ancien du Jukurit.

Il s'agissait d'un échange puisque dans le même temps, le Jukurit Mikkeli avait récupéré un nouveau gardien n°1 : Joni Myllykoski du... Hokki. Malheureusement pour lui, il s'est fait éliminer (3 victoires à 2) par son ancien club en demi-finale. Le Jukurit avait la meilleure attaque l'an passé, mais après le départ de son deuxième marqueur Tuomas Tikkanen vers le Mont-Blanc, il a marqué 30% de buts en moins cette année. Il a cependant tenu défensivement, là aussi en cinq manches, face à l'attaque ressuscitée de Vaasa en quart de finale.

Le KooKoo Kouvola s'est contenté de la quatrième place, mais s'est fait remarquer en commençant à embaucher des Canadiens. L'expérience a bien fonctionné et sert de coup d'essai, car le KooKoo veut se mêler à la lutte pour la montée l'an prochain.

Promu-surprise, arrivé pour la première fois à ce niveau, le Leki Lempäälä a étonné avec sa cinquième place. Le plus incroyable est le retour gagnant de Tuukka Suoniemi : ce défenseur qui avait déjà connu le club quand il jouait deux divisions plus bas, avant deux allers-retours en France (à Lyon en D2 et l'an dernier à Annecy en D1), a terminé sixième meilleur marqueur parmi les défenseurs de Mestis !

Le Sport Vaasa a raté son début de saison et viré l'entraîneur Mikko Manner. Son successeur est une célébrité finlandaise, le consultant télé Juhani Tamminen. Un Tamminen qui s'est souvenu qu'il fut sélectionneur de l'équipe de France en recrutant Nicolas Besch. En rejoignant une équipe déjà internationalisée par la présence de quatre Canadiens, le défenseur tricolore a vite vu la différence entre la deuxième division suédoise (Allsvenskan) et la deuxième division finlandaise (Mestis) car sa fiche statistique y a progressé bien plus vite. Tamminen a pris le Sport Vaasa en huitième position début décembre et l'a remonté de deux crans en améliorant nettement le niveau de jeu. Il a notamment mis en place le meilleur powerplay du championnat. Même si on a surtout demandé à Tamminen de préparer la saison prochaine, puisque celle-ci ne comptait guère, il a tenu à se fixer des challenges. Début février, avant un match chez le leader, il a promis de faire le trajet à pied de Turku jusqu'à Oulu (600 km...) si son équipe perdait. Elle était menée 5-2 à dix minutes de la fin... et a gagné 5-6 ! Une paire de chaussures sauvée !

Derrière le Sport, l'équipe qui compte la meilleure affluence (1875 spectateurs) est le Jokipojat Joensuu, une formation homogène qui a souffert de n'avoir aucun buteur qui sorte du lot. Le suivant, le SaPKo Savonlinna, a connu le problème inverse : il avait deux joueurs à 19 buts, Kalle Konsti (ex-Dijon) et Teemu Somppi, mais pas grand-chose derrière. La qualification de ces deux équipes n'a cependant pas été menacée par un HeKi Heinola encore plus faible.

En fait, la seule chose exaltante durant cette saison était la lutte pour le maintien. Le Kiekko-Vantaa en est ressorti vainqueur à tout point de vue. Il a dépassé les 1200 spectateurs de moyenne alors qu'il n'en avait guère plus de la moitié d'habitude. Notons que le Kiekko-Vantaa a retiré le premier numéro de maillot de son histoire. Celui qui a eu l'honneur de voir son chandail élevé au plafond, c'est l'ancien n°7 Jukka Hakkarainen, qui a passé toute sa carrière au club... sauf une saison, celle où il est devenu champion de France avec Mulhouse !

En usant 3 entraîneurs et 38 joueurs différents durant la saison, le second promu, le Titaanit Kotka, a connu une mise à niveau difficile. Mais après un début de saison catastrophique (6 points en 18 matches), il a relevé la tête au moment ou est arrivé l'énergique attaquant canadien Brad Mehalko, qui a changé le potentiel de l'équipe. Déjà condamné à la lanterne rouge, le Titaanit a pu se préparer à la série de promotion/relégation, où il a été porté à bout de bras par ses joueurs étrangers, le défenseur américain James Jernberg (ex-Villard-de-Lans) et bien sûr Mehalko.

A contrario, le Salamat Kirkkonummi ne s'attendait pas à se retrouver là. Il était à la lutte pour la qualification en play-offs quand les pépins se sont accumulés : problèmes financiers, démission des dirigeants et de l'entraîneur, et surtout une infirmerie remplie qui l'a obligé à finir la saison à trois lignes. Les "éclairs" (Salamat) retournent finalement à l'obscurité. En cinq saisons de Mestis, l'intérêt pour le club n'a jamais décollé depuis le coup médiatique de l'époque qui avait consisté à recruter la meilleure joueuse féminine du monde (Hayley Wickenheiser).

Le futur promu en Mestis est un ressuscité : il était une fois le Diskos Jyväskylä, le deuxième club de cette ville, qui avait dû repartir du bas de l'échelle en 2004 après un dépôt de bilan. Rebaptisé D-Kiekko, il a connu trois promotions en quatre ans et fera ainsi son retour en Mestis, ce qui lui permettra de reprendre son nom de Diskos. L'ultime étape de cette remontée fantastique a cependant été tout sauf un long fleuve tranquille : les joueurs de Jyväskylä s'étaient qualifiés d'extrêle justesse, aux tirs au but, pour la phase finale nationale. Mais ils ont alors dominé cette poule de huit équipes, avant de terminer à égalité de points avec le Salamat dans la poule de promotion/relégation. Dans ces cas-là, le règlement prévoit un match d'appui, sur la glace de Kirkkonummi qui avait la meilleure différence de buts. La partie s'est jouée en prolongation, lors de laquelle Pirkka Lahtinen, l'ancien joueur de Mont-Blanc, s'est fait pénaliser pour... simulation ! Cela aurait pu être la pénalité fatale... Tout au contraire, en sortant de prison, Lahtinen a marqué le but vainqueur et est devenu le héros de la remontée !

Marc Branchu

 

 

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