Le Mont-Blanc essaie de se maintenir

 

Il y a un an, l'Entente Saint-Gervais/Megève connaissait une crise existentielle : non contents de s'être engagés in extremis dans des conditions précaires, les nouveaux dirigeants découvraient le déficit laissé par leurs prédécesseurs et avertissaient la fédération que les comptes présentés étaient faux. Les deux points de pénalité - sanction contre une faute réelle avec la circonstance atténuante de la transparence et de la bonne foi du nouveau bureau - ont alors été traînés comme un boulet et le club a figuré jusqu'en décembre avec un nombre de points négatif !

Quand on attend la douzième journée de championnat pour enfin marquer ses premiers points, on ne se fait normalement guère d'illusion sur ses chances de maintien. Le HC Mont-Blanc a pourtant réussi à sauver sa peau, in extremis, au cinquième match du barrage de relégation, en prenant sa revanche sur Neuilly-sur-Marne qui l'avait défait un an plus tôt avant un repêchage providentiel.

Le cycle de performance de l'Avalanche a en partie coïncidé au cours de la saison avec celui de son gardien Henri-Corentin Buysse. Arrivé au dernier moment pour pallier la défection d'Alexandre Vincent, il avait eu du mal à se remettre de sa tentative ratée pour s'établir en Amérique et accusait le coup face à l'accumulation des buts encaissés. Plusieurs fois, il a quitté la glace en cours de jeu, d'abord par mansuétude de son entraîneur, puis de son propre chef, comme à Rouen.

À Saint-Gervais comme à Megève, beaucoup lui en ont longtemps voulu de cette désertion en ces temps difficiles. Mais chacun a bien été obligé de reconnaître ensuite le mérite de ce même Buysse lorsque, rasséréné par de meilleurs résultats et sa première sélection en équipe de France, il a largement contribué au maintien.

Buysse est déjà devenu un point de repère dans une équipe qui a dû digérer les arrêts définitifs de son meilleur buteur Sébastien Subit et des frères Nicoud. Ils étaient revenus sur leur retraite pour donner un coup de main, mais il faut bien qu'à un moment ils raccrochent. Ils laissent un vide puisqu'il ne reste plus qu'un cadre historique, Étienne Croz, seul ancien au milieu d'une bande de gamins.

L'heure de faire place aux jeunes ? Le Mont-Blanc n'a pas attendu ce signal pour leur donner leur chance. Ils sont nombreux à avoir pu prouver leur valeur en alternant sur les lignes importantes, mais sont-ils pour autant prêts à être tous titulaires ? Sans doute pas, surtout s'ils ne sont pas encadrés par des éléments de métier. En plus, le plus prometteur d'entre eux, Robin Gaborit, est parti au Canada. Après une saison achevée par une blessure au genou en barrage de maintien, il espérait se relancer dans la ligue "AAA" du Québec, mais a subi les contrariétés de la fédération canadienne qui ne veut pas de renforts étrangers en junior A. Rien de surprenant, Quessandier avait vécu les mêmes tracasseries en son temps et avait dû quitter la BCHL pour cette raison. Encore un exil mal préparé par méconnaissance du contexte réglementaire nord-américain. Gaborit a tout essayé dans ses démarches, en vain, et pendant ce temps en France, la date limite des transferts du 15 novembre tombe comme un couperet pour le placer dans une situation réglementaire inextricable.

Quatre retours dans la région

Pour l'Avalanche, en tout cas, il fallait retrouver des cadres avec suffisamment d'expérience de la Ligue Magnus. Les propositions financières étant limitées, il faut donc compter sur des joueurs originaires de la région, ou qui s'y sont au moins attachés.

L'an dernier, Numa Besson était parti à Chamonix dans la continuité des projets de fusion, mais il ne savait pas alors que son ancien club serait engagé. Chez le rival, il a réussi sa meilleure saison : une sélection dans l'équipe-type du mois de Hockey Archives, puis une présence régulière dans la liste des remplaçants de l'équipe de France. Sa cote est donc montée, et il a même été contacté par Rouen au moment où Christian Pouget, son ancien partenaire de ligne au Mont-Blanc, en était encore l'entraîneur. Le Mégevan a finalement choisi, comme il l'avait prévu initialement, de rentrer dans son club, et d'y retrouver son frère. Mais entre-temps, les attentes sont plus fortes qu'elles ne l'étaient à l'époque. À Chamonix, Besson avait été le plus efficace aux côtés de Daniel Ström, qui le couvrait bien. À l'Entente, Besson fait la paire avec le jeune Arthur Cocar, et il doit assumer la plus grande part de responsabilité sur sa ligne. Dans un système de jeu plus défensif, on compte sur son lancer en powerplay, mais on veut surtout qu'il assure ses arrières. Un défi qui s'avère plus difficile.

Moins de pression sur les épaules de Lionel Simon, dont les performances à Épinal étaient moins clinquantes. Son engagement physique n'a cependant jamais été remis en cause. Arrivé dans la région en cadet, Simon a fini sa formation à Saint-Gervais et revient maintenant en tant que joueur d'expérience : à tout juste trente ans, il est en effet le troisième plus ancien de l'équipe.

Le centre Clément Masson était venu de Viry en Haute-Savoie pour jouer directement en Ligue Magnus, c'était alors chez le voisin Chamonix. Le Mont-Blanc a ensuite bénéficié de ses talents et le rappelle aujourd'hui. Compte tenu de la faiblesse offensive de l'équipe, ce petit gabarit souvent remarquable défensivement sera jugé sur sa capacité à créer du jeu. Les revenants ont un certain niveau d'exigence à satisfaire.

Le quatrième retour a pris des proportions plus importantes que prévu. Tout remonte au mois de mars, pendant la trêve qui précédait la dernière journée de division 1, celle qui verrait Amnéville relégué en D2. Gaël Jeanbourquin était venu en vacances chez lui à Saint-Gervais pour skier un peu en compagnie de ses deux coéquipiers suédois. Il en a profité pour appeler Marc Djelloul et pour lui présenter les deux hommes, qu'il trouvait suffisamment bons pour jouer au niveau supérieur. Une opinion vite partagée au sujet de Stefan Wiktorsson, sobre et bien placé, qui correspond bien aux besoins défensifs du Mont-Blanc et qui a été rapidement mis sous contrat. Quelques semaines plus tard, Johan Chang l'était à son tour : le quatrième marqueur de D1 dispose d'une vitesse de jeu intéressante.

Quant à Jeanbourquin lui-même, il a évoqué son cas personnel dans la foulée de celui de ses coéquipiers. Ne marquant guère même en division 1, il ne pourrait être utilisé que comme attaquant défensif. Plus que ce rôle sur la glace, Marc Djelloul lui a surtout proposé de travailler avec lui pour le club. Ce dont nul ne se doutait alors, c'est que Djelloul, comme l'entraîneur grenoblois Patrick Rolland, se verrait offrir un poste de directeur de centre commercial et quitterait le monde du hockey. Ce départ a précipité une passation de pouvoir imprévue, et Jeanbourquin a accepté de prendre la suite comme manager, sans l'expérience qui viendra avec le temps.

Des étrangers enfin mieux intégrés ?

Parmi les missions urgentes du nouveau manager, le recrutement, en étroite collaboration avec Christopher Lepers. Le club ne souhaitant conserver aucun de ses cinq étrangers, il en restait trois à acquérir une fois les deux Suédois signés.

Le plus important était celui du leader d'expérience des lignes défensives. Dusan Brincko avait connu l'élite en 2004 à Mulhouse, où Christer Eriksson le jugeait parfois trop offensif. Avec quelques années de plus, ce risque est limité. Pas maladroit techniquement, il peut combler ce manque de présence physique déjà constaté l'an passé dans la défense de Mont-Blanc où seul Adamovics tenait le fort. La bonne surprise, c'est surtout que Brincko prend à cœur son rôle d'homme de métier et est sans arrêt en train de motiver et conseiller les jeunes. Il encadre bien Sébastien Borini, un joueur qui connaît des limites, ne s'enflamme pas et tient son marquage de près.

Pour trouver le buteur qui faisait aussi cruellement défaut, le Mont-Blanc a réactivé la piste canadienne. Il y a un an, elle avait pourtant été source de bien des désillusions. Sur les quatre recrues, une seule était finalement restée pour la saison, le défenseur Alexandre Gagnon, qui n'a pu pratiquer son style créatif en raison d'un poignet droit récalcitrant. Le manque de flexibilité articulaire obérant sa vitesse d'exécution, il est rentré au pays pour passer des examens médicaux et sans doute arrêter la compétition.

Si la ligue junior AAA du Québec n'a vraiment pas été un filon, l'Entente a recruté Jeff Clarke non pas en raison de ses stats impressionnantes en Espagne mais sur la base de ses bonnes saisons en CJHL, une ligue junior A de l'est de l'Ontario (aujourd'hui abrégée en CHL) dont le niveau est en pratique supérieur à son homologue québécoise. Il a été élu dans l'équipe all-star de la ligue lors de sa dernière saison là-bas.

La dernière recrue, John Sullivan, est arrivée au dernier moment. Capitaine dès la deuxième de ses quatre années d'université (la saison "sophomore" en langage des collèges américains), il a remporté deux fois sa conférence NESCAC pour accéder aux play-offs nationaux de la division III de NCAA : finale en 2007 et quart de finale en 2010, battus à chaque fois en prolongation. Il faisait partie de l'équipe Edge US, groupe d'universitaires américains venus en tournée en France en août pour trouver un club. Recommandé par l'ex-entraîneur fédéral James Tibbets, Sullivan a été engagé après une semaine d'essai.

Après cette dernière arrivée, il y a donc six joueurs "confirmés" dans l'attaque de Mont-Blanc : les trois étrangers, Croz, Masson et Romain Orset, qui a clairement franchi un palier et a été sélectionné en équipe de France A' cet été. On peut ajouter à ce groupe de joueurs Josselin Besson, devenu titulaire indiscutable au vu de sa dernière saison, mais malheureusement absent plusieurs mois en raison d'une blessure à la main.

Il reste donc des places pour les juniors, même si la venue de Kevin Hamon a fait grincer quelques dents. Les renforts sont évidemment les bienvenus - s'ils sont au niveau attendu - mais le recrutement d'un joueur de troisième ligne est moins compris et apprécié. Ne vient-il pas en effet "piquer la place" d'un jeune du cru sans lui être supérieur ? Il aura donc lui aussi une certaine pression comme les autres recrues.

Ayant perdu ses quatre meilleurs défenseurs et les deux tiers des titulaires en attaque, l'Entente doit espérer que l'intégration de ses recrues soit plus réussie cette fois. Elle doit en effet subir un renouvellement assez important, paradoxal pour une équipe qui s'appuie essentiellement sur le vivier local. Elle paye là l'héritage de périodes très agitées. Désormais elle y voit un peu plus clair. Et la première des certitudes, c'est qu'avec son budget, il ne saurait y avoir d'autre objectif que le maintien.

Marc Branchu

 

 

Effectif

Gardiens

N° NOM Prénom            Naissance    cm  kg  Club formateur    Club & Ch 2009/10
26 SACCOMANO Luc         16/05/1991  180  70  Saint-Gervais     Mt Blanc    FRA-1
31 BUYSSE Henri-Corentin 18/03/1988  183  76  Amiens            Mt Blanc    FRA-1

Défenseurs

N° NOM Prénom            Naissance    cm  kg  Club formateur    Club & Ch 2009/10   MJ   B   A Pts   Pén
 4 JEAN Sacha            26/07/1989  170  72  Grenoble          MtBlanc U22 FRAjr   22   0   6   6   20'
16 BRINCKÖ Dusan         10/10/1976  185  96        (Slovaque)  Presov      SVK-2   46   2  14  16   98'
23 COCAR Arthur          20/07/1987  180  75  Le Vésinet        Mt Blanc    FRA-1   37   3   2   5   10'
29 WIKTORSSON Stefan     29/06/1983  184  88         (Suédois)  Amnéville   FRA-2   26   4  14  18   58'
32 BESSON Numa           06/08/1987  185  72  Megève            Chamonix    FRA-1   39   6   7  13   36'
33 BORINI Sébastien      02/12/1985  173  73  Megève            Mt Blanc    FRA-1   36   0   0   0   18'
38 SIMON Lionel          18/09/1980  181  78  Grenoble          Épinal      FRA-1   28   0   1   1   30'
69 COCAR Victor          27/01/1991  181  72  Le Vésinet        MtBlanc U22 FRAjr   22   0   8   8   24'

Attaquants

N° NOM Prénom            Naissance    cm  kg  Club formateur    Club & Ch 2009/10   MJ   B   A Pts   Pén
 3 MASSON Clément        03/05/1986  167  60  Viry              Villard     FRA-1   34   6  30  36   18'
 8 VIALLE Morgan         26/06/1991  184  80  Saint-Gervais     MtBlanc U22 FRAjr   22   2   7   9    8'
 9 COULON Arthur         22/08/1991  172  73  Saint-Gervais     Mt Blanc    FRA-1   28   0   1   1    4'
12 CHANG Johan           05/12/1984  176  80   (Suédo-Chinois)  Amnéville   FRA-2   26  22  31  53   74'
14 BESSON Josselin       07/04/1990  178  75  Megève            Mt Blanc    FRA-1   36   6   8  14   18'
18 JEANBOURQUIN Gaël     18/06/1985  172  70  Saint-Gervais     Amnéville   FRA-2   21   2   7   9    8'
19 SULLIVAN John         11/12/1987  178  73       (Américain)  Middlebury  NCAAd3  28  12  11  23   42'
42 ORSET Romain          15/04/1988  179  73  Megève            Mt Blanc    FRA-1   35   6  15  21   46'
64 HAMON Kévin           06/04/1990  179  68  Yerres            Amiens      FRA-1   30   1   1   2    2'
79 CROZ Étienne          14/02/1979  193  90  Saint-Gervais     Mt Blanc    FRA-1   36  11  12  23  108'
86 PAYRAUD Julien        11/02/1986  182  77  Megève            Mt Blanc    FRA-1   17   0   2   2    8'
91 CLARKE Jeffrey        30/04/1988  179  77        (Canadien)  Jaca        ESP-1   22  43  28  71   76'
92 ARÈS Jérémy           25/05/1992  184  77  Megève            MtBlanc U18 FRAcd   18  24  21  45   34'

Entraîneur : Christopher Lepers (35 ans).

Départs : Edgars Adamovics (D, 6+12, Torun, POL), Francis Ballet (D, 5+11, Brest), Ales Cerny (D, 5+12, Mulhouse), Alexandre Gagnon (D, 2+7, arrêt), Antoine Vigier (D, 0+1, Caen), Patxi Biscard (A, 0+0, Valence), Frédéric Figon (A, 0+2, Lyon), Robin Gaborit (A, 5+5, Terrebonne, CAN jrA), Quentin Jacquier (A, 0+2, Villard-de-Lans), Sylvain Nicoud (A, 1+3, arrêt), Thierry Nicoud (A, 4+6, arrêt), Andrej Rajcak (A, 8+12, Senica, SVK-2), Jordan Revel (A, 4+3, Montpellier), Garip Saliji (A, 14+11, Nitra, SVK), Sébastien Subit (A, 17+8, arrêt).

 

 

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