Russie 2018/19 : présentation

 

Conférence Ouest

Division Bobrov : SKA Saint-Pétersbourg, Jokerit Helsinki, Dynamo Moscou, Spartak Moscou, Severstal Cherepovets, Dinamo Riga.

Division Tarasov : CSKA Moscou, Lokomotiv Yaroslavl, Dynamo Minsk, HK Sotchi, Vityaz Podolsk, Slovan Bratislava.

Conférence Est

Division Kharlamov : Metallurg Magnitogorsk, Ak Bars Kazan, Avtomobilist Ekaterinbourg, Traktor Chelyabinsk, Torpedo Nijni Novgorod, Neftekhimik Nijnekamsk.

Division Chernyshev : Avangard Omsk, Salavat Yulaev Ufa, Kunlun Red Star, Sibir Novosibirsk, Barys Astana, Amur Khabarovsk, Admiral Vladivostok.

 

 

Division Bobrov (Conférence Ouest)

 

Alors que son club a été étonnamment discret pendant l'été en matière de transferts de choc, le président du SKA Saint-Pétersbourg Gennadi Timchenko a quand même fait parler de lui par une grande annonce. Il avait jusqu'ici été uniquement question d'une reconstruction de la patinoire actuelle, qui date de 1991. Il projette maintenant rien moins que la plus grande aréna du monde : 22 400 places, soit plus que le Centre Bell de Montréal (21 288). L'idée est qu'elle soit prête pour le championnat du monde 2023, dont l'attribution à la Russie ne serait qu'une formalité avec un tel atout. Le président de la fédération internationale René Fasel pourrait prendre l'aspirateur à salive dans son cabinet d'ancien dentiste pour nettoyer la bave pointant à la commissure de ses lèvres...

Timchenko a évalué ce projet à 20 milliards de roubles (260 millions d'euros), plus qu'un stade de la récente coupe de monde de football - et Timchenko sait de quoi il parle en la matière puisque sa compagnie Stroytransgaz a construit ceux de Volgograd et Nijni Novgorod. À vouloir tout faire en grand, n'est-ce pas surdimensionné ? Certes le SKA a fait du bon travail pour populariser le hockey à Saint-Pétersbourg, mais il y a une marge avec l'adoration quasi-religieuse pour ce sport à Montréal. La salle ne se remplirait que pour les grandes occasions, alors que le Centre Bell est tout le temps plein. Mais Timchenko, un partenaire de judo du locataire du Kremlin qui avait déjà fait son beurre avec les contrats des Jeux olympiques de Sotchi, est bien placé pour savoir qu'en Russie rien n'est jamais trop cher quand il s'agir d'une priorité politique et de prestige international.

Quid, en attendant ce grand projet, de la saison qui commence ? Rappelons que deux stars du SKA ont choisi de retourner en KHL : Ilya Kovalchuk a signé un très beau contrat pour son âge à Los Angeles, et on se demande bien comment Vyacheslav Voynov pourra en faire de même avec un talon d'Achille encore endommagé et surtout une réputation entachée en Amérique du nord pour des faits de violence de 2014 sur sa compagne (qui l'a épousé depuis...), même si son interdiction d'entrer sur le territoire américain a été levée.

Le SKA n'a pas recruté de nom de résonance équivalente. Sa recrue la plus célèbre est Naïl Yakupov, ancien n°1 de draft NHL qui y a toujours déçu, pas par manque d'envie mais par manque de résultats : s'il a appris à travailler défensivement en devenant un simple joueur de troisième ou quatrième ligne ces dernières années, il n'a plus guère exprimé son potentiel offensif avec un faible temps de jeu. Ce joueur qui fonctionne à la confiance est "chouchouté" à Saint-Pétersbourg : il a tout de suite été placé dans des conditions idéales à l'aile droite de la première ligne avec Nikita Gusev et Pavel Datsyuk, deux joueurs subtils qui peuvent libérer par leur intelligence de jeu les espaces dans lesquels il peut s'engouffrer avec sa vitesse. Yakupov a marqué sur son premier tir à sa première présence du premier match de préparation, mais il a parfois encore tendance à trop en faire, y compris dans le jeu sans palet en quittant sa position. C'est donc un joueur qui devra être coaché en permanence - ce qui n'a guère été le cas depuis sa première année NHL avec Ralph Krueger - par Ilya Vorobyov, qui a succédé à Znarok aux commandes de l'équipe de Russie et maintenant du SKA. Ce retour - trop tardif ? - au pays est la dernière chance pour Yakupov, à 24 ans, de donner un autre sens à sa carrière que l'étiquette du pire numéro 1 de draft de l'histoire.

Même plate-forme idéale pour le jeune Andrei Kuzmenko. En finissant par convaincre le CSKA de l'échanger contre le plus polyvalent et défensif Sergei Kalinin, le SKA a offert à ce talent offensif ce que les Moscovites ne pouvaient pas lui offrir : une place en deuxième ligne aux côtés de Nikolaï Prokhorkin et de la révélation de la dernière saison en équipe de Russie, Aleksandr Barabanov. Saint-Pétersbourg semble avoir gagné dans cet échange, surtout à moyen terme. Des attaquants de "neutralisation" comme Kalinin, le SKA en a déjà avec le duo Kablukov-Ketov, même sans les mettre en avant comme le CSKA.

S'il y a une faiblesse par rapport à ce grand rival, c'est qu'il semble y avoir moins de solutions et de polyvalence au centre : après la non-reconduction de Shipachyov, l'équipe de Saint-Pétersbourg est plus que jamais dépendante de la bonne santé du désormais quarantenaire Pavel Datsyuk. Mais aux ailes, en défense et même dans les cages (c'est maintenant Magnus Hellberg qui a remplacé Koskinen comme partenaire gênant du jeune gardien russe Igor Shestyorkin), la profondeur de banc reste forte. Le SKA a cartonné dès la pré-saison avec 9 victoires en 9 rencontres et n'a rien perdu de ses ambitions.

 

Le bilan de Lauri Marjamäki en deux années aux manettes de l'équipe de Finlande a été assez piteux. Il a parfois été décrit comme le pire sélectionneur national de l'histoire. Il avait pourtant un bon bilan chez les Kärpät. A-t-il été incompris ? Est-il plutôt fait pour être entraîneur de club, où les joueurs ont le temps de s'imprégner de son système et de l'appliquer ? La réponse sera donnée chez les Jokerit Helsinki.

L'équipe finlandaise de KHL est en effet un bon étalonnage. Elle a gardé les trois quarts de son effectif, forcément de haut niveau au vu de ses moyens financiers et de l'absence de quotas nationaux pour les clubs étrangers de la ligue russe. Marjamäki connaît les renforts : après avoir utilisé son "petit chouchou" Sakari Manninen (170 cm) toute la saison dernière en équipe nationale, il l'aligne maintenant sur le premier trio offensif avec Steve Moses (175 cm) et le capitaine Peter Regin.

Les Jokerit n'ont pas hésité à faire le grand écart sous la toise : si la quatrième ligne est toujours dominée par Marko Anttila qui dépasse les deux mètres, la priorité à la vitesse est nette sur les autres trios. L'Américain Brian O'Neill (175 cm) est toujours présent aux côtés de l'international suédois John Norman et du grand Jesse Joensuu. L'autre nouveau venu avec Manninen, l'international biélorusse Geoff Platt (176 cm), fait quant à lui équipe avec Pekka Jormakka (174 cm) et le puissant buteur danois Nicklas Jensen. Ces petits gabarits sont ainsi capables de faire circuler le palet à haute vitesse en zone offensive avec de constants changements de position. Dans le système défensif, si les bases restent en place, les Jokerit sont plus agressifs au forechecking. Ils restent donc les plus à même de perturber la domination des deux géants de la Conférence Ouest.

 

La principale recrue du Dynamo Moscou a 81 ans. Valeri Shantsev a connu la période faste des bleu et blanc à partir de l'effondrement de l'URSS, d'abord comme directeur commercial du club puis comme vice-maire de Moscou. Cet âge d'or s'est arrêté lors du titre 2005... au moment exact où Shantsev est parti pour devenir gouverneur de la région de Nijni Novgorod. Depuis, le Dynamo a enchaîné les crises structurelles. Nommé directeur général en avril, Shantsev est donc apparu comme l'homme providentiel. Il a arrêté la politique et ne vient pas avec une manne financière, simplement avec une voix écoutée et une capacité reconnue de prise de décision. Tout n'est pas affaire d'argent : le Dynamo avait le quatrième budget de l'ouest l'an passé, cela ne l'a pas empêché de finir neuvième et donc de rater les play-offs.

Mais cette fois, il a pu se mettre au travail très tôt et récolter deux des meilleurs joueurs sur le marché. Vadim Shipachyov s'est totalement planté sur son choix de carrière en rejoignant Vegas (ville où il est " impossible de vivre " selon lui) sans connaître les subtilités contractuelles NHL, au lieu de rester ou de suivre son partenaire habituel Dadonov en Floride. " Il rêvait d'une ville étrangère / Une ville de filles et de jeux. [...] Il a dit "Je retourne en arrière" / Il s'est brûlé les yeux "... Shipachyov, qui ne sait pas que Francis Cabrel avait prédit son destin il y a 30 ans (!), reste un des meilleurs centres russes, capables de passes géniales. Formé également à Cherepovets, l'ailier gauche Dmitri Kagarlitsky est lui aussi un joueur capable de faire la différence par son talent.

L'arrivée de ces deux vedettes a engendré des attentes considérables. Le Dynamo a vendu 2000 abonnements, deux fois plus que l'an passé. Mais deux joueurs, même sur-utilisés par un entraîneur (Vladimir Vorobiev) sentant l'épée pendre au-dessus de sa tête, ne suffisent pas à faire une équipe. Le Dynamo a aussi fait revenir deux joueurs formés au club, Maksim Afinogenov, encore un des plus en forme à 37 ans selon les tests physiques de pré-saison, et le défenseur Andrei Mironov, mais ce dernier s'est malheureusement blessé au bras.

 

Maintenant qu'il est revenu en play-offs, le Spartak Moscou aimerait se positionner en outsider crédible. Il en a les moyens. Il a gardé ses joueurs-clés et s'est bien renforcé pendant l'été, sur tous les secteurs. La défense a gagné en robustesse et en expérience avec Maksim Goncharov et Andrei Kuteikin.

Quatre nouveaux joueurs ont pris place dans le top-6 offensif. Le Tchèque Robin Hanzl, qui a passé la phase d'apprentissage de la KHL à Nijnekamsk, accompagne sur un nouveau trio étranger les internationaux lettons Martins Karsums et Kaspars Daugavins. Le centre russe Ilya Zubov est venu pour sa part compléter et encadrer les jeunes stars locales Aleksandr Khokhlachev et Vyacheslav Leshchenko.

Les Moscovites ont aussi de la profondeur de banc. Même dans les cages, Nikita Bespalov, qui avait pris le dessus sur un Svensson que l'on contraignait à jouer contre-nature, a comme toujours durant sa carrière hérité d'un nouveau concurrent étranger, l'international Julius Hudacek, toujours aussi showman et qui a par exemple enfilé le masque de la mascotte du club, un soldat spartiate, pour célébrer dans sa position favorite assis sur la cage.

Le Spartak a besoin de connaître une bonne saison pour faciliter ses démarches logistiques à moyen terme. Le puissant CSKA a emménagé dans la même patinoire au Parc des légendes, ce qui a compliqué le calendrier déjà publié car il faut deux jours d'intervalle pour re-décorer la glace et les bandes selon le club qui joue à domicile. Mais surtout, le CSKA a cinq ans de contrat alors que le bail du Spartak arrive à expiration l'an prochain : la colocation entre rivaux, déjà dénoncée par les "ultras" du CSKA, risque de ne pas durer, et c'est le Spartak, dont la patinoire Sokolniki est une antiquité, qui devrait alors chercher une autre solution.

 

Début mars, le capitaine Dmitri Kagarlitsky rasait la tête de son entraîneur Aleksandr Gulyavtsev qui avait tenu son pari franchement pas évident : qualifier le Severstal Cherepovets en play-offs. Une consécration obtenue par un formidable esprit d'équipe. Le club est allé au maximum de ses possibilités pour retenir Kagarlitsky, mais il a choisi le Dynamo. Les plus virulents l'ont qualifié de traître, mais ce joueur formé au club, qui a hésité, a fait son choix en conscience et a déjà rendu de fiers services à sa ville natale. Le Severstal n'a en revanche pas essayé de retenir Pavel Chernov, car il jugeait que le centre serait moins efficace sans Kagarlitsky et n'en valait pas le prix.

Chaque rouble est pesé à Cherepovets. Le recrutement est soigneusement pesé. Quand un joueur n'est pas très gourmand, comme le défenseur-bombardier de 35 ans Denis Kulyash, la porte lui est vite ouverte. Quand ses exigences dépassent le budget, comme Nikolaï Lemtyugov après l'avoir accueilli à l'essai en pré-saison après sa convalescence (rate perforée et passage en soins intensifs en octobre dernier), on ne peut accéder à ses demandes. Les étrangers sont forcément parmi les moins chers de KHL. Carter Ashton revient ainsi d'une longue blessure. Dominik Furch reste sur une dernière saison en demi-teinte à Omsk, et c'est ce qui le rendait abordable. Le Tchèque, qui parle russe et connaît la ligue, a été jugé plus sûr qu'une recrue prise en Liiga ou en Extraliga.

La survie reste l'enjeu. La compagnie sidérurgique Severstal avait voté son dernier financement pour 3 ans, et on atteint la dernière année. Malgré tous les efforts accomplis, la ville industrielle reste si peu "sexy" qu'on a l'impression que la KHL s'en débarrassera facilement pour des projets d'expansion à l'ouest, même si ceux-ci semblent aujourd'hui peu avancés quand on voit l'empressement de la ligue à communiquer sur une hypothèse Paris très prématurée et embryonnaire. Dans tous les cas, la réduction à 24 équipes est annoncée dans un an, et la méthode de notation est si opaque et inconnue dans l'obscur classement "multi-critères" de la KHL que le Severstal sait qu'être mal classé est s'exposer à une mise à la porte. Ce serait dommage pour une ville qui continue de produire de bons joueurs : le plus récent est le défenseur de 21 ans Vadim Kudako, même si sa compréhension du jeu n'est pas encore au niveau de ses bases techniques.

 

Que reste-t-il au Dinamo Riga si tous les meilleurs joueurs lettons sont à Moscou ? Daugavins et Karsums sont donc au Spartak, et le capitaine et meilleur marqueur Miks Indrasis est parti cet été au Dynamo Moscou. Il sera remplacé par le Suédois Linus Videll, qui avait été le meilleur marqueur de l'équipe en 2014/15 et fait son retour.

Même la découverte de la saison passée, Janis Kalnins, a filé chez les Jokerit avec le risque de n'y être que second gardien dans l'ombre de Zapolski. C'est peut-être la grande chance pour son successeur Kristers Gudlevskis. S'il paraissait le gardien d'avenir de l'équipe de Lettonie il y a quelques années, il a longtemps été frustré en AHL. Il n'a presque jamais eu sa chance en NHL malgré de bonnes statistiques lors de ses rares apparitions épisodiques (trois en saison régulière et deux en play-offs). Pendant ce temps, d'autres lui sont passés devant et le plus jeune Merzlikins s'est imposé en numéro 1 dans la hiérarchie nationale des gardiens. En jouant dans la capitale lettone Riga, il sera à l'endroit idéal pour marquer les esprits et ne pas se faire oublier.

De plus en plus largué au classement chaque année, le Dinamo Riga a besoin de garder son public : il reste un club d'économie "occidentale", qui tire quand même une bonne partie de son budget de ses ressources propres. Les renforts étrangers doivent donc plaire au public, et de ce point de vue le recrutement semble intéressant avec deux petits gabarits de 175 cm qui ont ce petit quelque chose en plus. Le défenseur offensif Matthew Maione a été élu "joueur le plus spectaculaire" de la Liiga finlandaise, et Kevin Clark est un joueur plein d'émotion avec un sens du but notoire.

 

 

Division Tarasov (Conférence Ouest)

 

Le CSKA Moscou, était le club européen avec la plus grande dichotomie entre ses affluences, déplorables, et son niveau sportif. Il a donc décidé de quitter sa patinoire obsolète pour emménager dans la plus belle enceinte sportive de Moscou : le palais de glace VTB du Parc des légendes, qu'il a fait rebaptiser "CSKA Arena" en signant un contrat de cinq ans.

Problème : les supporters ont annoncé le boycott des matchs, reprochant aux dirigeants de ne pas avoir choisi le Megasport de capacité équivalente (12 000 places) - où jouent déjà les basketteurs du CSKA - et d'avoir déménagé à l'autre bout de Moscou, loin du quartier historique du club. Néanmoins, ce groupe de supporters, qui n'assiste pas à chaque match et préfère souvent le football, n'est pas nécessairement représentatif de tout le public potentiel. Pour gagner la bataille de la communication, le CSKA sait qu'il doit remplir au mieux sa salle, deux fois plus grande que la précédente qui sonnait creux... Surprise : elle était pleine dès le premier match. Le sponsor majeur du club (la compagnie pétrolière Rosneft) s'est apparemment chargé d'acheter et surtout de bien distribuer les billets.

L'entraîneur Igor Nikitin s'est vu maintenir la confiance, mais avec de nouveaux adjoints. Sa rigidité a toutefois causé quelques départs. Alors que le club se présentait l'an passé comme agissant dans l'intérêt de l'équipe nationale en retenant les internationaux au pays par de beaux contrats, il a fait fuir deux joueurs outre-Atlantique cet été. Le défenseur Igor Ozhiganov, frustré d'être critiqué dans un rôle qui n'avait jamais été le sien (les phases d'infériorité numérique), a été jeté dans les bras de Toronto. Le cas de Sergei Shumakov est plus délicat : il a été suspendu lors des derniers play-offs pour violation du régime (bruits d'orgie dans sa chambre d'hôtel en déplacement...). Le club était prêt à lui pardonner, mais c'est lui qui s'est proclamé en grève en exigeant d'être échangé. Or, le CSKA l'avait acheté si cher qu'un tel échange devenait impossible... Il a été accueilli à Washington (il est de la même génération 1992 du Traktor Chelyabinsk que son ami d'enfance Kuznetsov).

Ultime sujet de controverse dans une intersaison qui n'en a pas manqué : l'échange du meilleur espoir du club Andrei Kuzmenko, qui avait refusé de signer une prolongation de quatre ans, au grand rival pour le titre, le SKA Saint-Pétersbourg, en retour de Sergei Kalinin. Cet attaquant défensif est mieux payé et n'a pas le même talent, il remplace en fait poste pour poste un joueur qui faisait le boulot, Roman Lyubimov, qui a alors été envoyé en équipe-ferme en août avant une rapide rupture par consentement mutuel. C'est donc un trio légèrement modifié, Telegin-Andronov-Kalinin, qui foule la glace en premier avec toujours la même mission de neutraliser les meilleures lignes adverses.

Mais pour ce qui est des rôles offensifs proprement dits, le CSKA a quand même perdu 4 de ses 6 meilleurs marqueurs à l'intersaison (il faut ajouter Nichushkin et Petrov à Kuzmenko et Shumakov) pour seulement deux arrivées de NHL, Anton Slepyshev et l'international danois Jannik Hansen, ce dernier entrant de plus dans le quota d'étrangers. Mais au vu du sureffectif du CSKA, ce n'est peut-être pas plus mal. La concurrence reste forte, mais pas excessive en obligeant à faire tourner tout le monde. Un trio majeur Kaprizov-Vey-Grigorenko peut ainsi se former.

 

Depuis l'accident d'avion qui a coûté la vie à toute l'équipe du Lokomotiv Yaroslavl en 2010, le 7 septembre était un jour sans match en KHL, en hommage aux disparus. Au printemps, le conseil d'administration de la ligue russe a évoqué la fin de cette tradition respectueuse : dans un calendrier densifié pour passer de 60 (exceptionnellement 56 pendant la saison olympique) à 62 parties, le moindre jour compte ! Le deuil sacrifié sur l'autel du profit économique (ou plutôt de la moindre perte car les clubs de KHL ne se rentabilisent pas du tout par les recettes au guichet) ?

Pour éviter l'image désastreuse que cette décision aurait pu donner, la KHL s'est efforcée de placer cette journée sous le signe de la mémoire. Chaque club à domicile devait mettre en place un secteur du souvenir dans les tribunes avec 44 écharpes placées sur 44 sièges, une par victime du crash aérien. Les équipes se présentaient avec des brassards de deuil et les supporters pouvaient déposer des fleurs dans une zone réservée à cet effet dans les patinoires. La KHL a même pris soin de préciser que la réunion du Conseil d'Administration programmée ce même 7 septembre a commencé par une minute de silence. Message bien marqué : personne n'a oublié les disparus du Lokomotiv.

Le Lokomotiv, par contre, s'oublie parfois dans certains choix curieux. Le recrutement de David Desharnais aurait pu être un des plus beaux transferts de l'intersaison, il fut le plus ridicule. L'entraîneur Dmitri Kvartalnov n'avait pas vraiment été consulté sur ses besoins : il voulait un ailier et il a obtenu un joueur qui évolue uniquement au centre depuis 7 ans en NHL, et qui n'a jamais prétendu être polyvalent. Les tentatives obstinées de tester Desharnais à l'aile - alors qu'il devait déjà s'adapter à une surface de glace différente sans devoir en plus changer de position - ont conduit Kvartalnov à laisser sa précieuse recrue sur le banc. Le club s'est donc séparé de Desharnais, ce qui implique selon le règlement de la KHL de lui verser un quart de son contrat en dédommagement. Erreur de casting chèrement payée... Le Canadien a été recasé à l'Avangard où, avec un autre indésirable à Yaroslavl (Maxime Talbot après deux ans au Loko), il formera une petite colonie francophone avec l'entraîneur Bob Hartley.

Desharnais a été remplacé par... Brandon Kozun, dont le club avait essayé de se débarrasser tout l'été et qui n'avait pas repris l'entraînement ! Le voilà revenu en grâce alors que Kvartalnov n'avait guère apprécié son jeu la saison passée. Il figure à l'aile droite de la première ligne, aux côtés du pur centre finlandais Petri Kontiola. Et à l'aile gauche ? Un centre reconverti, Andrei Loktionov ! On comprend mieux le caractère superflu du recrutement de Desharnais...

 

Après la relégation du Bélarus en division I mondiale, on craignait le pire pour le Dinamo Minsk. Quelques mots assassins sous la moustache du Président de la République, et il pouvait se faire interdire d'aligner des joueurs étrangers, ce qui l'aurait envoyé au casse-pipe au vu du niveau actuel des joueurs biélorusses.

On se fait parfois un sang d'encre pour rien. Bien sûr, le Dynamo a commencé par rapatrier des joueurs biélorusses "à la maison" : les inévitables frères Kostitsyn, qui sont plus jeunes que ce que leur visage couperosé laisse transparaître (33 et 31 ans) et deux défenseurs qui jouaient en AHL, le bon patineur Kirill Gotovtsev et le lourd géant Oleg Yevenko. On classerait toutefois un seul de ces quatre joueurs comme vraiment utile pour redresser l'équipe nationale...

Mais le club a aussi pu recruter des étrangers. Il aurait été dommage qu'il ne puisse pas le faire car il s'y prend plutôt bien ! Le Dynamo a tissé de bons réseaux en Amérique du nord et fait de bonnes affaires. Si Teemu Pulkkinen a vraiment signé pour moins de 100 000 dollars par an comme on le colporte, c'est même la promo de l'année ! En fait, Minsk détient ses droits pendant encore deux ans pour l'avoir choisi à la draft KHL 2009 : oui, cette draft inutile, dépourvue de sens dans un contexte européen de formation, et depuis longtemps remisée au placard. Quand le club biélorusse annonçait le nom de Pulkkinen à l'époque, on regardait ça d'un air incrédule (voir notre article quel sens donner à la draft KHL). À l'époque, ce pur buteur était un des deux grands espoirs du hockey finlandais avec son compère Granlund, mais il n'a pas connu le même développement. Faute de se faire une place sur une des deux lignes à vocation offensive en NHL, Pulkkinen a surtout joué en AHL, ligue mineure dont il a largement fait le tour. Dès que le staff de Minsk a su qu'il voulait revenir en Europe, il s'est démené pour l'avoir.

Pour le reste (faut-il y voir une prochaine vague de naturalisations ?), le Dynamo a recruté trois joueurs russes, dont Denis Kazionov, ailier énergique et talentueux mais à qui on a souvent reproché de ne pas suivre le système de jeu. De fait, les frontières entre hockeyeurs russes et biélorusses sont tombées cet été : le 23 août, le Ministère russe des Sports a annoncé que plus aucune restriction sur les sportifs biélorusses ne pourrait s'appliquer dans les championnats russes dans tous les sports collectifs. Le hockey sur glace a dû s'exécuter comme les autres.

Ce décret est venu trop tard pour influer sur la saison en cours, mais ce n'est théoriquement pas une bonne nouvelle pour le Dynamo Minsk, puisque les clubs russes pourront le piller (risque toutefois limité car la valeur de marché actuelle des joueurs biélorusses est assez basse). Par contre, c'est une excellente nouvelle pour l'équipe nationale : les joueurs qui ont renoncé à la nationalité l'an passé pour leurs carrières dans des clubs russes redeviennent sélectionnables. Au lieu de taper sur ses dirigeants de club, Lukashenko, suivant la nouvelle image de négociateur qu'il voudrait coller à la place de celle de dictateur, semble avoir réagi plus utilement en usant de son influence diplomatique...

 

Et de trois Français en KHL ! Après Stéphane Da Costa et Charles Bertrand, Yohann Auvitu a signé à son tour en KHL. Pas une surprise au vu des conclusions tirées de son expérience en NHL (voir citations de l'été), et parce que sa femme, rencontrée en Finlande en université, est russe (de Kaluga au sud-ouest de Moscou). Il a donc souvent visité le pays et connaît des rudiments oraux et écrits de la langue. On peut donc être sûr qu'il s'adaptera sans mal.

Le vrai enjeu pour Auvitu est le temps qu'il mettra à revenir au meilleur de sa forme après avoir dû subir une opération des adducteurs cet été. Il a signé un contrat de deux ans avec le HK Sotchi et espère ainsi pouvoir s'inscrire dans le long terme, d'autant que son entraîneur Sergei Zubov, ancien grand défenseur offensif de KHL, aura forcément des choses à lui apprendre. Sotchi a un seul autre nouvel étranger, le centre suédois Robert Rosén, car les trois autres étaient déjà présents l'an passé : le défenseur finlandais Jyrki Jokipakka et les attaquants canadiens Eric O'Dell et Sean Collins.

Continuité, certes, mais douceur de vivre sur les bords de la Mer Noire, quand même pas. Sotchi, club tangent pour les play-offs qui s'est qualifié trois fois en quatre ans d'existence, souvent de justesse, aura forcément la pression. Il lui faut aussi gérer la perte de celui qui était devenu son joueur-symbole en se présentant en costume de Superman au All-Star Game, Pavel Padakin. Zubov s'est séparé sans regret de cette figure médiatique, car il considère que Padakin pensait plus à ses stats personnelles qu'à l'équipe. Le joueur est plus à plaindre que son club de cette séparation car il aura bien du mal à se faire une place dans le système rigoureux de Bilyaeltdinov à Kazan. Ce ne sera pas le premier joueur porté disparu en quittant l'environnement favorable de Sotchi. Il a été remplacé par Aleksandr Polunin, jeune joueur de 21 ans qui a éclos en KHL à Yaroslavl.

 

Le Vityaz Podolsk a perdu son capitaine Aleksei Semyonov et son leader offensif Maksim Afinogenov. Souvent, les équipes s'efforcent de confier le "C" à des piliers de vestiaires de longue date. Pas ici. L'attaquant défensif Denis Kokarev, joueur-clé des titres du Dynamo Moscou en 2012 et 2013, a été recruté et immédiatement nommé capitaine. Il sera chargé de mener la troisième ligne.

Plus étonnant encore, l'identité du premier assistant-capitaine : Aleksandr Syomin, ancienne star de NHL au très grand talent naturel, revenu discrètement en KHL après une saison au niveau inférieur dans sa ville natale Krasnoïarsk. Il a une grande carrière en NHL comme en équipe de Russie, dont il pourra faire partager l'expérience, mais n'a pas vraiment la réputation d'un joueur qui tire un collectif... L'autre "A" est Miro Aaltonen, de retour après une année en AHL où il est devenu champion avec les Toronto Marlies mais sans atteindre objectif de jouer en NHL. Lui a au moins déjà connu le club, en 2016/17, l'année où il avait atteint les play-offs. Syomin et Aaltonen animent une ligne offensive talentueuse avec le joyau du hockey croate Borna Rendulic, arrivé en octobre 2017.

L'international tchèque Vojtech Mozik reste le pilier de la défense. Le gardien finlandais Joni Ortio aura forcément un rôle important. Enfin, le cinquième étranger sera l'attaquant slovaque Marek Hrivik, après neuf années non totalement abouties en Amérique du nord : une Coupe Memorial dès sa première année junior, des stats sans cesse en hausse en AHL, mais seulement 24 matches de NHL au compteur. Son objectif sera de regagner sa place en équipe nationale de Slovaquie après une apparition peu concluante en 2014 : c'est le moment idéal pour se faire connaître au pays, l'année du Mondial à domicile.

 

Ce lien avec l'équipe de Slovaquie, ce sera aussi l'enjeu majeur pour Vladimir Országh. Celui qu'on présente comme le meilleur entraîneur slovaque, coach du champion Banska Bystrica et adjoint de la sélection nationale, est réputé pour son travail pour faire progresser les jeunes talents : rétablira-t-il les ponts coupés entre le Slovan Bratislava et la fédération ?

Sa nomination est venue conclure un long feuilleton. Le directeur général arrivé l'an passé, Patrik Zeman, est en effet entré en conflit avec le directeur sportif Oldrich Štefl. Il a demandé à celui-ci de démissionner et annoncé publiquement que le nouvel entraîneur serait le Biélorusse Eduard Zankovets. Le conflit hiérarchique s'est réglé au sommet avec le président du club Juraj Široký, ex-président de la fédération qui reste une figure politique puissante et souvent honnie. C'est finalement Zeman qui a démissionné, et Štefl a alors nommé Országh.

Au-delà des problèmes de personnes, la situation du club était désastreuse : des salaires impayés et 700 000 euros de loyers en retard à la municipalité. Le Slovan a obtenu sa licence grâce à l'arrivée d'un sponsor international, Mastercard, en promettant de rembourser ses dettes. La KHL, qui cherche l'expansion internationale en dehors d'une Russie financièrement asphyxiée, l'aidé en délocalisant deux rencontres lucratives de saison régulière à Vienne, dans la riche Autriche, fin octobre face aux deux plus grands clubs russes (CSKA et SKA). Une plate-forme idéale pour les sponsors et les médias.

Cette vitrine est d'autant plus nécessaire que le club a perdu 15% de ses abonnés. Il a mis en place un système de pré-vente, puisque les billets seront renchéris d'un à deux euros deux jours avant le match, et espère reconquérir les spectateurs manquants par de meilleurs résultats sportifs. L'équipe en a les moyens car elle a été renforcée. La valeur montante du hockey slovaque, Marek Ciliak, gardien double champion de République tchèque avec Brno, est venu faire concurrence à Jakub Stepanek.

Promu capitaine, Tomas Sersen accueille à ses côtés Éric Gélinas, défenseur au lancer puissant qui a passé trois saisons NHL chez les New Jersey Devils. Toujours emmenée par l'international tchèque Michal Repik, l'attaque s'est structurée autour de trois centres nord-américains qui connaissent la KHL, Chad Rau et deux "revenants" déjà présents en 2016/17 quand le Slovan était relativement compétitif, Jeff Taffe et Kyle Chipchura.

 

 

Division Kharlamov (Conférence Est)

 

Champion en titre, l'Ak Bars Kazan figure forcément parmi les favoris à sa propre succession. Il ne bénéficiera certes plus de l'effet de surprise, mais a déjà fait ses preuves. L'entraîneur Zinetula Bilyaletdinov a un système rodé, et après avoir été très critiqué quand il était sélectionneur, il semble bien à ce qu'on lui attribue toute la paternité du succès. Les interviews accordées par l'entraîneur finlandais des gardiens Ari Moisanen après la victoire ont-elles été trop nombreuses pour le goût russe de la centralisation du pouvoir ? En tout cas, le club s'est séparé de lui, et le peu disert Bilyaletdinov a eu cette rare phrase cinglante : " Les étrangers aiment prendre notre bonbon, l'emballer dans un papier et dire qu'ils l'ont fait. "

Le "bonbon" en question, c'est Emil Garipov, meilleur gardien des play-offs avec des statistiques jamais vues en KHL. Le portier tatar a reconnu que Moisanen l'a fait progresser dans l'analyse du jeu et des adversaires, tout le travail préalable aux arrêts qui ne constituent que la dernière étape du rôle d'un gardien. Et le Finlandais n'a été viré qu'après la prolongation de contrat de Garipov, qui n'est toutefois pas du genre à faire de vagues ou à s'en plaindre publiquement. Ce qu'il a appris ne pourra pas en tout cas pas être désappris...

Deux défenseurs majeurs sont aussi partis. Atte Ohtamaa a été remplacé par le Canadien Paul Postma, un grand gabarit utilisé dans un rôle secondaire en NHL, mais qui patine bien et avait démontré son impact offensif en junior et en AHL. Bilyaletdinov voulait conserver Vassili Tokranov à tout prix, mais le SKA a joué la surenchère en doublant à la fois la durée de contrat (4 ans) et le salaire proposés par Kazan. Ak Bars devra se rabattre sur Andrei Pedan, né en Lituanie mais formé aux Krylia Sovietov de Moscou. Parti à 17 ans au Canada, il revient huit ans plus tard en n'ayant joué que 13 matches en NHL... en partie comme "attaquant bouche-trou" à Vancouver.

Avec un leader menacé par l'âge (Andrei Markov atteindra la barre symbolique des 40 ans en décembre), la défense de Kazan paraît donc individuellement moins forte. Mais la force des Tatars résidait dans l'équilibre de l'effectif, où tout le monde dépend. La troisième ligne offensive Lukoyanov-Burmistrov-Potapov s'est spécialisée la saison passée dans un rôle de neutralisation des trios adverses, donnant plus d'espace à un top-6 talentueux (Sekac-Malykhin-Azevedo et Zaripov-Tkachyov-Galiev). En se permettant d'avoir en quatrième ligne l'ancien joueur de NHL Rob Klinkhammer, Ak Bars garde une belle profondeur en attaque.

 

Dans une KHL où les contrats sont plutôt en baisse, le Metallurg Magnitogorsk a beaucoup dépensé cet été, mais il n'aime guère qu'on lui fasse remarquer. Les trois quarts du budget du club viennent des deniers de Viktor Rashnikov, le patron du combinat métallurgique, et s'il y a une règle d'or au pied de l'Oural, c'est qu'il fait ce qu'il veut de son argent. En l'occurrence, après la prolongation de contrat de Sergei Mozyakin, des ponts d'or ont été offerts à deux joueurs formés au club qui reviennent de NHL : Viktor Antipin, qui avait manqué en défense l'an passé, et Nikolai Kulyomin.

L'ennui, c'est que Kulyomin a 31 ans et sort d'une saison presque blanche à cause d'une blessure à l'épaule. En NHL, il a mis sous le boisseau son talent pour devenir peu à peu un spécialiste de l'infériorité numérique et du travail défensif. Il avait envie d'ouvrir une nouvelle page en retrouvant un rôle offensif, qu'il avait tenu à merveille lors du dernier lock-out en 2012, sur un trio avec Mozyakin et Malkin. Le problème, c'est qu'il n'y a évidemment plus Malkin, ni même Jan Kovar, le centre numéro 1 des dernières saisons, parti tenter sa chance en NHL.

Il n'est pas évident de trouver un centre capable de faire briller le buteur Mozyakin. Les Canadiens n'ont pas la même culture et l'entente avec Matt Ellison avait déjà été tentée l'an passé sans trop de résultat. Reste Dennis Rasmussen, qui a certes des qualités techniques, mais qui les a rarement exprimées à un tel niveau. C'est une sacrée pression pour le Suédois, tout comme pour l'autre recrue étrangère Iiro Pakarinen, utilisé comme joueur d'énergie en NHL. Dans un club comme Magnitogorsk, les étrangers doivent être des leaders, mais ils ont souvent eu des missions défensives (comme la dernière recrue importante, l'international russe Roman Lyubimov). Le top-6 n'est pas évident à construire, et la pression va fatalement se reporter sur le nouvel entraîneur, le désormais ex-sélectionneur tchèque Josef Jandac.

Un étranger a un peu moins de pression : Maksim Matushkin. Et pour cause, ce fils d'un ancien international biélorusse (Igor Matushkin), même s'il a été formé en Suède et a la nationalité de ce pays, va être enregistré comme russe. Le club a préparé tous les papiers avec la fédération, qui s'en est assurée auprès du ministère. Comme il n'a pas représenté d'autre pays, il rentrera dans le champ des "sélectionnables", même s'il faudrait passer deux années complètes dans le championnat russe pour qu'il puisse vraiment l'être selon les règlements internationaux. Le Metallurg a préparé son coup depuis un an en suivant ce joueur, qui arrive avec le statut de meilleur marqueur des défenseurs en Liiga finlandaise. Mais en Suède, c'était un joueur de second plan qui n'avait presque pas joué en élite... On verra sur pièce ce que Magnitka a vraiment sorti de son chapeau.

Ce qui est certain en tout cas, c'est que Magnitogorsk continue de former de bons jeunes, et qu'ils auront leur chance. Yuri Platonov, 18 ans, débute ainsi... dans le même vestiaire que son père - précoce - Denis, 36 ans. Le duo père-fils, aligné côte-à-côte sur la même ligne en pré-saison, peut être une des belles histoires de la saison de KHL ! Et ce n'est peut-être pas le dernier tandem filial car on annonce que Mozyakin junior (17 ans) est lui-même très talentueux...

 

Dans une KHL où les budgets sont plutôt en repli et où la crise économique en Russe ne permet guère plus de folies, l'Avtomobilist Ekaterinbourg fait figure d'exception. Le club de l'Oural a un budget en hausse et des ambitions à l'avenant. Après le retour de Nikita Tryamkin, devenu pilier défensif et capitaine, la Russie s'attendait donc à ce que le plus grand hockeyeur jamais formé à Ekaterinbourg vienne y finir sa carrière avec une reconversion dans l'encadrement de l'équipe. Mais non, Pavel Datsyuk, puisque c'est de lui qu'il s'agit, est toujours au SKA...

La politique de retour n'a donc pas concerné un joueur local, mais... un entraîneur formé au club, qui est aussi un ancien joueur de l'époque soviétique. Alors simple adjoint, Andrei Martyemanov avait eu sa première expérience d'entraîneur en chef à l'automne 2011 en prenant en mais une équipe de l'Avtomobilist totalement désargentée, qui avait fini dernière de la Conférence Est. Les finances du club ont fait du chemin depuis, et Martyemanov aussi. Il revient dans sa ville natale après avoir marqué les esprits la saison passée à Khabarovsk par son système de jeu agressif. Contrairement à son prédécesseur Krikunov, c'est quelqu'un qui communique bien avec les hockeyeurs étrangers, même si c'est via un traducteur.

Cela tombe bien car l'Avtomobilist s'est surtout renforcé avec trois étrangers de premier plan, qui connaissent très bien la KHL et y ont été très performants. Nigel Dawes et Stéphane Da Costa arrivent pour former avec le petit buteur maison Anatoli Golyshev un trio de très grande valeur technique, capable de mettre le feu dans les défenses. Dan Sexton, qui tournait à presque un point par match à Nijnekamsk depuis quatre ans, est aligné pour sa part aux côtés de Francis Paré. Vu que le trio Krikunov-Kucheryavenko-Chesalin a déjà fait ses preuves, l'attaque d'Ekaterinbourg, qui était déjà la meilleure à l'est, devient redoutable. Et comme le gardien tchèque Jakub Kovar est toujours présent dans les cages, on ne comprendrait pas que l'Avtomobilist ne passe pas au moins un tour de play-offs, ce qu'elle n'a encore jamais fait. Elle doit normalement viser bien plus haut.

 

Finaliste de la Conférence Est l'an passé, le Traktor Chelyabinsk risque d'avoir du mal à répéter cette performance car son effectif semble un peu affaibli. Maintenant que Pavel Francouz n'est plus là, le gardien local Vassili Demchenko devra enfin régler ses problèmes de constance, et apprendre aussi à plus parler à ses défenseurs. Sinon, son nouveau concurrent Aleksandr Sudnitsin, plus affirmé et solide mentalement, peut constituer une alternative sérieuse. Nick Bailen se retrouve bien seul comme défenseur offensif (y compris après le départ d'Ivan Vishnevsky vers l'Avtomobilist), et le Traktor aura donc besoin que le vétéran Nikita Nikitin (32 ans) se prenne à rêver qu'il revit sa grande année 2012, quand il avait marqué 32 points en 54 parties avec Columbus et été champion du monde avec la Russie.

Si cette base arrière se voit demander plus d'activité, c'est aussi parce que le système de jeu va changer. Anuar Gatiyatullin (désormais adjoint de Vorobiev au SKA) avait mis en place un système très compact en zone neutre et dans sa zone, qui ne laissait que des tirs extérieurs, ce qui expliquait le pourcentage de réussite élevé des gardiens. Le nouveau coach German Titov, lui, ne veut en aucun cas subir le jeu : ses joueurs ont pour consignes d'être plus actifs sans palet, de sortir rapidement de leur zone défensive, et - si jamais ils s'y font presser et coincer - de partir au banc un à un pour changer pendant que les quatre autres font bloc.

Titov a aussi recommandé Ryan Stoa, qu'il avait déjà eu sous ses ordres au Spartak et auparavant à Novokuznetsk. Il y avait alors aidé à révéler le jeune prodige Kirill Kaprizov. L'Américain doit désormais tenir le même rôle auprès d'un autre espoir du hockey russe, Vitali Kravtsov, privé de son mentor de l'an passé Kruchinin (parti au SKA). Techniquement doué avec un patinage grandiose, Kravtsov doit encore travailler sa puissance et gagner en métier, car une éclosion printanière en play-offs ne suffit pas à faire un champion. Mais avec son caractère communicant et souriant, il s'est tout de suite bien entendu avec l'Américain, d'autant qu'il parle bien anglais. Si le duo fonctionne, il pourrait soulager un peu le premier trio étranger Bergström-Szczechura-Gynge du poids de l'offensive.

 

Bouche-trou officiel de la KHL, le Torpedo Nijni Novgorod a changé une énième fois de conférence et est "passé à l'Est". Ce n'est franchement pas un cadeau, ni pour lui ni pour ses adversaires : la division Kharlamov a été amputée des deux moins bonnes équipes de la ligue (Lada et Yugra), et elles ont été remplacées par une équipe classée cinquième à l'ouest. Les six équipes de cette division ont tous fini dans les onze premiers de la KHL l'an passé ! Et elles vont donc toutes s'affronter quatre fois, au lieu de deux pour la plupart des autres adversaires, ce qui représente un petit handicap.

L'objectif officiel - accéder au deuxième tour des play-offs - paraît donc franchement irréaliste. Pour le Torpedo, il s'agira déjà de s'y qualifier. Le nouveau staff est totalement novice. Yan Golubovsky (oui, l'ancien joueur de Morzine-Avoriaz en 2011/12 !) démarre sa carrière de directeur général dans des conditions difficiles : le club a déjà eu du mal à finir de régler les salaires de la saison passée, et la potentielle meilleure recrue Jonathon Blum est repartie pendant l'été pour raisons familiales. Le Canado-Russe David Nemirovsky aborde lui une première expérience de coach en prenant la difficile succession de Peteris Skudra qui avait marqué l'équipe de son empreinte (mais qui est actuellement sans emploi parce que sa non-reconduction lui a été signifiée tardivement et parce que son caractère fait peur).

C'est plus ce contexte qui inquiète, car l'effectif garde quand même du potentiel. Le gardien Stanislav Galimov est toujours là et la défense a conservé ses cadres autour de Denis Barantsev. Le retour de l'ailier formé du club Mikhaïl Varnakov, cinq ans après son départ, apporte un ancrage d'expérience. Il complète bien le premier trio avec Vladimir Galuzin - qui n'a jamais quitté le club - et le toujours redoutable Denis Parshin.

Tout dépendra de la bonne adaptation du "deuxième cinq", unité constituée entièrement d'étrangers. Le Slovène Robert Sabolic est le seul à ne pas être nouveau, et surtout le seul à connaître la KHL. Ses compagnons de ligne nord-américains Andy Miele et Andrew Calof ont été champions de Suède avec Växjö. Les défenseurs Philip Holm et Mathew Bodie arrivent pour leur part d'AHL.

 

Le Neftekhimik Nijnekamsk a perdu à l'intersaison son meneur de jeu offensif Dan Sexton et son capitaine et géant défensif Oleg Piganovich, qui ne semblent pas vraiment avoir été remplacés. Même s'il se répand moins en déclarations fracassantes (ce qui ne signifie pas qu'il n'envoie plus certains joueurs sur la glace pour d'autres actions "fracassantes"...), on peut au moins reconnaître à Andrei Nazarov qu'il sait donner sa chance aux talents locaux, partout où il passe. Il a commencé le championnat avec un premier trio entièrement formé au club : le nouveau capitaine Emil Galimov, le plus inattendu Pavel Kulikov (plus habitué à la quatrième ligne) et même un junior de 18 ans, Bulat Shafigullin.

L'international tchèque Ondrej Nestrasil, absent en ce début de saison, viendra sans doute prendre place sur le premier trio dans un second temps. Pendant ce temps, on laisse le trio finlandais Joonas Nättinen - Mikael Ruohomaa - Juusi Puustinen prendre ses marques sur la deuxième ligne et découvrir la KHL. Néanmoins, Puustinen était le meilleur buteur de la Liiga la saison dernière et il est certain qu'on va lui demander des comptes, et de l'efficacité offensive. Nazarov, qui dispose d'une escouade de travailleurs énergiques, saura alors ré-attribuer les rôles à chacun. Peut-être même les rôles douteux qui ont moins à voir avec le hockey et plus avec la boxe...

 

 

Division Chernyshev (Conférence Est)

 

Au vu du rythme effréné de consommation des entraîneurs de l'Avangard Omsk, l'annonce de son nouveau coach intriguait forcément. Les fans locaux ont patienté jusqu'à 2h30 du matin pour apprendre la nouvelle dans une émission du soir à la télévision sportive nationale, donc à l'heure moscovite. Cela valait le coup d'attendre : Bob Hartley était certainement le nom le plus prestigieux qu'il était possible de dévoiler. Il venait de tirer le maximum de l'équipe de Lettonie en l'amenant en quart de finale des championnats du monde et en y faisant suer les futurs vainqueurs suédois. Hartley a remporté des titres dans tous les championnats où il est passé, de la NHL à la LNA suisse. Il ne lui manque que la KHL, et il fallait pour cela mettre le prix. L'entraîneur canadien est dur en négociation. Il était trop cher il y a dix ans pour le Spartak lors de la première approche russe, tout comme plus récemment pour le Dinamo Riga. Hartley est la garantie d'un système efficace dans le jeu sans palet, qu'il a répliqué tel quel de la NHL sans le disperser dans la largeur de glace supplémentaire des patinoires européennes, afin de le maintenir aussi compact.

L'Avangard pouvait donner l'impression initiale d'avoir misé sur l'entraîneur plus que sur les individualités. Les dirigeants s'étaient impliqué tardivement sur le marché, y compris parce qu'il était difficile de le faire avant que le coach ne soit connu (fin mai). Comme ils avaient négocié la réduction de moitié du salaire du capitaine Evgeni Medvedev dans le cadre de sa prolongation de contrat (l'ex-international a maintenant 36 ans), il ne restait plus le moindre joueur payé plus d'un million (en dollars) dans l'effectif. La première ligne - qui se révèlera très efficace en pré-saison - ne comprenait pas de stars, "juste" l'ex-international Sergei Shirokov, le jeune Denis Zernov (22 ans, meilleur buteur du Lada) et le meilleur marqueur de l'an passé Ilya Mikheev, produit du club qui s'est totalement révélé à 23 ans.

C'est alors que la nouvelle-choc tombait au beau milieu de l'été : l'Arena Omsk, construite il y a onze ans à peine pour 150 millions de dollars, a été interdite au public en raison de fissures ! Ces défauts structurels graves ne pourront pas être réparés rapidement, et le club ne pourra donc pas y jouer de la saison. Que faire ? Retourner dans l'ancienne patinoire ? Elle n'a pas été mise en glace depuis plusieurs années et elle n'est pas dans un bien meilleur état... Pour répondre aux normes de la KHL, la seule solution "locale" en Sibérie était - à 1200 kilomètres à l'est - la patinoire toute neuve de Krasnoïarsk, construite pour les Universiades 2019. Sauf que lesdites Universiades se tiendront pendant les play-offs KHL, ce qui pose un problème insoluble. L'Avangard jouera donc la saison à Balashikha, à 2700 kilomètres à l'ouest, et à trois fuseaux horaires de différence ! Les supporters ont bien fait de s'habituer à se coucher tard lors de l'annonce de l'entraîneur, le club est maintenant à l'heure de Moscou ! Les rencontres commencent à 19h30 à Balashikha, soit à 22h30 à Omsk. L'Avangard dit qu'il essaiera d'organiser des matchs en plein air au cśur de l'hiver sibérien pour au moins se montrer un peu dans sa ville.

Très franchement, il nous venait à ce stade des sentiments compatissants envers Bob Hartley, qui paraissait embarqué dans une belle galère. Était-il bien mal tombé, pour une saison forcée de transition ? En plus, son gardien finlandais Karri Rämö se blessait gravement au genou en pré-saison contre Magnitogorsk : six mois d'arrêt ! Mais en fait, le déménagement dans la région de Moscou était peut-être un mal pour un bien, notamment vis-à-vis des joueurs étrangers que la Sibérie peut "refroidir". À dix jours du début du championnat, l'Avangard a alors fait feu de tout bois. Il avait déjà testé Kris Versteeg, ancien double vainqueur de la Coupe Stanley qui a dû subir l'an dernier une opération de la hanche. Il a ensuite occupé les deux places d'étrangers restantes en récupérant Maxime Talbot et le centre David Desharnais (28 points en NHL l'an passé, entre 48 et 60 lors de ses trois saisons complètes à Montréal), étrangement écartés par Yaroslavl. Rämö était remplacé par Aleksei Murygin, ce qui libérait un poste d'étranger supplémentaire.

Ce n'était donc pas fini. La défense prévue paraissait déjà solide et complète : Medvedev, l'offensif Maksim Chudinov, le très sûr Yegor Martynov, le solide pilier Maksim Berezin, le jeune Maksim Mineev (révélé la saison passée et sélectionné en équipe de Russie B), les retours de Nikita Pivtsakin et du vétéran Aleksei Bondarev, et l'arrivée de l'international finlandais Ville Pokka. Huit noms, alors que Hartley joue avec 13 attaquants et 7 défenseurs et non à la russe avec quatre paires d'arrières... Et là-dessus, pendant les premiers jours de la KHL, l'Avangard a ajouté Cody Franson, un grand gabarit qui a perdu sa place en NHL mais y avait de bonnes stats (y compris Corsi et stats plus précises comme les transitions), et Aleksei Emelin, qui n'a par contre jamais eu des stats avancées positives mais dont toute la Russie connaît l'impact physique. Avec ces dix joueurs de bon calibre, Hartley dispose de la meilleure défense de Conférence Est, mais devra gérer la compétition interne.

 

Pendant que l'Avangard embauchait un entraîneur-vedette, l'autre grand club de la division Chernyshev, le Salavat Yulaev Ufa, faisait l'inverse. Erkka Westerlund, amer de son renvoi et de la culture court-termiste de la KHL, a été remplacé par son adjoint Nikolaï Tsulygin. Le Finlandais se consolera - ou pas - de n'avoir pas travaillé pour rien, puisque son successeur se place naturellement dans son sillage. Il faut dire que Tsulygin n'avait aucune autre expérience préalable avec des adultes ; à sa retraite de joueur, il s'était vu confier la génération 1997 et avait gravi les catégories d'âge avec elle comme cela se pratique en Russie.

C'est bien de laisser une chance aux jeunes entraîneurs. Tsulygin a pris son rôle et la pression qui l'accompagne avec calme et discrétion, comme le défenseur qu'il était. Disposant de talents offensifs, tel Linus Omark, il pratique un hockey moderne qui change souvent la direction des attaques d'un côté à l'autre pour essayer de créer des espaces dans la défense. De plus, l'autre entraîneur-assistant finlandais Toni Lämsä est toujours là, et s'il n'a que 38 ans, il avait déjà deux ans et demi d'expérience comme entraîneur principal des Jokerit et des Pelicans en Liiga. Le staff prend donc toujours des apports du hockey russe et du hockey finlandais.

Le premier trio n'a pas changé (Omark-Kemppainen-Hartikainen) et les départs ont été compensés. Après sa médaille olympique, le gardien canadien Ben Scrivens a pris une retraite précoce à 31 ans pour devenir manager de l'équipe de l'université de Denver, mais il a été remplacé par Juha Metsola, qui a fait trois bonnes saisons à Khabarovsk. Le Salavat ressemble donc beaucoup à l'équipe de la fin de saison dernière, après les renforts des jokers Anton Burdasov et Vladimir Tkachyov... Cette équipe que Westerlund aurait voulu continué à entraîner car il voyait son potentiel !

 

Le Kunlun Red Star a fait l'actualité pour une seule raison cet été, la nomination de Wayne Gretzky comme "ambassadeur mondial" du club. Il faut voir essentiellement ce rôle comme une fonction internationale, dans la perspective des Jeux olympiques de Pékin 2022 sur lesquels place encore une fois la menace d'une non-participation de la NHL. Pour l'autre défi du Kunlun, qui est de se faire connaître sur le marché chinois, Gretzky n'a que peu d'usage car il est un inconnu en Chine. Pour vraiment capter l'attention du public, il faudrait une vedette chinoise, comme l'avait été le basketteur Yao Ming en NBA. Mais en hockey sur glace, un seul paramètre physique génétique (la taille) n'a pas une telle importance par rapport à l'apprentissage technique.

Pour l'instant, le Red Star compte toujours sur ses trois Canado-Chinois, conservés également dans l'optique des JO 2022 (Brandon Yip, Zach Yuen et Brayden Jaw). Les "vrais" Chinois formés localement sont dans la réserve de VHL, rapatriée cette saison de Mandchourie à Pékin, et qui sera donc directement sur place. L'équipe alignée en KHL reste très internationale, avec même quelques nouveautés comme deux défenseurs tchèques (le physique Ondrej Vitasek et le plus offensif Tomas Kundratek) et l'attaquant slovène Rok Ticar.

Les gardiens seront désormais russes (Aleksandr Lazushin et Ivan Nalimov). Les recrues majeures seront le défenseur offensif Marc-André Gragnani et surtout trois Finlandais, un authentique titulaire de l'équipe nationale en Veli-Matti Savinainen mais aussi le défenseur offensif Ville Lajunen et le buteur Olli Palola. L'enjeu est de réussir à former un collectif avec cet effectif cosmopolite, mais le Red Star a assez de talent pour se qualifier de nouveau pour les play-offs après une saison ratée.

 

Aucun club ne compte lâcher l'affaire, pas même le Sibir Novosibirsk qui a - comme souvent - perdu ses leaders offensifs de la saison précédente, Zackrisson et Bergström. La dernière star locale, le capitaine Sannikov, est parti au Loko. Ce sera la première saison pleine pour l'entraîneur Vladimir Yurzinov junior, celui qui avait emmené Kunlun en play-offs. Il connaît très bien la Finlande où il a reçu sa formation d'entraîneur, et il a donc orienté le recrutement vers cette piste.

Yurzinov a ainsi formé sa première ligne avec trois joueurs performants en Liiga : le capitaine de Tappara (champion 2016 et 2017) Jukka Peltola, un centre avec un excellent tir du poignet, et deux ailiers qui ont fait fureur chez le champion 2018 (Kärpät), le joueur de l'année Julius Junttila et le Français Charles Bertrand. La tâche ne sera pas facile pour ces novices en KHL, car la concurrence est plus rude que jamais à l'Est.

Le gardien Salak également parti à Yaroslavl, le Sibir a aussi rappelé le gardien Danny Taylor - qui avait fait l'intérim pendant la blessure du Tchèque il y a deux ans - après une saison passée en Amérique du nord (dont un seul match NHL pour Ottawa). Il se retrouve en concurrence avec Aleksei Krasikov qui devra confirmer la durabilité de son pourcentage d'arrêts élevé de la saison passée (93,9%).

L'intersaison a été marquée par le diagnostic de la nouvelle acquisition Samvel Mnatsyan, un défenseur russe de 28 ans. Une douleur au dos persistante l'a interpellé et conduit à des examens approfondis qui ont révélé une tumeur. Il sera soigné cette année en Allemagne, et le club a laissé entendre qu'il apporterait une aide financière et ferait le nécessaire pour collecter des fonds supplémentaires.

 

Après une saison "sacrifiée" (comme le mouton victime d'un abattage rituel lors d'un entraînement), le Barys Astana cherche à restaurer la confiance. Le nouveau président Boris Ivanishchev doit restaurer le respect entre les joueurs et les dirigeants. L'homme de confiance est désormais l'entraîneur biélorusse Andrei Skabelka, qui aura la double casquette et devra à la fois ramener l'équipe nationale du Kazakhstan dans l'élite et le club de la capitale en play-offs.

La grande surprise est le retour au jeu du capitaine Brandon Bochenski. Le hockey sur glace lui a tellement manqué qu'il s'est rendu compte combien c'était une passion et pas seulement un travail. Se sentant plus en forme que jamais, comme si ses blessures étaient oubliées, il a rechaussé les patins à 36 ans, suivant de plus loin ses investissements dans la construction immobilière. Ses habituels partenaires de ligne (Dawes et Boyd) ne sont certes plus là, mais Bochenski a vite développé une entente avec le nouveau leader offensif André Pettersson, un habitué de la KHL. Et il dit se comprendre toujours " à demi-mot " avec le défenseur offensif Kevin Dallman.

La sortie de retraite de l'Américain naturalisé pourrait donner une fausse idée du recrutement du Barys. En réalité, le club a plutôt moins de vétérans. Les deux nouveaux centres en provenance d'AHL, Curtis Valk et l'ancien capitaine de l'équipe junior canadienne Patrice Cormier, sont des joueurs plus jeunes. Le troisième centre Dmitri Grents, l'homme qui monte au Kazakhstan, n'a que 22 ans. Un jeune gardien tchèque, Dominik Hrachovina, est même arrivé en complément de Henrik Karlsson. C'est donc bien un rajeunissement qui est en cours, le même qui constitue le grand enjeu de la sélection nationale du Kazakhstan.

 

L'Amur Khabarovsk a gardé une composante essentielle, son top-4 défensif : les Tchèques Michal Jordan et Jan Kolar, le capitaine Vitali Atyushov et l'autre vétéran Maksim Kondratiev. Néanmoins, le gardien finlandais très solide depuis deux ans, Juha Metsola, a été remplacé par un Tchèque peu connu, Libor Kasik.

Quant aux deux vedettes offensives Aleksei Byvaltsev et Oleg Li, qui évolueront entre la quatrième ligne et les tribunes au SKA, elles n'ont pas vraiment été remplacées. La disparité de moyens reste énorme en KHL, et le club d'Extrême-Orient a seulement pu recruter tardivement le Sibérien Valentin Pyanov (ex-Omsk).

Rester en play-offs serait une énorme surprise, et un challenge très difficile pour le nouvel entraîneur Nikolaï Borshchevsky (qui n'avait plus eu que des postes d'adjoint depuis huit ans). L'Amur Khabarovsk devra tout de même rester compétitif pour ne pas se faire mettre à la porte de KHL comme cela a été le cas d'autres clubs russes (Lada et Yugra) cet été.

 

S'il est un club dont la pérennité semble objectivement franchement douteuse, c'est l'autre club d'Extrême-Orient, l'Admiral Vladivostok, créé de toutes pièces il y a cinq ans. Le président de la KHL a claironné au lancement de la saison que plus aucun russe n'avait de dettes de la saison passée, et que le seul qui en traînait encore était le Slovan Bratislava. Factuellement, c'est exact : l'Admiral Vladivostok aborde cette nouvelle saison sans dettes. Mais c'est parce que le club portuaire les a en grande partie jetées à la mer (du Japon) !

Les hockeyeurs de l'an passé ont dû signer un accord et renoncer à 30% des salaires impayés pour pouvoir se faire verser les 70% restants. Et ensuite, l'Admiral a changé d'entité légale. Ses finances toujours précaires expliquent que le club commencera la saison sans joueurs étrangers ; pas sûr que le bouche-à-oreille soit très favorable pour en recruter de toute façon...

Le nouvel entraîneur Sergei Svetlov a confié le capitanat à Konstantin Glazachev, qui fut un grand joueur de KHL mais a décliné. Le club a recruté des joueurs qui n'avaient plus trop le choix, soit à cause de leur âge (Sergei Konkov, 36 ans), soit parce qu'ils s'étaient retrouvés au chômage après l'exclusion de leur équipe de KHL, tels les jumeaux Streltsov de Togliatti. Cette équipe sans renfort étranger a néanmoins une qualité utile, son homogénéité..

 

Marc Branchu

 

 

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