Marseille, à jamais les premiers (des affluences)

 

La première saison de Marseille en Ligue Magnus a d'abord été celle d'une réussite populaire. Alors que les autres clubs affichent un taux de remplissage quasi-parfait mais ne peuvent pas pousser les murs de salles où ils sont souvent trop à l'étroit, les Spartiates ont tiré pleinement bénéficie de la plus grande patinoire du pays. Portées par un marketing dynamique pour se faire connaître, et un sens de la dramaturgie dans la mise en scène des rencontres, les affluences n'ont cessé de progresser.

Des spectateurs souvent habitués du Stade Vélodrome ont connu le coup de foudre pour ce sport rapide et dynamique, moins ancré dans le paysage marseillais que le football mais avec une ambiance plus familiale et tout aussi passionnée. En fin de saison, les 5500 places du POMGE ont fini par être elle aussi toutes occupées. La moyenne de spectateurs (4032) a ainsi été la meilleure du pays, de peu devant Grenoble, pour la première année. Pas mal pour le (pas si) pitchoun. Le succès a été tel que les difficultés de stationnement ont été importantes, car le tramway ne sera mis en service que dans un an. Les recettes de billetterie et de restauration ont tellement explosé que le budget prévisionnel de 1,6 million d'euros a atterri un peu au dessus de la barre des 2 millions.

Montée rapide mais redescente interdite

Les objectifs sportifs ont eux aussi été dépassés. La qualification en playoffs a été obtenue haut la main, ce qui a valu à Luc Tardif le titre d'entraîneur de l'année. Une récompense dont il avoue qu'elle lui a fait plaisir, même si ce n'est pas la finalité. L'objectif d'un compétiteur est toujours de gagner, et la défaite en quart de finale contre Bordeaux - en prolongation du match 7 - a été frustrante après avoir mené 3 victoires à 2, puis avoir mené à quatre minutes de la fin du match décisif. C'est tant mieux d'une certaine manière, car il faut bien un peu de frustration pour continuer à progresser.

C'est qu'il ne faudrait pas que les supporters soient trop comblés trop vite. Les dirigeants du club savent bien que le Marseille Hockey Club n'est pas encore assez installé pour fidéliser les spectateurs si le soufflé retombe trop vite. Le public marseillais est parfois versatile, même pour ses plus grandes amours, et le fameux OM-Forbach en D2 devant 434 péquins il y a soixante ans est entré dans la légende du football local. Le président Éric Lagache le dit sans ambages : "Si on redescend, ce sport est mort-né ici. On peut perdre, mais on ne peut pas redescendre." Une ambition qui définit son modèle budgétaire. "On a encore beaucoup de potentiel de progression, dans le ticketing ou pour mieux exploiter notre outil de restauration. On a pris un peu de risques, notre budget 2024/25 sera entre 2,3 et 2,5 millions d'euros. On ne veut pas aller trop vite, mais on veut construire vite. On assume de vouloir faire les playoffs, mais on a la modestie ancrée en nous. Dans quatre-cinq ans, on espère bien gagner quelque chose."

Si la validation de l'équipe a pris un peu de temps, ce n'est pas du fait de la SASP (la structure professionnelle) mais du club amateur. Rappelons que toute association support d'un club de Magnus est obligée de remettre un bilan validé par un commissaire aux comptes. Or, le MHCA (Marseille Hockey Club Amateur) a changé de président pendant la saison, la passation a été difficile et la transmission des documents a pris du temps. La commission nationale de gestion ne risquait pas d'accepter un dossier qu'elle n'a pas reçu. Le staff assure toutefois que ce "problème administratif" n'a pas perturbé la préparation de la saison.

Un homme-clé pour le jeu de puissance

Les Spartiates ont des certitudes, à commencer par la présence toujours calme et rassurante de Marek Čiliak, élu meilleur gardien de la ligue. Sa blessure dans les dernières minutes contre Bordeaux a marqué l'équipe, et pas seulement du fait de l'élimination. Tout le monde espère donc retrouver le Slovaque dans la même forme après son intervention chirurgicale. Le processus de retour a été respecté et tout s'est bien passé lors de son premier match contre Nice en présaison. Néanmoins, Luc Tardif n'a aucune intention de le surcharger : "Blessure ou pas, Čiliak a 35 ans. Flo [Florian Gourdin] progresse bien et on veut qu'il joue un peu plus, une dizaine ou une quinzaine de matches. Il y a une hiérarchie, Marek est numéro 1, mais on veut gérer un peu plus d'alternance."

La troisième meilleure défense de Ligue Magnus ne se résumait pas à son seul gardien. Tyler Rockwell a été le plus constant des défenseurs et Roberts Kalkis a eu les honneurs de rester assez longtemps au camp de l'équipe de Lettonie avant les championnats du monde. Mais les Spartiates ont aussi terminé avec le pire taux d'efficacité en avantage numérique de la ligue (16,5%). L'absence d'un patron à la ligne bleue que l'on avait pointée s'est faite ressentir. Ce profil-là était donc la priorité.

Champion de Norvège 2019 avec Frisk Asker, le défenseur offensif expérimenté Victor Björkung a eu le triste honneur d'être l'homme qui avait fait la dernière passe à Adam Johnson avant que le hockeyeur de Nottingham ne perde la vie dans le drame qui a bouleversé le monde entier. Traumatisé par des flashs presque quotidiens de l'accident, le Suédois a quitté les Panthers pour rentrer dans son pays. Deux mois plus tard, il a lui-même été coupé par un patin, près de l'aine, à deux centimètres seulement de son artère fémorale. Très sensible au sujet d'un équipement plus protecteur dans le hockey sur glace, Björklund devrait être ce spécialiste du powerplay qui manquait aux Spartiates, s'il parvient psychologiquement à se remettre de ce qu'il a vécu. Les retrouvailles avec son coach lors du drame (Jonathan Paredes aujourd'hui à Angers) promettent d'être émouvantes.

Les deux nouveaux arrières finlandais, qui font tous deux 1m90 ou plus, devraient avoir un rôle plus confiné à leur zone défensive. Le jeune Elias Ruusu avait joué deux rencontres en Liiga uniquement lorsque plusieurs joueurs du JYP étaient tombés malades du Covid-19. En Mestis, au deuxième niveau finlandais, il avait un temps de jeu important, essentiellement en protection, sans jamais beaucoup tirer ou mettre de points. Le bourlingueur trentenaire Markus Kojo, qui fut capitaine de l'équipe de Finlande des moins de 16 ans, va connaître son cinquième pays différent en cinq ans. Ce déménageur de 100 kg était surtout utilisé en infériorité numérique à Vsetín et s'y montrait efficace. Il est très agressif et ses nombreuses fautes sont un risque potentiel, les pénalités étaient déjà un sujet sensible pour les Spartiates la saison dernière.

Pour l'instant, ce sont surtout les adducteurs de Kojo qui posent souci. Sasha Djigaouri est toujours là en tant que septième défenseur, mais pas tout de suite prêt car malade. Les Spartiates ont donc passé la présaison à tourner à cinq hommes derrière, mais ne s'inquiètent guère pour leurs lignes arrières. Les deux joueurs recrutés à Gap sont normalement meilleurs que leurs prédécesseurs Guillaume Roussel (retourné comme prévu à Amiens) et Louis Cirgues (non reconduit). Fabien Bourgeois reste certes sur une saison ratée mais il serait anormal qu'il décline physiquement à 29 ans. Quant à Yohan Coulaud, il a surnagé avec une belle détermination dans l'année noire des Rapaces.

Deux nouveaux ailiers droits pour créer des différences

C'est en attaque que Marseille a surtout besoin de franchir un cap. Le potentiel technique de Martin Kadlec et du joker automnal David Åslin - joueur talentueux mais un peu indolent - ne s'était pas entièrement exprimé. Les buts spectaculaires de temps en temps ne suffisent pas (Åslin avait gagné concours du plus beau but trois fois en Suède). Le trio Stolyarov-Machac-Dufek avait en revanche trouvé grâce aux yeux des supporters. Le centre Patrik Machac, homme des tâches de l'ombre, semblait bien compléter la technique de Jan Dufek et le leadership de l'expérimenté Gennadi Stolyarov.

Luc Tardif a pourtant fait le choix de briser cette ligne pour passer un palier : "On voulait apporter plus d'efficacité offensive, plus d'imprévisibilité, pour créer des espaces, des différences. C'est pourquoi Stolyarov et Machac ont changé de partenaire et ont été placés avec du sang neuf : petit gabarit plein d'énergie, Joni Airo a été le meilleur buteur de Mestis en 2022/23 (30 buts) et pourrait faire des merveilles si la première expérience à l'étranger - souvent perturbante pour les hockeyeurs finlandais - se passe bien.

Airo n'est pas le seul nouvel ailier droitier. Matt Salhany, champion du Danemark 2023 avec Aalborg, est lui aussi un bon patineur, exemplaire dans les duels malgré un gabarit quelconque, et surtout un finisseur doté d'un bon tir du poignet et apte à prendre des responsabilités en avantage numérique. Il était aligné l'an passé sur un trio avec deux anciens joueurs de Ligue Magnus (Pierre-Olivier Morin et Tommy Giroux) mais devra cette fois s'adapter à un vestiaire sans aucun autre nord-américain. Son centre devrait être français avec Fabien Colotti, qui pourrait profiter d'un tel partenaire pour se rappeler à l'équipe de France.

Sauf difficulté d'intégration, pas de doute : les nouveaux étrangers de Marseille représentent un saut qualitatif par rapport à ceux qui les ont précédés, ce qui et logique avec un budget en hausse. C'est vrai aussi du profil d'attaquant défensif, dans lequel Dvorak est avantageusement remplacé par Simon Suoranta. Le Finlandais à la longue expérience (117 points en 394 matches de Liiga) a passé le mois d'août avec sa famille en accord avec le club, mais son arrivée plus tardive n'est pas trop gênante. Ce n'est pas un inconnu puisqu'il a été le joker de Rouen en 2021/22, et Luc Tardif en dresse le profil : "C'est un joueur complet, intéressant dans l'échec-avant, un gros gabarit qui peut créer des espaces, et en plus c'est un top mec."

Les recrues françaises présentent aussi quelques gages positifs. Paul Joubert avait déjà été prêté à Marseille du temps de la D1 et connaît déjà le club et le vestiaire. Flavian Dair est un ailier percutant par sa vitesse, qui pourrait compléter de manière intéressante l'expérience de Teddy Da Costa. Au capitaine de 38 ans, on souhaite avant tout une saison pleine, sans blessure, après la vilaine charge qui l'avait éloigné des glaces ave deux ligaments du genou endommagés l'hiver dernier.

Avec Paul Siraudin et le centre Maxence Leroux, Marseille a de quoi aligner une bonne quatrième ligne. La profondeur de banc s'est améliorée avec le retour de Grégoire Gonnard - le premier pur Marseillais de l'équipe Magnus que Tardif se souvient avoir entraîné à ses débuts en catégorie U9 ! - et l'arrivée de Noa Nsonsa-Kitala. Cet attaquant rapide né en Belgique est né en 2007 comme le défenseur Maurice Zwikel et ces deux joueurs devraient être des atouts pour l'équipe de France des moins de 18 ans.

Lyon-Marseille, pour une fois partenaires

Ce n'est pas en cirant le banc que ces internationaux U18 Maurice Zwikel ou Noa Nsonsa-Kitala se développeront et Marseille voulait absolument une alliance avec un partenaire de division 2. Il a été trouvé très naturellement avec Lyon car l'entraîneur des Lions, Damien Raux, est de la même génération que Luc Tardif. Il l'a connu en équipe de France, de même que le directeur sportif et assistant-coach Jonathan Zwikel. Les trois hommes collaboreront en toute confiance dans l'intérêt de ces jeunes joueurs pour qu'ils puissent évoluer dans les deux divisions.

L'effectif est manifestement plus fort, et il est légitime d'espérer que Marseille fasse mieux que l'an passé, donc une demi-finale, mais ce n'est pas si simple car les quatre grands clubs mettent la barre assez haut. Luc Tardif définit ses objectifs de manière un peu différente : "On veut se qualifier pour les play-offs, c'est une évidence. Une fois qu'on y est, tout le monde espère gagner. J'ai surtout des objectifs dans le jeu : plus de constance, plus de qualité avec le palet, tout en restant comme l'an dernier solides défensivement. Les objectifs intermédiaires sont plus importants pour moi que l'objectif final. On veut garder notre assise défensive, notre bon penalty-killing, et s'améliorer à l'offensive et en avantage numérique."

Marc Branchu

 

Effectif :

Gardiens

N°                       Naissance    cm  kg  Club formateur    Club & Chpt 2023/24  MJ   Min   Moy.     %
 1 ČILIAK Marek          02/04/1990  183  89        (Slovaque)  Marseille    FRA-1   46  2708   2,33   92,6%
33 GOURDIN Florian       11/11/2001  184  67  Gap               Marseille    FRA-1    9   383   3,61   84,5%

Défenseurs

N°                       Naissance    cm  kg  Club formateur    Club & Chpt 2023/24  MJ   B   A Pts   +/-  Pén
10 BJÖRKUNG Victor       07/04/1993  183  85         (Suédois)  Nottingham   GBR-1    7   1   2   3   +2    2'
                                                                Spisska N.V. SVK-1   25   2   8  10   -13  16'
13 ZWIKEL Maurice        09/11/2007  177  67  Rouen             Marseille    FRA-1   10   0   1   1   +1    4'
17 COULAUD Yohan         30/08/2000  180  78  Gap               Gap          FRA-1   40   7   4  11   -1   37'
26 KOJO Markus           30/03/1994  194 100      (Finlandais)  Vsetin       TCH-2   41   1   3   4   -4   80'
36 RUUSU Elias           28/07/2001  190  96      (Finlandais)  KOOVEE Tamp. FIN-2   35   1  10  11   -1   39'
65 DJIGAOURI Sasha       22/08/2002  189  90  Grenoble          Marseille    FRA-1   42   2   4   6   -15  10'
74 BOURGEOIS Fabien      06/04/1995  173  81  Morzine           Gap          FRA-1   49   1   9  10   -15  16'
82 MORILLON Colin        02/02/1997  181  73  Épinal            Marseille    FRA-1   51   3  11  14   +12  22'

Attaquants

N°                       Naissance    cm  kg  Club formateur    Club & Chpt 2023/24  MJ   B   A Pts   +/-  Pén
 5 MACHAC Patrik         23/04/1994  178  80         (Tchèque)  Marseille    FRA-1   46  10  13  23   +5   14'
11 GONNARD Grégoire      11/04/2006  181  74  Marseille         Angers 2     FRA-3   16   1   1   2        35'
12 JOUBERT Paul          14/09/2000  178  74  Saint-Pierre      Gap          FRA-1   47  11  15  26   -8   33'
15 LEROUX Maxence        09/12/1998  174  68  Dammarie          Marseille    FRA-1   50   4   5   9   -12   6'
16 COLOTTI Fabien (A)    27/08/1996  179  78  Grenoble          Marseille    FRA-1   38   8  14  22   -5    8'
21 SUORANTA Simon        21/05/1992  190  94      (Finlandais)  TuTo Turku   FIN-2   32   6  10  16   -8   33'
23 DAIR Flavian          16/05/2002  175  73  Chambéry          Grenoble     FRA-1   52   5  11  16   +5   10'
                                                                Chambéry     FRA-2    7   5   2   7    0    2'
44 DUFEK Jan             20/02/1997  183  83         (Tchèque)  Marseille    FRA-1   49  12  24  36   -1   19'
71 STOLYAROV Gennadi (A) 20/08/1986  193  91           (Russe)  Marseille    FRA-1   48  11  18  29   +4   16'
76 AIRO Joni             24/06/2000  173  73      (Finlandais)  KeuPa Keuruu FIN-2   46  22  22  44   -2   16'
77 DA COSTA Teddy (C)    17/02/1986  180  86  Dammarie-les-Lys  Marseille    FRA-1   29   6   5  11   -8   18'
91 SIRAUDIN Paul         17/02/2003  180  80  Annecy            Marseille    FRA-1   48   9   7  16   -3   39'
93 SALHANY Matthew       08/01/1993  178  81       (Américain)  Aalborg      DAN-1   54  19  23  42   +10   4'
97 NSONSA-KITALA Noa     02/05/2007  185  68  Grenoble          Vaujany/Gre. FRA-3   25  12   6  18        10'

Entraîneur : Luc Tardif junior (39 ans) assisté de Jonathan Zwikel (49 ans).

Partis : Tyler Rockwell (D, 3+20), Roberts Kalkis (D, 1+13), Guillaume Roussel (D, 2+9, Amiens), Louis Cirgues (D, 4+5, Nice), Tommy Parran (D, 2+3, arrêt), David Åslin (A, 9+16), Martin Kadlec (A, 11+12, Feltre, ITA-2), Nicolas Ruel (A, 7+14, Nice), Lucas Colombin (A, 8+6, Gap), Bryan Ten Braak (A, 6+8, Chamonix), Filip Dvorak (A, 5+5, Nice).

 

Revoir la présentation 2023/24

 

Retour à la Ligue Magnus 2024/25