Interview de Pascal Bédard (6 décembre 2002)

 

C'est un peu l'invité surprise d'Anglet, arrivé en catastrophe pour pallier le départ de Jean-Benoît Deschamps en début de saison. Ce défenseur québécois de 21 ans a séduit une bonne partie du public par son jeu sobre et rapide. Déjà attiré par le jeu européen plus adapté à son gabarit que le jeu nord-américain, il avait failli débarquer à Toulouse à l'âge de 18 ans, il y a de cela quelques années. Privilégiant ses études, il avait décidé de les poursuivre au Québec. Depuis, c'est chose faite, profitant de la trêve avancée pour l'Hormadi, il nous livre ses impressions.

- Quel est votre sentiment sur la première phase qui s'achève demain soir, et qui a vu l'Hormadi logiquement se qualifier sans forcément impressionner?

C'est certain que nous avons rempli l'objectif qui était de faire partie des huit équipes qui disputeront la poule Magnus en janvier. Il y a effectivement une ou deux rencontres que l'on a un peu en travers, le match retour à Villard par exemple nous laisse beaucoup de regrets. La rencontre face à Grenoble ou nous n'avons réellement joué que le troisième tiers nous laisse également amers, quand on pense que nous avons mis vingt-cinq tirs et que eux n'en produit que cinq.

- Comment jugez vous le niveau de la poule sud, quelle est l'équipe qui vous a fait le plus impression ?

C'est certainement Mulhouse qui m'a laissé la plus grosse impression, ils sont très bien organisés et ils respectent les consignes. Ils ne marquent pas des buts forcément spectaculaires, mais c'est une équipe qui travaille beaucoup, qui est méthodique. Quand un joueur monte sur la glace, il sait ce qu'il doit faire, il a un but. Ce serait donc l'équipe qui m'aurait impressionné, enfin c'est un bien grand mot, c'est en tout cas celle qui était un ton au-dessus. De toute manière on ne pouvait négliger aucune équipe dans cette poule, par exemple Villard qui nous a mis 7-3.

- Lors de cette première phase, l'Hormadi n'a pas remporté la moindre victoire sur des équipes comme Mulhouse ou Grenoble, qu'a-t-il manqué ?

Il a juste manqué un petit quelque chose, le déclic qui fait que l'on joue tous ensemble dans la même direction. Ce petit truc qui fait que le palet va plus facilement au fond du filet. Peut-être de petites erreurs qui se payent cash, une petite faute de concentration. Même si on manque un peu de physique, on est jeune et on est tellement motivé que l'on a pas peur de prendre des coups. De ce côté-là, je ne suis pas inquiet.

- Certaines critiques ont été faites sur la perméabilité de la défense, pensez vous qu'elles soient justifiées ?

Comme je le disais précédemment, contre Grenoble ou Mulhouse nous avons fait des fautes de concentration, des erreurs de jeunesse. Nous l'avons payé comptant. Mais de là à dire que la défense est perméable, je ne pense pas. C'est clair que nous sommes pas des "gros", nous sommes mobiles et rapides, ce qui va bien avec le système de jeu que nous voulons adopter. Globalement on a payé cher les erreurs que nous avons fait, mais je pense que l'on a une bonne défense qui est respectable.

- La poule Magnus débute en janvier, l'Hormadi rencontre des équipes plus fortes que celles rencontrées lors de la première phase, Anglet devra faire preuve de plus de régularité et de rigueur, pensez-vous en être capables ?

Certainement. Je ne doute pas que l'on soit capable de hausser le niveau de jeu. On a montré que l'on était capable de dominer une équipe comme Grenoble, on l'a fait malheureusement seulement pendant le troisième tiers où l'on a largement dominé les débats. Dans ce match durant lequel on a loupé les deux premiers tiers, on s'en veut car on a peut-être fait preuve de nonchalance. Mais on a fait notre autocritique sur cette rencontre. Je pense que nous sommes prêts à affronter ce genre d'équipe-là, et au vu du troisième tiers que l'on a produit je pense que l'on peut battre des teams comme Mulhouse ou Grenoble.

- Quel est l'objectif de l'Hormadi au sein de la poule haute, pensez-vous pouvoir accrocher une des quatre places qualificatives pour les play-offs ?

C'est certain que c'est notre objectif, je pense que c'est réalisable honnêtement, mais il va falloir travailler dur. On n'est pas une équipe où chaque joueur peut prendre le palet dans sa zone de défense et faire une traversée de la patinoire pour marquer. Mais quand on arrive à jouer tous ensemble, l'Hormadi est alors capable de faire du bon hockey, de belles choses, comme contre Villard par exemple. Avec les entraîneurs, on va faire le bilan de nos faiblesses et de nos qualités pendant le mois de décembre, je pense que l'on va avoir un programme chargé. On n'aura pas de temps mort, mais c'est un mal nécessaire pour espérer accrocher une des quatre places. On est une équipe jeune et motivée, mais on n'a pas forcement l'habitude de jouer ensemble. Quand on arrive à le faire et que l'on va tous dans le même sens, on arrive à faire de bonnes choses.

- Au niveau personnel quel bilan faites-vous de votre première phase ?

Je suis assez satisfait, mais il y a quand même des améliorations à apporter. Je ne suis pas du genre à me contenter de ce que j'ai fait, je préfère aller de l'avant. Il y a des secteurs du jeu que je dois travailler. J'ai dû également l'adapter au style de jeu, et surtout à l'absence de la règle de la ligne rouge (le hors-jeu de deux lignes). Il a fallu que je compose avec pour mes relances.

- À l'occasion d'une rencontre on vous a vu jouer en attaque, est-ce un poste que vous appréciez ?

Pas vraiment, ça fait quinze ans je joue au hockey en défense. Non, je ne suis pas à l'aise dans ce genre de poste. J'ai déjà eu un entraîneur qui essayait de me métamorphoser en joueur de centre. Mais, décidément, ce n'est pas pour moi, pour les besoins de la cause je ferai une exception.

- Est-ce que le style de jeu européen vous convient plus ?

Chez moi au Canada, mon gabarit m'empêche de pouvoir évoluer plus haut, ici c'est moins physique, il y a plus de beau jeu. C'est certain que c'est plus agréable que des rencontres ou il y a des coups de bâton, des bagarres. En France, les passes sont plus rapides. L'adaptation à Anglet a été facilité par la taille de la patinoire d'Anglet qui ressemble un peu à ce que j'ai connu chez moi.

- Vous êtes un peu l'invité-surprise après le départ de Jean-Benoît Deschamps, qu'est ce qui vous a décidé à venir ici ?

Premièrement, c'est Xavier Daramy avec qui j'ai joué pendant deux ans qui m'a mis en contact avec le club. Deuxièmement, ça faisait longtemps que j'avais envie de venir jouer ici, j'avais deux possibilités pour poursuivre ma carrière, jouer en université aux États-Unis ou venir en France. L'occasion s'est présentée, donc j'ai dit on fonce. Sinon j'aurais continué mes études au Québec tout en jouant en amateur. Quand j'avais dix-huit ans, j'ai failli venir en France, à Toulouse plus précisément, mais des gens que je connaissais m'avaient conseillé de plutôt continuer mes études.

- Pouvez-vous nous expliquer votre parcours hockey avant de venir à l'Hormadi ?

J'ai toujours joué aux alentours de Saint Jérôme, à 30 km au nord de Montréal. J'ai joué une demi-saison pour un collège anglophone au Québec dans une ligue collégiale majeur. Je suis revenu jouer à Saint Jérôme en junior AAA pendant deux saisons et demi, ou j'ai connu de grands moments avec Xavier Daramy. L'an passé j'ai joué en senior AA dans la ligue du bas Saint-Laurent pour l'équipe des Castors de Matan.

- Quelles sont vos premières impressions sur la France au niveau hockey comme au niveau personnel ?

J'adore la région, les gens, la température, tout ce qui entoure le club. Pour ce qui est du hockey, il m'a fallu un temps d'adaptation du fait de l'absence de ligne rouge. Cependant, une partie de hockey reste une partie de hockey, donc ce ne fut pas si dur que ça.

- Quels sont vos ambitions en venant jouer en Europe, faire une saison ou deux puis retourner en Amérique du Nord terminer les études ?

Pour ce qui est des études, je compte les poursuivre par correspondance via Internet, ou en rentrant l'été pour prendre des cours. Il ne me reste que deux ans pour finir mes études, c'est donc possible, comme cela en les terminant je m'occupe de mon après-hockey. Mais de toute manière je souhaiterais rester ici - si les dirigeants sont satisfaits de mes performances - car j'adore le hockey en France, et la vie est très sympa à Anglet.

- Est-ce qu'un seul match par semaine est un handicap ?

Il est évident que de jouer aussi peu de matchs nécessite une adaptation. Ça passe par plus d'entraînements par semaine pour pouvoir garder le rythme. Mais le fait de ne pas pratiquer gêne car c'est pendant un match que l'on ajuste réellement les systèmes que l'on doit appliquer. Vu que l'on a qu'un match par semaine, les entraînements ont un niveau plus élevé qu'au Québec.

Ceci étant, ça a comme avantage de pouvoir ajuster les systèmes et le jeu en fonction de l'équipe que l'on va rencontrer, de corriger ce qui ne va pas. Alors qu'au Québec avec deux voire trois matchs en semaine on ne peut pas le faire, donc on a une stratégie et on l'applique pendant toutes les rencontres en ne pouvant faire que de petits ajustements durant le match si ça ne va pas.

- Si vous aviez un mot à passer aux supporters quel serait-il ?

Ce serait bravo car il y a une ambiance que je n'avais encore jamais vue. Les gens sont présents, ils nous supportent fort, avec la musique, la fanfare. Dans ma jeune carrière, j'en ai vu, des amphithéâtres, mais rien qui n'y ressemblait vraiment. En Amérique du Nord, les gens viennent plutôt voir un spectacle, ils supportent mais font moins de bruit. Ils sont moins patients et les critiques sont plus agressives. Ici, même si on perd, les applaudissements en fin de rencontre sont là, ça fait chaud au cœur. Donc ce serait un gros bravo, et continuez !

Propos recueillis le 6 décembre 2002 par Hormadiar

 

 

Retour au sommaire