Interview de Vyacheslav Bykov

 

Vyacheslav Bykov est le nouvel entraîneur du CSKA Moscou.

- Vous prenez la place d'entraîneur dans un grand club, que vous connaissez bien pour y avoir longtemps joué, à la place d'un mythe du hockey mondial. Cela ne doit pas être évident de succéder à Viktor Tikhonov ?

C'est vrai, c'est pour moi un grand challenge dans ma vie. Cela fait seulement quatre ans que je suis entraîneur, et tout à coup, j'ai reçu la proposition - que je n'aurais même pas pu imaginer - de prendre le volant d'un tel club. Je sais que cela me donne une grande responsabilité vis-à-vis de tous les supporters, mais j'ai pris cette décision avec beaucoup de courage, de volonté et d'enthousiasme.

- En Russie, la vie d'entraîneur est difficile. On l'a vu à Novossibirsk, quatre matches et l'entraîneur est déjà écarté. Comment vivez-vous cette pression, cette obligation de résultats ?

À mon avis, cette pression qui pèse sur le métier d'entraîneur n'existe pas qu'en Russie. Rien n'est jamais sûr, on reste continuellement sur le siège éjectable, et dans toutes les disciplines, pas uniquement en hockey. Beaucoup de facteurs entrent en jeu. Si l'on ne trouve pas un bon contact avec les joueurs, un bon langage avec les dirigeants, et si les résultats manquent, on est tout de suite remis en question. Mais moi je ne réfléchis pas à cela, je ne perds pas mon temps à penser à cela. Tout simplement, je me concentre sur mon métier. Ma priorité est de créer une atmosphère agréable pour les joueurs pour qu'ils puissent travailler durement certes, mais avec beaucoup de succès.

- Est-ce que vos longues années en Suisse vous ont apporté un plus dans votre métier d'entraîneur, est-ce que l'on gère une équipe de la même manière à Fribourg, Lausanne ou au CSKA ?

Je pense que c'est plus ou moins la même chose, à savoir un travail avec un groupe. Soit on communique bien, soit on n'a pas cette facilité. Si l'on arrive à bien faire passer le message, que l'on soit en France, en Suisse ou en Russie, cela sera la même chose. Donc c'est avant tout un travail humain et psychologique. 70% de mon travail est psychologique, la technique ce n'est que 30%. C'est pour cela que j'ai accepté ce poste. Je n'ai pas peur, j'ai travaillé avec des enfants et je dois admettre qu'avec les enfants, c'est parfois beaucoup plus dur, plus difficile, car leur concentration n'est pas la même. Ils comprennent différemment des adultes. C'est vraiment intéressant, c'est un métier qui me fascine. Jusqu'à présent, je suis vraiment satisfait du contact établi avec les joueurs. J'espère que nous allons avoir de meilleurs résultats que jusqu'à présent (NDLR : le CSKA est dixième au moment de cette interview avec une défaite à domicile la veille contre le Neftekhimik).

- Est-ce que la menace de lock-out en LNH peut fausser le championnat russe avec des allers et retours de joueurs depuis l'Amérique du Nord ?

Fausser est un mot un peu dur. Je préfère penser que le lock-out va nous permettre d'accueillir ici de grands joueurs, techniquement très forts, psychologiquement et mentalement aussi, bien entendu, et que cela va populariser encore plus le hockey sur glace en Russie. L'intérêt pour le championnat va être plus grand et la qualité de jeu va augmenter. L'aspect éducation pour nos jeunes générations est également important. Cela va leur permettre de capter toute cette expérience. Visuellement, il est important que les jeunes puissent regarder ces joueurs techniquement hors norme. Je ne vois que du positif pour le développement du hockey russe. Alors, bien sûr le championnat sera quand même un peu faussé, parce que tous les clubs ne peuvent se permettre d'engager des vedettes, parce qu'elles coûtent cher en fait (sourire), mais les clubs qui accueillent ces joueurs ne doivent en retirer que des bénéfices.

- Connaissez-vous le hockey français, même s'il est un peu loin de l'élite mondiale ?

Un petit peu. En jouant en Suisse, j'ai rencontré des clubs français comme Megève, Rouen ou d'autres. En plus, dans les années quatre-vingts, j'avais disputé avec le CSKA la finale de la coupe d'Europe à Megève (NDLR : je le sais, j'y étais...). J'aime vraiment beaucoup la France. Je dois avouer que j'ai choisi de venir jouer en Suisse un peu à cause de la France, parce qu'on y parle français. Je ne voulais pas aller en Allemagne ou dans les pays nordiques. Et comme à l'époque, le niveau du hockey français n'était pas élevé, je suis allé en Suisse pour la langue française. D'ailleurs quand nous étions en Suisse, nous allions régulièrement en vacances en France.

Propos recueillis le 14 septembre 2004 par Bruno Cadène, correspondant de Radio France à Moscou

 

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