Interview de Santeri Immonen

 

Le Finlandais Santeri Immonen s'était imposé comme un des meilleurs défenseurs de la Ligue Magnus avec Morzine-Avoriaz. Il apporte désormais son expérience au promu Neuilly-sur-Marne.

- Comment êtes-vous arrivé à Neuilly ?

C'est mon coéquipier de l'an dernier, Nicolas Pousset, qui m'a suggéré cette piste, car il est bon ami avec Jérôme Pourtanel, l'entraîneur de Neuilly-sur-Marne. Je me suis dit "pourquoi pas". En effet, j'étais déjà arrivé à Morzine-Avoriaz au moment où ils étaient montés en Ligue Magnus, et c'était super.

- Comment vous a-t-on annoncé que vous ne seriez plus repris à Morzine ?

Le club avait décidé qu'il ne prendrait plus d'imports. On m'a expliqué que c'était pour raisons économiques. Je ne connais pas les vraies raisons, alors je le crois.

J'ai passé quatre grandes années à Morzine, mais ce n'était pas un must pour moi. Il y a du hockey partout. Les gens là-bas me manquent, mais mon travail, je le fais là où je le trouve. J'aime Neuilly, j'aime Paris, et si on gagnait un peu plus souvent, ce serait un autre plus.

- Vous attendiez-vous à une saison si difficile ?

Je savais que ce serait difficile, mais peut-être pas si dur. On a eu de la malchance avec les blessés, et puisles changements d'étrangers en début de saison. Je pensais que l'équipe serait un plus ensemble dès le début. Ce n'est jamais facile quand on est promu dans cette ligue. Si on ne joue pas 60 minutes, on perd. Mais je crois encore qu'on finira dans le top-12, cela reste mon but. Si on finit 13e ou 14e, on se concentrera sur les play-down, mais pour l'instant, j'ai encore la tête aux play-offs.

- Vous avez fait partie d'un powerplay qui fonctionnait avec Morzine l'année de la finale. Comment analysez-vous les difficultés rencontrées par Neuilly en supériorité numérique ?

Ce sont plein de petites choses qui font qu'on n'a pas l'efficacité voulue. Nous essayons des choses trop compliqués, il faut faire plus simple. Nous avons une longue semaine d'entraînement devant nous, il faudra l'utiliser pour travailler à ça.

- Revenons sur votre carrière. Très jeune, vous avez côtoyé de grands joueurs au Jokerit Helsinki...

Après ma formation et mon année de service militaire, pendant laquelle je pouvais continuer à aller aux entraînements et aux matches de l'équipe junior du Jokerit, j'ai commencé ma carrière professionnelle au SapKo Savonlinna, en deuxième division, à 400 kilomètres de Helsinki. C'était agréable de quitter la maison.

Quand je suis revenu un an plus tard, c'était l'année du premier lock-out en NHL. Jari Kurri et Teemu Selänne étaient revenus en Finlande, et on avait une équipe incroyable, qui est devenue championne d'Europe. Les entraînements étaient plus durs que les matches, car c'est là que l'on voyait leur vrai niveau. J'étais à bonne école, et cela a fait de moi un meilleur joueur.

J'avais un bon feeling parce que j'avais beaucoup de temps de glace en division inférieure [avec Haukat-KJT]. C'était donc plus facile de monter parce que j'étais prêt. J'ai eu la chance de jouer sur une ligne avec Kurri, Selänne, Juha Jokiharju, le futur Briançonnais, et à mes côtés Erik Hämäläinen [NB : qui a pris sa retraite cet été après plus de 1000 matches de SM-liiga, record absolu]. Ils ne se comportaient pas comme des superstars. J'étais nerveux, mais ils me disaient quoi faire, et ils étaient toujours positifs, en me donnant des conseils tout le temps. Les matches étaient plus faciles que l'entraînement.

La deuxième année a été plus difficile, sans doute parce que j'attendais trop de moi. Néanmoins cela reste un bon souvenir car on gagnait tout. On a encore été champion d'Europe, et cette fois on a aussi été champion de Finlande.

- Vous êtes ensuite parti pour Ässät...

Avec Ässät, j'ai pris de l'expérience, parce que j'ai pu jouer en jeu de puissance, ce que j'avais peu fait au Jokerit. J'étais dans le top-3 des défenseurs. D'un côté, c'était difficile parce que c'était une équipe de bas de tableau et que l'on gagnait moins souvent, mais de l'autre côté, j'ai pris un plus grand rôle dans l'équipe.

- Qu'est-ce qui vous a poussé à partir de l'étranger, et plus particulièrement en Angleterre ?

Ce n'était pas tellement un choix. En fait, le Jokerit était devenu propriétaire des Newcastle Jesters, et c'est comme ça que plusieurs joueurs finlandais ont été envoyés là-bas, dont Tommi Satossaari, l'actuel gardien de Briançon. En fait, cela a été une erreur. Il y avait 95% de Nord-Américains dans la ligue. Le niveau se rapprochait alors des ligues mineures nord-américaines (AHL et IHL), mais les gens en Europe ne respectaient pas cette ligue. Quand vous disiez que vous veniez de là-bas, cela ne valait rien.

Harkimo, le patron du Jokerit, a revendu la franchise après Noël, il y avait de gros problèmes d'argent, les salaires n'était pas versés. J'ai bien aimé la ville de Newcastle, mais j'ai vécu une saison de merde.

- Pour un défenseur de petit gabarit, l'adaptation n'était pas encore plus dure ?

C'est vrai que l'on a beaucoup essayé de m'user parce que j'étais petit quand je suis arrivé dans la ligue, mais c'est bien de voir aussi un hockey plus nord-américain. Pour ma part, j'ai joué mon style, je n'avais pas de raison d'en changer. Dans notre équipe, il y avait un bon mix entre Européens et Nord-Américains.

- Le coach était-il nord-américain ?

Non, le coach était finlandais... C'était Jukka Jalonen ! Il traversait à ce moment-là un passage difficile dans sa carrière, cela s'était mal passé pour lui en Italie. J'ai été un peu surpris de comeback spectaculaire qu'il a réalisé depuis, puisqu'il a aujourd'hui le poste le plus prestigieux qui soit, celui d'entraîneur national de la Finlande. C'est un bon coach, du genre à parler avec les joueurs, sans trop crier.

- N'était-il donc plus possible de jouer en SM-liiga après votre année en Angleterre ?

J'avais des propositions, mais c'était pour jouer gratuitement, et je ne le voulais pas. J'ai donc rejoint Nyköping en Allsvenskan, la deuxième division suédoise. Il y avait quatre imports, deux Lettons la première année, puis d'autres Finlandais, et j'ai passé trois bonnnes années en Suède. Le club voulait que je reste, mais j'avais décidé de repartir.

- Pourquoi avoir choisi la France à ce moment, en 2004 ?

J'avais le choix entre Morzine et Cortina, et j'avais entendu que Cortina avait chaque année des problèmes avec son sponsor. J'ai donc choisi Morzine. C'est une petite ville, mais les gens y sont amicaux, et elle se remplit pendant la saison de ski. Personnellement, je skie peu, c'est un peu dangereux, mais j'aime bien monter sur les pistes pour voir les gens skier et être heureux.

J'avais évidemment le rôle du défenseur d'expérience, et lors de ma dernière saison, j'ai même été nommé comme assistant-coach de Stéphane Gros.

- Envisagez-vous une reconversion comme entraîneur ?

Oui, c'est mon plan, mais ce n'est pas pour tout de suite. Je compte jouer aussi longtemps que je me sens bien. Je ne peux pas dire si j'ai gardé le même niveau, il faut regarder de l'extérieur mais c'est difficile de dire cela de soi. Je sais que le jeu a changé pour moi, que je suis plus patient et que je patine moins fort, mais c'est naturel avec l'expérience.

- Y a-t-il un coach que vous prenez comme modèle ?

Je vais plutôt essayer de prendre un petit peu de chacun, et de ne pas commettre les mêmes mauvaises erreurs que j'ai pu connaître du point de vue du joueur. J'ai eu la chance d'évoluer avec des entraîneurs finlandais (Hannu Aravirta au Jokerit et Jukka Jalonen à Newcastle), russe (Vladimir Yurzinov junior à Ässät), suédois (Jens Hellgren à Nyköping) et français. Cela fait beaucoup d'entraîneurs célèbres mais aussi de cultures de hockey différentes dont je pourrai m'inspirer.

Propos recueillis le 4 janvier 2009 par Marc Branchu

 

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