Suède - États-Unis (8 mai 1994)

 

Match pour la troisième place des championnats du monde 1994.

Défenseur-buteur contre troisième gardien

On dit souvent que la médaille de bronze revient à l'équipe qui a su le mieux se remettre de sa défaite. Entre des Suédois et des Américains qui ont pris des gifles en demi-finale (respectivement 0-6 et 0-8), ce doit être plus vrai que jamais. Lesquels d'entre eux refuseront de tendre l'autre joue ? La comparaison des effectifs est clairement défavorable aux États-Unis. Chris Chelios est habillé pour la première fois, mais il ne rentre toujours pas en jeu, suivant la consigne de son équipe de Chicago qui refuse qu'il fasse courir un risque à son genou. Le gardien Guy Hebert est présent en maillot sur le banc mais sans équipement car il s'est étiré un muscle au niveau de l'aine.

La Suède a elle aussi changé de gardien en faisant rentrer la doublure Tommy Salo. Dès la quatrième minute, Salo tend le bras pour une parade in extremis face à Phil Bourque, mais il est ensuite hors de position quand ce dernier passe en retrait à Peter Ciavaglia : c'est alors le défenseur Nicklas Lidström qui sauve le but en contrant le tir avec sa crosse. Une minute plus tard, le gardien américain Les Kuntar se fait mal et appelle le médecin, qui vient le masser longuement derrière le genou gauche. Il reprend le jeu et reste très occupé contre des Suédois qui monopolisent le palet. Craig Wolanin concède une pénalité pour cinglage pendant une séquence de possession scandinave, un avantage numérique converti par un puissant lancer de la ligne bleue de Magnus Svensson plein axe (0-1).

À chaque arrêt - et il en effectue neuf en moins d'un quart d'heure - Kuntar semble se relever lentement, prudemment. Jusqu'au moment oů, après un grand écart, il ne peut plus du tout se relever. Il aura tout tenté, mais il reste à genoux. C'est soutenu par son capitaine et le médecin qu'il quitte la glace. Il rentre au vestiaire en boîtant. Les États-Unis doivent donc finir le match avec leur troisième gardien, David Littman...

Peter Andersson finit la période en prison pour obstruction. Dès le début du deuxième tiers-temps, Craig Janney dévie un slap de Bob Beers et égalise (1-1). Ce but semble sonner la révolte américaine. Doug Weight contre le palet deux fois dans la même action face à Larsson et Forslund et lance une contre-attaque très dangereuse. Mais comme en demi-finale, l'indiscipline est fatale aux États-Unis. Une faute en zone offensive de Sweeney n'est pas sifflée. Par contre, l'arbitre sanctionne Joe Sacco quand il donne un cross-check dans le dos de Mikael Johansson (servi près de la cage par Carnbäck). Quatre secondes après l'engagement, un nouveau missile de la ligne bleue de Svensson bat Littmann au niveau de la mitaine (1-2). La dangereuse charge du capitaine Wolanin, qui propulse la tête de Forslund contre la bande, entraîne elle aussi une sanction immédiate. Nicklas Lidström fait se coucher Podein par une feinte de lancer, puis l'évite et envoie un slap en pleine lucarne (1-3). Littmann était masqué.

Quatre pénalités, quatre buts : le bilan est impressionnant. Au début du troisième tiers-temps, c'est à 5 contre 5 que la Tre Kronor creuse l'écart. Doug Weight perd le palet en sortie de zone et Sean Hill est le seul bleu en position de défendre. Il sert de barycentre au jeu en triangle initié par Mikael Johansson et conclu facilement par Svensson (1-4). La Suède domine toujours et semble irrattrapable, mais le défenseur Don McSween part en contre-attaque avec Sacco et décoche un tir fulgurant du poignet entre Salo et son poteau (2-4). Sa célébration est limitée, comme s'il ne croyait plus que le match pouvait basculer.

Une nouvelle charge avec la crosse, de Beers cette fois, élimine en effet cette hypothèse. Magnus Svensson en profite pour compléter un quadruplé - performance unique pour un défenseur dans un match à médaille - entre les jambes du gardien (2-5). La Suède en est à 80% de conversion en supériorité numérique. Le coefficient ne décroît ensuite qu'en apparence. Le sixième but intervient quelques secondes après la sortie de prison de Neaton, lorsque la mitaine de Littmann relâche un tir de Sundin devant Jonas Bergqvist, présent dans le slot (2-6). Mikael Johansson clot le score à deux minutes de la fin sur une passe du revers de Sundin (2-7).

La puissance de lancer de ses défenseurs reste l'arme majeure de la Suède, comme aux Jeux olympiques. Elle a amené les cinq premiers buts et anéanti les espoirs des Américains. Un Chelios aurait pu leur être utile ailleurs que sur leur banc, il devait avoir des fourmis dans les doigts à l'idée d'armer un slap... Les autres défenseurs n'avaient pas son impact physique, et ils ont quand même pris des pénalités. Même sans médaille, et jamais au niveau des équipes qui ont fini sur le podium, les États-Unis auront connu leur heure de gloire en éliminant les Russes.

Désignés joueurs du match : Magnus Svensson pour la Suède et Craig Janney pour les États-Unis.

Marc Branchu

Commentaires d'après-match :

Kalt Wyle (assistant-coach des États-Unis) : "Nous jouons de manière totalement différente chez nous. C'est très difficile de changer en deux ou trois semaines notre jeu physique de type NHL. Je ne dis pas que les arbitres sont meilleurs ou moins bons, ils sont différents. Les joueurs ne peuvent pas s'adapter si vite. Et les Suédois comprennent le système collectif bien mieux que nous."

Curt Lundmark (entraîneur de la Suède) : "Les Canadiens jouent physique, mais quand on utilise sa crosse comme le font les Américains, on prend des pénalités. C'est aussi simple que ça."

Suède - États-Unis 7-2 (1-0, 2-1, 4-1)
Dimanche 8 mai 1994 à 16h00 au Forum d'Assago (Milan). 8000 spectateurs.
Arbitrage de František Rejthar (TCH) assisté de Stefan Trainer (ALL) et Chuck McTague (CAN).
Pénalités : Suède 6' (2', 4', 0'), États-Unis 14' (2', 6', 6').
Tirs cadrés : Suède 36 (15, 10, 11), États-Unis 11 (4, 2, 5).
Tirs bloqués : Suède 13 (6, 3, 4), États-Unis 5 (2, 2, 1).
Tirs non cadrés : Suède 18 (6, 6, 6), États-Unis 9 (1, 7, 1).
Engagements : Suède 37 (11, 16, 10), États-Unis 23 (10, 4, 9).

Évolution du score :
1-0 à 07'12" : Svensson assisté de J. Jönsson (sup. num.)
1-1 à 20'14" : Janney assisté de Beers et Chambers (sup. num.)
1-2 à 24'22" : Svensson assisté de M. Johansson (sup. num.)
1-3 à 33'04" : Lidström assisté de Sundin et M. Johansson (sup. num.)
1-4 à 40'30" : Svensson assisté de Sundin et M. Johansson
2-4 à 48'29" : McSween assisté de Wolanin
2-5 à 53'21" : Svensson assisté de Sundin (sup. num.)
2-6 à 55'48" : Bergqvist assisté de Sundin et R. Johansson
2-7 à 58'14" : M. Johansson assisté de Sundin et Bergqvist
 

Suède

Attaquants :
27 Tomas Forslund (-1) - 17 Jan Larsson - 13 Mats Sundin (+3)
16 Patrik Carnbäck (+1) - 26 Mikael Johansson (+3) - 12 Andreas Dackell
20 Jörgen Jönsson - 15 Stefan Örnskog - 23 Mikael Andersson
11 Roger Hansson - 22 Charles Berglund (C, -1) - 18 Jonas Bergqvist (A, +1, 2')

Défenseurs :
8 Magnus Svensson (+3) - 34 Roger Johansson (+3)
14 Fredrik Stillman (A, -1) - 2 Tommy Sjödin (-1)
3 Peter Andersson (2') - 4 Nicklas Lidström (2')

Gardien :
35 Tommy Salo

Remplaçants : 30 Roger Nordström (G), 19 Kenny Jönsson. En réserve : 1 Johan Hedberg (G), 5 Patrik Juhlin (étirement du ligament interne du genou).

États-Unis

Attaquants :
12 Tim Sweeney (-1) - 9 Doug Weight [puis Janney] - 10 Joe Sacco (+1, 2')
13 Shjon Podein (-3) - 15 Craig Janney (A) [puis Weight] - 23 Scott Young (A, -2, 2')
18 Phil Bourque - 26 Peter Ciavaglia (+1) - 19 John Lilley
8 Jeff Lazaro (-1)

Défenseurs :
6 Pat Neaton (-2, 2') - 28 Sean Hill (-1, 2')
4 Shawn Chambers (-1) - 3 Bob Beers (2')
24 Don McSween - 2 Craig Wolanin (C, -1, 4')

Gardien :
30 Les Kuntar puis 29 David Littman à 14'38"

Remplaçants : 5 Barron Richter, 7 Chris Chelios, 17 Danton Cole. En réserve : 1 Guy Hebert (G, étirement à l'aine). Suspendu : 21 Bill Lindsay (contrôle positif à l'éphédrine).

en noir, la feuille de match officielle ; en rouge, les corrections de Hockey Archives

 

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