Canada - Suède (15 février 2002)
Match comptant pour les Jeux Olympiques 2002.
La rumeur avait laissé entendre que Anders Hedberg serait préféré à Tommy Salo dans les buts suédois et que Curtis Joseph aurait le meilleur sur Martin Brodeur pour garder les cages canadiennes. Les faits lui ont donné raison pour ce dernier, mais elle s'est fourvoyée dans le premier cas. Cette rencontre entre deux des meilleures équipes du tournoi commence à un rythme de folie et les Canadiens font feu de tout bois. L'équipe suédoise est d'abord prise en défaut de placement et d'organisation, et Peca décale rapidement Blake dans une contre-attaque gagnante dès la troisième minute. Même s'ils avaient eux aussi utilisé la longue passe pour Lindros en début de match, les Canadiens ne sont peut-être pas complètement familiarisés avec la suppression de la ligne rouge et le service d'Alfredsson peut ainsi lancer Sundin vers l'égalisation. Les Canadiens misent plus sur la rapidité que sur la puissance physique, quitte à verser dans la précipitation, dans un début de match enthousiasmant même si la concentration des deux équipes est souvent prise en faute. Il faut attendre la douzième minute pour voir la première pénalité, contre un Mats Sundin répondant stupidement à une petite provocation de la teigne Theoren Fleury. Mais la supériorité numérique est sans effet, et c'est au contraire le jeu en mouvement suédois qui donne le tournis à la défense canadienne et met CuJo à l'ouvrage. Mais les Canadiens sont capables de contre-attaques fulgurantes et Salo doit même être sauvé par son poteau sur une action de Nieuwendyk. On sent que les deux équipes se cherchent encore un peu, mais ce tiers-temps joué à cent à l'heure promet déjà énormément pour la suite, quand les petites imperfections seront gommées.
Ce sont encore les Suédois qui dominent en début de deuxième tiers-temps. Après déjà une bonne passe de Sundin pour Alfredsson devant la cage, c'est un service de Nylander pour Sundström dans le dos de la défense qui amène le but du 2-1. On attend de voir les Canadiens à ce niveau de jeu collectif, alors que Lemieux commence seulement à trouver Sakic. Mais c'est une action individuelle qui est la plus proche d'aboutir, quand Niedermayr passe la bleue et lance directement sur la barre transversale. La rencontre tourne à la démonstration, le jeu de transition suédois frise la perfection, et Sundin conclut ainsi une rapide remontée de palet par un lancer qui trompe Curtis Joseph. Les Suédois se trouvent les yeux fermés, et le Canada prend complètement l'eau sur un quatrième but de Kenny Jönsson. MacInnis exprime sa frustration par une crosse au visage de Holmström, et la première (et dernière !) supériorité suédoise du match porte déjà ses fruits : une longue passe de Niklas Lidström lance un 2 contre 1 et Dahlén enfile la cinquième perle. Un ressort s'est cassé dans cette deuxième période chez les Canadiens, incapables de contenir les Scandinaves, et encore moins aptes à se montrer dangereux : ils ont conclu le tiers-temps avec le total misérable de trois tirs cadrés, sans doute du jamais vu pour un Team Canada !
Les Canadiens atteignent rapidement ce total en troisième période, essayant de nouvelles combinaisons de lignes pour retrouver leur jeu offensif. Mais ils commettent encore des erreurs inhabituelles : Pronger qui contrôle mal le palet et le laisse sortir de la zone offensive en jeu de puissance, Theoren Fleury qui fait une passe dans le vide, etc. Plus agressifs sur le palet, ils tentent toutefois de forcer le destin : Fleury arrache la rondelle à Alfredsson derrière son but, fait le tour de la cage, mais tire directement dans le gant de Salo, pourtant étendu en croix sans défense sur la glace. La réussite n'est pas du côté canadien, et Kenny Jönsson met sa crosse en opposition pour empêcher Lemieux de profiter d'une cage ouverte. L'incroyable déroute des favoris du tournoi laisse beaucoup de monde coi, y compris le juge de ligne qui siffle un dégagement interdit aux Suédois alors qu'ils sont en infériorité. Étonnant au niveau international... Tommy Salo s'interpose devant des lancers d'Iginla ou de Fleury, mais s'incline finalement devant un de ses coéquipiers d'Edmonton, Eric Brewer, qui construit une action personnelle de l'entrée de la zone à la finition, un revers en pleine lucarne. Les Canadiens se prennent à rêver à un retour quand Lindros marque dans la foulée au rebond de Fleury, mais le but est refusé car Mike Peca campait dans la zone du gardien et gênait considérablement Salo. Ce dernier réussit encore quelques beaux arrêts et assure la nette victoire suédoise.
Les deux équipes ont quelque peu délaissé le forechecking dans cette rencontre : la Suède parce que Hardy Nilsson n'avait pas le temps de convertir tout le monde au "torpedo", et le Canada parce qu'ils préfèrent privilégier d'autres arguments. Le jeu a ainsi pu mieux se développer, et cela a profité à la Suède. Enfin, on l'a vu pratiquer le jeu collectif exceptionnel dont on la sait capable, et surtout réussir à le rendre efficace et percutant. Elle confirme tout le bien que l'on pensait d'elle et paraît en mesure d'aller au bout sans exploser en vol. Mais attention : le coup sur la tête reçu par les Canadiens au deuxième tiers leur servira certainement par la suite. Ils ne peuvent plus se permettre de prendre aucun adversaire de haut, et leur réaction d'orgueil de la troisième période doit donner le ton du reste du tournoi.
Marc Branchu
Commentaires d'après-match :
Pat Quinn (entraîneur du Canada) : "Nos défenseurs étaient trop peu mobiles, il faut leur demander de faire le travail qu'ils ne font pas en NHL. S'ils ne le font pas, nous ne gagnerons pas. En deuxième période, nous les avons regardés jouer... et ils ont vraiment bien joué. Nous devons prendre ça comme une leçon. Nous avons été assommés. Si nous pensons pouvoir jouer facile comme ça, nous serons à la maison jeudi matin. Nous devons reconstruire les choses à l'entraînement demain."
Hardy Nilsson (entraîneur de la Suède) : "C'est du hockey sur grande glace. Nous voulons conserver le palet dans l'équipe, créer beaucoup de glace dans laquelle jouer et l'utiliser. Nous ne voulons pas abandonner le palet. Ce système est différent du torpedo. Je suis content que Sundin ait eu la première occasion, car en général il marque. Je suis fier de faire partie d'une équipe capable de battre une équipe comme celle-là."
Canada - Suède 2-5 (1-1, 0-4, 1-0)
Vendredi 15 février 2002 à 16h00 au E-Center de West Valley City. 8597 spectateurs.
Arbitrage de Dennis LaRue (USA) assisté de Sergei Kulakov (RUS) et Dan Schachte (USA).
Pénalités : Canada 2' (0', 2', 0'), Suède 6' (2', 0', 4').
Tirs : Canada 35 (15, 3, 17), Suède 25 (10, 11, 4).
Engagements : Canada 48 (13, 22, 13), Suède 27 (11, 5, 11).
Évolution du score :
1-0 à 02'37" : Blake assisté de Peca et Fleury
1-1 à 05'30" : Sundin assisté d'Alfredsson
1-2 à 26'06" : Sundström assisté de Nylander et Näslund
1-3 à 30'42" : Sundin assisté d'Alfredsson et Lidström
1-4 à 31'47" : K. Jönsson assisté de Zetterberg
1-5 à 35'58" : Dahlén assisté de Sundström et Sundin (sup. num.)
2-5 à 55'39" : Brewer assisté de Nolan
Canada
Attaquants :
Paul Kariya (-1) - Joe Sakic (-1) - Mario Lemieux (C, -1)
Brendan Shanahan (A, -2) - Steve Yzerman (-2) - Jarome Iginla (-2)
Simon Gagné (+1) - Eric Lindros - Owen Nolan (+1)
Theoren Fleury - Joe Nieuwendyk (+1) - Mike Peca (A)
Ryan Smyth
Défenseurs :
Adam Foote (-1) - Rob Blake (+1)
Eric Brewer (-1) - Al MacInnis (-2, 2')
Chris Pronger - Scott Niedermayer (-1)
Gardien :
Curtis Joseph
Remplaçants : Martin Brodeur (G), Ed Jovanovski. Non aligné : Ed Belfour (G).
Suède
Attaquants :
Ulf Dahlén - Mats Sundin (C, +1, 2') - Daniel Alfredsson (+1)
Markus Näslund (+1) - Michael Nylander (+1) - Niklas Sundström (+1)
Henrik Zetterberg (+1) - Jörgen Jönsson (A, +1) - Mikael Renberg (+1)
Magnus Arvedson - Mathias Johansson (-1) - P.J. Axelsson (-1)
Tomas Holmström
Défenseurs :
Nicklas Lidström (A, +1) - Fredrik Olausson (+1, 2')
Mattias Norström - Kim Johnsson
Kenny Jönsson (+2) - Marcus Ragnarsson (+1, 2')
Mattias Öhlund (-1)
Gardien :
Tommy Salo
Remplaçant : Johan Hedberg (G). Non aligné : Mikael Tellqvist (G).