Canada - République Tchèque (9 mai 2003)
Demi-finale des championnats du monde 2003.
Cette demi-finale oppose les deux meilleures défenses de ce championnat du monde, ainsi que les deux meilleures paires de gardiens jusqu'ici : Vokoun/Málek et Burke/Luongo, tous très bons. Il est donc légitime de s'attendre à une partie serrée, avec peu de buts, où la moindre erreur sera fatale.
Martin Straka, qui s'est fait le spécialiste pour exploiter la moindre faille, est cette fois moins efficace, puisqu'il ne cadre pas son revers alors qu'il avait l'ouverture après être passé devant la cage. Un peu lent à se déplacer sur cette action, Sean Burke se rattrape rapidement en captant parfaitement un lancer de Duda ou en repoussant un tir de l'enclave de Hlavac. Il faut dire qu'il a du travail dans ce début de match à cause des nombreuses approximations de sa défense. Les Canadiens ont l'air de jouer avec le frein à main, mais ils ouvrent le score contre le cours du jeu sur leur première supériorité numérique, avec un rebond bien enfilé par Shane Doan sur un lancer bloqué par le corps de Hejda (1-0 à 10'34"). Le Canada se réveille à partir de ce moment et ne se met plus en danger que quand Eric Brewer donne un coup d'épaule au visage de Jirí Hudler, profitant de la différence de taille entre les deux hommes. Mais les Canadiens sont absolument excellents pendant cette infériorité et ferment une à une toutes les solutions aux Tchèques, qui tournent sans jamais les mettre hors de position.
Les Tchèques sont méconnaissables au deuxième tiers, comme le Canada en début de match, à la différence que la facture est présentée sans délai. Ils n'attendent pas la rentrée aux vestiaires inexpliquée de Burke (28'10"), remplacé par Luongo, pour être déstabilisés et se demander ce qui se passe. Vokoun avait déjà auparavant vu passer entre ses jambières un lancer balayé de Heatley (2-0 à 23'57"), et une minute après le changement de gardien canadien, il n'est pas innocent sur le troisième but de Bouwmeester (3-0 à 29'39"). Tomáš Vokoun dit là sans doute adieu au titre de meilleur gardien du tournoi (Burke vainqueur par contumace ?) en cédant sa place à Roman Málek.
On ne sent pas vraiment de choc psychologique chez les Tchèques, mais une situation de quatre contre trois permet quand même au capitaine Robert Reichel, un des seuls liens avec le collectif tchèque gagnant de ces dernières années, de remettre son équipe sur de meilleurs rails (3-1 à 34'30"). À la dernière minute de la période, c'est encore Reichel qui réduit l'écart, alors que Roberto Luongo était masqué - et selon lui gêné - par un joueur adverse passé devant lui (3-2 à 39'32").
La République Tchèque revient de loin, et elle ne manque pas l'occasion d'égaliser à la reprise sur un beau mouvement collectif - enfin ! - conclu par une lucarne de Milan Hejduk sur une passe croisée de Jirí Hudler (3-3 à 42'04"). Pour la deuxième fois consécutive, le Canada se fait rejoindre alors qu'il avait une avance confortable. Mais Andy Murray demande un temps mort à l'effet immédiat, et c'est Kyle Calder, coupable de la remontée allemande au match précédent à cause d'une glissade monumentale, qui redonne cette fois l'avantage au Canada avec un but plein de volonté (4-3 à 43'20").
Les Tchèques accusent le coup et leur défense prend soudainement l'eau, car leurs attaques désordonnées et peu convaincantes ouvrent d'énormes espaces à l'adversaire. Roman Málek colmate une brèche en face-à-face avec Heatley, mais il ne peut rien sur un 2 contre 1 parfaitement négocié par Kolanos et Heatley (5-3 à 48'41"). Sur un palet récupéré contre la bande par Marleau, Shawn Horcoff inscrit le but du KO (6-3 à 52'53"). Málek paraît maintenant fébrile et se fait contrer par Brière en allant dégager contre la bande. Le centre n'est pas repris par Marleau malgré les filets qui lui tendent les bras. Il reste donc une minuscule chance, et elle est saisie à trois minutes de la fin par Radek Duda (6-4 à 57'08"), le recordman des pénalités qui s'est fait surtout remarquer dans ce match en se faisant sanctionner deux fois pour des gestes stupides après des coups de sifflet qui auraient dû donner des supériorités numériques, annulées par sa faute, à son équipe. Mais ce mince espoir dure quarante secondes, gommé par un tir de la bande de Dandenault (7-4 à 57'40"). Un hat-trick de Heatley, auteur d'un splendide revers dans le haut du filet sur un superbe service de Brière (8-4 à 58'25"), clôt cet étonnant naufrage tchèque.
Quel match bizarre... Le Canada a pris trois buts d'avance fortuitement, puis s'est fait remonter tout aussi fortuitement. Les Tchèques n'ont pas eu à faire assez d'efforts pour revenir et n'ont pas mesuré leur chance. Les Canadiens n'ont eu qu'à retrouver leur envie de vaincre pour venir à bout de cette équipe tchèque absente, qui n'a fait qu'illusion, et qui a montré tout ce qui la séparait de l'esprit vainqueur de ses devancières.
Compte-rendu signé Marc Branchu
Commentaires d'après-match :
Andy Murray (entraîneur du Canada) : "Pour ce qui est de Sean Burke, il s'est blessé à l'aine, il ressentait déjà de petites douleurs avant le match. Nous avions bien commencé le match, mais notre adversaire a su revenir. Quand nous avons pris le temps mort à 3-3, nous savions que le prochain but serait décisif. C'est la première fois depuis le titre de 1997 que le Canada remporte une médaille mondiale. Nous espérons maintenant transformer l'argent en or."
Shane Doan (Canada) : "Rien n'avait suggéré que ça se passerait ainsi. Ce n'est pas un match typique contre les Tchèques quand il y a douze buts. C'était sympa pour nous, une belle victoire. Ils étaient les maîtres de la défense sur une grande glace, et personne n'attendait tous ces buts aujourd'hui. Burke est très important pour nous, et je pense qu'il est le meilleur gardien au monde en ce moment. Mais quand vous avez Luongo pour le remplacer, ça va. Il est probablement le meilleur jeune gardien en devenir dans la NHL."
Slavomír Lener (entraîneur de la République Tchèque) : "Les Canadiens sont plus forts que les années précédentes, meilleurs patineurs, soudés et solides. C'est très difficile de leur trouver un point faible. Nous avons manqué beaucoup d'occasions, mais ils ont globalement dominés, plus frais et plus actifs. Nous avons réussi à revenir, mais nous avons joué ces minutes-là sur l'envie du moment. Après le quatrième but, il aurait fallu jeter plus de forces dans la bataille, autant que notre adversaire."
Canada - République Tchèque 8-4 (1-0, 2-2, 5-2)
Vendredi 9 mai 2003 à 17h00 à la Hartwall Arena de Helsinki. 12924 spectateurs.
Arbitrage de Thomas Andersson (SUE) assisté de Kevin Redding (USA) et Joacim Karlsson (SUE).
Pénalités : Canada 14' (4', 6', 4'), République Tchèque 8' (2', 2', 4').
Tirs : Canada 31 (8, 9, 14), République Tchèque 29 (11, 11, 7).
Évolution du score :
1-0 à 10'34" : Doan assisté de Brewer et Brière (sup. num.)
2-0 à 23'57" : Heatley assisté de Brière et Dandenault
3-0 à 29'39" : Bouwmeester assisté de Horcoff et Rivet
3-1 à 34'30" : Reichel assisté de Kadlec (sup. num.)
3-2 à 39'32" : Reichel assisté de Kadlec
3-3 à 42'04" : Hejduk assisté de Hudler et Špacek
4-3 à 43'20" : Calder assisté de Horcoff et Marleau
5-3 à 48'41" : Heatley assisté de Kolanos et Reinprecht
6-3 à 52'53" : Horcoff assisté de Marleau
6-4 à 57'08" : Duda assisté de Hudler et Modrý
7-4 à 57'40" : Dandenault assisté de Doan et Draper
8-4 à 58'25" : Heatley assisté de Maltby et Reinprecht
Canada
Gardien : Sean Burke puis Roberto Luongo à 28'10".
Défenseurs : Eric Brewer - Steve Staios ; Jay Bouwmeester - Craig Rivet ; Cory Cross - Mathieu Dandenault ; Jamie Heward.
Attaquants : Shane Doan - Kris Draper - Kirk Maltby ; Dany Heatley - Daniel Brière - Patrick Marleau ; Anson Carter - Mike Comrie - Ryan Smyth ; Kyle Calder - Steven Reinprecht - Shawn Horcoff ; Krys Kolanos.
République Tchèque
Gardien : Tomáš Vokoun puis Roman Málek à 29'39".
Défenseurs : Petr Kadlec - Jan Hejda ; Tomáš Kaberle - Jaroslav Modrý ; Jaroslav Špacek - Pavel Kolarík ; Martin Richter.
Attaquants : Jan Hlavác - Martin Straka - Milan Hejduk ; Jaroslav Hlinka - Robert Reichel - David Výborný ; Michal Sup - Josef Vašícek - Radek Duda ; Jindrich Kotrla - Jirí Hudler - Radim Vrbata ; Jaroslav Balaštík.
Surnuméraire : Pavel Trnka.