Russie - États-Unis (1er mai 2004)

 

Championnats du monde 2004, deuxième phase, groupe F.

Peter Laviolette surprend en alignant le jeune gardien Ty Conklin dans ce match capital. Le pari est payant car la révélation de la saison des Edmonton Oilers fait un très bon match. La Russie, qui retrouve ses lignes de départ, est désormais dos au mur et n'a d'autre choix que de gagner ce soir si elle veut accéder aux quarts de finale. Elle fait une première période correcte, notamment avec une percée d'Antipov, mais inefficace, car ses erreurs individuelles lui coûtent cher, une fois de plus. Une mauvaise passe d'Aleksandr Guskov, qui avait fait un bon championnat du monde jusqu'ici, est interceptée par le junior Dustin Brown dont le tir du poignet trouve la lucarne de Maksim Sokolov, qui ne peut pas tout faire.

Le deuxième tiers-temps réveille les espoirs de tous les supporters russes. Leur équipe y joue remarquablement, constante sur toutes les lignes, se créant occasion sur occasion avec brio. Dmitri Yushkevich est le plus prompt sur un palet qui traîne près du but dans une action confuse et égalise. Alors que Miller en prison pour un cinglage qui a cassé la crosse de Kovalchuk, un lancer d'Aleksandr Guskov est intelligemment dévié par Andreï Bashkirov, le joueur de Lausanne qui prouve par sa prestation de ce soir que les Russes ont tort d'avoir autant de dédain pour ceux des leurs qui évoluent dans d'autres championnats européens.

Mais ce match suit un déroulement exactement similaire à celui joué contre la Suède. C'est en troisième période, au moment où elle semble avoir le match en mains, que la Russie se montre fébrile et pleine de doutes. Encore une fois, elle se recroqueville, attend les contres, et est sanctionnée par une égalisation qui fera beaucoup parler. En effet, Jeff Halpern se trouve ostensiblement dans la zone et gêne le gardien Sokolov lors du tir de Ryan Malone. Pourtant, l'arbitre tchèque Vladimír Šindler se refuse à faire appel à la vidéo malgré les demandes des Russes. Ceux-ci peuvent-ils s'estimer victimes de l'arbitrage après le but à six des Slovaques hier ? Pas vraiment, parce qu'un but avait été refusé aux Américains à la neuvième minute sur une action confuse (il y avait trois joueurs de chaque camp dans le slot tellement la bataille y était intense), alors que l'égalisation de Yushkevich avait été accordée sur une action similaire.

Mais les Russes sont très nerveux, à l'image d'un Ilya Kovalchuk très volontaire mais mal canalisé, que les Américains pas fous se plaisent à titiller. Il faut dire que l'exemple vient d'en haut, car Viktor Tikhonov lui-même a été pris dans un échange verbal avec Mike Grier au premier tiers. Pas vraiment un exemple de maîtrise de soi. Une obstruction de Gill à moins de six minutes de la fin est pourtant une opportunité en or pour la Russie. Mais Kovalchuk s'emmêle un peu les pinceaux, Grier déborde sur le flanc droit et centre pour Chris Drury qui en bon capitaine inscrit le but décisif. La dernière chance de Skugarev est repoussée par la transversale. Comme à Saint-Pétersbourg il y a quatre ans, les Russes sont crucifiés par les Américains. Il ne leur reste plus qu'à espérer un miracle répété, sous la forme d'une nouvelle victoire du Danemark sur les États-Unis, car la protestation officielle déposée après le match contre l'arbitrage n'a évidemment aucune chance d'aboutir.

Compte-rendu signé Marc Branchu

 

Commentaires d'après-match

Peter Laviolette (entraîneur des États-Unis) : "Je suis terriblement fier de mes joueurs. Être mené en deuxième période par une équipe qui ne peut pas se permettre de perdre et ne pas douter une seule seconde qu'ils étaient capables non seulement de revenir mais aussi de gagner, cela mérite le respect. Ils ont tout donné aujourd'hui."

Mike Grier (attaquant des États-Unis) : "En première période, j'ai eu un duel avec Kovalchuk. À mon avis il était normal, il y en a suffisamment de similaires en NHL. C'est vrai, il a un peu levé la crosse et elle m'est retombée dans les dents. Quand je me suis relevé et que je suis passé près du banc russe, leur entraîneur m'a crié quelque chose, je ne sais pas quoi, bien sûr, puisqu'il parlait russe. Ce que je lui ai répondu, mieux vaut ne pas le répéter. [...] Les Russes s'appuient trop sur leur technique. Ils essaient l'impossible quand il faut jouer plus simple. L'exemple typique est notre troisième but. Kovalchuk a le palet contre la bande, et au lieu de l'envoyer dans notre zone, il fait une passe en retrait qui est interceptée. En NHL, on dit d'équipes comme celle-là qu'elles jouent selon l'axe ouest-est, en bougeant le palet transversalement. Notre équipe suit au contraire un diagramme nord-sud."

Viktor Tikhonov (entraîneur de la Russie) : "Nous perdons à cause de nos erreurs individuelles, commises le plus souvent par les mêmes, deux défenseurs et un attaquant. Je n'ai rien d'autre à ajouter."

Ilya Kovalchuk (attaquant de la Russie, dans Sport-Express) : "Je ne commenterai pas les méthodes de l'entraîneur. Vous n'avez qu'à lui demander. Non, ça ne se passe pas comme ça en NHL, peut-être dans les années 30 ou 40 mais plus aujourd'hui. Ils comprennent là-bas que le joueur n'est pas un robot. Il n'y a rien de terrible à ce qu'un homme commette parfois une erreur. Mais si on lui crie dessus à chaque fois, son désir de jouer peut disparaître. C'était différent avec Fetisov ou Plyushchev. Viktor Tikhonov est certainement quelqu'un de grand mérite, mais je crains que son approche des joueurs n'ait pas changé depuis le temps où il entraînait le CSKA de Kharlamov. [...] Qu'est-ce qu'il nous a manqué ? Dire que c'est la chance, c'est n'avoir aucun respect de soi. Le talent non plus, nous avons été battus par des joueurs de troisième ou de quatrième ligne de NHL. L'envie, nous en avions dans les vestiaires avant de rentrer dans le match. L'entraîneur trouvera bien quelqu'un à accuser. Personnellement, je pense que nous sommes coupables nous-mêmes, il n'est pas possible de rejeter la faute sur l'arbitre ou la glace. Peut-être que certains diront que ce sont les millionnaires de NHL qui n'ont rien fait, mais j'ai vu combien les joueurs qui ont fait une longue saison en Amérique du nord ont essayé. Tout le monde est responsable. Je ne veux pas charger les entraîneurs. Mais vous l'avez vu vous-mêmes. Vous avez vu ce qui s'est passé sur le banc, et ce qui s'est passé avant la compétition aussi. Les joueurs ont commencé à arriver un mois avant le début du tournoi après une longue saison, et on les a fait s'entraîner deux fois par jour. Restons-en là avec ce sujet. Considérons que moi et Tikhonov n'avons pas trouvé de langage commun."

 

Russie - États-Unis 6-1 (4-1, 1-0, 1-0)

Samedi 1er mai à 16h15 à la CEZ Arena d'Ostrava. 6512 spectateurs.

Arbitrage de Vladimír Šindler (TCH) assisté de Petr Blümel (TCH) et Dean Laschowski (CAN).

Pénalités : Russie 12' (4', 6', 2'), États-Unis 12' (2', 8', 2').

Tirs : Russie 35 (15, 15, 5), États-Unis 35 (16, 11, 8).

Évolution du score :

0-1 à 08'54" : Brown assisté de Cullen

1-1 à 28'01" : Yushkevich

2-1 à 34'41" : Bashkirov assisté de Guskov (sup. num.)

2-2 à 49'54" : Malone assisté de Rauch

2-3 à 55'25" : Drury assisté de Grier (inf. num.)

 

Russie

Gardien : Maksim Sokolov.

Défenseurs : Dmitri Yushkevich - Oleg Tverdovsky ; Dmitri Bykov - Vitali Proshkin ; Aleksandr Guskov - Dmitri Kalinin.

Attaquants : Aleksandr Ovechkin - Aleksandr Prokopiev - Maksim Sushinsky ; Ilya Kovalchuk - Alekseï Yashin - Valeri Zelepukin ; Nikolaï Pronin - Andreï Bashkirov - Maksim Afinogenov ; Alekseï Morozov - Aleksandr Skugarev - Vladimir Antipov.

Remplaçants : Egor Podomatski (G), Maksim Kondratiev, Vyacheslav Butsaïev.

États-Unis

Gardien : Ty Conklin.

Défenseurs : Hal Gill - Brett Hauer ; Aaron Miller - Paul Mara ; Jeff Jillson - Andy Roach ; Keith Ballard.

Attaquants : Bates Battaglia - Mike Grier - Erik Westrum ; Chris Drury - Andy Hilbert - Richard Park ; Jeff Halpern - Adam Hall - Ryan Malone ; Blake Sloan - Matt Cullen - Dustin Brown ; Jeff Hamilton.

Remplaçant : Mike Dunham (G).

 

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