République Tchèque - États-Unis (12 mai 2005)

 

Quart de finale des championnats du monde 2005.

Belle affiche aux allures de revanche au programme de ces quarts de finale. Il ne faut en effet pas remonter bien loin dans l'histoire des championnats du monde pour retrouver trace d'un affrontement entre Tchèques et Américains à ce stade de la compétition. C'était l'an dernier à Prague, et les joueurs de Peter Laviolette avaient créé la surprise en s'imposant à l'issue des tirs aux buts grâce à un joueur sorti de nulle part ou presque, Andy Roach, qui avait marqué un penalty gravé dans les mémoires. De la mémoire, les Tchèques en ont forcément, et c'est bien leur revanche qu'ils sont décidés à prendre sur la glace de la Stadthalle.

Jaromir Jagr donne le ton en se présentant en bonne position face à Rick Di Pietro (préféré à Ty Conklin qui avait dû son titre de meilleur gardien du tournoi à son match contre les Tchèques l'an passé), mais il ne cadre pas son tir. Jeff Halpern réplique en mettant la pression sur la cage de Vokoun. Le ton du match était donné. Jagr fait admirer sa technique en s'offrant un slalom dans la défense américaine avant de passer le palet entre les jambes de Hal Gill. Déjà se profile un match dans le match entre deux légendes en activité de la NHL : Modano et Jagr, systématiquement opposés lors de leur présence sur la glace. Après une phase de jeu à quatre contre quatre, les Américains commettent leur première erreur du match, un surnombre qui offrait un avantage numérique aux Tchèques. Ces derniers s'installent facilement mais peinent à trouver des ouvertures dans la défense compacte des Américains. Et au terme de la pénalité, ils se font même surprendre par un contre de toute beauté : une entrée de zone de Brett Hauer qui sert Erik Cole en mouvement, lequel croise avec Mike Modano qui bat Vokoun pour un but imparable (0-1, 09'18") ! Crispés en ce début de match, les Tchèques se sont fait surprendre et les souvenirs de Prague commencent à les hanter. Jiri Slegr sonne la révolte d'un lancer balayé mais les Tchèques négocient très mal un 3 contre 1. La fin du tiers est tchèque : Straka fonce vers la cage, Spacek lance de loin, Hlavac mène un deux contre un. À chaque fois Di Pietro, rarement masqué, s'interpose et préserve un court mais précieux avantage à la pause.

La tendance constatée en fin de tiers se confirme dans la période intermédiaire. Hormis un tir de Modano qui n'est pas cadré, toutes les occasions sont tchèques. Les hommes de Vladimir Ruzicka ont passé l'accélérateur et la pression est énorme. Sykora, Zidlicky et Prospal mettent tour à tour en danger Di Pietro qui ne sait plus où donner de la tête. Malheureusement, une faute de Kaberle sur Cole parti en contre vient freiner ce bel élan. En résulte une supériorité numérique où le jeu en mouvement américain va encore parler : sur une nouvelle entrée de zone très propre, Brett Hauer passe en retrait à Zach Parisé qui trouve immédiatement Mark Parrish aux abords du slot. Et de deux pour les États-Unis (0-2, 25'47") !

Les Tchèques, sonnés, frisent la correctionnelle lorsque le même Hauer adresse un centre parfait à Yan Stastny, oublié par la défense tchèque, mais cette fois Vokoun s'interpose. Hal Gill est à son tour envoyé en prison pour avoir fauché Varada dans son élan et s'en sort même assez bien avec une simple pénalité. Le jeu de puissance tchèque est un modèle du genre avec Jagr, Kubina puis Zidlicky qui bombardent Di Pietro... en vain. Weight tente de porter le danger en contre en servant Parrish en retrait mais l'attaquant des Islanders butte sur Vokoun toujours présent. Comme lors du premier tiers, les partenaires de Jagr, toujours aussi à l'aise avec le palet, finissent en trombe et assiègent la cage de Di Pietro. Mais Zidlicky rate une cage ouverte et Prospal tombe dans l'indiscipline en commettant une faute inutile sur Miller : le piège américain semble se refermer sur les Tchèques.

Deux buts à remonter en un tiers : voilà un objectif pas forcément évident à réaliser au vu du match parfait réalisé défensivement par les Américains jusqu'à présent. Et pourtant... Un premier slap puissant de Slegr va faire basculer le match : le palet heurte le casque de Di Pietro. Le jeu s'arrête pendant quelques instants, le temps de réparer le casque endommagé. Sur l'engagement, un tir anodin de Marek Zidlicky le long de la bande traverse un forêt de jambes et surprend Di Pietro sans doute encore un peu déconcentré (1-2, 41'40"). Di Pietro s'empresse de remplacer son casque mais le mal est fait : les Tchèques ont repris espoir.

Après une réaction immédiate des Américains, les Tchèques vont vite reprendre l'initiative des opérations avec un schéma de jeu assez classique : les défenseurs slapent à la bleue et les attaquants créent du trafic devant la cage de Di Pietro pour le masquer ou prendre des rebonds. Le gardien des Islanders n'est décidément pas à la fête dans ce tiers puisqu'il se fait percuter par son coéquipier Aaron Miller sur une échappée de Rucinsky puis se voit infliger deux minutes de pénalités pour avoir fait le ménage devant sa cage. Les Américains tuent la supériorité numérique tchèque mais cèdent dans les instants qui suivent sur une inspiration géniale de Vaclav Prospal qui feinte le tir, attire le gardien et passe finalement à Jaroslav Spacek au second poteau qui n'a plus qu'à pousser le palet dans la cage vide (2-2, 49'50"). La Stadthalle, entièrement acquise aux Tchèques, peut exulter : ils ont réussi leur pari. Les Américains sont désormais obligés d'attaquer à nouveau et ils en profitent à quatre contre trois : Modano et Knuble s'illustrent sur le jeu de puissance, Weight lance sur Vokoun qui reste intraitable. Les Tchèques sont désormais plus prudents et Jaromir Jagr est contré par Andy Roach sur une ultime occasion : place à la prolongation.

Et ce sont les Américains qui vont le mieux profiter des espaces laissés par le jeu à quatre contre quatre, en particulier sous l'impulsion de défenseurs offensifs comme Liles, Hauer ou Roach qui n'hésitent pas à créer le surnombre en attaque. Une passe en retrait du dernier nommé pour Parrish semble sonner la fin de la mort subite, mais Tomas Vokoun s'interpose brillamment. Il est tout aussi spectaculaire en bloquant un tir de John-Michael Liles seul face aux buts. Du côté tchèque, seuls Jagr en solo ou Hemsky qui coupe une passe devant les buts semblent en mesure de marquer. La domination américaine est telle que les Tchèques se font même sanctionner pour une faute de Zidlicky sur Knuble devant les buts à trente secondes de la fin. Andy Roach tente d'arracher la victoire sur le (court) jeu de puissance mais en vain...

Comme un an auparavant, c'est donc la séance des tirs aux buts qui va décider du sort de la rencontre. Mike Knuble ne montre pas beaucoup d'imagination sur son premier tir stoppé sans problème par Vokoun. À l'inverse, Martin Rucinsky force Di Pietro à effectuer le premier geste et change de côté au dernier moment pour loger le palet dans la cage vide. Doug Weight manque de réussite en tirant sur le poteau. Di Pietro a retenu la leçon et reste cette fois imperturbable face à Jan Hlavac. Les grandes stars Modano et Jagr ne connaissent pas plus de réussite. Parrish manque la cadre et Hemsky se fait surprendre par un puck check de DiPietro avant même d'avoir tiré. Se présente alors Andy Roach pour le dernier tir au but américain. Mais cette fois le miracle ne se reproduira pas. Il sera le seul tireur américain à tenter une feinte (tous les autres avaient tiré), mais Vokoun ne se laisse pas surprendre et prend sa revanche, envoyant ainsi la République Tchèque en demi-finale. Les meilleurs sur l'ensemble du match ont cette fois gagné, mais quel suspense !

Élus meilleurs joueurs du match : Martin Rucinsky pour la République Tchèque et Rick DiPietro pour les États-Unis.

Meilleurs joueurs du tournoi pour les États-Unis : Mark Parrish, Mike Knuble et Rick DiPietro.

Compte-rendu signé Christophe Laparra (photos Francis Larrède)

 

Commentaires d'après-match :

Vladimir Ruzicka (entraîneur de la République Tchèque) : "Nous avons raté notre début de match. Dieu soit loué, il a été possible de marquer ce but en début de troisième période. Quant aux tirs au but, c'est une question de réussite. Je suis heureux pour notre gardien, Tomas Vokoun, en qui les supporters n'auraient pas misé une seule couronne avant les championnats du monde. Nous lui devons cette victoire."

Tomás Vokoun (gardien de la République Tchèque) : "On a essayé de se battre. On savait que si on arrivait à marquer ce premier but, on avait une chance. Ça a été un moment clé du match. Je pense que nous avons dominé la troisième période. Ils ont des joueurs grands et rapides : en prolongation, cela leur a donné un petit avantage. Nous étions les plus chanceux cette année. Nous avons fixé notre objectif : nous voulons aller en finale. C'est toujours agréable quand on gagne un match serré. Parfois cela fait encore plus plaisir que de gagner 5-1. C'était un sentiment extraordinaire pour nous. On a espéré et fait tout ce qui était en notre pouvoir."

Peter Laviolette (entraîneur des États-Unis) : "Je suis incroyablement fier de cette équipe et reconnaissant envers elle. Ils ont quitté leurs familles pendant un mois pour représenter leur pays dans ce remarquable tournoi. Nous savions que les Tchèques étaient peut-être la meilleure équipe de la compétition, et ils l'ont prouvé. Il est très dur d'avaler une défaite aux tirs au but, maintenant je comprends comment les Tchèques se sentaient l'an dernier dans la même situation. Roach tire des penaltys toute l'année dans les ligues dans lesquelles il joue [NB : c'était vrai pour la DEL mais c'est faux pour la LNA suisse où il a joué cette année avec Lausanne]. C'était un élément important. Quand on est bon dans cet exercice, on essaie d'improviser quand on approche des buts. Mais ça n'a pas marché pour Andy aujourd'hui."

Andy Roach (défenseur des États-Unis) : "Chaque fois que ça va aux tirs aux buts, tout peut arriver. Vu l'état de la glace aujourd'hui, les chances aux tirs aux buts sont clairement en faveur du gardien. Je savais que le mouvement que j'avais fait l'an dernier face à Vokoun ne remarcherait pas cette année."

 

République Tchèque - États-Unis 2-2 (0-1, 0-1, 2-0, 0-0) / 1-0 aux tirs au but

Jeudi 12 mai à 16h15 à la Stadthalle de Vienne. 7700 spectateurs.

Arbitrage de Rob Matsuoka (CAN) assisté de Antti Hämäläinen (FIN) et Joacim Karlsson (SUE).

Pénalités : République Tchèque 16' (4', 4', 6', 2'), États-Unis 12' (4', 2', 6', 0')

Tirs : République Tchèque 53 (13, 18, 15, 6), États-Unis 27 (8, 8, 5, 6).

Évolution du score :

0-1 à 09'18" : Modano assisté de Cole et Hauer

0-2 à 25'47" : Parrish assisté de Parisé et Hauer (sup. num.)

1-2 à 41'40" : Zidlicky assisté de Vyborny

2-2 à 49'50" : Spacek assisté de Prospal

Tirs au but :

République Tchèque : Rucinsky (réussi), Hlavac (arrêté), Jagr (arrêté), Hemsky (arrêté).

États-Unis : Knuble (arrêté), Weight (poteau), Modano (arrêté), Parrish (à côté), Roach (arrêté).

 

République Tchèque

Gardien : Tomás Vokoun.

Défenseurs : Tomás Kaberle - Jirí Slegr ; Jaroslav Spacek - Pavel Kubina ; Jirí Fischer - Marek Zidlický ; Jan Hejda - Frantisek Kaberle.

Attaquants : Martin Straka - Václav Prospal - Jaromír Jágr ; Jan Hlavac - David Výborný - Petr Sýkora ; Martin Rucinský - Petr Cajánek - Radek Dvorák ; Václav Varada - Josef Vasícek - Ales Hemsky.

Remplaçant : Milan Hnilicka (G). Absents : Radim Vrbata, Petr Prucha (surnuméraires).

États-Unis

Gardien : Rick DiPietro.

Défenseurs : Brett Hauer - Aaron Miller ; Jordan Leopold - Andy Roach ; Hal Gill - Paul Martin ; John-Michael Liles.

Attaquants : Mike Knuble - Mike Modano - Erik Cole ; Mike York - Doug Weight - Mark Parrish ; Yan Stastny - Zach Parisé - Brian Gionta ; Adam Hall - Jeff Halpern - Kevyn Adams.

Remplaçant : Ty Conklin (G). Absents : Matt Cullen (blessé), Richard Park, Ryan Suter, David Legwand.

 

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