Canada - Suisse (28 décembre 2005)

 

Championnats du monde des moins de 20 ans 2006, groupe A.

Les deux vainqueurs du premier jour s'opposent dans le groupe A. L'objectif est de bien se positionner pour la suite de la compétition. Les deux formations sont inchangées côté canadien (même si Downie, malade, avait manqué l'entraînement de la veille) et légèrement retouchées côté suisse. En effet, Juraj Simek s'est blessé en entrant lors de l'échauffement, trébuchant sur une glace tout juste refaite au premier coup de patin. Le gardien Berra se voit offrir un deuxième départ dans ce tournoi, de même que son vis-à-vis Pogge, même si Brent Sutter avait un temps songé à aligner Dubnyk, ce qui pourrait arriver au match suivant face à la Norvège. Toutefois le Canada ne peut pas se permettre de se reposer si tôt dans le tournoi : il faut accumuler les points.

La Suisse n'est pas prête à abandonner sans combattre. Le début de match est ainsi relativement physique, avec des Canadiens attentistes. Le coach a eu beau répéter qu'il fallait avoir une mentalité de meute de loups, les crocs ne sont pas vraiment de sortie... L'arbitrage est très sévère et les pénalités pleuvent, sans pour autant que les locaux ne parviennent à exploiter la faille. Mauvaises passes et mauvais choix rendent le jeu de puissance stérile. En face les Helvètes multiplient les mises en échec, poussant leur adversaire à la faute. Tom Pyatt est puni pour faire trébucher, imité par Ryan O'Marra pour accrocher. À deux de moins cela devient compliqué et la Suisse ouvre la marque d'un tir de la bleue d'Eric Blum entre les jambières du gardien. Ce but réveille vaguement les joueurs à la feuille d'érable, et une erreur adverse permet finalement l'égalisation. Sur un changement de ligne maladroit, la défense suisse laisse Dustin Boyd seul en zone d'attaque pour recevoir une belle passe de Cam Barker. Boyd fixe l'unique défenseur revenu pour servir par une passe lobée Steve Downie lancé à toute vitesse. Ce but change la physionomie de ma partie, plus équilibrée. Ryan O'Marra répond ainsi au défi physique suisse par une grosse mise en échec sur Dario Bürgler. Bieber répond avec une belle mise en échec en milieu de glace sur Chipchura, que l'arbitre sanctionne sévèrement d'une obstruction... annulant une supériorité suisse. Dans les secondes qui suivent, le Canada prend l'avantage sur une mise au jeu en zone offensive. Boyd gagne le duel et envoie le palet en arrière sur Kris Letang dont le tir est dévié et abouti sur la crosse de Boyd, qui glisse le palet tranquillement entre les jambières de Berra. Au final, un Canada qui s'en sort bien avec un premier tiers transparent et des joueurs peu concernés, à l'image d'Andrew Cogliano qui offre littéralement le palet à un adversaire pour une chance en infériorité numérique.

La chance suisse est-elle passée ? Toujours est-il que les Canadiens rentrent sur la glace avec conviction en attaque, mais un peu plus de crainte en défense. Sutter décide même de punir Cogliano en le maintenant sur le banc pendant de longues périodes, coupable d'avoir trop joué sur les côtés au lieu de foncer vers le but. Malgré tout, la domination est désormais nord-américaine. Le Canada est plus discipliné qu'en début de match et inquiète plus le gardien. À la mi-match, Pyatt sort le palet du coin et le passe à Bourdon du patin. Le lancer puissant de Luc Bourdon profite ainsi à... Tom Pyatt, qui pousse le rebond au fond des filets. Quelques minutes plus tard, Eric Blum écope de deux minutes pour une charge trop sévère. Le Canada combine bien et Benoît Pouliot réussit le geste du jour avec une passe aveugle entre ses propres jambes pour David Bolland. Le buteur des London Knights ne manque pas l'offrande et marque dans une cage ouverte pour donner trois buts d'avance à son équipe. Toutefois la Suisse n'abdique pas. Profitant du relâchement adverse, Sprunger gagne un duel le long de la bande et libère le palet pour Yanick Weber, qui réduit le score sur un tir lointain du poignet traversant une forêt de jambes et atterrissant dans la lucarne de Pogge. Le portier canadien a du se montrer solide dans cette période avec de nombreux arrêts difficiles mais ne peut rien faire sur le coup. Le deuxième tiers s'achève prématurément lorsque Alessandro Chiesa explose un plexiglas en voulant dégager le palet. Les cinquante-sept dernières secondes sont donc reportées en début de troisième tiers temps et les joueurs rentrent au vestiaire sur ce score serré de 4-2.

Les consignes de sévérité données aux arbitres jouent alors un rôle capital d'entrée. Frank Awizus multiplie les pénalités, tout en étant très critiqué sur ce match par les deux camps, ce qui finalement équilibre les choses... À sa décharge il a probablement été victime d'un excès de zèle en suivant plus qu'à la lettre les nouvelles consignes IIHF. Marc Staal est puni pour faire trébucher et la Suisse concrétise son avantage numérique. Matthias Bieber lance puissamment depuis la ligne bleue et la rondelle est déviée dans le but par Julien Sprunger au-dessus du gant du gardien... Le Canada tente de ne pas paniquer et au contraire appuie sur l'accélérateur pour reprendre le contrôle du jeu. Fidèle à la devise "la meilleure défense, c'est l'attaque", les hommes de Sutter tentent d'inquiéter Berra. Mais Pouliot encaisse une pénalité pour coup de coude accompagnée d'une crosse haute dans la foulée en s'énervant derrière le but... Quatre minutes de supériorité s'offrent aux Suisses pour revenir et les occasions menacent Pogge. Malheureusement pour Bürgler, sa pénalité pour faire trébucher redonne de l'air aux Canadiens. Pire, Julian Walker est sanctionné pour un plongeon et cette simulation empêche toute tentative de sortir le gardien dans les dernières minutes.

Le Canada s'impose donc au forceps 4-3, le plus faible écart entre les deux équipes depuis 1996 (2-1). Cela reste toutefois la 16e victoire consécutive du tenant du titre sur son adversaire du jour depuis 1980, avec jusque là un score combiné de 106-28. Malgré tout, le Canada a ce soir montré ses limites... et reste un outsider sur son propre sol. Avertissement sans frais...

Désignés meilleurs joueurs du match : Steve Downie pour le Canada, Reto Berra pour la Suisse.

Compte-rendu signé Nicolas Leborgne

 

Commentaires d'après-match :

Brent Sutter (entraîneur du Canada) : "Leur équipe a très bien joué. Ce sont des grands gabarits avec de belles qualités de patinage et en supériorité numérique, et ils étaient très motivés. Vous pouvez écrire tout ce que vous voulez mais ce n'est pas l'équipe qu'ils avaient au Dakota l'an dernier. Peut-être que cela est dû au fait que nous n'avons pas réalisé à quel point ils allaient se battre. Nous ne pouvons pas jouer avec de telles prises de risque. Dans les dix premières minutes, nous étions nonchalants. Quand vous ne réussissez pas le départ voulu, vous devez en tirer les conséquences. Le plan de jeu n'a pas été respecté comme l'aurait voulu le staff. Mais nous avons progressé au cours du match et serons encore meilleurs la prochaine fois. La réalité c'est que nous devons nous montrer meilleurs, tout comme l'arbitrage. Je pense qu'il a surpris les deux équipes, mais [Awizus] a vu les choses ainsi. Quand vous avez sept pénalités sur les sept premières minutes vous savez à quoi vous en tenir... Vous ne pouvez pas vous arrêter à cela sans quoi vous allez vous arracher les cheveux. À la fin vous devez juste gagner le match. La double pénalité contre Pouliot est très égoïste, il n'a pas pensé à son équipe. J'espère qu'il ne recommencera pas car ce n'est pas le genre de geste que je tolère. Cogliano jouait trop sur le périmètre. C'est un match pour lequel vous devez rentrer dans une bagarre de tranchées et il jouait à l'extérieur. Après l'avoir mis sur le banc en deuxième tiers je l'ai relancé en troisième période et j'ai trouvé qu'il jouait mieux. Downie comprend le jeu et joue avec son cœur. C'est le genre de joueur que vous aimez avoir dans votre équipe."

Steve Downie (attaquant du Canada) : "Nous n'étions pas préparés, or vous devez entrer sur la glace prêts à jouer n'importe quelle équipe. Le coach nous l'a bien fait comprendre. Je pense que de frôler la défaite est un mal pour un bien car nous allons en tirer les leçons. Nous les avons pris de haut et nous ne pouvons pas nous permettre de recommencer à gaspiller des avantages au score. Nous avons été chanceux ce soir. Nous avons tenté de jouer en finesse mais nous ne sommes pas une équipe capable de jouer en finesse."

Jakob Kölliker (entraîneur de la Suisse) : "Nous voulions donner à tout ce public de Vancouver un bon match de hockey, et nous nous sommes bien battus. Je pense que ce match a été très bon de notre part. Nous n'avons pas obtenu le point que nous méritions mais c'est ainsi. L'arbitrage n'est pas de notre ressort. Nous faisons notre travail et l'arbitre le sien. Ce n'est pas à moi de juger sa performance."

 

Canada - Suisse 4-3 (2-1, 2-1, 0-1)

Mercredi 28 décembre 2005 à 16h00 au Pacific Coliseum de Vancouver. 16123 spectateurs.

Arbitrage de Frank Awizus (ALL) assisté de Georgij Jablukow (ALL) et Konstantin Gordenko (RUS).

Pénalités : Canada 20' (10', 4', 6'), Suisse 22' (12', 6', 4').

Tirs : Canada 32 (13, 10, 9), Suisse 17 (7, 7, 3).

Évolution du score :

0-1 à 05'33" : Blum assisté de Simek (sup. num.)

1-1 à 08'45" : Downie assisté de Boyd et Barker (sup. num.)

2-1 à 17'45" : Boyd assisté de Downie et Letang

3-1 à 30'00" : Pyatt assisté de Bourdon et Comeau

4-1 à 33'39" : Bolland assisté de Pouliot et Barker (sup. num.)

4-2 à 34'37" : Weber assisté de Sprunger

4-3 à 42'42" : Sprunger assisté de Bieber et Joggi (sup. num.)

 

Canada

Gardien : Justin Pogge.

Défenseurs : Marc Staal - Ryan Parent ; Kris Russell - Cameron Barker ; Luc Bourdon - Kristopher Letang ; Sasha Pokulok.

Attaquants : Michael Blunden - Jonathan Toews - Benoît Pouliot ; Blake Comeau - Dustin Boyd - Guillaume Latendresse ; Kyle Chipchura - Andrew Cogliano - David Bolland ; Steve Downie - Daniel Bertram - Ryan O'Marra ; Tommy Pyatt.

Remplaçant : Devan Dubnyk (G).

Suisse

Gardien : Reto Berra.

Défenseurs : Eric Blum - Raphael Diaz ; Patrick Parati - Alessandro Chiesa ; Yannick Weber - Simon Lüthi ; Claudio Berchtold.

Attaquants : Julien Sprunger - Matthias Bieber - Julian Walker ; Matthias Joggi - Janick Steinmann - Niccolo Spolidoro ; Stephen Moser - Jeremy Gaillard - Fadri Lemm ; Steve Kellenberger - Juraj Simek - Fredi Bürgler ; Christopher Rivera.

Remplaçant : Lars Haugen (G).

 

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