Lokomotiv Yaroslavl - Ak Bars Kazan (5 avril 2006)

 

Quart de finale de Superliga russe, match 3.

Gare à la panthère blanche ! Le chaton des beaux quartiers inoffensif de l'an passé s'est transformé en redoutable félin prédateur cette saison ! Après une saison régulière, sans à-coups, à patte de velours, la panthère des neiges tatares sort les griffes dans les play-offs. Trois victoires à une en huitièmes de finale contre le promu policier Tver, trois victoires à zéro en quart contre le voisin bachkir d'Oufa et une avance de deux succès en demie contre le Lokomotiv Iaroslavl qui a pris deux gros coups de patte, 5-1 et 4-1 lors des deux premières confrontations dans la Tatneft Arena.

On reste dans une patinoire ultra-moderne, l'Arena-2000, mais l'on monte au nord, à Iaroslavl, pour la suite de cette bataille "historique" entre deux fières cités ancestrales. Une bataille que l'on sent cependant être déjà jouée psychologiquement, tellement les Tatars ont imposé leur marque lors des matches disputés à Kazan, et même plus globalement depuis le début des phases finales où l'équipe verte et rouge semble patiner un ton au-dessus des autres.

À signaler une particularité dans ces demi-finales : les quatre gardiens titulaires sont canadiens ! Stephen Valiquette à Iaroslavl, Fred Brathwaite à Kazan, Travis Scott à Magnitogorsk et Norm Maracle à Omsk. Comme quoi, la règle d'or pour réussir dans des play-offs est simple : avoir un gardien parfait. Et si l'on ne le trouve pas sur place, et bien, on commence son recrutement par ce poste décisif en allant se servir à l'étranger. Si vous voyez ce que je veux dire... Aucun des demi-finalistes russes ne fait jouer un jeune gardien russe pour l'aguerrir. Ils laissent cela aux clubs moins huppés. Parenthèse refermée...

Le début du match est prudent des deux côtés. Il faut attendre la mort des deux premières minutes pour voir les locaux du Loko prendre les choses en main. Ils y sont aidés par la première pénalité du match, infligée à la quatrième au remuant attaquant tatar, formé en Sibérie, Sergueï Zinoviev. Les visiteurs multiplient d'ailleurs leurs possibilités de mettre en applications leurs schémas de jeu en infériorité, puisque juste après celle de Zinoviev, c'est une autre pénalité qui est sifflée contre un joueur de Kazan, le défenseur, Evgueni Riassenski (un junior arrivé en début de saison... des Krylia Sovietov). Mais Fred Brathwaite est parfait dans ses cages et le train de Iaroslavl ne siffle pas (À chaque but du Loko, un bruit de sifflet de train retentit dans l'Arena-2000, tchou tchou !). Les Rouges et Blancs de Iaroslavl font le siège de Kazan, mais rien ne passe, même à quatre contre quatre lorsque Zinoviev et Nepraïev vont se calmer deux minutes. Ils ont encore une occasion de choix lorsqu'à la seizième minute Alexeï Mikhnov file seul au but. Mais Fred Brathwaite effectue un arrêt spectaculaire en se couchant pour boucher son angle. Le palet lui passe certes au-dessus, mais il longe la ligne, avant qu'un de ses défenseurs n'écarte définitivement le danger. Trois minutes plus tard, belle réponse tatare avec une action confuse devant la cage de Valiquette. Un raid mené par Dimitri Oboukhov. Le Loko a dominé cette première période, mais sans conclure. La machine tatare est également impressionnante défensivement.

Changement de décor en deuxième période. Les visiteurs s'enhardissent. Et cela fonctionne dès leur première supériorité du match, après une pénalité contre Karel Rachunek, le défenseur tchèque dont le retour de blessure était très attendu à Iaroslavl. Le temps d'installer la boîte, et un tir de l'un des nombreux transfuges du Dynamo Moscou, le défenseur Ilia Nikouline, transperce Stephen Valiquette. Leçon d'efficacité d'une équipe qui ne doute pas. Pourtant, une minute plus tard, la réponse du chef de gare est cinglante. L'aiguilleur de l'attaque du Loko, Anton Bout, met son but. 1-1 pratiquement à la mi-match.

Mais il en faut plus pour déstabiliser les hordes tatares. Et c'est le khan en personne, le capitaine Alexeï Morozov, qui sonne la charge. Un raid lancé depuis son camp de base qui est difficilement repoussé par Valiquette. Morozov illumine ces phases finales, le "Moscovite ailé" a d'ailleurs été désigné meilleur joueur des play-offs par le quotidien Sport Express admiratif devant la fin de saison du joueur issu des KSM.

Et c'est, évidemment, Alexeï Morozov qui est à l'origine de la banderille sanglante qui suit. Une passe au cordeau pour son compère de ligne Sergueï Zinoviev qui, laissé tout seul devant la cage, sème la désolation chez les "Iaroslaviens" pour le 1-2.

Une fois de plus, le Lokomotiv parvient cependant à réagir pratiquement dans la minute. Un tir lointain d'Alexandre Galimov transperce la défense de Kazan et semble passer entre les jambières de Fred Brathwaite. Mais il en faut plus pour faire douter la panthère blanche tatare. Une minute plus tard, une superbe attaque en deux contre un se conclut par un tir de près victorieux d'Alexandre Stepanov, qui a peut-être un peu bousculé Valiquette dans son élan. Quoi qu'il en soit la ligne des trois anciens du Dynamo de Moscou, Stepanov-Terechtchenko-Vorobiev a assommé le Loko.

En reprenant l'avantage à moins de deux minutes de la sirène, Kazan a psychologiquement marqué un adversaire déjà affaibli dans ce domaine par les deux claques prises à Kazan et qui doit se rappeler que cette saison, il n'a jamais encore réussi à battre l'Ak bars... Surtout que le duo Morozov-Zinoviev remet d'entrée de troisième tiers ! Une passe au laser d'Alexei Morozov sur l'aile pour Sergueï Zinoviev décalé et cela fait 4-2 au bout de quatre minutes dans l'ultime période. Le Loko se dirige vers une voie de garage. Surtout que les "cheminots" se trompent de cible en s'énervant. Le Tchèque Karel Rachunek prend deux minutes pour une charge franchement limite, suivi dans la foulée par un 2'+10' infligé à l'attaquant Andreï Taratoukhine. Il n'en faut pas plus à Alexeï Morozov ! Le Krylia sovietien se régale et vient marquer de près le cinquième but.

Visiblement vexé, Karel Rachunek remet cela. Une autre vilaine charge de l'ancien défenseur de Zlin, passé par la LNH est cette fois-ci sanctionné par un juste 5'+20'. Cette fois-ci la messe est dite (euh, les Tatars sont musulmans, mais comme ils sont "tous" moscovites dans cette équipe d'Ak bars...), le Lokomotiv a déraillé. La fin de match ne sert plus à rien. Les locaux n'y croient plus et les visiteurs attendent la sirène finale. C'est la sirèèèèène finaaaaaleeeeuh, groupons-nous et demain, l'ak barseeeeuk kazan sera champion d'Russie !

Et lorsque cette fameuse sirène retentit, les joueurs verts et rouges forment une montagne en signe d'allégresse. Humiliée l'an passé en quart de finale par ce même Lokomotiv, l'équipe la plus chère de Russie a pris sa revanche en revenant à plus de simplicité un an plus tard. Ce qui fait écrire, avec ironie, à Sport Express que, devant une telle joie, on pourrait croire que Kazan n'a pas gagné depuis mille ans. Une allusion aux célèbres fêtes des mille ans de Kazan, l'an passé, qui auraient dû se terminer par le titre de champion pour l'Ak bars et qui s'était terminé en queue de poisson, ce qui n'est pas esthétique pour une panthère.

Au contraire, en ce printemps 2006, c'est le poil luisant que la grosse bébête tatare affronte ces play-offs. Et à mon avis, il faudra se méfier des coups de griffes en finale.

Étoiles du match : *** Alexeï Morozov (Kazan), ** Sergueï Zinoviev (Kazan), * Fred Brathwaite (Kazan).

 

Commentaires d'après-match

Vladimir Yurzinov (entraîneur de Yaroslavl) : "Ak Bars est très fort aujourd'hui. Je ne vais pas commencer à dresser le bilan de la saison : les émotions de ce match ne me permettront pas de le dresser objectivement."

Zinetula Bilyaletdinov (entraîneur de Kazan) : "Le Lokomotiv est une équipe très forte avec une composition stable qui a dékà été championne. Nous avons abordé chaque match comme une finale. Les scores de nos trois victoires ne reflètent pas l'intensité des duels. Un joueur du niveau de Morozov aurait dû être présent aux JO. Mais il s'est passé ce qui s'est passé, et tant mieux pour nous si ça profite à son club."

 

Lokomotiv Yaroslavl - Ak Bars Kazan 2-5 (0-0, 2-3, 0-2)

Mercredi 5 avril 2006 à l'Arena-2000 de Yaroslavl. 9046 spectateurs.

Arbitrage de M. Bulanov (Moscou) assisté de MM. Anissimov et Kamurkin.

Pénalités : Yaroslavl 49', Kazan 28'.

Tirs : Yaroslavl 32 (18, 10, 4), Kazan 26 (6, 14, 6).

Évolution du score :

0-1 à 26'13" : Nikulin assisté de Pervyshin et Vorobiev (sup. num.)

1-1 à 27'27" : But assisté de Schastlivy et Vlassenkov

1-2 à 35'49" : Zinoviev assisté de Zaripov et Morozov

2-2 à 37'33" : Galimov assisté de Glazachev et Ignatov

2-3 à 38'38" : Stepanov assisté de Tereshchenko et Vorobiev

2-4 à 44'18" : Zinoviev assisté de Morozov

2-5 à 49'03" : Morozov assisté de Vorobiev (sup. num.)

 

Lokomotiv Yaroslavl

Gardien : Stephen Valiquette (CAN).

Défenseurs : Alekseï Vasiliev - Oleg Davydov ; Sergei Zhukov - Karel Rachunek (TCH) ; Ilya Gorokhov - Dmitri Krasotkin (c) ; Nikolaï Ignatov - Alekseï Shvalev.

Attaquants : Alekseï Mikhnov - Andreï Taratukhin - Vladimir Antipov ; Anton But - Dmitri Vlasenkov - Piotr Schastlivy ; Konstantin Rudenko - Ivan Nepraïev - Ivan Tkachenko ; Aleksandr Galimov - Guennadi Churilov - Konstantin Glazachev.

Remplaçant : Egor Podomatski (G).

Ak Bars Kazan

Gardien : Fred Brathwaite (CAN).

Défenseurs : Raymond Giroux (CAN) - Vitali Proshkin ; Ilya Nikulin - Konstantin Korneïev ; Igor Shadilov - Andrei Pervyshin ; Evgeni Riasenski - Serhyi Klimentiev (UKR).

Attaquants : Danis Zaripov - Sergei Zinoviev - Aleksei Morozov (c) ; Aleksandr Stepanov - Aleksei Tereshchenko - Vladimir Vorobiev ; Dmitri Obukhov - Aleksei Badyukov - Dmitri Dudarev ; Enver Lisin - Mikhaïl Yonkov - Aleksei Kosurov.

Remplaçant : Aleksandr Eremenko (G).

 

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