Suède - République Tchèque (21 mai 2006)

 

Finale des championnats du monde 2006.

L'année de la Suède

Le champion olympique contre le championnat du monde en titre : cette affiche est un classique du hockey, et pourtant ces deux équipes ne se sont jamais rencontrées en finale. Il plane donc un parfum d'inédit sur la Riga Arena. Sur le plan disciplinaire, la méconduite de match de Mika Hannula a été commuée en pénalité de match après coup pour son agression sur Crosby. Dans les rangs tchèques, en revanche, le leader défensif Tomas Kaberle est bien présent, et heureusement car il n'y aurait pas eu grand monde pour le remplacer. Il a échappé à la suspension en dépit de la bagarre dans laquelle il a été entraîné hier par Olli Jokinen.

Les Tchèques avaient annoncé ne plus vouloir être dominés en première période, et ils mettent la pression d'entrée avec l'aide d'une supériorité numérique. Le premier jeu de puissance suédois est encore plus dangereux, mais Mikael Samuelsson manque de précision alors que l'excellente passe de Michael Nylander lui a ouvert la cage. À la huitième minute, Andreas Karlsson tire à ras la glace dans les filets, mais l'arbitre avait justement sifflé auparavant en raison d'une passe à la main : le palet avait été rabattu par le gant de Fredrik Emvall avant d'être joué par Karlsson. La Suède donne d'étonnants signes de fébrilité à la relance, à l'instar de Hållberg qui loupe le palet et le donne à Vyborny, heureusement cantonné à un tir en angle.

Le jeu est équilibré, et il faut un peu de réussite pour qu'une équipe prenne l'avantage. Sur une mise au jeu en zone offensive remportée par Andreas Karlsson face à Hlinka, le défenseur Niklas Kronwall s'infiltre magnifiquement dans les lignes tchèques, puis Jesper Mattsson récupère le rebond, contré par la crosse du défenseur. Le palet s'élève très haut dans les airs... et retombe dans la cage de Hnilicka (1-0, 14'36"). Mattsson remet ça tout de suite avec un lancer de la bleue dévié par Emvall (2-0, 15'13"). Comme en quart, comme en demi, les Tchèques sont menés, mais cette fois l'écart est immédiatement passé à deux buts. Tout peut encore se produire puisque "l'homme qui ne commet jamais d'erreurs", Kenny Jönsson, perd un palet dans sa zone. Complémentarité de la ligne défensive : si le capitaine n'est pas dans son meilleur jour, son collègue Kronwall, revenu à son niveau du dernier championnat du monde, dégage la situation.

En début de deuxième période, une obstruction peu évidente est sifflée contre Kenny Jönsson, mais Hlinka perd le palet devant Zetterberg qui part en contre et provoque une faute de Michalek. À quatre contre quatre, Michael Nylander tourne en zone neutre en attendant de servir sur un plateau Niklas Kronwall, qui se lance dans un nouveau solo technique avec ses jambes très écartées. L'arrière de Detroit, qui sera désigné dans la soirée meilleur joueur de la compétition, place le palet du revers dans le haut du filet (3-0, 24'07"). Dans la tribune officielle, le premier ministre tchèque Paroubek tire une de ces tronches... Les Suédois ont maintenant la maîtrise totale du match, ils sortent proprement de leur zone, ils ont plus de vitesse et ils conservent toujours le palet avec autant de talent. Les Tchèques sont en panne, et les pénalités n'arrangent rien : Stefan retient la crosse de Kronwall et Plekanec lève son bâton au visage de Samuelsson. La Suède se retrouve à cinq contre trois et Jörgen Jönsson achève les tenants du titre sur une petite passe de derrière la cage de Michael Nylander (4-0, 37'01").

Pour mettre une touche finale au succès suédois, il pourrait y avoir un but du grand espoir Niklas Bäckström, joker lancé dans le grand bain du haut niveau. Le junior prend le palet à Hnilicka mais rate son tour de cage en rabattant le palet sur le poteau et non dans le but ouvert. C'est un détail par rapport au sort du match, déjà joué. Même une crosse de Nylander au visage de Michalek ne donne lieu qu'à une démonstration de Franzen en infériorité. Hadamczik peut bien triturer ses lignes, son équipe n'a plus de volonté, plus d'énergie, plus aucun moyen de contrarier le triomphe suédois.

Les joueurs scandinaves ont du mal se retenir de rentrer sur la glace avant que la sirène ne retentisse. Le visage rougeaud de Kenny Jönsson et le sourire modeste de Niklas Kronwall sont des images qui nous renvoient trois mois plus tôt, mais les plus émus sont certainement ceux dont c'est la première fois, et ils sont nombreux car cela faisait huit ans que les Suédois n'avaient rien gagné avant ces trois mois magiques. Johan Holmqvist, le gardien de Brynäs qui vit un conte de fées depuis le début de l'année, pleure comme un enfant. Le manager suédois Mats Näslund descend sur le banc pour féliciter ses hommes, alors que l'observateur de prestige Börje Salming ne les rejoindra que dans les vestiaires. Les grands anciens de la Tre Kronor saluent l'exploit historique que viennent de réaliser leurs successeurs : être les premiers de l'histoire à remporter deux tournois majeurs la même année en cumulant Jeux Olympiques et Championnats du monde. 2006 restera comme l'année de la Suède.

Les Tchèques n'avaient jamais perdu une finale... Celle-ci, ils ne l'ont pas seulement perdue, ils l'ont lâchée. Ils sont encore plus passés à côté de leur match qu'en demi-finale olympique contre ces mêmes adversaires. Les deux buts coup sur coup de la deuxième ligne suédoise leur ont miné le moral, et le troisième but a anéanti leurs dernières capacités de réaction.

Désignés joueurs du match : Johan Holmqvist pour la Suède et Jan Bulis pour la République Tchèque.

Compte-rendu signé Marc Branchu

 

Commentaires d'après-match

Henrik Zetterberg (attaquant de la Suède) : "Je suis la personne la plus heureuse sur Terre. Après une saison si difficile en Amérique, je ne pensais pas qu'un match pour éveiller en moi de telles émotions. Peut-être que c'est un rêve ? Gagner la même année les Jeux Olympiques et les championnats du monde... Une telle chose est-elle possible ?"

Niklas Kronwall (défenseur de la Suède) : "Gustafsson est très doué pour créer un esprit d'équipe à partir des individualités dont il dispose. Le match contre la Slovaquie, que nous avons perdu 2-5 en jouant de façon abominable, a été le moment critique : il nous a forcés à nous secouer et à relever la tête dès le lendemain contre la Russie. C'est comme si une nouvelle équipe était née. De mon point de vue, notre capitaine Kenny Jönsson mérite plus ce titre de meilleur joueur que moi. On parle d'un joueur qui évolue en deuxième division suédoise, et cela ne l'empêche absolument pas d'être dominant sur la glace aux championnats au monde !"

Kenny Jönsson (capitaine de la Suède) : "En Suède, personne ne pensait à nous. Certains reporters chez nous disaient que nous ne qualifierions même pas pour les quarts de finale. Je pense que ça nous a rendus plus forts en tant que groupe. Plus le tournoi avançait, et plus nous étions forts. J'ai eu de l'aide de tout le monde dans le vestiaire et sur la glace. Chacun a été un capitaine et un modèle. L'entraîneur veut que nous prenions du plaisir, et nous nous sommes amusés aussi bien sur la glace qu'en dehors. On ne peut pas être fatigué quand il reste soixante minutes à jouer dans une saison. Avec une médaille d'or en vue, cela aurait été une honte si quelqu'un s'était dit fatigué aujourd'hui."

Johan Holmqvist (gardien de la Suède) : "C'était un sentiment fort quand j'ai su que j'allais être le n°1 dans ce tournoi. J'ai essayé de saisir l'opportunité que le coach me donnait. J'ai eu des hauts et des bas, mais je me suis senti de mieux en mieux, surtout dans les matches à élimination directe. Aujourd'hui la défense était si bonne que je n'ai pas eu grand-chose à faire. Le match contre les États-Unis en quart de finale était un des plus impressionnants, on contrôlait tout devant moi. Ce fut plus difficile contre le Canada, mais nous avons fait du bon travail. Aujourd'hui, nous avons été exceptionnels. Je ne sais pas combien de tirs j'ai reçus, mais ceux qui sont passés étaient faciles pour moi. Quand vous avez Niklas Kronwall et Kenny Jönsson dans votre équipe, vous faites de belles choses."

Alois Hadamczik (entraîneur de la République Tchèque) : "J'applaudis la Suède, elle a bien joué. Cette défaite est dure pour nous, mais il faut apprendre à perdre avant d'apprendre à gagner."

 

Suède - République Tchèque 4-0 (2-0, 2-0, 0-0)

Dimanche 21 mai 2006 à 20h15 à l'Arena Riga.

Arbitrage de Richard Schütz (ALL) assisté de Yuri Oskirko (RUS) et Milan Novak (SVK).

Pénalités : Suède 10' (4', 4', 2'), République Tchèque 10' (4', 6', 0').

Tirs : Suède 26 (9, 10, 7), République Tchèque 15 (7, 4, 4).

Évolution du score :

1-0 à 14'36" : Mattsson assisté de Kronwall et Karlsson

2-0 à 15'13" : Emvall assisté de Mattsson et Karlsson

3-0 à 24'07" : Kronwall assisté de Sundin et Nylander

4-0 à 37'01" : J. Jönsson assisté de Samuelsson et Nylander (double sup. num.)

 

Suède

Gardien : Johan Holmqvist.

Défenseurs : Ronnie Sundin - Magnus Johansson (A) ; Kenny Jönsson (C) - Niklas Kronwall ; Per Hållberg - Matthias Timander.

Attaquants : Johan Franzén - Henrik Zetterberg (A) - Nicklas Backström ; Fredrik Emwall - Andreas Karlsson - Jesper Mattsson ; Jörgen Jönsson - Michael Nylander - Mikael Samuelsson ; Joel Lundqvist - Jonas Nordquist - Tony Mårtensson.

Remplaçants : Stefan Liv (G), Andreas Holmqvist, Björn Melin. En réserve : Daniel Henriksson (G), Matthias Johansson (surnuméraire), Mika Hannula (suspendu).

République Tchèque

Gardien : Milan Hnilicka.

Défenseurs : Tomas Kaberle (A) - Zbynek Michalek ; Jan Hejda - Lukas Krajicek ; Martin Skoula - Martin Richter.

Attaquants : Jan Hlavac - David Vyborny (C) - Martin Erat [puis Irgl à 40'] ; Jan Bulis [puis Bednar à 40'] - Patrik Stefan - Petr Tenkrat ; Petr Hubacek - Jaroslav Hlinka (A) - Jaroslav Balastik ; Tomas Rolinek puis à 20'00" Jaroslav Bednar [puis Bulis à 40'] - Tomas Plekanec - Zbynek Irgl [puis Erat à 40'].

Remplaçants : Adam Svoboda (G), Zdenek Kutlak. Absents : Tomas Pöpperle (G), Ivo Prorok (surnuméraire).

 

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