Amiens - Rouen (21 octobre 2006)

 

Match comptant pour la septième journée de la Ligue Magnus.

Bien sûr, Rouen a goûté plusieurs fois à la défaite depuis son sacre printanier. Bien sûr, Amiens est quelque peu distancé au classement et les deux formations ne suivent qu'à distance le rythme imposé par leurs rivaux de Rhône-Alpes. Mais leur rencontre demeure incontournable et l'engouement suscité chez les deux publics est infaillible.

Si Denis Perez réserve une première surprise à ses visiteurs avec la titularisation de Henri-Corentin Buysse, l'alignement normand est plus classique, avec le retour annoncé lundi dernier de Vesa Ponto, en lieu et place de Frédéric Bouchard dont la séparation a été officialisée quelques jours plus tard. Le renfort finlandais, censé apporter plus de poids à l'arrière-garde des champions en titre, n'effraie pas Brice Chauvel, qui allume la première mèche, imité dans la foulée par Jean-Philippe Glaude sur la gauche. Les Dragons ne sont pas en reste et, au terme de cette première minute animée, Julien Desrosiers rappelle sa menace permanente à un Buysse bien placé et efficace du gant devant Kimmo Salminen (1'06). C'est pourtant bien Amiens qui est le mieux entré dans la partie et, si le public croit à l'ouverture du score sur une tentative du revers de Wiotte pour redresser un centre fuyant devant la cage, Alexandre Lefebvre est sanctionné pour obstruction (1'57). Ramon Sopko doit alors se montrer vigilant face à la présence dans les parages de Laurent Gras, sur une passe de François Rozenthal, avant de souffler en voyant Frantisek Pulscak puni à son tour (3'19). Le danger n'est cependant pas écarté pour autant car Jonathan Gauthier fait déjà parler la poudre d'un slap croisé de la gauche, brillamment capté du gant, tout comme le lancer du même endroit de Benjamin Dieude-Fauvel.

Amiens est toujours aussi présent, à l'image de Thomas Roussel, véritable roc auquel se heurtent Nicolas Besch et toute l'équipe rouennaise. Ces difficultés se traduisent par deux pénalités coup sur coup, Dominic Léveillé stoppant illégalement Rozenthal (10'30) et Vesa Ponto étant rappelé a l'ordre pour retard de jeu (10'34). Les Picards n'en demandaient pas tant, et Laurent Gras fait une nouveau fois se lever un public qui croit au but, la rondelle passant en réalité derrière la cage, avant de revenir sur Loïc Sadoun, qui l'expédie à mi-distance en force sur la droite du but avec l'aide de Jean-Philippe Glaude (1-0, 10'50). Les Gothiques disposent toujours de l'avantage d'un homme et Pazak se retrouve seul devant la cage d'un Sopko impeccable sur son lancer haut. Calmement, Rouen laisse passer l'orage et, au complet, s'en remet au talent de Marc-André Thinel. Le numéro 24 récupère la rondelle dans le camp gothique pour la loger à mi-hauteur sur la droite du but (1-1, 13'56). C'est désormais à Buysse de faire preuve de sang-froid face à Julien Desrosiers, en relais avec Marc-André Thinel, et le jeune gardien ne tombe pas dans la feinte de l'international. Le slalom de Léveillé et l'alerte consécutive au but, finalement refusé, d'Alexandre Lefebvre témoignent d'un rééquilibrage des débats. À un point tel que relances trop rapides et palets vite perdus se succèdent avant que Marc-André Thinel ne force Thomas Roussel à la faute sur une nouvelle accélération (18'16). Son frère Sébastien tente bien de profiter du rebond consécutif à son lancer, mais Buysse reste présent.

Le jeu sans complexe de leur portier donne des ailes aux Gothiques et, sitôt la pénalité tuée, Brice Chauvel s'échappe pour contraindre Sopko à une parade, qui renvoie le danger sur... Anthony Mortas, opportuniste (2-1, 20'30). Rouen subit un véritable pilonnage et son portier slovaque s'oppose aux coups de boutoir de Sadoun et de Glaude. Une faute provoquée sur la droite par Tristan Lemoine va de nouveau relancer le vaisseau normand (21'58). Ce dernier ne peut toutefois tirer profit d'une belle opportunité dans l'enclave et malgré la force de frappe de Salminen, un nouveau contre picard fait vaciller les Dragons. Revenu de prison, Benjamin Dieude-Fauvel s'en va tromper un Sopko laissé pour compte (3-1, 24'05). Alain Vogin en profite pour requérir un temps mort censé réorganiser des troupes mal en point. Un nouvel avantage numérique, suite à une obstruction de Anthony Mortas (24'50) peut relancer Rouen, mais le lancer à la ligne bleue de Vesa Ponto est contré par... le patin de son coéquipier Lefebvre !

La plus belle occasion de cette mi-match vient bizarrement d'une situation d'infériorité numérique, et Henri-Corentin Buysse repousse de la jambière l'assaut de la paire Marc-André Thinel - Julien Desrosiers. Loin de décourager les joueurs des bords de Seine, cette action se révèle être un catalyseur pour eux. Buysse se met encore en évidence face à Salminen, oublié au deuxième poteau, à Salomaa, arrivé de derrière, aux frères Thinel, au lancer haut de Yvan Fontana, au revers de Léveillé, avant que la nouvelle percée de Marc-André Thinel entre Bachet et Mortas ne se termine par un lancer trop haut... Au rythme d'un lancer concédé par minute, Amiens ne peut opérer qu'en contre-attaque, comme le fait François Rozenthal. La tentative à ras glace de l'Amiénois n'est que repoussée par Sopko, ce dont profite Laurent Gras pour faire passer le palet du revers au-dessus du portier (4-1, 36'37). Et quand, en plus de sa vitesse, Gras n'hésite pas à défier Vesa Ponto dans un domaine plus physique, ou quand Desrosiers ne peut se relever, Rouen paraît au plus mal. Quelques échauffourées éclatent alors, et Julian Marcos est sanctionné (38'48). Les Dragons ne tergiversent pas longtemps et leur power play balbutiant de la Coupe Continentale paraît bien loin. La montée incisive de Tristan Lemoine sur la droite est relayée derrière la cage par Desrosiers et Sébastien Thinel, qui voit son frère loger le palet hors de portée de Henri-Corentin Buysse (4-2, 39'43). Ce dernier a longtemps retardé l'échéance d'un but mérité et synonyme d'espoir pour le troisième tiers.

Le dernier acte est inauguré par une nouvelle supériorité numérique pour Rouen, au cours de laquelle les frères Thinel s'illustrent, par une tentative de déviation de Sébastien puis sur un échange de baffes avec Julian Marcos. Le dernier arrivé de la famille sanctionné (43'09), Amiens dispose d'une opportunité de se mettre à l'abri. Pourtant, faute de trouver une position de tir intéressante, les Gothiques s'exposent au retour des Dragons. Le capitaine Daniel Carlsson n'hésite pas à s'aventurer dans leur arrière-garde, évite Mortas et Gauthier, pour trouver la faille (4-3, 43'28). Le travail de sape de Marc-André Thinel provoque une nouvelle pénalité (45'48) et par ricochet la double intervention décisive de Buysse face à Salminen, d'abord de la crosse, ensuite à bout portant devant un attaquant finlandais médusé. Amiens résiste encore et toujours, Gras repousse le danger puis Pulscak est mis KO après avoir reçu un lancer en plein visage (47'09), preuve de la détermination défensive des locaux. Mais les cinq pénalités concédées dans le dernier tiers vont finir par user les Gothiques, et la passe de la gauche de Nicolas Besch est reprise victorieusement par Dominic Léveillé au second poteau (4-4, 55'37).

Enfin revenu au score à force de patience, Rouen semble le plus à même de faire la différence. Mais faut-il se fier aux apparences d'un semblant de domination lorsqu'il s'agit d'une opposition entre les deux voisins ? Une fois de plus, le dénouement est brutal. Alors que Alexandre Lefebvre est arrêté dans la zone gothique par la paire Bachet-Gauthier, ce dernier s'avance sur la gauche et, non attaqué, surprend tout son monde d'un lancer frappé dont il a le secret et auquel plusieurs portiers de la ligue ont déjà appris à connaître (5-4, 58'01). Il n'en faut pas plus pour faire se lever tout un Coliseum définitivement libéré par le but en cage vide de François Rozenthal (6-4, 59'29).

Désignés meilleurs joueurs du match : Marc-André Thinel pour Rouen et Laurent Gras pour Amiens.

Compte-rendu signé Mathieu Hernaz

 

Commentaires d'après-match

Denis Perez (entraîneur d'Amiens) : "Ce soir on a vu le vrai visage amiénois. On a pris les devants et on ressort avec la victoire, c'est très satisfaisant même s'il y a encore des touches à améliorer. Les joueurs ont répondu présent à ce fameux derby éternel. Amiens-Rouen reste un gros match avec la venue du nombreux public rouennais. Cela fait des bonnes parties, c'est bon pour le hockey. Rouen est allé chercher nos erreurs, c'est une équipe opportuniste avec des joueurs malins à ce niveau-là. On prend un mauvais but à cinq contre quatre qui fait mal physiquement et moralement. [...] Jonathan est un des rares joueurs sans complexes sur son shoot. Cela fait la différence. [...] C'est un challenge pour Henri, il a un sacré caractère et les dents longues, mais il ne faut pas l'enflammer, on juge un gardien sur la continuité. Éric Raymond jouera en Coupe contre les Français Volants, j'ai réuni les joueurs avant le match pour leur annoncer le planning."

Jonathan Gauthier (défenseur d'Amiens) : "J'ai pris le palet à la ligne bleue, je suis monté de manière nonchalante, j'ai décoché un lancer comme je sais les faire et c'est rentré. Je ne sais pas comment je fais, je suis né avec ça. Si c'est dans le but je suis content, sinon je recommence après. Le poids sur les épaules est tombé, et on a travaillé fort pour garder cet avantage. Cela faisait longtemps, je pense, qu'Amiens n'avait pas gagné contre Rouen. L'ambiance, le bruit et le nombre de mises en échec m'ont fait passer une bonne soirée."

Henri-Corentin Buysse (gardien d'Amiens) : "C'est une bonne soirée. Depuis petit, Rouen reste un match particulier, qui plus est comme titulaire. Je l'ai super bien vécu. Contre Rouen on est obligé d'être concentré, cela transcende car c'est du haut niveau. Je pensais aux prolongations jusqu'au but de Jo. J'espère faire quelques matchs et, en tant que deuxième gardien, rentrer si Éric rate son match. On s'entend bien avec Éric, on se félicite mutuellement et on parle des buts qu'on a encaissé. J'ai demandé à Antoine Mindjimba de venir, il était là un tiers et m'a donné des conseils. Je sais qu'Éric Raymond jouera car c'est lui le numéro 1. Je suis toujours prêt à entrer."

Alain Vogin (entraîneur de Rouen) : "On a manqué de concentration en deuxième période sur les deuxième et troisième buts. J'ai voulu calmer les esprits car on a tendance à trop ouvrir le jeu. Comme entraîneur, c'est dur de voir ces ouvertures. Le quatrième but vient d'une erreur de notre défenseur, qui laisse Gras prendre le rebond. Notre but en fin de deuxième tiers nous a donné du cœur, Amiens a eu peu d'occasions au troisième tiers. Les joueurs ont fait preuve de caractère en revenant, ils auraient mérité un point mais Amiens était le plus fort. J'avais dit de faire attention au tir de Gauthier, on lui a laissé trop d'espaces. Son tir n'est pas voilé mais il a un excellent lancer, on ne peut en vouloir à notre gardien. [...] On tourne à cinq défenseurs. Salomaa ne s'est pas toujours entraîné car il était malade, Ponto n'a eu que deux entraînements, et Sedlak, un des très bons défenseurs de la ligue, est absent. Ce ne sont pas des excuses mais des explications. [...] Les spectateurs ont vu un bon match de hockey. Pour moi, sur le banc, c'est toujours spécial de vivre son premier Amiens-Rouen officiel. Ces derbys sont excellents pour le spectacle. Si on avait plus souvent des matchs comme ça en France, le hockey pourrait gagner en popularité."

 

Amiens - Rouen 6-4 (1-1, 3-1, 2-2)

Samedi 21 octobre 2006 à 20h05 au Coliseum. 3200 spectateurs environ.

Arbitrage de Julien Avavian assisté de Savice Fabre et Thibaud Juret.

Pénalités : Amiens 20' (4', 6', 10'), Rouen 10' (6', 2', 2').

Évolution du score

1-0 à 10'50" - Glaude assisté de Sadoun et Gras (sup. num.)

1-1 à 13'56" : M.-A. Thinel assisté de Salomaa

2-1 à 20'30" : Mortas assisté de Chauvel

3-1 à 24'05" : Dieude-Fauvel assisté de Bachet

4-1 à 36'37" : Gras assisté de Rozenthal

4-2 à 39'43" : M.-A. Thinel assisté de S. Thinel et Desrosiers (sup. num.)

4-3 à 43'28" : Carlsson (inf. num.)

4-4 à 55'37" : Léveillé assisté de Besch et M.-A. Thinel (sup. num.)

5-4 à 58'01" : Gauthier assisté de Bachet

6-4 à 59'29" : Rozenthal assisté de Sadoun et Glaude (cage vide)

 

Amiens

Gardien : Henri-Corentin Buysse.

Défenseurs : Thomas Roussel - Frantisek Pulscak ; Vincent Bachet (A) - Jonathan Gauthier ; Jean-Philippe Glaude - Benjamin Dieude-Fauvel.

Attaquants : Loïc Sadoun - Laurent Gras (A) - François Rozenthal ; Rob Millar - Anthony Mortas (C) - Brice Chauvel ; Miroslav Pazak - Elie Marcos - Julian Marcos ; Simon Petit - Lionel Wiotte - Nicolas Primout.

Remplaçants : Éric Raymond (G), Mathieu Jestin.

Rouen

Gardien : Ramon Sopko (sorti de 59'02" à 59'29").

Défenseurs : Daniel Carlsson (C) - Nicolas Besch (A) ; Sami-Ville Salomaa - Vesa Ponto ; Fabien Veydarier.

Attaquants : Sébastien Thinel - Julien Desrosiers - Marc-André Thinel (A) ; Alexandre Lefebvre - Dominic Léveillé - Tristan Lemoine ; Yvan Fontana - Thibault Geoffroy - Kimmo Salminen ; Damien Raux - Jérémie Romand.

Remplaçant : Landry Macrez (G). Absent : Daniel Sedlak (cheville).

 

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