Finlande - Russie (9 novembre 2006)

 

Match comptant pour le tournoi Karjala, deuxième manche de l'Euro Hockey Tour.

Pour les Finlandais, le duel contre les Russes à la Coupe Karjala est généralement une partie de plaisir : 10 victoires sur 10. Pourquoi la onzième confrontation serait-elle différente ? Par exemple parce qu'elle commence très mal pour les locaux. Dès la deuxième minute, Sean Bergenheim, qui ne s'était pas adapté à la vie en Russie au début de cette saison, fait faute sur Kharitonov, et sur la supériorité numérique, le lancer d'Evgeni Kuteïkin rentre à mi-hauteur au ras du poteau de Hurme, masqué et qui attendait le palet du côté opposé (0-1, 01'41").

L'innovation de ce match, c'est que la Russie aligne pour la première fois de son histoire une quatrième ligne physique, spécifiquement dimensionnée pour pratiquer un jeu rude et donner des mises en échec. Il ne s'agit pas d'une préméditation du sélectionneur Vyacheslav Bykov, car deux des joueurs de ce bloc ne figuraient pas dans la sélection initiale (Timofei Shishkanov a pallié la blessure d'Aleksandr Nikulin et le rhume de Vlasenkov ; quant à Maksim Kondratiev, il a été appelé quand Dmitri Bykov a aggravé une vieille blessure lors de la préparation). Mais cette ligne a fait son apparition comme une évidence au camp d'entraînement. Devant les grands défenseurs Kondratiev et Emelin, trois attaquants qui n'ont pas froid aux yeux, Shishkanov, Nepryaev et celui qui retient le plus l'attention, Evgeny Artyukhin, l'homme qui a "craché au visage" de Tampa Bay.

Le fils d'un champion du monde de lutte gréco-romaine ne tarde pas à se faire remarquer, mais pas de la meilleure des manières : il lance ses 114 kg dans une charge genou contre genou qui attrape la jambe du centre Jari Viuhkola qui zigzaguait en zone neutre. On dirait une locomotive à pleine puissance emportant un imprudent à un passage au niveau. Incident de jeu ou agression vengeresse et délibérée ? On peut deviner ce que pense le public finlandais de cette "amputation", et tandis que Viuhkola, qui ne peut plus poser le pied au sol, doit être porté pour sortir de la glace, l'arbitre renvoie Artyukhin aux vestiaires. C'est le dernier arrivé Igor Volkov qui prend sa place : la quatrième ligne conserve un style physique, mais sans geste dangereux.

Non seulement les Russes défendent leur cinq minutes d'infériorité numérique, mais au retour à cinq contre cinq, ce sont eux qui s'installent en zone offensive, avec justement cette quatrième ligne. Kondratiev lance du coin et Ivan Nepryaev s'arrache au rebond pour glisser le palet du revers dans les filets (0-2, 13'14").

Le jeu change du tout au tout en deuxième période. La Finlande revient sur la glace plus conquérante. Elle revient à hauteur en profitant successivement de deux pénalités, un accrochage de Simakov puis d'une obstruction de Grebeshkov. C'est d'abord Janne Niskala dans l'enclave qui place parfaitement un tir du poignet à mi-hauteur, poteau rentrant (1-2, 25'41"). Deux minutes plus tard, sur un palet envoyé au fond, Kiprusoff fait parler son physique face à Leshchev, Pyörälä remet le palet en retrait, et Esa Pirnes réalise un superbe pleine lancer en pleine lucarne (2-2, 27'42"). Désormais dominés, les Russes peuvent s'estimer heureux de rejoindre les vestiaires avec un score nul.

Heureux ? En russe, ça se dit "stchastlivo". Et justement, c'est un certain Piotr Stchastlivy qui va donner du bonheur à tous ses coéquipiers. Il patine fort le long de la bande pour gagner le palet et le remettre devant la cage à Pavel Vorobiev. Celui-ci ne parvient pas à tirer, serré de près par la défense, mais Stchastlivy fond sur ce palet et l'envoie sous la barre grâce à un tir du revers très pur en pivot (2-3, 42'06").

Vyacheslav Bykov devient donc le premier entraîneur russe à battre les Finlandais dans leur tournoi. Dire qu'avant le tournoi, la composition de la Sbornaïa publiée sur le site officiel de la fédération finlandaise - à partir d'une liste fournie par son homologue russe - indiquait Krikunov comme sélectionneur ! Et pourtant, certains ont vu et apprécié la différence - en premier lieu l'entraîneur finlandais selon ses déclarations d'après-match.

Le résumé vidéo du match.

Compte-rendu signé Marc Branchu

 

Commentaires d'après-match

Erkka Westerlund (entraîneur de la Finlande) : "C'est un des meilleurs matches de la Russie ces dernières années. Elle a agi comme un mécanisme uni, et elle ne nous a pas habitués à avoir des unités spéciales aussi bonnes. Outre la vitesse de ses actions, on sentait distinctement la tactique et la pensée de ses entraîneurs, ce qui fut très inattendu pour nous. [...] Artyukhin doit être suspendu pour la même durée que la blessure de Viuhkola, dont la saison est peut-être terminée."

Vyacheslav Bykov (entraîneur de la Russie) : "Le hockey est un sport d'hommes. Nous considérons que c'était une action de jeu et qu'il n'y avait aucune mauvaise intention d'Artyukhin. Je veux rappeler que le match a pris immédiatement une tournure physique, et qu'Evgeni s'est pris plusieurs charges finlandaises sur la même présence. Je ne comprends toujours pas pourquoi le joueur qui a frappé Nikulin au visage n'a pas été puni. Quand j'ai appelé l'arbitre, il m'a répondu que l'impact était sur le bras ! Quoi qu'il arrive, nous défendrons notre joueur jusqu'au bout."

Evgeni Artyukhin (attaquant de la Russie) : "C'est un simple concours de circonstances, un duel habituel pour la conquête du palet. J'y suis allé la tête froide, sans la moindre idée de blesser. Je me dirigeais clairement dans le joueur, il a bifurqué sur le côté et sa jambe m'a heurté. Je ne sais pas pourquoi l'entraîneur finlandais veut me disqualifier, il a dû dire ça sous le coup de l'émotion. Des tribunes, j'ai ensuite vu combien les Finlandais donnaient des coups dans le dos de nos joueurs ou les poussaient contre la bande, et personne n'a rien dit."

 

Finlande - Russie 2-3 (0-2, 2-0, 0-1)

Jeudi 9 novembre à 18h00 à la Hartwall Arena de Helsinki. 7968 spectateurs.

Arbitrage d'Ulf Rönnmark (SUE) assisté de Mikko Kekäläinen et Jussi Terho (FIN).

Pénalités : Finlande 14' (6', 8', 0'), Russie 35' (2'+5'+20', 4', 4').

Tirs : Finlande 29 (13, 9, 7), Russie 18 (9, 6, 3).

Évolution du score :

0-1 à 01'41" : Kuteykin assisté de Grebeshkov et Vorobiev (sup. num.)

0-2 à 13'14" : Nepryaev assisté de Kondratiev

1-2 à 25'41" : Niskala assisté de Pirnes et Kallio (sup. num.)

2-2 à 27'42" : Pirnes assisté de Pyörälä et Kiprusoff (sup. num.)

2-3 à 42'06" : Schastlivy assisté de Vorobiev

 

Finlande

Gardien : Jani Hurme (sorti de sa cage de 58'31" à 59'13" et de 59'34" à 60'00").

Défenseurs : Janne Niskala - Pekka Saravo ; Aki-Petteri Berg - Marko Kiprusoff ; Mikko Luoma - Martti Järventie (6') ; Antti-Jussi Niemi - Jukka-Pekka Laamanen (2'.)

Attaquants : Sean Bergenheim (2') - Esa Pirnes - Riku Hahl ; Mika Pyörälä - Jari Viuhkola - Tomi Kallio ; Jussi Pesonen (4') - Petri Kontiola - Jani Rita ; Hanni Pikkarainen - Petri Pakaslahti - Tomek Valtonen .

Remplaçant : Sinuhe Wallinheimo (G).

Russie (2' pour surnombre)

Gardien : Vassili Koshechkin.

Défenseurs : Evgeni Varlamov (C) - Vitali Atyushov ; Denis Grebeshkov (2') - Andrei Kuteykin ; Kirill Koltsov - Ilya Nikulin ; Maksim Kondratiev - Aleksei Emelin.

Attaquants : Aleksandr Kharitonov - Albert Leshchev (2') - Vladimir Antipov ; Sergei Konkov - Piotr Schastlivy - Pavel Vorobiev ; Alekseï Simakov (2') - Anton Kuryanov (2') - Nikolaï Kulemin ; Timofei Shishkanov - Ivan Nepryaev - Evgeni Artyukhin [puis Igor Volkov à 06'34"].

Remplaçant : Aleksandr Eremenko (G).

 

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