France - Suède (8 mars 1923)
Championnats d'Europe 1923, deuxième journée.
Le match Suède-France a commencé dans les coulisses du Palais de Glace lors du congrès de la LIHG de l'après-midi, avec les candidatures pour l'organisation de la prochaine édition. Le consul Isaac Westergren, président de la fédération suédoise qui a lui-même mis la main à la poche pour aider à financer de la voyage de ses hommes, a défendu son dossier avec le soutien de l'énergie consul général de Suède à Anvers, Harald Petri. Ils ont obtenu l'organisation du championnat d'Europe à Stockholm en mars 1924 et espèrent même convaincre les équipes nord-américaines de venir pour un premier championnat du monde, en profitant de leur présence lors du tournoi olympique de Chamonix. C'est justement pour s'appuyer sur ces JO que les délégués français ont essayé de contrarier la candidature suédoise, en vain puisqu'il ont fini deuxièmes du vote.
Les Scandinaves partent plus nettement favoris le soir, même s'ils abordent le match avec la même prudence que face à leurs grands rivaux tchèques hier. L'opposition est intéressante car les deux équipes veulent pratiquer du beau jeu. Le gardien français Robert George est un peu aveuglé par l'éclairage du Palais de Glace et laisse passer un tir de 20 mètres de "Stor-Klas" Svensson. La parité revient rapidement : un lancer de Léon Quaglia passe sous le patin de l'idole locale Abbe Jansson (résident belge). Les spectateurs français connaissent une immense joie quand Quaglia décoche un tir à la puissance inattendue qui s'élève rapidement dans la cage suédoise. Incroyable, la France mène 2-1. Mais la Suède réagit et combine bien avec de petites passes, alors que la France tire plutôt de loin. Les Scandinaves ne manquent pas de force dans leurs lancers, et l'envoi tonitruant du capitaine Nils Molander en est la preuve sur l'égalisation. Juste avant la mi-temps, ce même Molander se lance à l'attaque avec son compère Birger Holmquist et ce dernier parvient, dos au but au milieu de la défense, à placer un tir précis (2-3).
C'est après une attaque un peu anodine que Molander donne deux buts d'avance aux Suédois à la reprise. La France domine la suite du match pour refaire son retard. Léon Quaglia prouve qu'il n'est pas seulement un remarquable patineur mais qu'il a aussi une qualité de tir redoutable. Sa réduction du score passe entre l'abdomen et la cuisse de Hansson. Les Scandinaves ont identifié le danger : ils chargent l'ailier gauche Birger Holmquist de rester au marquage de l'ailier droit Quaglia pour éviter que celui-ci ne se fasse oublier et reçoive sans cesse des passes transversales. Mieux positionnés, les défenseurs suédois parviennent désormais à bloquer avec leur crosse des tirs français qui manquent de puissance. L'arrière "Knatten" Lundell se permet même à la dernière minute de lancer son action typique bien connue dans son pays : une montée rapide dans laquelle il fait rebondir le palet entre sa crosse et la balustrade.
La Suède a battu ceux qui apparaissent comme ses deux principaux adversaires et a fait un très grand pas vers le titre de championne d'Europe. Mais pour l'équipe de France, dont la seule sortie internationale était jusqu'à hier une leçon reçue des débutants suédois dans cette même patinoire olympique en 1920, cette soirée a été une révélation. Elle est tout à fait compétitive dans les compétitions internationales et on ne peut que regretter qu'elle n'y ait pas participé plus tôt. Elle a tenu tête à ce qui est sans doute la meilleure équupe d'Europe. "Avec un peu de chance, la France, qui fit preuve de réelles qualités, aurait pu arracher le match nul", écrit La Dernière Heure. L'autre quotidien belge Vélo Sport va plus loin en estimant que le "match nul représentait mieux la physionomie du jeu".
France - Suède 3-4 (2-3, 1-1)
Jeudi 8 mars 1923 à 22h00 au Palais de Glace d'Anvers.
Arbitrage de Walter de Siebenthal
0-1 : Svensson
1-1 : Quaglia
2-1 : Quaglia
2-2 : Molander
2-3 : Holmquist assisté de Molander
2-4 : Molander
3-4 : Quaglia
France
Attaquants : Albert Hassler - Alfred de Rauch (C) - Léon Quaglia
Défenseurs : Robert Lacroix - Philippe Payot
Gardien : Robert George
Remplaçants : Pierre Charpentier, Joseph Monard.
Suède
Attaquants : Birger Holmquist - Nils Molander (C) - Einar "Stor-Klas" Svensson
Défenseurs : Gustaf Johansson - Einar Lundell
Gardien : Abbe Jansson.
Remplaçant (non entré en jeu) : Karl Björklund.