Angers, le dernier des Mohicans

 

Benoît Pourtanel (photo Sébastien Rault)

Jusqu'à l'an passé, Reims était souvent cité en exemple dans la ligue d'Elite : un club qui construisait sur la durée, qui remboursait patiemment sa dette, et qui progressait d'année en année. Mais, la faute entre autres à une privation prolongée de patinoire pour travaux et à un coûteux procès aux Prud'hommes, il a fini par rejoindre la longue liste des champions de France disparus au champ d'honneur. Désormais, parmi les vétérans de l'élite, il n'en reste plus qu'un, le dernier des Mohicans, l'ultime espoir du hockey français, le seul à avoir tenu la distance sans jamais déposer le bilan : l'ASG Angers.

Sans jamais faire de folies, sans jamais essayer d'acheter un titre sans en avoir les moyens, Angers en a trouvé la récompense dans sa pérennité et devrait être à son aise dans le nouveau Super 16, moins contraignant que l'ex-élite et son escalade financière. Peut-être un jour la chance sourira-t-elle aux Ducs et leur permettra-t-elle d'atteindre un podium qui serait le premier du club (à moins que, pour inscrire un premier grand trophée à leur palmarès, les Angevins ne choisissent la coupe)... L'an dernier, on a senti cette équipe capable de grandes choses, mais, après un bon départ, elle a été trop irrégulière pour suivre le rythme des meilleurs.

Le championnat qui s'annonce requerra justement de la constance, notamment dans une poule nord promptement baptisée groupe de la mort. Ce sera la partie la plus délicate de la saison angevine, durant laquelle les Ducs peuvent tout perdre. Rouen fait en effet figure d'épouvantail tandis qu'Amiens possède un bataillon d'internationaux. Les Angevins peuvent peut-être rivaliser avec ce duo de favoris, mais ils peuvent tout aussi bien être victimes des ambitions de leurs poursuivants. On pense notamment à Brest, qui a une grande richesse d'effectif, ne serait-ce que quantitative, mais dont les deux gardiens inexpérimentés en élite (le "fiston" Gabriel Bounoure et l'ex-Angevin Jérôme Plumejeau) constituent la grande inconnue. Tours promet des derbys très chauds avec son jeu physique alors que Besançon avec son style plus européen a également les dents longues. Même si on peut penser que Dijon et surtout Dunkerque seront en retrait, six équipes pour quatre places, cela fait beaucoup, et c'est pourquoi Angers ne pourra plus se permettre le passage à vide de la saison passée.

Christophe Burnet le sait parfaitement, lui qui a sûrement gagné en expérience mais qui voit aussi monter la pression maintenant qu'il apparaît comme le futur grand gardien français. Sa doublure, le junior angevin Daniel, a encore moins de références que Plumejeau, un habitué des sélections de jeunes, et c'est aussi une preuve que le club a pleinement confiance en Burnet, confiance qu'il a justifiée depuis un an.

La défense sera toujours conduite par le capitaine Benoît Pourtanel, qui devrait faire la paire avec un autre joueur tout en puissance, l'imposant Eerikki Koivu, dont le retour réjouit tout le monde en Anjou. Le vétéran suédois Patrik Bargman sera également précieux pour conduire la relance, reste à savoir avec qui il sera associé en deuxième ligne. Francis Couturier est finalement resté même s'il a globalement déçu l'an passé, et le choix devrait se faire entre lui et le défenseur américain Matt Hennigar, qui représente un peu une inconnue. A priori c'est un joueur dont l'essentiel des qualités se résume dans son gros gabarit (97 kg pour... 1m75) et dans son style physique. Mais ce genre de "goon" sera-t-il utile et saura-t-il s'adapter dans le championnat de France ? Pas sûr... En tout cas, Angers pourra compter sur trois bonnes lignes défensives complètes - ce qui n'a pas toujours été le cas par le passé - puisque le sixième homme sera Sébastien Rousselin, qui devrait poursuivre sa progression pour sa première année senior. Dans l'ensemble, les atouts de cette défense seront le poids et la puissance, et son principal point faible sera son manque général de vitesse et de vivacité.

La vitesse et la vivacité, Jokinen et Tuominen n'en manquent pas. Les deux Finlandais seront à nouveau les principales armes offensives de cette équipe, surtout Juho Jokinen, technicien hors pair. Ils devraient profiter sur la première ligne de la complémentarité de Chris George, qui évolue dans un registre très différent. L'Américain a été drafté en NHL (par Colorado en 1995), ce qui veut dire tout et rien à la fois (plutôt rien dans le cas présent, puisqu'il n'a disputé que deux matches en AHL). Ce qui est sûr, c'est qu'il devrait faire impression par son physique athlétique et qu'il devrait vite être redouté par les défenses. Outre Koivu et George, la troisième recrue d'importance des Ducs pourrait bien être... Paulin Bordeleau junior. Diminué par une blessure l'an passé et rasséréné par sa rééducation estivale, il devrait enfin pouvoir exprimer tout son potentiel cette saison et marquer son lot de buts, tout comme l'efficace Julien Pihant. On attend aussi de voir à l'œuvre Yann Vannienwenhove. Le jeune joueur de Saint-Gervais n'avait disputé jusqu'ici que deux tiers de saison en élite avec Viry, et il devrait se disputer la dernière place en deuxième ligne avec les vieux grognards que sont le fidèle François Ferrari, Grégory Girardot, mais aussi Claude Devèze, qui après un passage à Nantes vient finir sa carrière en Anjou.

Mais les Ducs peuvent aussi aligner une ligne complète de la génération 83, avec Mathieu Jestin, Rodolphe Bretault et surtout Pierre-Yves Albert, qui revient après un passage chez les juniors amiénois. Avec Benjamin Mocquart qui a lui aussi l'intention de se faire une place, Angers a des jeunes qui ont faim de temps de glace. En auront-ils à satiété ? Là est toute la question. Si Derek Haas le décide, il a en tout cas tout le loisir d'user de cette réserve. Cette nouvelle profondeur d'effectif des Angevins peut être un atout pour cette formation jeune et prometteuse entourée de cadres expérimentés, et pour qui cette première saison du Super 16 représente un pari intéressant. Si elle se sort d'une première phase piégeuse, elle n'aura plus rien à perdre et pourrait jouer sa chance à fond.

Marc Branchu

 

 

Départs : Stéphane Balmat (Chamonix), Jean-Michel Larroque (Mulhouse), Roberto Baldris (Canada), Jérôme Veret (Brest), Jérôme Plumejeau (Brest), Jordan Peter (Canada).

Arrivées : Eerikki Koivu (Diskos Jyväskylä, FIN), Matt Hennigar (Life University, USA), Chris George (Long Beach, WCHL), Yann Vannienwenhove (Saint-Gervais), Claude Devèze (Nantes), Pierre-Yves Albert (Amiens), Rodolphe Bretault (Rouen).

Effectif :

Gardiens : Christophe Burnet (20 ans), Pierre Daniel (18).

Défenseurs : Benoît Pourtanel (28), Eerikki Koivu (FIN, 22), Patrik Bargman (SUE, 33), Matt Hennigar (USA, 24), Francis Couturier (CAN, 31), Sébastien Rousselin (20).

Attaquants : Juho Jokinen (FIN, 26), Jani Tuominen (FIN, 21), Chris George (USA, 25), Paulin Bordeleau jr (CAN, 25), Julien Pihant (24), François Ferrari (31), Yann Vannienwenhove (21), Grégory Girardot (29), Claude Devèze (32), Pierre-Yves Albert (19), Mathieu Jestin (19, peut aussi jouer en défense), Rodolphe Bretault (19), Benjamin Mocquart (18).

Entraîneur : Derek Haas (CAN).

 

 

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