Un nouvel élan pour Grenoble

 

Une saison mi-figue, mi-raisin

La saison 2002-2003 des Brûleurs de Loups ne restera pas dans les annales du club. Non pas que les partenaires de Benoît Bachelet aient connu une saison catastrophique, loin de là. En fait il s'agissait plutôt d'une saison que l'on pourrait qualifier de quelconque. Une première phase sans véritable enjeu où les Grenoblois gagnent les matches qu'ils doivent gagner mais montrent déjà leurs limites face à Mulhouse. La deuxième phase sera plus prometteuse notamment à l'extérieur : un début très mitigé puis un sursaut à Villard qui allait être le détonateur d'une belle remontée et d'une qualification tranquille pour les demi-finales avec en point d'orgue deux succès de prestige contre Rouen et à Mulhouse. Les Brûleurs de Loups terminent à une très intéressante deuxième place (à égalité de points avec Mulhouse et Amiens, ils ne sont quatrièmes qu'à la différence de buts) et se prennent à rêver à un exploit en demi-finale contre les Dragons. Mais l'armada offensive de Rouen aura tôt fait de ramener tout le monde (joueurs comme supporters) sur terre. Y avait-on seulement cru ? La fin de saison se termine en queue de poisson avec une petite finale contre Mulhouse jouée dans l'indifférence générale et ponctuée par deux défaites.

Certes, les Brûleurs de Loups ont atteint et même dépassé leurs objectifs en se hissant en demi-finale. En début de saison, les dirigeants n'osaient parler que de qualification pour la poule Magnus... Il faut dire que les conditions étaient loin d'être favorables au mois de septembre avec une restriction budgétaire (imposée par la commission de contrôle) qui avait entraîné le départ tardif de Suvanto et le non-remplacement de Pouget. Dès lors le résultat final (4ème) peut paraître plus qu'honorable comme s'en défendait Dimitri Fokine. Mais il a été obtenu surtout "par défaut" face à des équipes de l'ex-Nationale 1 encore un peu tendres à ce niveau et une équipe d'Anglet considérablement rajeunie. Pour preuve la différence de niveau avec le futur champion s'est avérée énorme lors des demi-finales. Le public est resté sur sa faim, frustré par un parcours à domicile passablement médiocre en deuxième partie de saison. Les relations joueurs/entraîneur/dirigeants n'étaient pas au beau fixe avec un Fokine de plus en plus isolé. Son départ, évoqué en 2002, devenait alors un évidence en 2003 : les Brûleurs devaient trouver une nouvelle dynamique.

Passation de pouvoir

Le technicien russe a rarement fait l'unanimité à la tête de l'équipe première des Brûleurs de Loups. Pourtant son bilan après trois saisons (il était arrivé au moment de la remontée en Elite en 2000) est loin d'être mauvais : les résultats plaident en sa faveur. Deux fois troisième, une fois quatrième : Grenoble a fait preuve d'une belle régularité dont peu de clubs peuvent se targuer. Pourtant Fokine ne laissera pas un souvenir impérissable de son passage. La faute sans doute à des problèmes de communication récurrents avec ses joueurs, à des tactiques de jeu pour le moins douteuses et à des progrès difficilement perceptibles en trois ans. Un bail de trois ans est considéré comme la durée idéale pour mettre en place une équipe, les dirigeants annonçaient en 2000 vouloir jouer le titre trois ans plus tard. Les difficultés financières en ont certes décidé autrement, le club étant obligé de mettre un frein à ses ambitions l'année où il avait prévu de passer la vitesse supérieure. Mais Fokine n'a jamais pu profiter d'une relative stabilité de l'effectif pour mettre en place un collectif bien huilé.

Fokine parti, les dirigeants se mettaient rapidement en quête d'un successeur. Malgré quelques autres pistes évoquées ça et là (Salo, Vuoti, ...) un nom est revenu sans cesse dès la fin de saison : celui de l'ancien capitaine des Brûleurs de Loups, Gérald Guennelon. Un choix surprenant au départ car Guennelon était engagé avec le Ministère des Sports et ne semblait pas "disponible" ni demandeur. Mais un choix logique finalement si on revient sur le principal constat de la saison 2002-03 : il était indispensable de restaurer la communication avec les joueurs. Dès lors le candidat devait être francophone (une priorité des dirigeants) mais aussi plus proche des joueurs (un ancien joueur pouvait convenir) et avoir bien entendu un vécu avec le club. Vuoti (fraîchement retraité) était un candidat possible mais Gérald Guennelon correspondait encore bien mieux au profil souhaité. Guennelon a montré tout au long de sa carrière qu'il était un battant et un meneur d'homme (capitaine de Grenoble de 1995 à 1998) tout en menant les Brûleurs de Loups deux fois à la Coupe Magnus (en 1991 et 1998). Pourquoi ne pas rêver d'un troisième succès, cette fois en tant qu'entraîneur ? Enfin, ses qualités d'éducateur (même s'il n'a exercé jusqu'à présent qu'aux côtés des jeunes) sont certainement une garantie supplémentaire. Bien sûr le "pari" Guennelon n'est pas sans risque : il n'a encore jamais fait ses preuves à la tête d'une équipe senior et devra se montrer à la hauteur. Il devra également composer avec les cadres de l'équipe (Bonnard, Rolland, Agnel, B. & S. Bachelet, Podlaha) qui sont ses anciens coéquipiers. Un bon modus vivendi sera à trouver. Mais cette nomination est une belle opportunité pour un joueur à la carrière exemplaire : à lui de la saisir ! Enfin, on pourra apprécier qu'un nouvel entraîneur français fasse son apparition derrière les bancs du Super 16 !

Un recrutement de qualité

Alors que le changement d'entraîneur devait être l'événement majeur de l'intersaison, le recrutement a mis à nouveau les Brûleurs de Loups sous les feux des projecteurs. Au chambardement réclamé ici et là, les dirigeants ont répondu en renouvelant leur confiance à l'essentiel de l'effectif préférant n'ajouter que quelques renforts ciblés. Un choix peu évident au vu de la saison écoulée mais qui prend une tout autre dimension à l'énoncé du nom des renforts. Il fallut d'abord remplacer Arto Vuoti, le seul partant "volontaire" de l'effectif 2002-03. Le vétéran finlandais (35 ans) décidait en effet de mettre un terme à sa carrière de joueur après deux ans sur les bords de l'Isère. Sa dernière saison a été très irrégulière et il semblait évident qu'il avait de plus en plus de mal à "peser" régulièrement sur les rencontres comme il pouvait le faire par le passé. Pour le remplacer, les dirigeants sont allés dénicher un compatriote, de huit ans son cadet : Tero Forsell. Si son nom est inconnu en France, la lecture de son palmarès, statistiques à l'appui, permet vite de se rendre compte que les Brûleurs de Loups ont réalisé un bon coup. Forsell figure en effet depuis plusieurs saisons parmi les meilleurs pointeurs en Mestis, l'antichambre de la SM-Liiga. Il a même terminé meilleur pointeur en 2002 et a toujours maintenu une moyenne supérieure ou égale à un point par match. Plus passeur que buteur, il pourrait être le complément idéal de Josef Podlaha.

Quant au reste du recrutement, il est français et de belle facture : trois "ambassadeurs" de retour au pays que les dirigeants ont eu la bonne idée d'attirer du côté de Pôle Sud. Les internationaux Baptiste Amar et Laurent Meunier ne sont en effet pas les premiers venus. Amar vient de terminer deux saisons NCAA à Lowell tandis que Meunier a goûté avec réussite au professionnalisme américain avec une saison pleine aux Florida Everblades (ECHL). Leur cas est finalement très similaire puisqu'ils se retrouvaient sans perspective à court terme en Amérique du Nord (Meunier n'a pas pu franchir le palier menant à l'AHL l'an passé et Amar n'a pas obtenu de contrat pro) et avaient tous deux des études à terminer à l'INSA avant de tenter à nouveau leur chance hors de nos frontières. Des circonstances qui font donc le bonheur des Brûleurs de Loups tout heureux de pouvoir rapatrier ces deux Dauphinois (Amar a été formé à Gap et Meunier à...Grenoble !) qui sont des piliers de l'équipe de France. Avec ces deux renforts, l'effectif grenoblois prend un tout autre visage.

La quatrième recrue est moins médiatique mais a pourtant un parcours similaire puisque lui aussi revient de l'étranger : il s'agit de Timo Bayon, le jeune défenseur (21 ans), ex-international junior, chaudement recommandé par le manager des juniors français Dany Grando et qui évoluait jusqu'à présent à Espoo en Finlande. Il est un peu tôt pour se faire une idée du niveau auquel peut jouer Bayon et la place qu'il peut occuper dans l'équipe. Mais ce jeune défenseur est une recrue de choix qui pourrait bien être une des révélations de la saison à Grenoble. À noter enfin l'intégration dans l'effectif senior du gardien Fabrice Agnel, champion de France junior. On pourra d'ailleurs regretter que d'autres piliers de l'équipe junior (Sangiorgio et Rudy Billieras notamment) n'aient pu être intégrés dans l'effectif senior. Espérons que leur départ de Grenoble n'est que provisoire.

Qui dit arrivées dit forcément départs car le budget grenoblois n'est pas illimité. Il a donc fallu faire de la place aux arrivants et les "victimes" sont donc Christian Élian, Franck Guillemard, Marc Billieras et Arnaud Goetz. Élian (en balance avec Fougère) a payé une saison 2002-03 assez moyenne laissant planer quelques doute sur sa marge de progression. Guillemard, malgré ses qualités techniques et une attitude irréprochable sur la glace, occupait un emploi à plein temps hors du hockey et ne pouvait pas toujours se rendre disponible pour les entraînements voire les matches à l'extérieur. Quant à Billieras, déjà sur la sellette l'an passé, il ne fait visiblement plus partie des plans grenoblois et mérite mieux que de "cirer" le banc. Goetz méritait lui de trouver enfin une place de n°1 dans un club.

Les Brûleurs de Loups auraient pu regretter que Christian Pouget ait finalement préféré rechausser les patins à Chamonix plutôt qu'à Grenoble. Ils auraient pu aussi regretter de ne pas avoir fait de place à l'enfant du pays Stéphane Barin, lâché tardivement par Krefeld et qui s'est finalement rabattu (provisoirement ?) sur le Mont-Blanc. Mais la qualité des arrivants ne peut laisser de place aux regrets. Ce n'est pas tous les ans que l'on peut accueillir dans ses rangs deux internationaux et un Finlandais du niveau de Forsell. Sans faire injure aux partants, il est évident que Amar, Meunier, Forsell et Bayon constituent individuellement une nette amélioration par rapport à Élian, Guillemard, Vuoti et Billieras. Tout le défi de Gérald Guennelon sera de rendre meilleure collectivement une équipe indéniablement meilleure individuellement.

L'équipe 2003-04 en bref

Gardiens :

Avec le départ de Goetz, Rolland est l'incontestable n°1. Plutôt que de promouvoir Goetz, le club a donc préféré jouer la sécurité et poursuivre son chemin avec l'expérimenté gardien de l'équipe de France (34 ans). Malgré des performances irrégulières l'an passé, Rolland reste un des meilleurs gardiens français et un des cadres de l'équipe. L'avenir passera peut-être par Fabrice Agnel, régulier en D2 et épatant en finale junior. Il est promu au poste de remplaçant.

Défense :

Avec l'arrivée de Amar et Bayon tandis qu'Élian est le seul départ, la défense s'est clairement renforcée. Quatre défenseurs portent ou ont porté le maillot de l'équipe de France (Amar, Bonnard, Gachet et S. Bachelet). Saarinen a un excellent apport offensif. Fougère devra faire oublier une saison 2002-03 décevante et repartir sur les bases de 2001-02. Cela sera certainement plus facile aux côtés d'un défenseur expérimenté à la place d'Élian. Bayon et Millerioux constitueront la quatrième ligne défensive et auront certainement leur chance pendant la saison.

Attaque :

Podlaha, la machine à marquer sera certainement à nouveau le meilleur compteur de l'équipe. Il aura cette fois Forsell pour le servir mais il devra montrer plus d'engagement et moins d'individualisme que par le passé. Meunier est le joueur de caractère qui manquait l'an passé. Attaquant très complet à l'image du capitaine Benoît Bachelet, il sera un des rouages essentiels de l'attaque grenobloise. Antonoff, aux portes de l'équipe de France mais malchanceux côté blessures l'année dernière, espère sans doute jouer une saison complète cette fois. Son gabarit devient intéressant. Shchevelev a connu une saison honnête et est un fin technicien mais on espère encore des progrès de sa part cette année. Comme chaque année Agnel tiendra sa place sur l'une des deux premières lignes. Deschaume et De Murcia devraient avoir encore un rôle défensif sauf surprise. La quatrième ligne junior Tartari-Papa-R.Bachelet méritera du temps de glace.

Conclusion :

Entraîneur et dirigeants se veulent prudents à l'aube de cette saison 2003-04. Mais si les ambitions de titre ne sont pas clairement affichées, le recrutement de très haut niveau place de facto les Brûleurs de Loups parmi les favoris. Reste à voir si l'équipe grenobloise "made in Guennelon" sera plus séduisante sur la glace (à domicile notamment) que celle de Fokine. Meunier, Forsell et consort devraient y contribuer.

Christophe Laparra

 

 

Départs : Arto Vuoti (arrêt), Christian Élian (Brest), Franck Guillemard (arrêt), Marc Billieras (Mont-Blanc) et Arnaud Goetz (Mont-Blanc).

Arrivées : Tero Forsell (TuTo Turku, Finlande), Laurent Meunier (Florida Everblades, ECHL), Baptiste Amar (Umass Lowell, HE, NCAA), Timo Bayon (Blues Espoo Jr., Finlande).

Effectif

Gardiens : Patrick Rolland, Fabrice Agnel.

Défenseurs : Jean-François Bonnard, Jesse Saarinen (FIN), Simon Bachelet, Baptiste Amar, Stéphane Gachet, Roland Fougère, Timo Bayon, Martin Millerioux.

Attaquants : Benjamin Agnel, Josef Podlaha (TCH), Tero Forsell (FIN), Benoît Bachelet, Laurent Meunier, Nicolas Antonoff, Laurent Deschaume, Andrei Shevelev (RUS), Xavier De Murcia, Romain Bachelet, Cyril Papa, Christophe Tartari.

Entraîneur : Gérald Guennelon.

 

 

Retour à la rubrique articles