Allemagne 2004/05 : présentation

 

Critiquée pour avoir voulu interrompre le processus de réduction progressive du nombre d'étrangers, la DEL est finalement arrivée à un compromis : les clubs pourront avoir douze licences de joueurs étrangers au cours de la saison, comme précédemment, mais seulement onze d'entre eux pourront être alignés dans un même match. Même si cette marge peut être utile pour bien d'autres aléas (blessures, remplacement de joueurs écartés, etc), elle est légèrement incitative à essayer de recruter, à titre éventuellement provisoire, une vedette de NHL pendant la durée du lock-out. Outre les Allemands (c'est dans cette catégorie que se rangera peut-être un très convoité Dany Heatley, né à Fribourg-en-Brisgau et qui possède un passeport allemand) pour qui le problème ne se pose pas, ils sont finalement quatre à profiter de cette petite ouverture, les clubs restant dans l'ensemble prudents : Mike York à Iserlohn, Cristobal Huet à Mannheim, Andy MacDonald à Ingolstadt et Stéphane Robidas à Francfort. Mais pas mal de joueurs récemment vus en NHL ont aussi signé des contrats définitifs.

Convaincue de sa force et de sa valeur de sport indoor n°1, la DEL n'a pas hésité à aller au bras de fer avec son diffuseur télévisuel Premiere. La DEL ne veut pas brader ses droits (tout de même 100 000 euros par club, même si c'est moitié moins qu'avant), comme l'ont fait d'autres sports. C'est prendre le risque d'une disparition totale du petit écran - hormis sur quelques programmes régionaux de la télévision publique ARD - mais la conclusion sera peut-être positive si elle obtient des droits télé conséquents ou si le hockey sur glace revient par ce biais sur une chaîne non payante et accessible à un plus grand public.

 

 

Les clubs de DEL

Comme d'habitude, Mannheim a construit une équipe impressionnante sur le papier. Les Adler ne recrutent que du jeune joueur allemand très prometteur ou du Nord-Américain dans le très haut du panier d'AHL avec si possible un pied en NHL. Le problème de ce second type de profil, c'est qu'il n'a qu'une seule envie, reposer un bout d'orteil dans la ligue de ses rêves. Chaque été, la même histoire recommence : les recrues prévues signent en fin de compte en NHL, et le manager de Mannheim, Marcus Kühl, n'a plus qu'à manger les contrats devenus inutiles. Cette force de l'habitude a néanmoins poussé le staff à devenir extrêmement réactif, à l'affût de la moindre opportunité. Cela se sent dans la façon dont on a profité de chaque fenêtre d'ouverture pour faire venir les deux jeunes Allemands de Nuremberg, Vitalij Aab et Thomas Greilinger. Et bien évidemment, le lock-out en NHL est lui aussi exploité. Le retour de Jochen Hecht (Buffalo Sabres) dans son club formateur était prévisible, mais il a en plus été accompagné par Sven Butenschön. Ce joueur de nationalité allemande formé au Canada, qui évolue aux New York Islanders, veut profiter de son passage en DEL pour se faire connaître et intégrer l'équipe d'Allemagne.

Mais il ne faut pas croire que le recrutement de Mannheim est uniquement affaire d'opportunisme. Il est aussi la conséquence d'une sacrée ténacité. Cela fait trois ans que le club tanne John Tripp pour le faire venir. Cet Américain est une occasion en or car il a un passeport allemand et ne compte donc pas comme étranger. Mais il donnait dernièrement sa priorité aux Los Angeles Kings, avec qui il a joué 36 matches la saison passée. Cependant, avec l'avenir incertain de la NHL, il a finalement cédé à la persévérance de Mannheim. C'est pareil pour Cristobal Huet, depuis plusieurs années sur les tablettes du club. On aurait pu jeter l'éponge depuis longtemps : d'une part, le gardien français avait déclaré qu'il préférait la LNA suisse à la DEL pour des raisons de qualité de vie, et d'autre part, il semblait lui aussi embarqué dans son aventure en NHL. Et puis, soudain, le voilà qui débarque à deux semaines de l'ouverture du championnat et qui, à quatre jours seulement de l'échéance, signe un contrat pour la durée du lock-out. Huet sera le quatrième joueur français de l'histoire du club, après Bozon, Pouget et Perez.

Avant ce happy end, il y avait pourtant de quoi se ronger les ongles. À l'origine, le gardien devait être Jamie Storr, l'ex-concurrent de Huet qui s'était fait prendre sa place chez les Kings, mais sa famille lui a conseillé de rester en Amérique. Pendant un mois, l'entraîneur Helmut de Raaf, ancien gardien de l'équipe d'Allemagne, a donc essayé plusieurs portiers sans en trouver un de complètement convaincant. Mannheim donnait une inquiétante impression d'incertitude sur ce poste-clé, mais en fait il avait un atout précieusement dissimulé dans sa manche, et tout le monde a compris quand il a abattu la carte Huet. Non contents de disposer de quatre grosses lignes d'attaque et d'un potentiel offensif impressionnant, les Adler ont maintenant un gardien très confirmé dans les cages. Les adversaires n'ont plus qu'à prier pour la fin du lock-out pour que repartent Hecht, Butenschön et surtout Huet. Car ce n'est pas avec le très tendre Danny aus der Birken dans les cages que Mannheim fera peur en play-offs, et il sera difficile de trouver un gardien libre en cours de saison si la NHL reprend et happe les joueurs. Mais rien à faire. Là encore, Mannheim, c'est plus fort que toi. L'éventuel remplaçant est déjà sous le coude. Steve Passmore, lui aussi passé par Los Angeles mais qui a fait l'essentiel de sa carrière NHL à Chicago, était parmi les candidats lorsqu'il s'est blessé lors d'un match amical. Un nouvel as dans la manche pour Mannheim qui va le garder bien au chaud à l'infirmerie et qui a décidément toujours quelques coups d'avance.

 

Les Eisbären de Berlin veulent concurrencer Mannheim sur tous les tableaux, y compris dans la DNL, le championnat junior des moins de dix-huit ans. Vu le nombre de jeunes incorporés à l'équipe première l'an passé, ils ont un nouvel argument de poids pour attirer les espoirs, et n'ont pas hésité à promettre monts et merveilles à deux jeunes talents très cotés pour les chiper à Mannheim : le gardien Youri Ziffzer et l'attaquant Christoph Gawlik, considéré comme le meilleur de sa génération mais qui, manque de bol, s'est blessé dès la fin juillet et sera absent plusieurs mois. Hormis cette offensive en règle sur des joueurs encore mineurs, qui peut ouvrir la porte à tous les excès, l'été a été calme à Berlin.

Il y a eu très peu de départs, essentiellement les plus de trente-cinq ans qu'étaient Aldridge, Bergen et Corriveau (ce dernier est parti en troisième division aux Preussen, qui après un nouveau dépôt de bilan ont enfin re-fusionné avec le Berliner Schlittschuh-Club, recordman des titres de champion d'Allemagne dont ils avaient fait sécession il y a plus de vingt ans, ce qui permettra peut-être de remonter un grand club à Berlin-ouest), et peu d'arrivées notables. Une en attaque, l'international Stefan Ustorf, qui apparaît dangereusement sur le déclin. Deux en défense, Derrick Walser, un joueur de seulement vingt-six ans qui a joué 80 matches de NHL ces deux dernières saisons à Columbus, et Shawn Heins. Après trois saisons de NHL souvent tronquées par les blessures à Pittsburgh et San José, cet arrière a été relégué en AHL la saison dernière par Atlanta. Il présente surtout la particularité d'être le recordman mondial du slap le plus puissant avec un tir chronométré à plus de 170 km/h, qui vaut à la crosse qu'il a utilisée ce jour-là d'être exposée au Temple de la Renommée (Hall of Fame) de Toronto.

Le point d'interrogation se situe dans les cages car c'est le moment de vérité pour Oliver Jonas. Il n'a pas convaincu dans les moments importants ces derniers mois, que ce soit en play-offs ou avec l'équipe d'Allemagne. Il doit prouver qu'il a la stature d'un titulaire en DEL, comme seul Robert Müller avait su le faire jusqu'ici.

 

Le champion en titre Francfort ne voudra pas subir le sort de son prédécesseur Krefeld, à savoir ne pas se qualifier pour les play-offs l'année d'après. Il devrait y parvenir car il n'a pas connu la même saignée. Il a tout de même perdu deux centres : Jesse Bélanger, le parfait complément de Pat Lebeau en attaque, retourne à la paisible vie helvétique, et Mike Harder n'est plus désiré malgré ses play-offs où il a marqué le but décisif à la fois en quart, en demi et en finale. Mais ils seront parfaitement remplacés, avec Marc Beaucage, une valeur sûre de DEL, et Sean Pronger, le petit frère de Chris (dernier défenseur à avoir été élu meilleur joueur de NHL), qui a le gabarit imposant caractéristique de la famille et compte 260 matches de NHL au compteur.

Le départ le plus problématique aurait pu être celui du capitaine Paul Stanton, qui a pris sa retraite sur ce dernier fait de gloire. Ils se mettront à plusieurs pour assumer le leadership laissé vacant, mais il risquait de laisser un vide sur la glace. Son remplaçant prévu, Nolan Baumgartner, a finalement décidé fin août d'annuler sa venue et de resigner chez les Vancouver Canucks. Francfort a eu très peur que l'autre pion essentiel des lignes arrières, le défenseur Peter Ratchuk, soit à son tour appâté au dernier moment, mais lui a choisi de rester. Puis, la veille du début de saison, les Lions décidaient de ne pas garder Coleman pris à l'essai et d'engager le défenseur de NHL Stéphane Robidas, excellent remplaçant de Stanton. Tout paraît donc pour le mieux, mais il y a par contre eu un départ discret, celui de l'assistant-coach responsable de la défense, Stéphane Richer, vers le rival Mannheim qui n'en rate pas une. Il a plus d'importance qu'il n'y paraît car le jeune retraité était le lien avec la communauté francophone de l'équipe.

 

Le travail de développement qu'il a mené auprès des jeunes joueurs à Iserlohn puis à Nuremberg a valu à Greg Poss d'être le premier Américain à devenir sélectionneur de l'équipe d'Allemagne. Ce bourreau de travail qui pense hockey 24h/24 ne craint pas le cumul des charges, mais la fédération a dû négocier avec son club qui ne voulait pas être privé de son entraîneur pendant la phase de préparation à cause de la coupe du monde. Il ne rentrera donc officiellement en fonction qu'en octobre, après s'être consacré exclusivement à Nuremberg pendant le début de saison, le directeur sportif de la fédération Franz Reindl assurant l'intérim en équipe nationale.

Avec des recrues comme Lubomir Sekeras, recordman des sélections en équipe de Slovaquie qui n'avait malheureusement pas pu participer au titre de champion du monde 2002 sur blessure, les Ice Tigers sont une nouvelle fois parmi les outsiders, même si le staff a pris quelques décisions impopulaires en se séparant des buteurs slovaques Cisar et Tomik mais aussi des vieux Canadiens comme le rude Guy Lehoux. Le rajeunissement continue plus que jamais puisque la moyenne d'âge de l'équipe passe en dessous de la barre des vingt-quatre ans. Pourtant, il y a eu un coup de théâtre lors de la reprise de l'entraînement. Nuremberg annonce que Thomas Greilinger est "échangé" à Mannheim contre Tomas Martinec. Quelle est donc cette curieuse transaction dans laquelle un des meilleurs espoirs allemands est cédé en retour d'un Germano-Tchèque pas de la première fraîcheur et surtout réputé comme un spécialiste de l'usage vicieux de la crosse dans des coups en douce ? En fait, Greilinger, le "Jan Ullrich du hockey", s'est encore laissé aller pendant la morte saison, et Poss, en voyant son état de forme, n'a pas transigé. Pas de chance pour un joueur qui avait réussi à vaincre enfin les réticences de l'ancien sélectionneur national Hans Zach (grâce au travail et à la conviction de Poss !), voilà qu'il fait mauvaise impression au nouveau. Poss n'est néanmoins pas rancunier et ne ferme pas la porte de l'équipe nationale à Greilinger, mais il a fixé une condition sine qua non avant tout débat à ce sujet : qu'il repasse en dessous des 95 kg !

L'autre rebondissement de l'été concerne la recrue prévue dans les cages Norm Maracle. Le gardien vice-champion de Russie avec Magnitogorsk a demandé à repartir au Canada auprès de sa mère malade d'un cancer, et le club a bien évidemment accepté... avant d'avoir des doutes en apprenant quelques semaines plus tard que Maracle était l'un des candidats attendus pour un essai à Mannheim. Une information sur lequel le staff de Nuremberg se refusa à faire le moindre commentaire, mais il est clair que le contrat de Maracle était gardé en réserve au cas où, et l'avion du Canadien fut d'ailleurs décommandé au dernier moment... Sa défection initiale avait été complexe à gérer pour Nuremberg quand on sait la difficulté que le club avait déjà eu à recruter son gardien dans un premier temps (et ce n'est pas faute d'avoir suivi des pistes prestigieuses, comme le portier slovaque n°1 Jan Lasak). On a finalement trouvé un remplaçant, Adam Svoboda, qui a survolé l'Extraliga tchèque l'an passé à Pardubice... avant de se faire étonnamment sortir en quart de finale. Il ne pouvait trouver un environnement plus familier que Nuremberg, un club qui a échoué ces trois dernières années à intégrer les demi-finales, quelles que soient ses bonnes positions en saison régulière.

 

Hambourg est un cas à part. Dans une DEL où la plupart des gros clubs, et notamment les quatre cités ci-dessus, affichent une vocation offensive, qu'ils soient friands ou pas de termes à la mode comme "Torpedo", les Freezers ont bien l'intention de faire honneur à leur nom et de geler les initiatives adverses. Ils ont pour cela quasiment conservé la même défense que la saison dernière, mais les doutes ont commencé à s'installer après des matches amicaux vraiment pas rassurants. Cette préparation tourmentée s'est achevée par l'exclusion de Mark Greig pour divergences philosophiques avec l'entraîneur Dave King. L'attaquant a alors trouvé refuge à Kassel.

Hambourg, qui a vu partir cinq joueurs vers Hanovre (dont quatre Allemands qui y seront enfin considérés) et son capitaine-symbole Andrew Schneider vers Düsseldorf, ne paraît pas vraiment renforcé même s'il dépasse désormais Mannheim en tant que club le plus riche du pays. Le problème est qu'une bonne partie de ce budget sert à payer le loyer de la Color Line Arena (pour l'instant les Freezers ont surtout pour effet de taper dans le portefeuille du milliardaire américain Anschutz pour remplir le portefeuille du milliardaire finlandais Harkimo, qui apparaît comme le gagnant du deal). L'effort de recrutement s'est essentiellement concentré sur un seul joueur, l'attaquant américain Craig Johnson, qui évoluait depuis neuf saisons sans interruption en NHL. De son adaptation à l'Europe - même à un championnat d'influence assez canadienne comme la DEL - dépendront sans doute les ambitions hambourgeoises.

 

Dans la mesure où Landshut ne joue qu'en deuxième Bundesliga, Marco Sturm a choisi de revenir le plus près possible de chez lui pendant la durée du lock-out, et il a donc opté pour Ingolstadt. La venue du meilleur joueur allemand, au moment où sa biographie sort en librairie, contribue encore à amplifier le phénomène hockey dans la ville industrielle bavaroise où son nom est sur toutes les lèvres. Mais il y a un revers à la médaille, c'est que l'ERCI est l'équipe la plus dépendante des évènements en NHL. Ses deux piliers offensifs, Sturm mais aussi Andy MacDonald (Anaheim), ont en effet des contrats provisoires et conditionnés à un éventuel accord entre syndicat des joueurs et propriétaires outre-Atlantique. Leur éventuel départ ainsi qu'une certaine inexpérience de l'équipe font qu'Ingolstadt est bien coté pour la saison régulière, mais moins pour d'éventuels play-offs.

L'effectif "sans les deux renforts" est néanmoins très semblable à celui qui avait atteint la demi-finale l'an passé. Le collectif est donc au point et Ron Kennedy a fait reprendre l'entraînement plus tard que les autres équipes, seulement à la mi-août. Laissant assez de libertés aux joueurs en dehors de la glace, l'entraîneur canadien n'est en revanche pas un grand adepte de la prise de risques, aussi bien dans l'incorporation des jeunes quand dans la tactique de jeu. On va encore essentiellement s'appuyer sur le gardien québécois Jimmy Waite et sur la défense, qui reçoit le renfort de Chris Armstrong. L'ex-joueur d'Augsbourg avait retenté sa chance en NHL l'été passé, mais n'avait joué que quatre matches avec Anaheim et avait passé le reste du temps en AHL. On note tout de même un pari au sein du recrutement, celui de donner une seconde chance à l'ex-international Andreas Loth, qui avait sombré dans l'anonymat depuis que Zach avait quitté Kassel.

 

Non seulement Cologne n'est plus la référence, mais en plus le KEC apparaît cette saison comme un club "ordinaire" de DEL, ce qui est un comble au vu de ses structures et de sa moyenne de spectateurs qui est la meilleure d'Europe. C'est sans doute un effet secondaire de l'aura de Hans Zach, descendu de son piédestal depuis qu'il a démissionné de son poste d'entraîneur de l'équipe nationale. Il agace sérieusement en continuant à essayer de faire porter le chapeau de son retrait à l'hebdomadaire Eishockey News qui avait osé le remettre en question (un débat contradictoire avait été publié sur deux colonnes, l'une par un journaliste qui défendait l'argument selon lequel il était temps de changer de sélectionneur, l'autre par un journaliste qui défendait Zach et expliquait pourquoi il devait continuer : on a vraiment vu pire comme campagne de presse contre un entraîneur...) et en refusant de faire une quelconque autocritique ou d'admettre qu'il y avait des mécontents au sein même de l'équipe. Protégé jusqu'ici par son poste et par ses résultats alors qu'il était déjà peu apprécié par beaucoup d'amateurs allemands de hockey, Zach n'apparaît plus aujourd'hui que comme un conservateur bavarois en culotte de peau (cf la photo en introduction de sa biographie publiée au printemps). Dans un pays qui ne veut plus que l'image donnée de son hockey soit une équipe nationale ennuyeuse attendant à quatre hommes à la ligne bleue défensive, dans un championnat où la tendance est aux tactiques offensives, il est tout simplement démodé.

Ne l'enterre-t-on pas un peu trop vite ? Pourquoi son système ne serait-il plus aussi efficace, simplement en raison de quelques résultats moins bons, mais pas pour autant catastrophiques ? Ne serait-on pas en train de jeter le bébé avec l'eau (de Cologne) du bain ? Il n'y a en soi pas de raison que la cote du KEC pâtisse de la place moins prédominante de Zach dans le hockey allemand. Après tout, il pourra maintenant se consacrer exclusivement à son club.

En fait, le problème tient peut-être plus du vieillissement de l'effectif de Cologne que des rides prises par l'image de Zach. Les jeunes internationaux (Morczinietz) ou les espoirs (Kink), qui avaient peut-être été surtout été intéressés par la possibilité de jouer sous les ordres du sélectionneur national, ont pris la poudre d'escampette. La première ligne canadienne Hicks-McLlwain-Roy a un âge cumulé de 107 ans, et l'ex-meilleur défenseur allemand Mirko Lüdemann (qui a perdu son rôle de capitaine au profit de Brad Schlegel parce qu'il n'était pas assez agressif avec les arbitres et ne les influençait pas assez, selon les explications de Zach lui-même !) commence à se faire vieux comme la coupe du monde l'a montré. Les Haie ont les dents usées, et voir leur aileron n'effraie même plus les baigneurs.

 

Il est un endroit où Zach est encore regretté, c'est Kassel, qui traverse des temps difficiles depuis son départ. Mais tout le monde s'attend à ce que cette année soit celle du grand retour des Huskies. Ils sont considérés comme l'équipe qui s'est le plus renforcée, et le chambardement effectué à l'intersaison (départs de presque tous les étrangers et arrivée de treize nouveaux joueurs) a été perçu très positivement par les supporters. Le public est alléché d'avance de la venue de Dany Bousquet, révélation de la saison dernière à Fribourg-en-Brisgau. Il y a en plus trois très bons joueurs d'AHL du meilleur âge (27 ou 28 ans), dont le solide arrière Christian Laflamme qui a déjà joué 333 matches de NHL. Il y a aussi un bon coup en la personne de Petr Macholda, défenseur de 22 ans devenu champion tchèque avec Zlin, car il a pu être naturalisé allemand en juillet. Son père Vladimir avait déjà joué à Kassel avec un passeport allemand entre 1991 et 1993.

La défense devait être le point fort de Kassel, grâce à la venue pour la durée du lock-out John-Michael Liles, récemment propulsé sous les projecteurs. L'arrière des Colorado Avalanche s'entraînait tranquillement avec les Huskies quand un coup de téléphone l'informait qu'il avait été sélectionné pour les États-Unis à la coupe du monde, en remplacement de Hal Gill blessé. Il dut alors emballer ses affaires et partir dans un temps record outre-Atlantique, et alors qu'il avait débarqué en plein milieu de l'échauffement d'avant-match, il réussit l'exploit de marquer un but. Son aventure fit évidemment parler de lui, et Kassel de se réjouir encore plus de l'avoir engagé. Malheureusement, il s'est blessé au pied lors de la coupe du monde, et du coup il ne viendra pas. Attention donc à ces lauriers déjà tressés avant que la saison ait commencé. Car un grand chantier attend l'entraîneur Mike MacParland qui a toute une équipe à construire. Le tempérament offensif qu'il appelle de ses vœux reste encore à insuffler.

 

Quatrième et dernière année de contrat à Düsseldorf pour l'entraîneur et directeur sportif Michael Komma, qui sait que la suite de sa carrière est en jeu. On lui a accordé un budget en hausse, et même une rallonge cent mille euros à deux semaines de la reprise de l'entraînement pour réussir enfin à alpaguer le centre qui faisait défaut à la première ligne (l'Américain Matt Herr). Son équipe paraît au moins aussi bonne que la saison passée, du moins offensivement. Seul souci, la concurrence, elle, est plus forte. Or, l'objectif assigné est à la fois d'atteindre les play-offs et d'être capable d'y faire quelque chose. Même la huitième place de l'an dernier, déjà loin d'être certaine, risque d'être insuffisante dans cette optique.

Conformément aux souhaits des dirigeants, Düsseldorf a gardé la même base et s'est constitué une équipe stable. À une exception près (le Canadien d'Augsbourg Éric Dandenault remplace l'Autrichien Gerhard Unterluggauer rentré au pays), le gardien et les défenseurs sont les mêmes que l'an passé. Ce qui n'est pas un gage d'amélioration quand on sait que tous les étrangers de ce secteur ont dépassé allègrement la barre des trente ans, avec le Belge Mike Pellegrims en doyen à 36 ans. L'attaque est par contre renforcée avec deux joueurs d'AHL qui se connaissent (Herr et Davidson), le travailleur Andy Schneider, et enfin l'international Klaus Kathan, qui a semble-t-il enfermé son sens du but dans un coffre depuis deux ans et jeté la clé dans le Rhin. Le joueur à suivre dans le hockey allemand, ça fait longtemps que ce n'est plus lui. C'est plutôt Daniel Kreutzer, dont les parents tenaient autrefois le restaurant de la patinoire de Düsseldorf, et qui confirme sans cesse - comme dernièrement à la coupe du monde - qu'il se rapproche du plus haut niveau mondial, au point d'avoir reçu des propositions pour évoluer comme joueur étranger en LNA suisse cet été.

 

Désormais cédés par la famille Haselbacher et installés pour de bon dans la Preussag Arena, les Scorpions de Hanovre peuvent vivre une vie plus normale, où l'essentiel se passera sur la glace et non plus dans les coulisses. La politique du club paraît tout de suite plus rationnelle en mettant la priorité sur le secteur auparavant délaissé des joueurs allemands, et en particulier des espoirs, comme le jeune international Andreas Morczinietz, qui donnent un vrai coup de jeune à l'effectif. Du coup, la profondeur de banc s'en trouve incomparablement améliorée par rapport à la saison dernière, et pas avec des bouche-trou. Au moment où l'entraîneur suédois Gunnar Leidborg, qui prend décidément vite des goûts de luxe, disait qu'il aimerait bien un quinzième attaquant pour que la concurrence soit encore plus poussée, on apprenait que Robert Hock se plaignait du faible temps de jeu que lui réservait Helmut de Raaf pour la nouvelle saison. Et hop, aussi sec récupéré lui aussi. Le meilleur marqueur de Mannheim la saison dernière, ce n'est pas mal comme quinzième attaquant...

En plus de Morczinietz, il y a beaucoup de recrues qui sont aux portes de l'équipe nationale allemande, comme Peter Abstreiter, Patrick Köppchen et, qui sait, "l'oublié" Robert Hock. Cela suffit à transformer le visage de l'équipe et à susciter l'euphorie. Les Scorpions n'avaient fait le plein qu'une fois à la Preussag Arena, c'était lors de la demi-finale 2001. Cette année, les dix mille places seront occupées dès la première journée, lors du derby de Basse-Saxe contre le promu Wolfsburg. Dans les cages, l'ex-international Christian Künast constituera une alternative valable à un Ilpo Kauhanen pas toujours constant. La défense reste stable avec l'adjonction du petit Dan Lambert comme leader d'expérience. Et l'attaque possède un nouveau buteur avec le Slovaque venu de Nuremberg, Marian Cisar.

 

Treize clubs sur quatorze ont gardé leur entraîneur de la fin de saison dernière (en cours de saison, cela valse plus, je vous rassure...), et l'unique exception est Krefeld. Qui plus est, le nouvel arrivant, l'Italo-Canadien Mario Simioni, arrive du championnat du Danemark, autant dire qu'il entend ses oreilles siffler et qu'il a intérêt à vite convaincre un milieu dubitatif. Après la dégringolade de l'an passé à la suite du titre de 2003, le KEV veut redorer son standing. En plus, avant même des bastions comme Mannheim (fin 2005) et Düsseldorf (2006), il sera le prochain à disposer d'une salle multifonctions, dès décembre. Le KönigPALAST de 8200 places n'en contiendra que mille cinq cents de plus que l'actuelle Rheinlandhalle, mais celle-ci était une ancienne construction avec quatre mille places debout.

Néanmoins, les moyens sont limités. Recruter un défenseur offensif serait utile, mais cela coûte trop cher, et l'unique nouveau en défense est donc le rugueux Guy Lehoux. En attaque, après le départ du marqueur Marc Beaucage, on a tout de même pu engager Steve Brûlé et Scott King, gros pointeurs respectivement en AHL et à Iserlohn. Le reste, ce sont des paris. Après Marcel Rodman (qui a malheureusement dû mettre sa carrière entre parenthèses en raison d'une maladie des yeux), un nouveau Slovène arrive, Ivo Jan, meilleur joueur du dernier championnat autrichien. Il avait déjà échoué en DEL il y a quelques années, mais il était jeune et il a beaucoup mûri depuis. Le parcours le plus original est quand même celui de l'attaquant allemand d'origine coréenne Martin Hyun. Né et formé à Krefeld, il est parti poursuivre ses études en Amérique avant de revenir en Europe... par le biais du championnat belge, aux Chiefs de Louvain.

 

Le manager d'Augsbourg, Karl-Heinz Fliegauf, a souvent été considéré comme le meilleur de DEL. Avec un budget pas extensible, il a toujours composé de bonnes équipes capables de rivaliser en milieu de tableau. Mais cette année, sa réputation a pâti d'un recrutement erratique. Pendant de longs mois, l'unique arrivant a été le gardien Jean-François Labbé, et on a même eu peur que le transfert capote lorsque le Lada Togliatti s'est manifesté pour dire qu'il était encore sous contrat avec eux même s'il avait soudainement quitté la Russie en décembre. Labbé aurait ainsi pu être suspendu, mais Augsbourg s'est arrangé avec le club russe. On comprend que Fliegauf y tenait car il n'avait aucune autre recrue à annoncer. Il a joué à l'extrême la carte de la patience, en espérant que la perspective d'un lock-out permettrait de trouver de bons joueurs pas cher à la fin de l'été.

En fait, cela a surtout servi à vivre des semaines tendues et frustrantes à essayer de trouver son bonheur parmi des joueurs à l'essai. Encore faut-il que ceux-ci viennent effectivement, pas comme le Français Yorick Treille qui n'a pas souhaité tenter sa chance et est reparti aux États-Unis. Au moins, les tests permettent de se rendre compte que l'on est en train de faire une bêtise. Par exemple avec les défenseurs Rémi Royer et John Jakopin qui avaient joué en NHL à leurs débuts, et dont on a surtout compris pourquoi leur cote avait sacrément chuté entre-temps. Laporte leur a gentiment montré... la porte, à six jours du début de saison. Au même moment, l'AEV trouvait - enfin - un défenseur de valeur, l'Américain Mike Pudlick, meilleur arrière de Portland en AHL. Ouf ! Ça en fera au moins un... Car on ne pourra tout faire reposer sur Labbé sous prétexte qu'il a obtenu treize blanchissages la saison passée. Cinq d'entre eux étaient dans le semi-pro québécois, pas une référence, et les autres étaient au sein du système ultra-défensif du Lada de Piotr Vorobiev où tous les gardiens ont de bonnes stats. Le très offensif Augsbourg de Benoît Laporte, dont la défense aura sûrement encore besoin d'un autre renfort, ça va le changer...

 

Comme chaque année, Iserlohn vise le maintien. Dans ce contexte, le choix de faire confiance à deux gardiens allemands - Dimitrij Kotschnew et Leonardo Conti - n'en est que plus courageux. Au vu de ses moyens limités, le club est contraint chaque année de faire des paris. Et cela donne un recrutement un peu plus audacieux et diversifié que les autres. Ici, le joueur d'AHL avec quelques matches de NHL dans la saison écoulée (Brett Lysak) est une denrée rare. On recherche plutôt par exemple un défenseur sûr aux statistiques peu spectaculaires, comme l'Américain Brian White. Deux Canadiens, l'ailier Rhett Gordon et le défenseur Mike Martin, ont été pêchés respectivement à Herning au Danemark et à Khabarovsk dans l'Extrême-orient russe. Deux anciens joueurs de DEL ont été retrouvés dans des championnats de moindre niveau, Ralph Intranuovo à Linz en Autriche et Igor Alexandrov à Storhamar en Norvège (le Russe devant revenir avec un passeport allemand). Il y a tout de même un nom qui claque, le défenseur offensif Martin Knold, un des piliers de l'équipe de Norvège.

Mais tous sont pour l'instant relégués dans l'ombre, car Iserlohn n'a actuellement d'yeux que pour un seul homme : Mike York. L'ex-compagnon de ligne de Fleury et Lindros aux New York Rangers était le meilleur marqueur des Edmonton Oilers au moment de se blesser en janvier dernier. C'est la première star de NHL dont le recrutement a été annoncé en cas de lock-out, dès juin dernier. On s'attendait à ce que soit un des cadors qui essaie d'abord de s'attacher les services d'une vedette, mais c'est le petit budget d'Iserlohn qui a doublé tout le monde. C'est un club qui est obligé de faire des paris, on l'a dit, et recruter un joueur qui risque de repartir outre-Atlantique en cours de saison n'en est qu'un de plus. L'Américain, qui a choisi Iserlohn pour y retrouver son ami Bryan Adams, a montré son désintéressement en payant lui-même son assurance (élevée au vu du montant de son contrat NHL, qu'il faudrait rembourser en cas de blessure). Le meilleur joueur jamais passé par Iserlohn aura pour objectif premier d'en mettre plein les yeux au public.

 

Deux mille spectateurs. C'est la moyenne sur laquelle table le promu Wolfsburg. C'est très faible pour la DEL, mais c'est déjà beaucoup pour un club qui dépassait péniblement les mille en deuxième Bundesliga. Dans une ville toute entière bâtie autour des usines Volkswagen, c'est la volonté de la firme qui a fait monter l'équipe de hockey, sponsorisée par sa filiale Škoda. Encore faut-il que le public suive, sachant qu'il peut déjà soutenir une équipe de football, elle aussi grassement financée, qui figure parmi les meilleures du pays. En attendant que soit construite une nouvelle patinoire digne des ambitions du club, l'actuelle, admise par dérogation en DEL, a été simplement retapée. Sur ses 2700 places, il n'y a que 400 places assises, et elles ont toutes été déjà vendues aux abonnés, signe d'un intérêt manifeste pour suivre le parcours du promu.

Celui-ci a fait le choix de conserver treize des joueurs qui ont obtenu la montée. Il vaut mieux en effet faire confiance à des gens qui ont œuvré pour le club plutôt que d'aller chercher des recrues pas toujours meilleures, comme Fribourg-en-Brisgau l'avait fait l'an passé. Mais cela ne dénote en aucun cas un manque d'ambition. Dès les premiers jours après sa promotion, Wolfsburg a marqué le coup en engageant un nom fameux, Marc Seliger, le gardien qui vient de mettre un terme à sa carrière internationale, dont le summum restera sa performance aux JO de Salt Lake City. L'entraîneur slovaque Stefan Mikes, qui a participé à la croissance de Wolfsburg depuis sept ans, a surtout fait appel à trois autres de ses compatriotes (en plus du gardien Mastic et du défenseur Veber déjà présents). Deux d'entre eux, Petr Smrek et Ivan Ciernik, ont déjà eu l'occasion de jouer en NHL malgré leur jeune âge, et le troisième, Richard Pavlikovsky, a été relégué l'an passé en Suède avec Leksand. On espère à Wolfsburg que ce n'est pas un mauvais présage...

Marc Branchu

 

 

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