Italie 2008/09 : bilan de la saison

 

Les résultats de la saison

 

Série A1

 

Premier : Bolzano. Sur sa lancée, le HCB a remporté un second titre d'affilée, avec encore plus de maîtrise. La pression du favori a finalement été bien supportée, même quand un journaliste local a annoncé le licenciement probable de l'entraîneur Jari Helle à l'automne. Non seulement le Finlandais a gardé son poste, mais il a bien su partager les tâches en s'occupant de l'attaque quand son collègue américain Jamie Dumont se chargeait de la défense.

Le bouleversement le plus important, le changement de gardien, s'est bien passé, puisque Pasi Häkkinen s'est révélé au moins aussi bon que Groeneveld. Le retour d'Alexander Egger a permis de disposer d'une bonne escouade de relanceurs italiens (avec Borgatello), compensant bien les limites des étrangers Carl-Johan Johansson - un peu lent - et Sergejs Durdins, un Letton de niveau moyen mais s'efforçant de commettre peu d'erreurs.

L'attaque, tournant toujours autour de l'impérial Kenny Corupe, a été comme prévu la meilleure du championnat, mais elle a mis du temps à se trouver. La recrue d'AHL Nate DiCasmirro, alléchante car dotée de mains en or, n'était vraiment pas d'une grande efficacité collective. Il a fallu attendre l'ultime joker Fraser Clair pour trouver enfin un dynamiseur offensif, auteur de 6 buts en play-offs où Cortina puis Renon ont été balayés.

Bolzano, qui a aussi remporté la Coupe et la Supercoupe, est donc totalement maître en son pays, tellement d'ailleurs que l'ennui le guette parfois... Il lorgne ainsi du côté du championnat autrichien. La fédération a bloqué ce départ pour l'instant, bien consciente qu'il priverait le hockey italien de ce qui est actuellement son seul grand club.

 

Deuxième : Renon. Le seul rival qui conteste la domination de Bolzano, c'est en effet une petite commune limitrophe de sept mille habitants, Renon, située sur un plateau au nord-est de la ville. À Collalbo - principal village de la commune et siège de la mairie et de la patinoire - on organise la résistance contre ceux d'en bas. C'est une situation qui n'est pas sans rappeler celle de Grenoble et de Villard-de-Lans, avec trois fois moins de distance kilométrique entre les deux fiefs, mais avec beaucoup plus de distance linguistique : à "Ritten", comme on appelle Renon en allemand, tout le monde est germanophone, pas comme dans la capitale provinciale.

Bien évidemment, "ceux du plateau" n'ont pas les mêmes moyens que "ceux de la ville". L'été dernier, Bolzano a ainsi pillé Renon, de son meilleur marqueur (Josh Olson) de son meilleur défenseur (Alexander Egger) et de son meilleur marqueur italien (Enrico Dorigatti... pour le laisser sur le banc). Pour être exact, ces deux derniers n'ont fait que rentrer d'où ils venaient.

Alors, pour les remplacer, Renon a vite fait appel à sa filière québécoise, qui l'avait déjà gratifié de son gardien Frédéric Cloutier. Si récupérer Giulio Scandella, international italien à double passeport, ne nécessitait guère d'imagination, il fallait en revanche un peu plus de flair pour aller chercher Nicolas Corbeil. Ce centre canadien très talentueux, ancien troisième tour de draft NHL, s'était perdu jusqu'en LNAH, une ligue où l'on pensait que seuls les clubs français recrutaient. La ligne Tudin-Scandella-Corbeil a été la meilleure lors de la saison régulière, où Renon a encore terminé en tête, mais elle a calé en finale. Les deux attaquants québécois ne seront donc pas reconduits.

C'est la troisième finale perdue en quatre ans pour Renon, dans une ambiance chaque fois plus passionnée. Il faut dire que l'entraîneur Ron Ivany n'a eu de cesse de souffler sur les braises avec des déclarations de plus en plus équivoques. À l'époque de son précédent passage au club en 2006, il avait déclaré que le calendrier était monté pour faire plaisir à Bolzano et en avait perdu son poste d'adjoint en équipe nationale. Cette fois, il a carrément dit que les arbitres étaient achetés par le tout puissant voisin. Il aurait peut-être dû tourner sa langue sept fois dans sa bouche puisqu'il a été suspendu cinq mois. Mais même si Ivany ne pourra être présent sur le banc avant la mi-novembre, Renon manifeste son total soutien à son coach et a fait savoir qu'il resterait en fonction malgré tout. Voilà qui promet encore de chauds derbys !

 

Troisième : Cortina. Renon n'est pas le seul à avoir une dent contre Bolzano. La demi-finale du champion contre Cortina, elle aussi réglée en quatre matches secs, a été émaillée de polémiques.

La plus houleuse a eu lieu lors de la prolongation de la troisième manche. Une faute non sifflée sur l'Italo-Canadien Ryan Watson a mis le feu aux poudres, car dans la continuité de l'action, Corupe a marqué le but vainqueur de Bolzano. L'entraîneur Paul Adey, venu de Renon et donc nourri de cette culture de victimisation, était furibard, et le club a même menacé d'aligner son équipe junior au match suivant en guise de protestation.

Finalement, ce sont bien les pros qui se sont déplacés, et ils ont répété le même scénario : perdre 3-4 en prolongation après avoir gâché une avance de deux buts. Cette conclusion a ressemblé à la saison de Cortina : dotée de dix points d'avance après deux allers-retours au moment où les points ont été divisés par trois, l'équipe a sombré dans la dernière ligne droite lorsque les victoires valaient le plus cher.

Un banc un peu court mais aussi l'indiscipline de certains joueurs, y compris hors glace, expliquent que Cortina ait ainsi disparu aussitôt que l'enjeu s'est élevé.

 

Quatrième : Val Pusteria (Brunico). Dans l'ambiance parfois morose du hockey italien, le Val Pusteria fait un peu figure d'exception : cette vallée est la seule où la passion ne s'est jamais démentie. Même lorsque l'air humide montant de la rivière Rienza s'engouffre l'hiver dans la patinoire de Brunico ouverte à tous les vents, la tribune nord reste toujours aussi chaude.

L'été dernier, le club a dû clôturer les inscriptions des enfants parce que les places étaient toutes prises avec 42 nouveaux arrivants. On connaît bien des clubs en Italie qui n'ont pas 42 licenciés dans tout leur hockey mineur...

Cet environnement favorable, microclimat très spécifique à cette vallée, s'est accompagné d'une réussite sportive : Brunico s'est qualifié cette année pour la deuxième demi-finale de son histoire, la première datant de... 1984.

À vrai dire, ce n'est pas parce qu'elle est rare que cette qualification est miraculeuse. Dans une série A un peu dépeuplée après le départ de Milan, on peut même dire qu'elle était attendue.

L'entraîneur qui monte, Stefan Mair, était en effet arrivé de Fassa avec dans ses bagages les marqueurs Greg Barber et Greg Watson. Et pourtant, à la mi-novembre, le président a été obligé de réaffirmer publiquement que Mair conserverait son poste. Si un doute avait pu s'installer, c'est que Brunico était alors dernier du classement. La raison en était simple : le nouveau gardien canadien Kelly Guard venait d'annoncer sa retraite à seulement 25 ans, déclarant "ne plus se sentir motivé" après des performances décevantes puis des soucis d'adducteurs. Il fallait donc le temps que son remplaçant finlandais Tuomas Nissinen trouve ses marques, ce qu'il a fait assez vite. Ces problèmes automnaux n'ont donc pas duré.

 

Cinquième : Asiago. Après deux saisons passées à la dernière place, les jaune et rouge sont enfin sortis de l'ornière. Ils ont appliqué la même recette que ces dernières années : des joueurs formés au club et des Nord-Américains d'origine italienne qui deviendront sélectionnables à plus ou moins brève échéance. Ces "Italos" ne sont pas systématiquement des modèles : Damian Surma s'est fait recaler avant le début de saison car il était revenu avec quelques kilos de trop. Il a été envoyé en série A2 et est rentré en ECHL.

À l'automne, Asiago a recruté deux nouveaux oriundi. L'un, Tony Tuzzolino, était bien connu en Italie, mais l'autre, Luciano Aquino est une sacrée découverte. Le frère du néo-international Anthony Aquino n'est pas aussi technique qu'un Tuzzolino mais il patine avec une grande intensité, y compris en phase défensive, et se retrouve donc toujours placé au bon endroit. C'est ainsi qu'il a inscrit un but par match et ranimé Asiago.

Peu après son arrivée, en décembre, le club a pourtant failli être déstabilisé par de méchantes rumeurs : les salaires ne seraient pas payés, certains cadres seraient quasiment partis. Ces bruits étaient si répandus que l'un des joueurs concernés - le défenseur international italien Trevor Johnson - et le président Mantovani ont été obligés de les démentir. Les difficultés financières étaient cependant admises, ce qui anéantissait une autre rumeur voulant que l'entraîneur James Camazzola soit en danger. Un licenciement aurait été trop cher de toute manière. Une série de quatre victoires à la fin décembre a vite dissipé ces inquiétudes.

 

Sixième : Alleghe. L'an passé, après avoir pris goût à la victoire pendant l'ère Mats Lusth, Alleghe s'était cru plus beau qu'il n'était. Il s'était imaginé en prétendant au titre et avait sérieusement déchanté. Cette année, il s'est beaucoup calmé et a retrouvé une équipe plus en phase avec sa tradition.

Le nouveau coach Mike Kelly a obtenu un effectif renforcé de rares éléments comme le gardien Phil Groeneveld et l'attaquant suédois Johan Sjodell-Wiklander. Les autres joueurs avaient été gardés, avec des fortunes diverses. Les étrangers n'ont pas toujours justifié leur prolongation de contrat, surtout un Mike Harder très décevant. En revanche, les trentenaires du cru qui avaient décliné en même temps que l'équipe l'année précédente ont réussi une grande saison : les deux meilleurs chasseurs de filets ont été Fabrizio Fontanive (22 buts) et Daniele Veggiato (19 buts).

Heureusement que la main d'œuvre locale reste productive, car le président Renato Rossi a évoqué une diminution d' un quart des coûts qui rendra impossible de conserver les renforts extérieurs au salaire actuel. Il y en aura donc d'autres l'an prochain (dont un certain Daniel Goneau).

 

Septième : Pontebba. Les Aigles du Frioul volent de moins en moins haut. Leur troisième saison dans l'élite a été de loin la plus difficile. Début décembre, l'entraîneur finlandais Vesa Surenkin a été remplacé par Larry Sacharuk, un ancien joueur de NHL devenu sélectionneur national de la Serbie. Le motif invoqué était qu'un Canadien serait mieux à même de diriger une équipe dont les étrangers étaient essentiellement nord-américains. Un espoir vain. L'équipe a même moins bien fonctionné avec Sacharuk.

À sa décharge, la défense n'a cessé de connaître des pépins. Après la mise à l'écart de Mario Larocque, les jokers Martin Stepanek (côte) et Ed Campbell (épaule) se sont blessées dès leur arrivée. Quant à Andreas Lutz, que l'on considérait comme un grand espoir italien, il peine de plus en plus à convaincre sur le plan purement défensif et a été prêté en fin de saison à Cortina, sans y être plus performant. La blessure au genou du gardien Andrea Carpano n'a pas aidé non plus : sa doublure Hannes Hopfgartner (19 ans) était dépassée et le pigiste slovaque Miroslav Bielik n'a pas fait de miracles.

Pontebba aura quand même assuré l'essentiel : le barrage de maintien a été remporté par 3 victoires à 1 contre Fassa, et le sponsor principal, les assurances Generali, continuera à soutenir le club. Les Frioulans seront donc encore là l'an prochain, même si beaucoup s'inquiétaient.

 

Huitième : Fassa. Depuis 24 ans qu'elle est en série A, l'équipe de Canazei n'a sans doute jamais vécu une saison aussi pourrie. La découverte en novembre d'une caméra cachée dans le vestiaire des arbitres (!), un mystère jamais vraiment résolu, aura été la seule anecdote tragi-comique d'un championnat raté.

Fassa avait cru bon d'engager un entraîneur de 40 ans, enthousiaste mais sans références : Stéphane Python, un Suisse qui avait pour CV des postes d'adjoint à Martigny et à Bâle. Malgré sa bonne volonté, le pauvre a fini par se faire virer au Nouvel An alors que le vestiaire était au bord de l'explosion après 13 défaites consécutives. Un triumvirat chapeauté par le manager Sergio Liberatore s'est occupé de la fin de la saison, évitant la dernière place de la saison régulière.

Le problème de Fassa est que les étrangers comme les deux attaquants québécois Francis Caisse et Jean Desrochers ou le défenseur vétéran Jeff Paul n'ont pas du tout eu le rendement attendu. Les seuls renforts satisfaisants ont été James Pemberton et Owen Fussey : le premier s'est blessé et le second est parti auprès de sa femme enceinte...

En barrages, ce sont donc les joueurs italiens qui ont sauvé la peau de Fassa lors de la série de promotion/relégation contre Vipiteno. C'est pourquoi le club a eu quatre sélectionnés en équipe d'Italie : son meilleur marqueur Luca Felicetti, son capitaine Diego Iori, son très prometteur défenseur Stefano Marchetti et son gardien Thomas Tragust. C'est lui qui a fait remonter l'Italie dans l'élite mondiale avec ses trois blanchissages, et qui tentera sa chance l'an prochain en deuxième division allemande à Kaufbeuren.

 

Série A2

 

L'arrivée de l'international Paolo Bustreo a donné du liant entre les marqueurs canadiens et les jeunes joueurs locaux de Vipiteno, devenu pour la seconde fois champion de série A2 après 2005. Avec trois étrangers seulement, il n'y avait cependant pas moyen de battre Fassa pour la montée. La fédération italienne a cependant développé l'idée d'étendre la série A à dix équipes, mais comme il y a quatre ans, le club formateur a refusé toute promotion dans un championnat où les joueurs étrangers sont si nombreux.

Option inverse à Valpellice qui va finalement sauter le pas, et entrer dans une élite qui a bien besoin de cette extension géographique puisqu'elle n'était composée que de clubs du nord-est. Les 2500 supporters méritent bien de découvrir enfin la série A, déjà fréquentée entre 1976 et 1983, même si des dissensions avec la société gestionnaire de la patinoire pourraient contraindre la "Valpe" à s'exiler à Pinerolo. Dans tous les cas, c'est un autre monde qui attend le petit village piémontais de Torre Pellice. Il en a bien conscience et l'entraîneur Massimo Da Rin a été remercié après trois finales perdues consécutivement. C'est Alain Vogin qui aura la charge de conduire l'équipe dans l'élite, sans qu'il soit dépaysé dans cette vallée également francophone.

Vipiteno restera donc en A2 avec ses autres congénères du Haut-Adige : Caldaro, toujours emmené par les frères Chelodi, Gherdëina, qui ne valait que par sa première ligne canadienne qui a écrasé le championnat (Karl Fournier, Dominic Perna et Luciano Lomanno), Egna et Appiano, qui seront rejoints la saison prochaine par Merano, enfin de retour au plus haut niveau.

La série A2 a donc été dominée par six clubs de village, devant les trois équipes de grandes villes, qui luttent avant tout pour leur existence. Milan a survécu au retrait du mécène Alvise di Canossa (qui a quand même aidé le hockey mineur et facilité la transition). Même si les fastes appartiennent au passé, le "Hockey Milano Rossoblu" s'est appuyé pour reconstruire sur les mêmes hommes qui ont conquis cinq titres de champion d'Italie : l'entraîneur Adolf Insam et le manager Ico Migliore. La différence, c'est que la masse salariale de l'effectif est beaucoup, beaucoup moins importante.

Pour le Real Turin, il s'agissait aussi de perpétuer le hockey de haut niveau dans la ville olympique, en remplacement des All-Stars Piémont. Il a eu un mois à peine pour se construire une équipe, encadrée par un jeune capitaine de 21 ans à peine, Manuel Lo Presti, et par deux ex-Dijonnais, l'attaquant Pavol Milec et le défenseur Peter Strapaty qui a vite déçu par sa lenteur de réaction après une bonne première impression.

Enfin, le hockey à Varèse reste très difficile à maintenir. Le financement du club lombard relève toujours de la gageure, ce qui ne permet d'obtenir que de faibles étrangers, parmi lesquels le brièvement Chamoniard Michal Pinc était le moins médiocre.

Marc Branchu

 

 

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