Brest cherche encore à prendre son envol

 

Il n'y a pas si longtemps de ça, disons trois ans, et en grossissant un peu le trait, l'annonce de l'obligation d'avoir dix joueurs formés localement sur une feuille de match aurait provoqué des ulcères à la direction du club breton ! Imaginez donc "Quoi ? Dix Français ? Mais c'est impossible de tous les faire rentrer sur la quatrième ligne !" Heureusement, Brest a senti le vent tourner (en même temps, le vent, à Bellevue, on connaît) et a anticipé le changement de règlement. Ainsi, petit à petit, Brest a troqué son image de "refuges pour mercenaires" pour celle d'une équipe où les Français jouent un rôle majeur. Mieux même, le formation commence à porter ses premiers fruits et pourrait offrir de bonnes opportunités dans un avenir proche.

Et le pire dans tout ça, c'est que contrairement à ce qu'on peut penser, francisation peut encore rimer avec ambition. Alors certes, Brest n'est plus l'ogre tant redouté et que tellement de monde prenait plaisir à voir chuter. Mais l'envie de rejoindre est toujours présente, plus discrète. Plus à n'importe quel prix, plus à n'importe quel moyen, mais les Albatros restent un des leaders naturels de la division.

Pendant longtemps, l'image des Albatros était intimement liée à celle de M. Briec Bounoure, président omniprésent. Adulé par les uns, haïs par les autres, il ne laisse personne indifférent. Ses coups de gueule, ses coups de sang, ses décisions incroyables mais aussi son authentique passion pour ce club auront marqué le hockey hexagonal. Mais depuis quelques temps, Briec Bounoure a pris du recul vis-à-vis de son club. Les mythes se mêlant aux ragots, on ne savait plus s'il était toujours impliqué dans le club et si c'était son argent personnel ou celui du Groupe Doux qui finançait les Albatros... Depuis le printemps dernier, Bounoure s'est retrouvé au chevet de son entreprise, bien mal en point, reléguant son amour du hockey à l'arrière-plan. Fin des fantasmes délirants de certains.

Au fur et à mesure que Briec Bounoure se fondait dans l'arrière-plan du hockey breton, un autre homme prenait les devants. Un homme plus calme, plus posé, plus policé - même s'il reste capable de balancer une petite phrase qui pique bien derrière la nuque - et qui a pris de plus en plus de responsabilités au sein du club. Cet homme, c'est Sébastien Oprandi, ancien joueur et capitaine des Albatros, devenu manager général avec l'ambition de rendre le club moins dépendant de la fortune de son célèbre mécène. Et puis, lorsqu'il s'est agi de remplacer André Peloffy partant, il a pris les choses en mains et s'est installé en plus sur le banc de Brest. Dire de lui qu'il est le nouveau Bounoure est une erreur en de nombreux points, reste qu'il devient de plus en plus l'homme fort - même s'il n'est pas seul - du hockey brestois. Une sorte de figure de proue d'un navire cherchant à quitter la rade.

Le meilleur duo de gardiens de D1 ?

Un gardien fait 80% du résultat d'un match, dit-on souvent. À Brest, ces 80% appartiennent pour la troisième saison consécutive à un homme controversé qui a désormais les moyens de faire taire tous ses détracteurs. Landry Macrez est passé du statut gardien décrié, à qui on reprochait (notamment) de laisser d'innombrables rebonds, à celui de gardien reconnu, puisqu'il a été la saison passée élu meilleur gardien de la division. Après avoir manqué sa carrière en Magnus puis erré dans plusieurs clubs (Lyon, Amnéville) à la recherche d'une stabilité quelque peu envolée, voilà que Macrez a trouvé ce qui lui manquait. En Bretagne, il a la confiance de son coach et de ses coéquipiers, lui permettant ainsi de retrouver de son lustre passé. À maintenant 30 ans, il devrait donner son meilleur pour accrocher un billet pour revenir en Magnus.

Pour le seconder, y a-t-il meilleure solution qu'Arnaud Goetz ? Après avoir longtemps participé aux différents championnats avec des équipes surarmées au niveau défensif (Grenoble, Mont-Blanc, Tours, Caen...), c'est finalement en endossant le costume de "numéro deux" qu'il s'est affirmé. Fini le statut de premier dans un concours de circonstance, le voilà désormais solidement établi comme étant le backup idéal : joueur d'équipe, présent dans le vestiaire et capable de prendre en charge un match quel que soit le moment où il rentre, Goetz est devenu le gardien à avoir dans son effectif.

Une défense solide, tonnerre de Brest !

Signe des temps modernes, voilà que cinq internationaux (présents ou passés) formeront l'ossature de la défensive brestoise. Le premier à citer est Gaëtan Cannizzo ! Ce pur breton est en effet le premier joueur formé au club à être sélectionné en équipe de France (celle des U18 en l'occurrence) alors qu'il porte le maillot des Albatros. Pourtant, qu'il est difficile de se faire une place dans ces équipes-là quand on ne fait partie des sacro-saints clubs "formateurs-pilleurs". Mais la nomination de Cannizzo est logique : solide, technique, il a en plus pour lui le calme et la tête froide qui sied si bien à un défenseur de qualité. Néanmoins, le joueur est jeune (tout juste 18 ans) et s'il commence à se faire une place sur l'un des trois premiers trios, il lui faut un défenseur d'expérience à ses côtés.

Et pour jouer ce rôle, Oprandi n'a pas lésiné sur les moyens en embauchant l'immense Daniel Carlsson. Oh, immense, pas forcément par la taille - il ne fait qu'un centimètre de plus que Cannizzo - mais plutôt par le CV : ancien international U20 en Suède, plus de 150 matchs en Elitserien et plus de 400 matchs en Ligue Magnus. Défenseur complet, il dispose d'un puissant slap et peut venir en soutien de ses attaquants, mais il excelle également dans la zone défensive : difficile à passer en un-contre-un, il n'hésite pas non plus à faire parler son physique pour aller gratter des palets dans les coins. Avec un tel point d'ancrage, les Albatros disposent non seulement d'un leader mais aussi d'un excellent professeur.

Autre ancien international junior (chez les U20), David Hennebert rempile pour une troisième saison chez les Albatros. Devenu un des visages les plus familiers de la division - il fait partie du top 10 du plus grand nombre de matchs joués parmi les joueurs en activité - il continuera à appliquer un jeu sobre et efficace en défensive. Il n'est pas celui qu'on remarque le plus car il reste un défenseur peu pénalisé et qui marque peu également. Autant dire qu'il n'apparaît pas très souvent sur la feuille de match, mais sa constance et sa régularité en font un joueur efficace dans son rôle. Ca n'est pas parce que Brest a recruté français ces dernières saisons que tous les étrangers ont disparu. La preuve, Vladimir Holik est toujours là, pour la quatrième saison. Pour son entraîneur, il est sans doute le joueur le plus sous-estimé de la division mais fait partie des meilleurs éléments du championnat, malgré ses 34 ans. Avec ses 150 matchs en Extraliga tchèque et sa (petite) expérience internationale, il continuera à faire parler son physique et à distiller de bonnes passes, notamment en supériorité numérique.

Dernier international, le point culminant de la défense brestoise : Aurélien Gréverend. Né et formé à Rouen, il a gravi tous les échelons chez le puissant Dragon, accumulant les regroupements avec les équipes de France U18 puis U20, avant de se retrouver barré par la concurrence au moment de franchir la dernière marche, la plus compliquée, celle qui amène à la Magnus. Redescendu d'une division, Gréverend s'est vite adapté à sa nouvelle équipe et a été une des bonnes révélations de la saison écoulée. Finalement, le seul non-international des trois premiers trios n'en est pas le moins doué. Mais bien sûr, il est "un tout petit peu" plus difficile d'être international quand on est canadien. David Poulin, issu de la traditionnelle filière du Junior AAA où il était assistant-capitaine à Joliette, a su se montrer décisif dès sa première saison en France. Avec huit rondelles envoyées au fond des filets, il finit quatrième buteur parmi les défenseurs, derrière trois de ses compatriotes (Paquin, Roch et Cosgrove). Doté d'un bon physique, il semble être le complément offensif le plus apte à délivrer des passes à ses attaquants.

Enfin, Brest pourra compter sur Clément Gonzales pour jouer une nouvelle fois les jokers de luxe alors que Sacha Grimshaw doublonnera avec la réserve en D3 pour avoir du temps de jeu.

À Caen la montée ?

Lorsqu'il avait fait par de son envie de venir jouer en France, Nicholas Pard avait suscité les envies de nombreux clubs. Mais en une journée, les Albatros sont venus couper l'herbe sous le pied de ses concurrents, en mettant sur la table, notamment, un contrat de deux ans. Restait à voir si cet ancien joueur important du Junior Majeur Québécois saurait se canaliser - à cause d'un incident lors d'un concert, il avait été écarté de son équipe de Saint-Jean - et s'adapter au jeu français. Mais quand on a son talent, avec un lancer puissant et qu'il peut déclencher très rapidement, il ne faisait pas de doutes qu'il deviendrait un joueur majeur du championnat. Vingt-six matches plus tard, Pard termine meilleur pointeur de son équipe, co-meilleur buteur de D1 et est élu dans l'équipe-type de la division par les entraîneurs. Il n'y avait donc aucune raison qu'il ne soit pas reconduit.

Pour faire équipe avec lui, David Croteau est lui aussi resté en Bretagne. Surestimé puis sous-estimé, Croteau aura eu toutes les étiquettes possibles collées sur le dos. Mais son jeu rapide et sa propension à faire les bons choix ont fait taire tous ses détracteurs, et le voilà installé parmi les hommes qui comptent en D1. Bien installé au centre, il restait désormais à trouver l'ailier capable de compléter la paire canadienne. Toujours dans un souci de francisation, Oprandi est allé chercher un joueur à l'étage supérieur, et tant qu'à faire, pas le pire. Erwan Pain, plus de 150 matchs de Magnus et un championnat du monde en Allemagne, présente un CV intéressant pour la D1, même si son image s'est quelque peu ternie l'an passé à Dijon. De retour chez les Ducs après une année à Caen, il avait débuté la saison sur le premier bloc avant d'être progressivement mis en retrait avec l'explosion du trio Gascon, Riendeau et Guttig et la bonne performance des autres Dijonnais.

Si Pain est passé par Caen, il est donc loin d'être un cas isolé dans l'équipe brestoise. Visiblement, le port de l'hermine sied bien aux anciens Drakkars. Ainsi, Graham Avenel est venu rejoindre son frère Jonathan après deux saisons en demi-teinte à Grenoble mais avec quand même une Coupe de la Ligue gagnée. De même, le vétéran slovaque Jaroslav Prosvic s'est engagé pour une quatrième saison où il continuera à évoluer au centre du second trio.

Autre "clan" à se réunir à Brest, celui des ex-Dragons. Le capitaine Alexandre Lefebvre et le travailleur Tristan Lemoine continueront ainsi de déjouer les défenses adverses même s'ils n'évolueront plus forcément sur le même bloc. Symboles de la méthode Oprandi, les deux anciens pensionnaires de Magnus seront rejoints par un autre ancien joueur de Rouen, plus jeune, et en provenance directe du voisin normand. Quentin Berthon quitte donc le banc encombré de Rouen pour trouver un temps de jeu plus conséquent avec les Albatros. En évidence lors des matchs de pré-saison, celui qui avait marqué son premier but en Magnus la saison passée entend imposer sa technique dans un championnat qui devrait lui convenir.

Au cas où ils voudraient développer une quatrième ligne, les Brestois pourront toujours s'appuyer sur les joueurs formés en Bretagne que sont Jérémy Cormier et William L'Arvor. Enfin, Marlo Chapron a été intégré dans l'effectif dans le but de se développer. Encore cadet, il dispose d'une marge de progression importante et pourrait devenir rapidement le pendant offensif de Gaëtan Cannizzo.

Alex Mondin

 

 

Effectif :

Gardiens

N° NOM Prénom           Naissance    cm  kg  Club formateur     Club & Ch 2011/12   MJ   Min  Moy.  Pén
30 GOETZ Arnaud         05/01/1980  178  73  Grenoble           Brest       FRA-2    9   508  3,19   4'
35 MACREZ Landry        30/04/1982  176  72  Amiens             Brest       FRA-2   23  1340  2,73  10'

Défenseurs

N° NOM Prénom           Naissance    cm  kg  Club formateur     Club & Ch 2011/12   MJ   B   A Pts   Pén
 2 GRÉVEREND Aurélien   09/11/1989  189  86  Rouen              Brest       FRA-2   28   1   2   3   51'
 4 HOLIK Vladimir       27/02/1978  184  89          (Tchèque)  Brest       FRA-2   30   4   3   7   26'
 7 CARLSSON Daniel      24/02/1977  187  87          (Suédois)  Angers      FRA-1   45   0   6   6   44'
17 GONZALES Clément     25/06/1986  186  66  Brest              Brest       FRA-2   26   0   0   0    0'
20 CANNIZZO Gaëtan      31/03/1994  186  86  Brest              Brest       FRA-2   12   0   0   0    0'
23 POULIN David         15/08/1990  183  95         (Canadien)  Brest       FRA-2   30   8  12  20   24'
37 HENNEBERT David      18/02/1984  175  78  Amiens             Brest       FRA-2   25   0   6   6   18'
81 GRIMSHAW Sacha       05/11/1988  170  75  Brest              Brest II    FRA-4   13   4   3   7   10'

Attaquants

N° NOM Prénom           Naissance    cm  kg  Club formateur     Club & Ch 2011/12   MJ   B   A Pts   Pén
 6 LEFEBVRE Alexandre   23/09/1985  180  78  Rouen              Brest       FRA-2   27  10  14  24   81'
11 LEMOINE Tristan      18/01/1985  180  82  Rouen              Brest       FRA-2   30   8  14  22   79'
14 PARD Nicholas        13/05/1990  181  79         (Canadien)  Brest       FRA-2   29  31  24  55   90'
22 BERTHON Quentin      25/01/1990  175  75  Rouen              Rouen       FRA-1   35   1   2   3    6'
39 AVENEL Jonathan      04/06/1987  185  77  Caen               Brest       FRA-2   28  15  13  28   22'
44 CROTEAU David        15/07/1983  182  82         (Canadien)  Brest       FRA-2   29  18  31  49   54'
58 L'ARVOR William      16/05/1990  176  78  Brest              Brest       FRA-2    6   0   1   1    2'
63 CORMIER Jérémy       30/12/1984  175  72  Quimper            Brest       FRA-2    1   0   0   0    0'
74 AVENEL Graham        26/06/1989  184  81  Caen               Grenoble    FRA-1   52   7  13  20   24'
80 PROSVIC Jaroslav     23/02/1982  186  91         (Slovaque)  Brest       FRA-2   30  17  34  51   50'
81 PAIN Erwan           14/02/1986  178  91  Grenoble           Dijon       FRA-1   33   7  11  18   44'
 - CHAPRON Marlo        02/09/1995  177  64  Brest              Brest U18   FRAcd3

Entraîneur : Sébastien Oprandi (FRA, 36 ans).

Partis : Francis Ballet (D, 4+19, Mulhouse, FRA-1), Nicolas Motreff (D/A, 2+9, Nice), Mans Papaux (A, 7+26, Anglet), Benjamin Rubin (A, 9+16, Courbevoie), Hugo Scarfiglieri (A, 0+0, Valenciennes, FRA-4), Serge Toukmatchev (A, 2+0).

 

 

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