Interview de Vyacheslav Bykov

 

Vyacheslav Bykov est l'entraîneur du CSKA Moscou et de l'équipe nationale de Russie.

- Ces dernières années, on a vu en Russie le retour d'un championnat professionnel très structuré, très puissant avec une concurrence avec la NHL. Comment expliquer ce retour ?

C'est vrai, le hockey sur glace a toujours été très populaire. C'était à l'époque le sport n°1, et il redevient à nouveau très important. Pour le comparer à une structure du niveau de la NHL, c'est encore trop tôt. Même s'il y a des joueurs qui reviennent, ce ne sont pas encore des joueurs de tout premier rang et de toute leur qualité. Mais on est content qu'ils reviennent pour populariser le hockey sur glace. Les spectateurs reviennent, et ce qui est important, c'est qu'il y a de très grosses sources financières qui supportent le sport en général et le hockey en particulier. Il y a des sociétés qui sponsorisent le hockey et ce financement permet de donner plus de qualité au niveau du coaching, des entraînements et du professionnalisme en général.

Maintenant, je pense que le hockey sur glace prend de plus en plus d'ampleur dans la vie quotidienne des gens. C'est ce qu'on attend. On a toujours la concurrence avec le football, et c'est clair qu'il touche plus de population et est le sport n°1 mondial. Malgré tout, le hockey sur glace a eu des bons résultats à l'époque. On revient gentiment au niveau international. La qualité de jeu s'améliore, et on essaie de suivre les tendances de développement du hockey mondial.

- Pensez-vous que vous allez régler les problèmes des joueurs russes avec la NHL, pour qu'ils ne partent pas forcément très tôt et que les clubs russes aient des compensations financières ?

Jusqu'à présent, nous n'avons pas d'accord avec la NHL et cela permet à n'importe quel joueur de partir à tout moment rejoindre la NHL. C'est une question politique que la fédération russe essaie d'arranger avec l'IIHF et la NHL. Ce n'est pas évident, c'est politique. Les gens ont leurs opinions sur les relations entre les trois parties, et nous, on subit juste les conséquences, si vous voulez. Malgré tout, nous entraîneurs essayons de donner le meilleur de nous-mêmes pour qu'un joueur développe le meilleur hockey possible et devienne très fort. Même s'il part en NHL, on va les supporter et les suivre, puisqu'il faut dire la vérité : la NHL actuellement est la meilleure ligue au monde, et c'est normal que chaque jeune qui met des patins de hockey sur glace rêve de jouer dans un stade de NHL.

- Est-ce que l'équipe nationale de Russie a digéré la déception du championnat du monde ? On a vu en France avec la coupe du monde de rugby combien c'était difficile.

C'est vrai, n'importe quel échec sportif laisse des traces. L'objectif à Moscou était d'aller le plus haut possible et de gagner le trophée de champion du monde. Malheureusement, on a essayé mais on n'a pas pu. Malgré tout, la troisième place représente un travail, une contribution. L'important, même si on n'a pas pu aller en finale, c'est que l'on a gagné le cœur de la population, l'amour et l'espoir des gens. Toute la population s'est rassemblée autour de nous, et cela a permis de partager cette défaite, cette tragédie si vous voulez, entre nous tous. On a réussi à créer une équipe qui voulait se battre pour tout le monde et pour garder notre façon de vivre et de voir le jeu. Il y a plus de choses positives qui vont reste que de choses négatives, et avec cette base-là on va regarder en avant.

J'ai regardé aussi la coupe du monde de rugby, c'était très émouvant. C'est la première année en Russie où on nous a montré tous les matches de la coupe du monde, et on a découvert un sport très passionnant et très intéressant. C'est la meilleure propagande pour que la Russie développe encore une discipline sportive.

- Pour les équipes moyennes comme la France, le Danemark, l'Autriche, l'Italie, la Slovénie, il est toujours difficile de se maintenir en Groupe A mondial parce qu'il manque des matches de haut niveau. Le hockey sur glace n'a pas de véritable Coupe d'Europe qui se joue toute l'année, parce que les grands championnats (suédois, russe) ont beaucoup de matches. Est-ce qu'il ne serait pas possible pour l'intérêt du hockey que les grandes ligues réduisent leur nombre de matches pour permettre des rencontres ?

C'est difficile à dire. Déjà maintenant, il y a quatre nations qui se séparent des autres, avec l'Euro Hockey Tour entre Russes, Tchèques, Suédois et Finlandais. Il y a la Suisse, l'Allemagne, la Slovaquie. C'est difficile de trouver des fenêtres pour des tournois car les calendriers sont très chargés dans tous les pays. De plus en plus, le hockey sur glace y prend de l'ampleur et de l'intérêt avec plus de matches. Ce n'est pas évident.

Mais à mon avis, ce n'est pas la question, ces matches internationaux. Ce qui manque à ces pays, c'est le développement en général du hockey sur glace, en commençant par la jeunesse pour que le spectre des joueurs s'élargissent. Avec ça, il y aura plus de choix et plus de qualité. Il faut amener un autre avis, par exemple prendre des entraîneurs d'autres pays, des gens qui peuvent échanger des idées. Avec cela, il y a plus de chance d'obtenir la place sous le soleil.

Je pense que tous ces pays qui restent en haut du classement sont très sensibles à observer si tout d'un coup un pays ou un autre revient sur la scène. Tout de suite, on trouvera les matches amicaux. C'est mon opinion : c'est une question sociale que l'on fait, on touche plus de gens.

Propos recueillis le 27 novembre 2007 par Bruno Cadène, correspondant de Radio France à Moscou

 

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