Russie - Finlande (26 février 1994)

 

Match pour la troisième place des Jeux olympiques 1994.

Si la Finlande avait peut-être été trop confiante dans le choix de son gardien en demi-finale, c'est cette fois la Russie qui surprend par sa rotation : Valeri Ivannikov est envoyé dans les cages alors qu'il n'a pas du tout joué de la quinzaine. Zuev avait certes pris cinq buts en poule contre cet adversaire, mais Abramov, qui l'avait remplacé, est pourtant le gardien qui inspire le plus confiance à ses coéquipiers.

Sachant qu'elle ne part plus du tout favorite, la Russie s'en remet à un certain esprit de sacrifice : Sergei Shendelev se couche ainsi devant un lancer alors que les Finlandais essaient de mitrailler de toutes parts pour tester Ivannikov sur leur première supériorité numérique. Quand les bleus sont eux-mêmes réduits à quatre, ils ne se laissent en revanche pas dominer et harcèlent leurs adversaires pour maîtriser et éloigner le palet, à l'instar de Jere Lehtinen. La Russie est dominée dans tous les secteurs (vitesse, puissance...), mais elle arrive encore à surnager par moments par son talent individuel en un contre un : Valeri Karpov dribble Marko Kiprusoff dans le cercle gauche et sert en retrait Andrei Nikolishin, dont le tir à bout portabnt est bloqué par le lancer de bottes de Jarmo Myllys.

Le score reste vierge jusqu'au moment décisif à deux minutes et demie de la pause. Sous la pression de Marko Palo, Pavel Torgaev prolonge mollement un palet en sortie de zone, le rendant ainsi aux Finlandais. La transition est immédiate : Mika Strömberg sert Mika Nieminen à la ligne bleue qui déborde sur la droite puis sert en retrait Marko Palo dans l'enclave pour un tir bien placé, à mi-hauteur côté plaque. À moins de cinquante secondes de la pause, Mika Strömberg envoie au fond à pleine puissance depuis la zone neutre : le palet rebondit dans la balustrade et fait des ricochets sur le chemin inverse. Le titulaire-surprise Ivannikov baisse sa mitaine mais rate cette rondelle sautillante, et Mika Alatalo se jette dessus pour l'envoyer dans la cage ouverte.

Ces deux buts rapprochés laissent bien peu d'espoir à la Russie de revenir. Elle n'aide pas sa cause en deuxième période avec deux pénalités (retenir) contre Shendelev puis contre Tarasov, qui se saisit clairement de la crosse de l'homme placé dans l'enclave (Mäkelä) dix secondes avant le retour prévu de son coéquipier sur la glace. Cette séquence de près de quatre minutes en infériorité numérique asphyxie les Russes. Inéluctablement, dans les dernières secondes, le patient Ville Peltonen conserve longtemps le palet jusqu'à ajuster Ivannikov à mi-hauteur côté mitaine. Le gardien russe Ivannikov, toujours pas rassurant, évite un but-gag par un réflexe du gant, en récupérant dans son dos juste avant la ligne un palet envoyé en angle par Laukkanen qui avait ricoché entre ses jambes... Mais il encaisse - une fois de plus - un but à la dernière minute avant le retour aux vestiaires : sa mitaine échoue à capter un slap du cercle droit de Mika Strömberg.

En troisième période, Strömberg fait trébucher Vinogradov - qui en rajoute - sur une mise au jeu, et Myllys sort un bel arrêt pendant l'infériorité numérique face à Sergei Berezin. Mais à aucun moment l'impression favorable aux Finlandais n'est démentie. Cette équipe en pleine bourre, qui contraste singulièrement avec une Russie à la recherche de son hockey, n'aura raté qu'un seul match - sa demi-finale contre le Canada - pour réussir un tournoi parfait.

Étoiles du match Hockey Archives : *** Mika Strömberg , ** Jarmo Myllys , * Marko Palo .

Souvenirs du match et du tournoi (dans Sport Express)

Andrei Nikolishin (attaquant de la Russie) : "Avec les Suédois et les Slovaques, nous jouions plus ou moins normalement. Avec les Finlandais, nous ne pouvions pas du tout montrer notre hockey. Où que nous y allions, ils y étaient. Il n'y avait aucun moyen de briser leur défense. Au premier match face à eux, on avait pu croire par moments que je jeu était équilibré. Mais on avait des occasions bon marché, nos adversaires avaient un système. Il n'y avait pas de leader dans l'équipe. Pourquoi avions-nous attendu Bykov et Khomutov jusqu'au bout ? Parce que personne n'avait de vraie expérience internationale. Smirnov était le plus ancien, mais c'est un ailier. Il y avait beaucoup de joueurs des clubs de province qui venaient aux Jeux olympiques avec une attitude complètement différente. À ces JO, j'ai compris pourquoi Tikhonov et Yurzinov prenaient rarement les joueurs de province à l'époque olympique. Dans les équipes des petites villes, ils ont l'habitude de se partager les matches, nous gagnons aujourd'hui et on vous rend la pareille demain. À Moscou, on a été élevé dans un esprit maximaliste. Ce n'est pas de la faute des gars. C'est la conséquence de l'écroulement de notre hockey, de la fin de l'hégémonie des clubs moscovites. Des équipes se sont montées avec des fonds, mais sans tradition de la victoire. Les hockeyeurs reçoivent des salaires et des bonus, ils n'avaient besoin de rien d'autre. J'étais marié mais ma jeune famille n'avait rien à manger. Il n'y a qu'en équipe nationale qu'on recevait un peu d'argent. Et le Dynamo nous donne 1000 dollars à chacun quand un joueur est vendu en NHL. À Togliatti et Magnitogorsk, les gars ont des Jeep Cherokee, impensable à cette époque. Je ne veux pas offenser les gars, c'était des hockeyeurs normaux, mais ils sont passés de la boue pour devenir princes. Occuper une niche d'élite, ce n'est pas juste foncer sur la glace avec une crosse. Il faut correspondre à son statut, savoir communiquer avec la presse, savoir se tenir. Surtout en équipe nationale où le monde entier vous regarde. C'était des gars simples de l'arrière-pays, et c'était difficile pour eux. Pas parce qu'ils ne le voulaient pas, mais simplement parce que c'était leur première fois dans un tel tournoi."

 

Russie - Finlande 0-4 (0-2, 0-2, 0-0)
Samedi 26 février 1994 à 21h00 au Håkons Hall de Lillehammer. 9215 spectateurs.
Arbitrage de Börje Johansson (SUE) assisté de Wilhelm Schimm (ALL) et Stephan Eriksson (SUE).
Penalités : Russie 8' (4', 4', 0'), Finlande 8' (4', 2', 2').
Tirs cadrés : Russie 21 (9, 7, 5), Finlande 31 (11, 12, 8).
Tirs totaux : Russie 44 (13, 15, 16), Finlande 56 (24, 20, 12).
Engagements : Russie 32 (12, 14, 6), Finlande 34 (16, 9, 9).

Évolution du score :
0-1 à 17'32" : Palo assisté de Nieminen
0-2 à 19'16" : Alatalo assisté de Strömberg
0-3 à 30'30" : Peltonen assisté de Koivu (sup. num.)
0-4 à 39'24" : Strömberg assisté de Nieminen
 

Russie

Attaquants :
12 Sergei Berezin - 9 Aleksei Kudashov (A) - 29 Ravil Gusmanov
23 Pavel Torgaev (-2, 2') - 11 Georgi Evtyukhin (-2) - 28 Andrei Tarasenko (-2)
16 Igor Varitsky (-1) - 25 Vyacheslav Bezukladnikov - 14 Valeri Karpov
21 Dmitri Denisov (-1) - 24 Andrei Nikolishin (-1, 2') - 19 Aleksandr Vinogradov (-1)

Défenseurs :
5 Aleksandr Smirnov (C) - 4 Sergei Sorokin (+1)
22 Sergei Shendelev (-2, 2') - 10 Igor Ivanov (-2)
26 Oleg Shargorodsky - 3 Sergei Tertyshny (A)
6 Vladimir Tarasov (-1, 2') - 2 Oleg Davydov (-1)

Gardien :
20 Valeri Ivannikov

Remplaçant : 1 Andrei Zuev (G). En réserve : 30 Sergei Abramov (G).

Finlande

Attaquants :
24 Sami Kapanen - 14 Raimo Helminen - 42 Mikko Mäkelä
40 Mika Nieminen (+2) - 9 Esa Keskinen (+2) - 13 Marko Palo (+2)
16 Ville Peltonen (A) - 11 Saku Koivu - 20 Jere Lehtinen
28 Petri Varis (+1) - 8 Janne Ojanen (+1, 2') - 15 Mika Alatalo (+1)

Défenseurs :
2 Marko Kiprusoff (+1) - 23 Hannu Virta
4 Vesa Erik Hämäläinen (+2) - 26 Mika Strömberg (+3, 4')
12 Janne Laukkanen (A) - 5 Timo Jutila (C)
6 Pasi Sormunen (2')

Gardien :
35 Jarmo Myllys

Remplaçants : 30 Jukka Tammi (G), 27 Tero Lehterä. En réserve : Pasi Kuivalainen (G)

 

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