Suisse - Suède (12 mai 1998)

 

Demi-finale des Championnats du monde 1998, premier match.

Peter Forsberg ne se souvient pas de la Suisse mais la Suisse se souviendra de Peter Forsberg

Une demi-finale à domicile a de quoi faire monter la pression autour de la Nati. C'est peut-être pour cela que Ralph Krueger essaie de la réduire autour de ce premier match. Il déclare que son équipe peut se permettre de perdre avec la formule en deux manches, et fait même une comparaisson avec le "warm-up" pour un pilote de Formule 1. Comme solution de rechange pour ses jeunes joueurs fatigués, il a profité de la réouverture des effectifs pour les phases finales pour introduire deux jokers, Olivier Keller (dans l'équipe depuis le début) mais aussi Michel Riesen (rappelé alors qu'il avait repris l'entraînement avec Davos pour la saison suivante).

Les journalistes suisses, quant à eux, ont été éberlués en interviewant Peter Forsberg, absent lors du match de poule entre les deux adversaires du jour. Poli mais plus franc que diplomate, le célèbre numéro 21 dit "respecter l'équipe de Suisse sans vraiment la craindre" et déclare ne l'avoir vue qu'un tiers-temps à la télévision. Pire encore pour les oreilles helvétiques, il a dit ne pas souvenir du résultat contre la Suisse il y a cinq ans à Munich : la Suède y avait perdu 6-4 dans la seule confrontation où il était présent ! Un match historique pour la Nati, mais oublié par "Foppa". Est-ce le signe d'une extrême confiance, après le 7-1 de la Tre Kronor contre le Canada, ou le symptôme d'une arrogance mal placée ?

La Suisse, bien organisée, gêne la construction suédoise au point de se procurer la première occasion à la cinquième minute. Après une mauvaise relance de Kim Johnsson, Gian-Marco Crameri décale idéalement Marcel Jenni qui écrase trop son tir. Nichlas Falk essaie aussitôt de partir en contre-attaque... et se fait accrocher par Misko Antisin. La Suède joue donc en supériorité numérique et Mikael Renberg est menaçant dans l'enclave, mais Mark Streit finit par le châtier à temps. Après onze minutes de possession suédoise sans position de tir ouverte, Peter Forsberg catapulte le palet dans un angle impossible et surprend David Aebischer (0-1). Jusqu'ici, le jeune gardien suisse avait couvert sa cage avec beaucoup d'assurance. Antisin retourne en prison pour avoir accroché Forsberg dans le coin et Renberg frappe encore à la porte à 5 contre 4, en tour de cage.

Bergqvist ayant fait trébucher Zeiter juste avant la pause, la Suisse revient sur la glace en powerplay, mais Öhlund pose sa crosse sur la glace pour contrer Steinegger sur la seule situation dangereuse. Peter Forsberg mène toujours l'offensive suédoise et élimine Dino Kessler en un contre un pour un dangereux tir du revers. Mathias Seger est ensuite décisif pour intercepter une redoutable passe de derrière la cage d'Ulf Dahlén qui était destinée à Huusko. La Tre Kronor attaque toujours, mais Peter Nordström se fait prendre le palet par Von Arx et commet une obstruction pour empêcher la contre-attaque. Le public zurichois siffle une faute non sifflée de Forsberg, qui accroche le bras de Streit en entrée de zone. Cela aurait pu permettre de jouer à 5 contre 3, mais on joue au contraire à 4 contre 4 quand Forsberg provoque un accrochage de Zeiter.

Entre deux équipes tactiquement en place, on commence à entrevoir des espaces. Un dégagement de Bergqvist envoie en échappée Nordström, que Keller revient accrocher devant le but. En infériorité numérique, David Aebischer doit encore subir tout le poids de Mikael Renberg sur lui, au sens propre de l'expression quand Martin Rauch le pousse. Le gardien suisse souffle de soulagement à 5 contre 5 quant ce même Renberg envoie un slap croisé qui heurte le coin du poteau. Deux minutes avant la pause, pendant un changement de ligne scandinave, Martin Rauch fait une belle passe qui isole Peter Jaks à la ligne bleue offensive : seul face à Tommy Salo, l'attaquant d'Ambrì-Piotta voit son tir échouer d'un rien en touchant le haut de la botte gauche. De nouveau, la Suède rentre aux vestiaires avec une pénalité, pour un coup de coude inutile de Huusko au forechecking.

Cette faute bête vaut cher. Au retour sur la glace, Peter Jaks envoie un slap puissant pendant que Salo a la vue bouchée par Martin Plüss qui a emmené le défenseur Johnsson avec lui (1-1). Explosion de joie rouge et blanche en tribunes. Kent Forsberg réagit en réunissant ses deux stars, à savoir son fils et Mats Sundin. L'effet est presque magique. Première présence, première protection de palet remarquable de Peter Forsberg pour un tir de peu à côté. Deuxième présence, et voilà que "Foppa" se présente en un contre un face à Kessler et masque le départ d'un tir croisé parfait, à mi-hauteur côté mitaine (1-2).

Revenue aux commandes, la Tre Kronor est attentive à rester en position et à ne plus commettre d'erreur. Zeiter oblige tout de même Salo à repousser un bon tir du cercle droit. Il se chamaille alors avec Jönsson et on joue à 4 contre 4. Même dans cette configuraion, les gros gabarits de la défense suédoise font la différence dans les duels. Mats Sundin fait le reste : après un contre favorable devant la cage, il exécute une feinte magistrale pour se mettre sur son revers et marquer en angle (1-3). Marcel Jenni évacue sa frustration en balançant la cage et prend une méconduite. La partie s'achève par de longues séquences de possession suédoise, à l'instar des 30 secondes de pénalité différée quand Plüss retient la crosse de Renberg. Le puck quitte rarement les palettes nordiques. David Aebischer réussit deux arrêts miraculeux de suite face à un Renberg décidément peu en réussite. Bergqvist rate la cage vide, mais Kjellberg visera mieux (1-4). La première manche est pour la Suède.

Étoiles du match Hockey Archives : *** Peter Forsberg / ** Mattias Öhlund et David Aebischer / * Mats Sundin

Marc Branchu

Commentaires d'après-match

Kent Forsberg (entraîneur de la Suède) : "Nous n'avions qu'un objectif : gagner. Je suis donc satisfait. De plus, nous avons contrôlé les débats et dominé pendant cinquante minutes. Nos joueurs d'exception ont fait le reste. Mais je dois souligner le très bon match défensif de la Suisse. Elle possède dans ses rangs un très bon gardien."

Ralph Krueger (entraîneur de la Suisse, photo) : "Je tiens à féliciter mes joueurs. Ils sont restés 44 minutes en position de battre la Suède. La différence est venue de Forsberg et Sundin qui ont livré un match de classe mondiale. De notre côté, nous avons bien tenu autour d'un David Aebischer remarquable. Notre match était bien meilleur que celui du tour préliminaire. La formule en deux matches nous permet d'espérer nous qualifier. Seul Baldi aurait pu faire un marquage individuel sur Forsberg ou Sundin. Il est irremplaçable à ce niveau, nous devrons donc nous contenter d'un marquage de zone en restant très vigilants."

Misko Antisin (attaquant de la Suisse) : "Nous devrons travailler plus défensivement sur les deux joueurs qui nous ont battus dans le premier match : Peter Forsberg et Mats Sundin. Ces gars sont vraiment très rapides, un coup ils sont derrière toi et, le temps de se retourner, ils sont déjà ailleurs. Impressionnant !"

Olivier Keller (défenseur de la Suisse) : "Lorsque Ralph Krueger m'a dit après l'entraînement que je jouerais, j'ai senti le feu monter dans mon ventre. J'avais la rage, mais la rage positive. Quand on ne me fait pas jouer, je ne me dis pas qu'on ne m'aime pas, mais que j'ai encore du travail à accomplir. Je n'en voulais pas à l'entraîneur, d'autant qu'il est parvenu à créer une ambiance que j'ai rarement rencontrée en équipe de Suisse. Même si j'ai eu un peu peur de manquer de rythme par rapport à mes camarades qui avaient disputé des matches très engagés, je n'étais pas trop tendu. Se mettre la pression ne sert à rien. D'autant que jouer contre la Suède en demi-finale de championnats du monde, c'était un peu un rêve."

 

Suisse - Suède 1-4 (0-1, 0-0, 1-3)
Mardi 12 mai 1998 à 16h00 au Hallenstadion de Zurich. 8 200 spectateurs.
Arbitres : Vladimír Mihálik assisté de Pavel Halas et Milan Mášik
Pénalités : Suisse 22' (4', 4', 4'+10') ; Suède 8' (2', 4', 2').
Tirs cadrés : Suisse 22 (3, 10, 9) ; Suède 44 (17, 16, 11).

Évolution du score :
0-1 à 11'48" : Forsberg assisté de Johansson
1-1 à 40'17" : Jaks assisté de Jenni (sup. num.)
1-2 à 43'47" : Forsberg assisté de Sundin
1-3 à 47'18" : Sundin assisté de Jonsson et Forsberg et Hävelid
1-4 à 59'55" : Kjellberg assisté de Johansson (cage vide)
en noir, la feuille de match officielle ; en rouge, les corrections de Hockey Archives
 

Suisse

Attaquants :
35 Sandy Jeannin - 18 Martin Plüss (2') - 19 Peter Jaks (A)
8 Claudio Micheli (-1) - 24 Michel Zeiter (-1, 4') - 21 Patrick Fischer
30 Marcel Jenni (-2, 10') - 17 Gian-Marco Crameri (-2) - 13 Misko Antisin (-2, 4')
11 Ivo Rüthemann (-1) - 15 Reto von Arx (-1) - 29 Michel Riesen (-2)

Défenseurs :
34 Martin Rauch (C, -1) - 5 Patrik Sutter (-1, 2')
2 Martin Steinegger - 31 Mathias Seger (-1, 2')
7 Dino Kessler (A, -2) - 27 Edgar Salis (-1)
26 Olivier Keller (2') - 16 Mark Streit (-1)

Gardien :
40 David Aebischer [sorti de 58'40" à 59'35" et de 59'47" à 59'55"]

Remplaçant : 20 Reto Pavoni (G). Absents : 9 Mattia Baldi (cheville cassée), 32 Franz Steffen (surnuméraire).

Suède

Attaquants :
19 Mikael Renberg (+1) - 13 Mats Sundin (C, +2) - 37 Niklas Sundström (+1) [puis Forsberg à 40'00"]
6 Anders Huusko (2') - 16 Nichlas Falk - 22 Ulf Dahlén (A)
24 Patric Kjellberg (A, +2) - 21 Peter Forsberg (+3) [puis Johansson à 40'00"] - 9 Mikael Johansson (+2) [puis Sundström à 40'00"]
23 Peter Nordström (2') - 31 Jörgen Jönsson (2') - 18 Jonas Bergqvist (2')

Défenseurs :
20 Johan Tornberg (+2) - 2 Mattias Öhlund (+2)
17 Hans Jonsson (+1) - 12 Niclas Hävelid (+1 0)
4 Kim Johnsson (+1) - 28 Christer Olsson (+1 +2)

Gardien :
35 Tommy Salo

Remplaçants : 1 Johan Hedberg (G), 11 Tommy Westlund (D), 8 Jan Mertzig (D). En réserve : 30 Magnus Eriksson (G), 33 Fredrik Modin (A, blessé).

 

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