Suisse - Canada (11 mai 2000)
Quart de finale des championnats du monde 2000 à Saint-Pétersbourg.
Les équipes reçoivent leur lot de renforts pour cette rencontre en vertu du règlement de l'IIHF autorisant jusqu'à cinq nouveaux joueurs avant les quarts de finale. Les Canadiens bénéficient ainsi de l'appoint de joueurs sortis des demi-finales de conférence, Kris Draper, Martin Lapointe et l'expérimenté Larry Murphy (recordman du nombre de matches joués par un défenseur en NHL). Mais pour faire entrer les nouveaux venus, il faut en sortir d'autres. Si cela ne pose aucun scrupule au staff s'agissant des joueurs du "Team Canada" (structure dont la disparition est annoncée) comme Peter Allen, la sanction doit aussi frapper deux professionnels de NHL, ce qui est un risque pour l'ambiance de l'équipe. Les Tchèques n'ont pas voulu le courir, mais le Canada - qui prend généralement soin de ne pas braquer ses joueurs - a osé. Le benjamin de l'équipe Robyn Regehr et l'attaquant Dean McAmmond regardent donc le match depuis la tribune aujourd'hui.
Dans le camp suisse, le problème ne se pose pas de la même façon puisque Michel Riesen a débarqué de Hamilton (AHL) en remplacement d'Aeschlimann blessé. Riesen s'insère sur une ligne à vocation offensive (Demuth ayant reculé sur le quatrième trio) et se met en évidence sur son premier palet en permettant à Ivo Rüthemann de partir seul face à Théodore. Une action dangereuse après vingt secondes : les Suisses rentrent de plein pied dans la rencontre. Ce sont eux qui se créent les meilleures occasions en contre-attaque, avec Crameri, puis un 2 contre 0 de Della Rossa et Conne, ce dernier appuyant trop peu son tir face à Théodore, même si les Canadiens sont dans l'ensemble les plus pressants, Steve Sullivan étant le plus dangereux. Les Suisses terminent même la période en supériorité numérique mais, comme les Finlandais plus tôt dans la journée, ils se font piéger en toute fin de tiers à cause d'un palet perdu en défense : Ryan Smyth profite d'une passe trop forte de Patrick Sutter pour Edgar Salis et part tromper Pavoni. Un but qui intervient au plus mauvais moment pour les Suisses, qui avaient réussi à rivaliser.
À la vingt-septième minute, les Suisses convertissent finalement une supériorité numérique grâce à un but d'Ivo Rüthemann, servi par Riesen. Mais ils se relâchent alors imperceptiblement et Kris Draper redonne l'avantage aux Canadiens. C'est une pénalité contre Martin Lapointe (faire trébucher) qui permet aux Suisses de reprendre pied : Michel Riesen cherche une déviation devant le but, mais il trouve... le patin de Jeff Finley, qui propulse le palet entre les jambes de Théodore.
Les Suisses ne s'en tiennent pas là et prennent l'avantage dans le dernier tiers alors que Jovanovski n'a pas le temps de sortir de prison, et Olivier Keller, complètement démarqué, reprend un centre de Jenni. Alors qu'il lève les bras pour fêter le but, le défenseur de Lugano est chargé dans le dos par Todd Bertuzzi, qui n'a rien trouvé de mieux pour exprimer sa frustration. Alors qu'ils font preuve de bien peu d'engagement sur la glace, les Canadiens déchargent leur agressivité dans des fautes stupides, et sont en passe d'offrir la victoire sur un plateau à leurs adversaires. Ils peuvent remercier Théodore, qui sauve la baraque lors d'une échappée solitaire de Thomas Ziegler. La désinvolture canadienne est symbolisée par une action du Suisse Micheli, seul dans la zone adverse : il contre une première fois un défenseur et est à deux doigts d'intercepter ensuite le palet derrière la cage face à un Canadien trop prétentieux. Le capitaine canadien Mike Sillinger montre pourtant la voie de la rédemption en récupérant dans le dos de la défense une passe en profondeur de Patrick Traverse et en dribblant Pavoni. Mais Mike Johnson accroche Ziegler et écope encore d'une pénalité. Les Suisses réussissent durant cette nouvelle supériorité numérique deux excellentes passes susceptibles de créer une position idéale, mais elles n'arrivent pas à destination, contrées ou mal réceptionnées. Peu après, Sullivan fonce droit au but, accroché par Riesen, qui prend logiquement deux minutes difficilement reprochables mais lourdes de conséquences. Bertuzzi et Smyth se ruent sur un rebond et leur travail de sape récolte ses fruits lorsque le second glisse le palet au fond des filets. Les ultimes espoirs suisses s'envolent dans une contre-attaque de Brad Isbister à une minute de la fin. Élimination difficile à digérer pour une équipe méritante qui n'a pas grand-chose à se reprocher, et où l'apport de Riesen aura été indéniable, mais les Canadiens ont su se réprimer pour focaliser leur agressivité sur la victoire au bon moment.
Désignés joueurs du match : Michel Riesen pour la Suisse et Ryan Smyth pour le Canada.
Marc Branchu
Commentaires d'après-match
Tom Renney (entraîneur du Canada) : "Nous avons joué comme des spectateurs pendant pas mal de temps, et c'est à mettre au crédit de Ralph Krueger. Mais maintenant nous passons au tour suivant, comme c'était notre devoir."
Ryan Smyth (attaquant du Canada) : "L'entraîneur a eu une sérieuse conversation avec nous après quarante minutes, et après cela, nous voulions réellement tous gagner. Nous avons vraiment commencé à jouer pour la mention qui figure au recto de nos maillots, le Canada, et non pas pour le nom qui est au verso."
Ralph Krueger (entraîneur de la Suisse) : "Nous nous sommes compliqué la vie en fin de match, mais jusque là, nous avions fait jeu égal. Ce résultat me fait de la peine pour mes joueurs. À huit minutes près, ils étaient en demi-finale. Ils peuvent néanmoins être fiers de ce qu'ils ont accompli. Ils ont franchi un palier supplémentaire et se hissent pour de bon parmi les meilleures équipes de la planète. Maintenant, la Suisse n'est plus une équipe de losers."
Suisse - Canada 3-5 (0-1, 2-1, 1-3)
Jeudi 11 mai 2000 à 20h30 au Dvorets Sporta de Saint-Pétersbourg. 3500 spectateurs.
Arbitrage de Vladimir Mihalik (SVK) assisté de Panu Bruun (FIN) et Johan Norrman (SUE).
Pénalités : Suisse 8' (2', 4', 2'), Canada 16' (4', 8', 4').
Tirs : Suisse 22 (11, 5, 6), Canada 25 (8, 8, 9).
Évolution du score :
0-1 à 19'44" : Smyth (inf. num.)
1-1 à 26'13" : Rüthemann assisté de Von Arx (sup. num.)
1-2 à 28'05" : Draper assisté de Smyth et Aucoin
2-2 à 38'07" : Riesen assisté de Streit (sup. num.)
3-2 à 41'36" : Keller assisté de Ziegler et Jenni
3-3 à 52'20" : Sillinger assisté de Brown
3-4 à 57'18" : Smyth
3-5 à 59'17" : Isbister assisté de Brown
Suisse
Attaquants :
Ivo Rüthemann (-1) - Reto von Arx (C, -1) - Michel Riesen (-1, 2')
Marcel Jenni (-1) - Gian-Marco Crameri (-1) - Patrick Fischer (-1, 2')
Flavien Conne (-1, 4') - Michel Zeiter (-1) - Patric Della Rossa (-1)
Claudio Micheli - Thomas Ziegler (+1) - Alain Demuth (-1)
Défenseurs :
Olivier Keller - Mark Streit (-1)
Patrick Sutter (A, -2) - Edgar Salis (-2)
Martin Steinegger (A, -1) - Mathias Seger (-1)
Rolf Ziegler - Julien Vauclair (+1)
Gardien :
Reto Pavoni [sorti de 59'40" à 59'59"]
Remplaçant : Martin Gerber (G). En réserve : Pauli Jaks (G), Jean-Jacques Aeschlimann (blessé).
Canada
Attaquants :
Brad Isbister (+2) - Curtis Brown (+2) - Mike Sillinger (C, +2)
Trevor Letowski (+1) - Kris Draper (+1) - Martin Lapointe (+1, 4')
Ryan Smyth (+2) - Steve Sullivan (A, 2') - Mike Johnson (4')
Peter Schaefer - Brendan Morrison (-1) - Todd Bertuzzi (-1, 2')
Jamal Mayers
Défenseurs :
Jeff Finley (-1) - Larry Murphy (-1)
Patrick Traverse (+3) - Ed Jovanovski (A, +1, 4')
Chris Phillips (+1) - Adrian Aucoin (+2)
Yannick Tremblay
Gardien :
José Théodore
Remplaçants : Fred Brathwaite (G). En réserve : Jamie Ram (G), Robyn Regehr, Peter Allen, Dean McAmmond.