République Tchèque - Lettonie (11 mai 2000)

 

Quarts de finale des championnats du monde 2000 à Saint-Pétersbourg.

L'IIHF a édicté cette année un règlement permettant d'inclure jusqu'à cinq nouveaux renforts au stade des quarts de finale, pour un total de 28 joueurs. La République Tchèque a décidé... de ne pas faire usage de cette possibilité ! Ce ne sont pourtant pas les candidats qui manquent. Les Penguins de Pittsburgh, récemment éliminés en NHL, sont en effet portés par sept joueurs tchèques sous la conduite d'Ivan Hlinka (qui entraînait l'équipe nationale il y a peu), dont cinq champions olympiques de Nagano. Et si Jágr - qui joue blessé - avait prévenu qu'il ne ferait pas le voyage, son collègue Martin Straka par exemple avait donné par avance sa promesse de venir.

Mais les entraîneurs Josef Augusta et Vladimír Martinec avaient convenu avant le tournoi qu'ils n'appelleraient des jokers qu'en cas de blessés ou de malades, et ils se sont tenus à cette décision. Le responsable d'équipe František Černík a expliqué : "Nous ne chercherons personne sauf si deux ou trois joueurs se blessent contre la Lettonie. C'est cette équipe qui s'est qualifiée en quart de finale." Le staff a précisé que le débat s'est déroulé en petit comité, et que les joueurs présents n'ont interféré d'aucune manière.

La politique a été acceptée avec beaucoup de compréhension, même chez ceux qui avaient des raisons personnelles d'espérer le contraire. František Kaberle, dont le frère Tomáš était prêt à venir après sa fin de saison à Toronto, a ainsi déclaré : "Il vient de m'appeler, et personne ne l'a contacté. C'est peut-être bien, ça pourrait perturber l'équipe." Leur père, l'ex-international František Kaberle, a convenu : "C'est vraiment un sujet très sensible. Comme père, bien sûr, j'aimerais les voir jouer ensemble. Mais comme entraîneur et joueur, je ne sais pas. Qui remplacerait-il ?

Les Tchèques se méfient d'un adversaire qu'ils connaissent peu : ils n'ont jamais affronté la Lettonie depuis sa nouvelle indépendance, la dernière confrontation remontant à 1939 ! Ils n'ont obtenu les vidéos promises par les organisateurs qu'hier dans la journée et ont eu peu de temps pour se préparer. Précisons que la Lettonie, diminuée par des blessures, n'a évidemment pas hésité à ajouter un renfort : Herberts Vasiļjevs, le fils de l'entraîneur, a joué 7 matches en NHL avec Atlanta cette saison (1 but) avant d'être envoyé dans l'équipe-ferme d'IHL... où il vient d'être élu "joueur de la semaine" deux fois de suite en avril. Il s'agit donc d'un homme en forme.

Cette menace inconnue se précise très vite. Dès la deuxième minute, Aleksandrs Kerčs se présente seul devant Roman Čechmánek, sans parvenir à tirer par dessus le gardien de Vsetín qui se couche. Les Tchèques n'arrivent pas à s'adapter au style de ce nouveau rival. Les Lettons défendent bien, patinent mieux que les champions du monde, et leurs combinaisons très rapides conduisent à des contre-attaques redoutables qui provoquent de grands rugissements de leurs supporters. Quant à Artūrs Irbe, il n'a pas à faire d'exploits et anticipe bien une action du duo Varaďa/Procházka. Même la perte de leur talentueux attaquant Belavskis - KO sur une charge à la tête non sanctionnée de Buzek - ne perturbe pas les Baltes. Ce n'est donc que logique si Aleksandrs Nizivijs ouvre le score. Est-on en train d'assister à un nouveau tremblement de terre dans le hockey mondial ?

On vient de passer la mi-match quand Viktors Ignatjevs prend sa deuxième pénalité du soir, pour retenir. Pendant l'infériorité numérique, Artūrs Irbe essaie simplement de dégager le palet dans les bandes... mais l'offre à Václav Varaďa qui marque dans les filets déserts et bondit de joie. Ce but-gag, concédé par la star nationale, brise la Lettonie d'un coup. Le capitaine Harijs Vītoliņš passe sa colère sur l'arbitre et prend deux minutes de pénalité pour attitude anti-sportive. Les Tchèques continuent donc à jouer en avantage numérique, et le défenseur Michal Sýkora leur donne l'avantage. Puis Ābols est sévèrement sanctionné pour une obstruction. František Kučera garde le palet sur le côté gauche avant de servir Jiří Dopita qui ajoute le troisième but.

Les Tchèques sont soulagés. Même la perte de leur capitaine Robert Reichel - qui a du mal à se relever et souffre du genou après une rude intervention d'Ābols - n'est que provisoire. Il revient sur la glace en troisième période. Les Lettons restent rapides et acharnés dans les duels, et Josef Augusta doit même réduire sa rotation à trois lignes pour assurer la victoire.

Malgré ces cinq minutes fatales qui ont gâché un bon match, la Lettonie a réussi un grand championnat. Même l'annonce de Kercs selon laquelle il ne voudrait pas rejouer pour le sélectionneur Haralds Vasiļjevs est passée inaperçue. D'autres joueurs se prononceront dans le même sens comme Pantelejevs ou encore Beljavskis, pour une raison bien futile : ce dernier se vexe de ne pas avoir été choisi parmi les trois joueurs lettons à la fin du match ! Son entraîneur a choisi Vītoliņš comme attaquant... Ces bisbilles auraient été entretenues par le président de la fédération Kirovs Lipmans, à la recherche d'un prétexte pour se séparer de Vasiljevs. Mais après ce tournoi réussi, c'est impossible : les sondages auprès des fans lettons montrent qu'ils se prononcent largement pour son maintien en poste !

Désignés joueurs du match : Michal Sýkora pour la République Tchèque et Grigorijs Panteljevs pour la Lettonie.

Marc Branchu

Commentaires d'après-match

Václav Varaďa (attaquant de la République Tchèque) : "J'avais dit avant le match qu'il arrivait à Irbe de commettre des boulettes, c'était peut-être l'une d'elles. Je n'ai pas en croire mes yeux quand j'ai vu la cage vide devant moi. J'ai fait un mouvement pour lui mettre la confusion et j'ai mis le but. Mais nous étions inquiets, nous nous sentions lents par rapport à eux."

Jiří Dopita (attaquant de la République Tchèque) : "Les Lettons maîtrisaient bien le palet, leurs passes sont parfaites. Au début du match, Čechmánek nous a tenus. On parle beaucoup des qualités magiques de gardien d'Irbe, ici il a jeté un sort qui a fait un beau but pour nous..."

 

République Tchèque - Lettonie 3-1 (0-0, 3-1, 0-0)
Jeudi 11 mai 2000 à 20h30 au Yubileyni de Saint-Pétersbourg. 3244 spectateurs.
Arbitrage de Scott Hansen (USA) assisté de Panu Bruun (FIN) et Johan Norrman (SUE).
Pénalités : République Tchèque 10' (2', 4', 4'), Lettonie 20' (6', 8', 6').
Tirs : République Tchèque 24 (10, 10, 4), Lettonie 17 (4, 8, 5).

Évolution du score :
0-1 à 26'36" : Ņiživijs assisté d'Opuļskis
1-1 à 31'10" : Varaďa assisté de Kaberle et Procházka (sup. num.)
2-1 à 32'11" : Sýkora assisté de Výborný (sup. num.)
3-1 à 35'37" : Dopita assisté de Sýkora et Kučera (sup. num.)
 

République Tchèque

Attaquants :
Jan Tomajko - Jiří Dopita (A, 2') - David Výborný
Tomáš Vlasák (-1) - Robert Reichel (C, -1) - Václav Prospal (-1)
Martin Procházka (2') - Pavel Patera - Václav Varaďa (2')
Petr Čajánek - Michal Broš - Martin Havlát

Défenseurs :
František Kučera (A) - Michal Sýkora
Ladislav Benýšek (-1) - Martin Štěpánek (-1, 2')
František Kaberle - Petr Buzek (2')

Gardien :
Roman Čechmánek

Remplaçants : Dušan Salfický (G), Radek Martínek, Martin Špaňhel.

Lettonie

Attaquants :
Grigorijs Pantelejevs - Harijs Vītoliņš (C, 2') - Herberts Vasiļjevs (4')
Aleksandrs Ņiživijs (+1) - Aleksandrs Semjonovs (+1, 2') - Juris Opuļskis (A, +1)
Aleksandrs Kerčs (2') - Sergejs Seņins - Aleksandrs Beļavskis (A) puis à 17' Artis Ābols (2')
puis à 54' Jānis Sprukts

Défenseurs :
Kārlis Skrastiņš - Normunds Sējējs
Viktors Ignatjevs (+1, 6') - Igors Bondarevs (+1)
Rodrigo Laviņš - Andrejs Maticins
Atvars Tribuncovs (2')

Gardien :
Arturs Irbe

Remplaçant : Sergejs Naumovs (G). Absents : Aigars Cipruss (aine), Vyačeslavs Fanduls (doigt), Leonīds Tambijevs.

 

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