République Tchèque - Canada (12 mai 2000)
Demi-finale des Championnats du Monde A 2000 à Saint-Pétersbourg.
Le "crétin" est arrivé à ses fins
La clé de cette rencontre réside peut-être dans la discipline canadienne : on en avait eu la preuve lorsque ces deux équipes s'étaient précédemment affrontées (2-1 pour les Tchèques) puisqu'elles avaient été d'emblée placées dans la même poule, les Canadiens ne peuvent raisonnablement pas espérer se qualifier en rééditant les mêmes fautes que contre les Suisses.
Le buteur au numéro 44 Todd Bertuzzi ne s'est pourtant pas repenti et paraît aussi énervé que la veille. Alors qu'il est en prison pour un coup de crosse en fin de tiers, David Výborný feinte le lancer pour contourner le défenseur Ed Jovanovski et ouvrir la marque. Mais 33 secondes plus tard, Brad Isbister égalise en reprenant dans l'enclave une passe de Brown : poteau rentrant. Les équipes se séparent donc sur un score de parité après un tiers-temps tendu (les Tchèques perdant Kaberle blessé au genou droit par une charge à pleine vitesse de Bertuzzi). Les vieux contentieux - bagarre générale de 1997 notamment - semblent toujours présents dans les mémoires.
De ce point de vue, la deuxième période n'apporte aucun apaisement, Adrian Aucoin et Jiri Dopita s'échauffant quelque peu. Les Canadiens obtiennent d'excellentes occasions : un 3 contre 1 rondement mené est conclu par un tir sur le poteau, puis Cechmanek bloque le palet sous sa jambière lors d'une action de Smyth. Théodore s'interpose lors de nombreux contres tchèques, notamment une échappée solitaire de Tomaško.
Les deux gardiens paraissant infranchissables par des moyens classiques, les Canadiens inventent une nouvelle façon de marquer : tandis qu'un de ses coéquipiers soulève la cage, Smyth, comme au curling, glisse délicatement, par le côté, le palet en dessous du but, qui est ensuite tranquillement reposé ! Même si les Canadiens lèvent les bras, l'arbitre, qui a probablement une dent contre l'innovation créatrice, ne valide pas cette méthode révolutionnaire.
Il faut donc attendre le dernier tiers-temps pour que les équipes se départagent. Les Canadiens ont l'emprise sur le jeu pendant la première moitié de ce tiers, même si José Théodore doit repousser un tir du revers Výborný de qui se présente seul face à lui. Mais, le destin étant cruel, c'est justement Théodore, jusque là irréprochable durant toute la compétition, qui craque : un tir du poignet de Robert Reichel du coin de la ligne bleue passe sous la botte gauche du gardien de Montréal. Les Tchèques peuvent même faire le trou par un 2 contre 1 bien amené, mais Tomaško ne peut contrôler le palet. Le Canada joue à 6 contre 5 après la sortie de Théodore, mais Robert Reichel remporte deux mises au jeu capitales pour retarder les plans adverses. Cechmanek vient capter le palet loin de ses buts à sept secondes du terme, ce qui clôt plus ou moins le suspense. Mais Bertuzzi retombe sur le gardien tchèque, provoquant une petite échauffourée qu'il semblait chercher depuis longtemps, et est justement récompensé de ses efforts méritoires et de sa persévérance à semer la zizanie par une pénalité de match.
Les Tchèques s'imposent, perpétuant la tradition de rencontres de qualité, serrées, accrochées et parfois houleuses face aux Canadiens, mais qui récompensent toujours au final le même vainqueur.
Désignés joueurs du match : Robert Reichel pour la République Tchèque et Kris Draper pour le Canada.
Marc Branchu
Commentaires d'après-match
František Kucera (défenseur de la République Tchèque) : "Le but est venu au bon moment. Peut-être qu'un peu de chance a fait la décision, mais ça fait partie du sport. Bertuzzi est juste un idiot. Ils se permettent des choses ici qu'ils ne font pas outre-Atlantique. Ils provoquent, ils cherchent les pénalités."
Václav Prospal (attaquant de la République Tchèque) : "Bertuzzi n'est qu'un gros crétin, mais je dois le féliciter d'avoir réussi à se faire sortir après y avoir mis tant de cœur et s'être autant démené."
Petr Buzek (défenseur de la République Tchèque) : "Robert a prouvé quel capitaine il est et quel cœur il a. Je ne comprends vraiment pas Bertuzzi par moments. Dès l'échauffement il me hurlait déjà quelque chose dessus, ensuite il a pris quatre pénalités. J'espère que Franta [Kaberle] ira mieux. Nous devrions toujours pratiquer notre jouer, il n'y a pas lieu d'inventer quoi que ce soit de nouveau. J'espère que nous poursuivrons notre série de victoires sur la Slovaquie, mais ils vont être très excités."
Josef Augusta (entraîneur de la République Tchèque) : "Les deux équipes ont pratiqué un très bon hockey ce soir. Nous avons mérité la victoire, principalement parce que nous nous sommes créé plus d'occasions en deuxième période. Les Canadiens ne nous ont pas battus dans les grands championnats depuis quatre ans. C'est différent de mon époque, quand ils pouvaient nous terroriser, nous insulter. Aujourd'hui, les joueurs leurs répondent calmement en anglais et n'ont plus du tout peur d'eux. Mais ce n'était pas facile. Robert Reichel a fait la différence. Sa performance n'a jamais été faible tout au long du championnat, on le sentait en zone neutre et dans le forechecking. Les deux meilleures équipes restent dans le tournoi, mais si quelqu'un avait parié dessus avant le championnat, il aurait gagné gros. Si Dieu nous voit travailler et travailler encore, il nous donnera la victoire."
José Théodore (gardien du Canada) : "Prendre un but comme ça est toujours décevant. J'en suis désolé après notre bonne prestation de ce soir."
Canada - République Tchèque 1-2 (1-1, 0-0, 0-1)
Vendredi 12 mai à 20h30 au Dvorets Sporta de Saint-Pétersbourg. 11700 spectateurs.
Arbitrage de Pekka Haajanen (FIN) assisté de Panu Bruun (FIN) et Johan Norrman (SUE).
Pénalités : Canada 39' (8', 2', 4'+5'+20'), République Tchèque 12' (4', 4', 4').
Tirs : Canada 24 (7, 12, 5), République Tchèque 17 (9, 5, 3).
Évolution du score :
0-1 à 17'03" : Vyborny assisté de Dopita et Buzek (sup. num.)
1-1 à 17'38" : Isbister assisté de Brown
1-2 à 51'07" : Reichel
Canada
Attaquants :
Brad Isbister (2') - Curtis Brown - Mike Sillinger (C)
Mike Johnson - Kris Draper - Martin Lapointe
Ryan Smyth - Steve Sullivan (A, 2') - Todd Bertuzzi (8'+5'+20')
Dean McAmmond - Trevor Letowski - Jamal Mayers
Défenseurs :
Ed Jovanovski (A, 2') - Larry Murphy
Chris Phillips - Adrian Aucoin
Patrick Traverse - Jeff Finley
Gardien :
José Théodore [sorti à 59'06"]
Remplaçants : Fred Brathwaite (G), Yannick Tremblay, Peter Schaefer. En réserve : Jamie Ram (G), Robyn Regehr, Peter Allen, Brendan Morrison.
République Tchèque
Attaquants :
Jan Tomajko - Jirí Dopita (A) - David Výborný
Tomáš Vlasák - Robert Reichel (C, 2') - Václav Prospal (4')
Martin Procházka (2') - Pavel Patera (2') - Václav Varada
Petr Cajánek - Michal Broš - Martin Havlát
Défenseurs :
František Kucera (A) - Michal Sýkora
Ladislav Benýšek - Martin Štepánek (2')
František Kaberle puis à 12' Radek Martínek - Petr Buzek
Gardien :
Roman Cechmánek
Remplaçants : Dušan Salfický (G), Martin Španhel. En réserve : Vladimír Hudácek (G).