Anglet - Rouen (6 décembre 2003)

 

Match comptant pour la treizième journée du Super 16, poule ouest.

Si l'Hormadi continue a développer ainsi son jeu et ses performances je vais manquer sérieusement de superlatifs, il va falloir sérieusement songer à investir dans le petit Robert des synonymes. Mais revenons-en au match de samedi soir, l'enjeu était évident, Rouen devait absolument vaincre pour pouvoir penser à la qualification, alors qu'Anglet avec une victoire était automatiquement qualifié.

Les nombreux supporters rouennais présents (comme bien souvent) ainsi qu'une patinoire archi-comble (on ne devait pas être trop loin de la limite légale des 1250 spectateurs) attestaient de l'importance de cette rencontre.

Les Dragons présentaient un effectif amputé des quatre juniors sélectionnés en moins de 20 ans (Bellemare, Geffroy, Besch et Lafrancesca), dont ils avaient en vain tenté de négocier la présence avec l'entraîneur national Dave Henderson, qui tenait à maintenir son stage de préparation pour les championnats du monde qui commencent la semaine prochaine. Cela poussait Franck Pajonkowski à rechausser les patins, contrairement à ce qu'il avait affirmé dans la semaine. L'Hormadi, pour sa part, était privé des services de Xavier Lasalle, également retenu en moins de 20 ans. Julien Hitze, étonnamment, n'était même pas sur la feuille de match.

Le public venu en masse les attendait de puis longtemps, pas de surprise, les deux premiers blocs débutent la rencontre. Les intentions sont bonnes car aucune des deux équipes ne peut se découvrir totalement ni gérer quoi que ce soit, la première action marquante des Angloys rassure immédiatement les supporters sur le niveau de jeu de David Dostal. En effet, après une sortie de zone approximative, Michal "TGV" Garbocz exécute une passe lumineuse vers le numéro 61 de l'Hormadi qui enrhume Éric Raymond en face-à-face et secoue les filets pour la première fois du match (1-0 à 03'18).

Kimmo Salminen, le joker buteur de Rouen, est repris de justesse deux minutes plus tard alors qu'il partait en breakaway par le dernier défenseur angloy. Le duo Dostal-Garbocz a retrouvé son punch et nous crédite d'une phase de jeu très rapide, mais le portier normand a le dernier mot (07'01). Les Dragons ne peuvent renoncer et l'égalisation vient sur un break de Sami Karjalainen. Un peu avancé, Jean-Ian Filiatrault est trompé par un tir en cloche qui tombe juste sous la transversale (1-1 à 09'56). Rouen pousse, la pression monte d'un cran, mais la défense basque tient le choc et Filiatrault impeccable fait étalage de son talent sur des sauvetages de grande classe.

La solution pour les Dragons vient en supériorité numérique, alors que Filippin est en prison, sur un tir tendu de Maurice Rozenthal (1-2 à 12'17). À ce moment de la rencontre, les Normands prennent un ascendant psychologique, mais qui n'est pas tranchant car les Basques reprennent leur jeu au rythme d'un métronome. David Dostal, qui a retrouvé tout son hockey, fait sonner le poteau d'Éric Raymond en supériorité numérique (15'14), et un peu plus d'une minute plus tard c'est au tour de Stanislas Solaux de faire sonner le tocsin (16'20). Jamais deux sans trois, me direz-vous, et bien non, car sur une action de jeu un peu étrange (autogol ou pas ?) Pascal Bédard égalise (2-2 à 16'23). C'est de la folie à la Barre, tout le public se lève comme un seul homme pour saluer ce retour au score. Mais la période n'est pas encore finie, avec encore une action magnifique de Michal Garbocz dont la déviation est écartée par un superbe réflexe de Raymond (17'43), et un palet cafouillé par Pascal Bédard qui permet un breakaway de Maurice Rozenthal, dont le tir passe au-dessus du cadre (19'01).

En vingt minutes, nous avons vécu l'intensité d'une rencontre complète. Le deuxième tiers-temps est bien moins percutant, car Rouen, ébranlé par l'égalisation angloye, montre des signes de faiblesse évidents. Après la très bonne action de l'Hormadi sur un une-deux magnifique entre Bédard et Solaux, conclu par un tir du Québécois qui loupe le cadre de peu (22'00), on doit attendre plus de onze minutes pour revoir du jeu. Et de quelle manière, le but de Stanislas Solaux fait battre tous les records en matière de décibels (3-2 à 33'27). L'avant angloy récupère son rebond et mystifie son défenseur pour aller tromper (trop) facilement Éric Raymond bien abandonné par sa défense. Le jeu des sept dernières minutes de cette période s'annihile quelque peu en zone neutre, il n'y a rien de bien tranchant à se mettre sous la dent si ce n'est la fébrilité inquiétante de Rouen.

L'électrochoc a dû être violent dans les vestiaires rouennais, car Maurice Rozenthal est le premier à se mettre en évidence sur une déviation vicieuse, car Filiatrault était masqué, mais le palet passe au dessus du cadre. Double réponse du berger à la bergère, tout d'abord sur un breakaway de Garbocz, repris en deux temps par Éric Raymond (41'11), puis sur un contre de Jérôme Patard où Xavier Daramy hérite d'un bon palet mais ne trouve pas le but, la faute à un réflexe miraculeux du gardien sur son tir instantané (43'26). La maison Rouen a le feu, mais Maurice Rozenthal, sur un bon travail d'Alain Vogin et Arnaud Briand, contraint Filiatrault à un énorme arrêt (48'01), salué comme il le faut par le public de la Barre. Rouen pousse mais la confiance n'est plus là, malgré un énième festival de Rozenthal paradé à nouveau par un Jean-Ian Filatrault en état de grâce (46'59).

La délivrance arrive par un pur produit angloy. Raphaël Larrieu inscrit le quatrième but de l'Hormadi qui scelle le sort de la rencontre (4-2 à 58'04), une folie que l'on n'avait plus connue depuis les glorieuses années de N1 (la finale face à Angers) ou lors de la finale élite face à Rouen parcourt à nouveau les travées de la Barre. L'ensemble des joueurs de l'Hormadi se jette sur le jeune Angloy pour le féliciter comme il faut. Malgré la sortie de Raymond, les Dragons sont en enfer, par deux fois le cinquième but est proche mais les tirs de Julien Aubry et Lubomir Duda manquent la cage désertée de peu.

Ça y est, l'Hormadi a réussi son pari fou, ils sont qualifiés et invaincus sur leur glace, et avec la manière. Transfigurés depuis la victoire à Rouen, les hommes de Jean-Marie Lutaud nous livrent un jeu rarement vu à la Barre, en cas de victoire à Dunkerque ils peuvent même ravir la seconde place aux Albatros exempts de cette dernière journée.

David Dostal a retrouvé son jeu qui en avait fait le chouchou de la patinoire de la Barre, encore bravo à lui. Stanislas Solaux a également fait une très bonne rencontre. Moins individualiste qu'à l'accoutumée, il a retroussé ses manches et s'est mis à gratter de nombreux palets dans les coins, le troisième but de l'Hormadi en est l'exemple parfait. Mais surtout, l'esprit d'équipe, la solidarité, l'entente sur la glace des joueurs et la défense exemplaire ont fait la différence ce soir.

A contrario, il y a le feu à la prestigieuse maison rouennaise, son sort après cette défaite est désormais suspendu au résultat de Tours-Amiens de la prochaine journée. Si le pire se produit (victoire de Tours), ça va tonner très sérieusement en Normandie, les hommes de Franck Pajonkowski ont deux visages, celui qui rit en Coupe Continentale et celui qui pleure en championnat de France.

Non seulement ils sont moins efficaces en attaque malgré des individualités comme Maurice Rozenthal ou Kimmo Salminen (un monstre d'attaquant, rapide et d'une technique) ou l'énorme travail abattu par le duo Arnaud Briand - Alain Vogin, mais la défense est régulièrement prise à défaut, que ce soit sur des fautes de placement (Veli-Pekka Hård est grand et d'une lenteur extrême) ou par de mauvais gestes (Steven Low a été bien peu inspiré). En bref, la cohésion et l'esprit de groupe faut cruellement défaut à la mouture 2003-04.

Compte-rendu signé Hormadiar

 

Commentaires d'après-match (dans Sud Ouest et Paris Normandie)

Karlos Gordovil (entraîneur/manager d'Anglet) : "Nous nous étions élevés en début de saison contre cette forme de championnat. Or voilà que Rouen, le champion de France en titre, doit se retrouver en neuvième position et donc a priori exclu des playoff. Qui l'eût cru ? Moi, je suis content ce soir d'avoir vu une patinoire pleine, comme je suis satisfait que le public ait eu droit à du spectacle. Dans les moments délicats, l'équipe a su faire preuve de réalisme et de discipline. Nous sommes invaincus sur notre glace à ce jour en championnat. À nous de confirmer mardi en coupe contre Angers."

Thierry Chaix (président de Rouen) : "On n'est plus maître de notre destin mais avec un peu de chance on peut encore passer. Je ne crois pas que la présence des juniors aurait changé grand-chose. C'est toujours difficile de gagner à Anglet et Rouen n'a pas vraiment mal joué. On ne peut pas dire que les mecs ne branlent rien. Si on ne passe pas, ce ne sera pas après dix défaites d'affilée. C'est aussi parce que les poules sont déséquilibrées et que la nôtre était difficile. Face aux meilleurs, on signe des résultats équilibrés. Mais on s'est un peu fait piéger par la Coupe continentale car on s'est focalisé sur cette compétition. En championnat, on s'est retrouvé face à des clubs plus concentrés que nous sur le Super 16. C'est le sport. Il nous manque un Doucet ou un Besse, mais avec l'équipe de l'an dernier, nous n'aurions pas fait le même parcours en Coupe d'Europe."

Franck Pajonkowski (entraîneur de Rouen) : "Ce n'est pas ce match qui nous fait mal, c'est celui que nous avons perdu une semaine plus tôt à Tours."

 

Anglet - Rouen 4-2 (2-2, 1-0, 1-0)

Samedi 6 décembre 2003 à 20h00 à La Barre. 1100 spectateurs.

Arbitrage de Frédéric Bachelet assisté de Laurent Antunes et Stéphane Phelippe.

Pénalités : Anglet 10' (6', 2', 2'), Rouen 14' (8', 2', 4').

Évolution du score :

1-0 à 03'18" : Dostal assisté de Garbocz

1-1 à 09'56" : Karjalainen assisté de Salminen et Rousu

1-2 à 12'17" : Rozenthal assisté de Low et Briand (sup. num.)

2-2 à 16'23" : Bédard assisté de Daramy et Solaux (sup. num.)

3-2 à 33'27" : Solaux

4-2 à 58'04" : Larrieu assisté de Bédard et Solaux

 

Anglet

Gardien : Jean-Ian Filiatrault.

Défenseurs : Lubomir Duda - Daniel Sedlak ; Pascal Bédard - David Saint-Onge ; Jean-Christophe Filippin (C) - Mickaël Wiart.

Attaquants : David Dostal - Michal Garbocz - Antoine Amsellem ; Xavier Daramy (A) - Jérôme Patard - Raphaël Larrieu ; Géraud Maréchal - Julien Aubry - Nicolas Courally ; Stanislas Solaux.

Remplaçants : Benoît Sanchez (G), Jean-François Ladonne, Christophe Cantos. Absents : Xavier Lasalle (équipe de France juniors), Julien Hitze (?).

Rouen

Gardien : Éric Raymond.

Défenseurs : Daniel Carlsson - Veli-Pekka Hård ; Simon Lacroix - Steven Low ; Benoît Pourtanel - Nicolas Pousset.

Attaquants : Kimmo Salminen - Sami Karjalainen (A) - Miikka Rousu ; Maurice Rozenthal (A) - Arnaud Briand (C) - Alain Vogin ; Niko Kantelinen - Martin Lacroix - Franck Pajonkowski.

Remplaçants : Landry Macrez (G), Tristan Lemoine. Absents : Pierre-Édouard Bellemare, Nicolas Besch, Thibault Geffroy (équipe de France juniors), Simon Doreille (examens).

 

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