Canada - États-Unis (5 janvier 2004)

 

Finale des championnats du monde des moins de 20 ans.

Les États-Unis souhaitaient venger leur défaite en demi-finale l'an passé face au Canada : la finale s'annonçait belle et serrée. Au terme d'un match haletant, et au prix d'un retour incroyable ponctué par un but curieux, les Américains ont réussi leur pari, et remportent la première médaille d'or de leur histoire à ce niveau.

Pourtant, le match tournait rapidement à l'avantage des Canadiens, finalistes malheureux des deux dernières éditions. Ils ne tardaient pas à ouvrir le score, par leur buteur en forme, le petit Nigel Dawes. Lancé par Stewart, le joueur de Kootenay accélérait et trompait Alvaro Montoya depuis le cercle d'engagement. Mais les États-Unis tenaient le choc, et l'un des deux joueurs NHL de leur équipe parvenait à égaliser cinq minutes plus tard. L'attaquant de Colombus Dan Fritsche, servi par le défenseur Richmond, tentait un mouvement tournant derrière la cage, et surprenait du revers un Fleury mal placé. À 1-1 à la pause, tout restait à faire dans une rencontre où les deux équipes dominatrices du tournoi s'étaient parfaitement neutralisées et où les deux gardiens s'étaient distingués par quelques arrêts spectaculaires.

La deuxième période en revanche ne souffrit d'aucune discussion. La puissance de la deuxième ligne canadienne Dawes-Stewart-Richards fit la différence. Après seulement douze secondes de jeu, Dawes réussissait le doublé, redirigeant au fond des filets un tir de Mike Richards. À mi-période, le puissant Anthony Stewart, meilleur Canadien du match, se faisait sentir. S'imposant au milieu de deux défenseurs américains sur la droite du but, il devançait Matt Carle et permettait à son pays de mener 3-1 grâce à tir du poignet de la ligne bleue. Le Canada terminait le tiers-temps avec un avantage de onze tirs à six, malgré la perte temporaire de son assistant capitaine Tim Brent, malmené par une mise en échec de Mark Stuart. Sonné, l'attaquant revenait sur la glace quelques minutes plus tard... Pendant la pénalité contre Stuart, ajoutée à une autre contre Ryan Suter, les joueurs défensifs américains parvenaient à tuer un trois-contre-cinq.

Le Canada avait alors la mainmise sur le match, mais perdait inexplicablement le contrôle en dernière période. Devenant nerveux, maladroits et poussifs à l'échec-avant, les joueurs à la feuille d'érable gaspillaient, comme lors des deux finales précédentes, l'avantage au score. Les tentatives de Crosby et Getzlaf étaient en outre bloquées par Montoya sur en début de tiers.

Loin d'être abattus par les deux buts de retard, les joueurs américains s'appuyaient de leur côté sur leur expérience du titre 2002 en moins de 18 ans, et retrouvaient la glace avec volonté et puissance physique. Le coach Mike Eaves séparait Ryan Kesler et Patrick O'Sullivan, plaçant le premier aux côtés de Parise et Murray et le second aux côtés d'Eaves et Stafford. Il lançait par ailleurs Richmond, Stuart, Suter et Wisniewski plus souvent sur la glace, profitant de leurs qualités offensives.

Patrick Eaves, fils du sélectionneur américain, trouvait alors Patrick O'Sullivan sur une passe transversale lors d'un 3-contre-2. L'espoir de Minnesota trompait Fleury en hauteur dans un trou de souris, réduisant le score à 3-2. Moins de deux minutes plus tard, le second joueur NHL de l'équipe égalisait. Parise débordait et servait Richmond sur une passe levée pour un tir. Ryan Kesler, laissé seul devant le but, s'emparait du rebond laissé par Fleury et le logeait en hauteur au fond de la cage.

À 3-3, le Canada voyait revenir le spectre russe, celui de la défaite. Au cours d'une action des plus confuses, le but de la victoire choisissait son camp, pour offrir aux États-Unis leur premier titre, à quelques minutes de la fin. Patrick O'Sullivan allait presser sur une échappée Marc-André Fleury et celui-ci tentait de dégager le palet de la crosse. Mais la rondelle prenait un rebond curieux, et frappait le dos du défenseur Braydon Coburn... avant de rentrer dans le but, malgré un retour désespéré de Fleury ! Sur ce but gag et une erreur du gardien censé être le pilier de l'équipe, les États-Unis prenaient l'avantage pour la première fois de la partie... Une malchance pour Fleury, car il réalisait son meilleur match d'un tournoi où il s'était souvent montré hésitant sur son positionnement et mis en danger sur des rebonds mal contrôlés.

Montoya se montrait de son côté décisif sur les quatre minutes restantes, pour une médaille d'or historique. Après la coupe du monde non officielle des moins de 17 ans 2001, la médaille d'or en moins de 18 ans en 2002, la quatrième place des moins de 20 ans en 2003, la génération dorée des États-Unis remporte l'or en moins de 20 ans. Ce succès est avant tout celui du programme de sélection des moins de 17 et moins de 18 ans basé à Ann Arbor, dans le Michigan, et qui produit de plus en plus de futures vedettes. Ce succès est aussi celui du capitaine Mark Stuart, devenu le véritable porte-bonheur de l'équipe, puisqu'il était déjà capitaine des sélections victorieuses les années précédentes...

Pour Patrick O'Sullivan, c'est une sérieuse revanche sur le sort. Maltraité par son père, critiqué pour son attitude l'an passé, il avait chuté au deuxième tour de la draft NHL en 2003 : aujourd'hui, il apparaît comme un joli coup de poker pour Minnesota grâce à son doublé en finale.

Les États-Unis placent deux joueurs dans l'équipe-type du tournoi : Alvaro Montoya (6 victoires, 2 blanchissages) prend acte pour la draft 2004 en étant élu meilleur gardien, alors que le buteur Zach Parise, muet pour la première fois du tournoi, est élu meilleur joueur de la compétition.

Les Canadiens doivent donc se contenter de l'argent pour la troisième fois consécutive, plaçant le défenseur Dion Phaneuf et le centre Jeff Carter dans l'équipe-type (choix surprenant, compte tenu des performances du duo Stewart-Dawes). Ils seront favoris lors de l'édition 2005 dans le Dakota du Nord et le Minnesota, car pas moins de treize joueurs médaillés cette année sont éligibles pour le prochain tournoi.

Compte-rendu signé Nicolas Leborgne

 

Commentaires d'après-match

Mario Durocher (entraîneur du Canada) : "Vous savez comme la pression est grande au Canada... Mais je pense que nous devons avoir la tête haute, car nous avons joué à fond depuis le début du tournoi. Il y a eu un rebond malheureux en troisième période, c'était un but chanceux..."

Nigel Dawes (double buteur du Canada) : "Nous sommes arrivés trop attentistes dans le dernier tiers... C'est probablement la pire façon de perdre, nous ne leur sommes pas rentrés dedans. On ne pas dire grand-chose du dernier but, c'est le destin."

Mike Eaves (entraîneur des États-Unis) : "C'est un groupe avec de grosses qualités mentales et techniques. Avec une telle combinaison, vous êtes sûrs de devenir un prétendant à la victoire à chaque fois, car lorsque le match devient difficile, la technique ne suffit pas. Après la deuxième période, nous savions que nous pouvions mieux jouer. Plus vous travaillez dur, plus vous attirez la chance... Fleury digèrera ce dernier but, il a une grande et longue carrière devant lui. Même s'il n'est pas parfait, le programme national de développement sort bonifié du tournoi. On doit toujours apprendre des autres pays, mais ce programme devient quelque chose de très bon."

Zach Parise (meilleur joueur du tournoi) : "Nous n'avons jamais abandonné, c'était la clé. Nous avons travaillé si dur... C'est le plus gros titre de ma carrière, je suis si heureux... Nous n'avons pas arrêté de presser et nous nous sommes dit avant la troisième période que le Canada n'avait pas encore vu notre vraie valeur. C'est extraordinaire pour le programme de la Fédération, car cela donne de la reconnaissance au hockey américain."

Patrick O'Sullivan (double buteur américain) : "C'est important pour ma carrière, car gagner des titres, c'est ce qui fait les grands joueurs. Plus vous en gagnez, meilleur vous êtes..."

 

Canada - États-Unis 3-4 (1-1, 2-0, 0-3)

Lundi 5 janvier 2004 à 19h00 à la Jäähalli de Helsinki. 7364 spectateurs.

Arbitrage de Thomas Andersson (SUE) assisté de Stefan Fonselius (SUE) et Seppo Lindroos (FIN).

Pénalités : Canada 6' (2', 4', 0'), États-Unis 6' (2', 4', 0').

Tirs : Canada 30 (12, 11, 7), États-Unis 28 (12, 6, 10).

Évolution du score :

1-0 à 03'25" : Dawes assisté de Stewart

1-1 à 08'57" : Fritsche assisté de Richmond et Moore

2-1 à 20'12" : Dawes assisté de Richards et Stewart

3-1 à 32'56" : Stewart assisté de Dawes

3-2 à 44'39" : O'Sullivan assisté d'Eaves et Stafford

3-3 à 46'58" : Kesler assisté de Richmond

3-4 à 54'48" : O'Sullivan

 

Canada

Gardien : Marc-André Fleury.

Défenseurs : Dion Phaneuf - Derek Meech ; Brent Seabrook - Braydon Coburn ; Josh Gorges - Shawn Belle ; Kevin Klein.

Attaquants : Ryan Getzlaf - Jeff Carter - Brett Burns ; Nigel Dawes - Mike Richards - Anthony Stewart ; Maxime Talbot - Daniel Paille - Tim Brent ; Stephen Dixon - Jeremy Colliton - Jeff Tambellini ; Sidney Crosby.

États-Unis

Gardien : Alvaro Montoya.

Défenseurs : Mark Stuart - James Wisniewski ; Ryan Suter - Jeff Likens ; Corey Potter - Matt Carle ; Matt Hunwick - Dan Richmond.

Attaquants : Patrick O'Sullivan - Ryan Kesler - Patrick Eaves ; Steve Werner - Zach Parisé - Brady Murray ; Brett Sterling - Greg Moore - Dan Fritsche ; Drew Stafford - Jake Dowell - David Booth.

 

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