États-Unis - Russie (2 septembre 2004)

 

Match comptant pour la coupe du monde 2004, groupe Amérique.

Après leur prestation en dedans face au Canada où ils ont été copieusement dominés sur l'ensemble de la rencontre, les Américains étaient attendus au tournant face aux Russes qui faisaient leur entrée dans le tournoi. Un avantage théorique compte tenu de la préparation très particulière de la Russie qui a eu toutes les peines du monde à assembler son effectif suite au forfait de nombreuses stars peu enclines à rejoindre la sélection nationale pour des prétextes plus ou moins valables. C'est donc un euphémisme de dire que les Russes constituent LE point d'interrogation de ce tournoi. Après les forfaits de Khabibulin et Nabokov, c'est le jeune Ilya Bryzgalov qui a la lourde responsabilité de garder les buts russes. À noter que pour ce premier match, la star de la dernière draft Aleksandr Ovechkin était dans les tribunes.

Le début de rencontre des Américains est un clone de celui disputé deux jours plus tôt face au Canada : apathiques et repliés en défense, ils se font bousculer par leur adversaires. La vitesse et la technique des Russes font merveille en ce début de rencontre à l'image de Maksim Afinogenov tout près d'ouvrir le score en deux occasions très nettes. Les Russes se montrent en revanche incapables d'installer quoi que ce soit sur une supériorité numérique rapidement concédée par Miller. Mais les Américains ne feront guère mieux quelques minutes plus tard. Robert Esche, déjà très sollicité face au Canada, doit être au four et au moulin : il aura seize arrêts à effectuer sur l'ensemble de la période tandis que son vis-à-vis Bryzgalov est au bord de l'ennui avec quatre malheureux palets parvenus jusqu'à lui. Malgré une dernière occasion franche de Yashin une nouvelle fois stoppée par Esche, le score reste nul et vierge à l'issue du premier vingt. Il n'aura manqué finalement que l'efficacité à des Russes qu'on n'attendait pas à pareille fête.

La deuxième période commence pourtant mal pour eux avec Kovalev envoyé en prison après seulement quatorze secondes. Les Américains profitent de l'occasion pour sortir de leur torpeur et Mike Modano, lancé par Tkachuk, est tout près de l'ouverture du score. De nouveau à cinq contre cinq, Kvasha répond du tac au tac mais la partie s'est équilibrée. Guerin et Kovalchuk ont tour à tour l'occasion de donner le premier avantage à leur équipe mais les deux gardiens se montrent intraitables et rivalisent de virtuosité. C'est finalement sur un coup du sort que le premier but est inscrit : Dainius Zubrus fait le tour de la cage de Esche, centre en direction du but, et le palet est dévié dans ses propres filets par l'infortuné Chelios (0-1, 32'20"). Un but tiré par les cheveux qui aura au moins le mérite de récompenser les Russes de leur domination dans la période initiale. Loin de se démobiliser, les Américains vont, comme face au Canada, réagir. Après une pénalité infligée à Kovalenko, il ne faut que douze secondes à Modano pour démarquer Keith Tkachuk qui ne laisse aucune chance à Bryzgalov (1-1, 33'44"). Même si ce dernier ne pouvait pas grand-chose sur le coup, il montre des signes de fébrilité en fin de tiers, notamment sur un dégagement dans les tribunes qui lui vaudra d'être sanctionné pour un retard de jeu, heureusement sans conséquence pour son équipe.

Les Russes, constants dans leur effort, attaquent la dernière période tambour battant. Yashin profite d'une mauvaise relance américaine mais Esche s'interpose in extremis. Afinogenov continue son festival dans la défense américaine qui parait sur le point de lâcher prise. Finalement, il faut un but d'exception d'Alekseï Kovalev pour débloquer la situation : il récupère le palet à la ligne rouge, se joue avec facilité de Tony Amonte et John-Michael Liles avant de coucher Esche pour finalement déposer la rondelle sous la transversale dans un angle impossible. Du très grand art pour ce qui est sans aucun doute le plus beau but de la compétition (2-1, 45'05"). Les Américains ont l'occasion de refaire le coup du premier tiers puisque Yashin écope d'une pénalité dans les secondes qui suivent. Mais ils n'y sont visiblement plus, incapables de porter le danger de manière régulière sur les cages de Bryzgalov. Les minutes défilent en faveur des Russes, Kovalchuk et Chelios se livrent une petite explication musclée, et Esche continue d'être bombardé. Rien de bien nouveau jusqu'à ce que Viktor Kozlov arrive à bout de la résistance du gardien des Flyers de Philadelphie en le trompant d'un tir anodin entre les jambes (3-1, 58'02"). Les Américains laissent éclater leur frustration en provoquant une bagarre mais le sort de la rencontre est définitivement scellé et la sortie d'Esche dans les derniers instants ne changera rien.

Avec cette deuxième défaite en deux matches, les Américains ont cette fois montré leurs limites et il leur sera bien difficile de conserver leur titre. Seul Robert Esche mérite des louanges, lui qui a déjà essuyé 77 tirs en deux rencontres ! Du côté russe en revanche, le sourire peut être de mise. Après les échecs répétés lors des dernières compétitions internationales et une préparation dans la douleur, la prestation de ce soir arrive à point nommé. Inspirés et accrocheurs, les Russes ont pu faire étalage de tout leur bagage technique, ridiculisant les Américains avec leur patinage.

Christophe Laparra

Commentaires d'après-match :

Ron Wilson (entraîneur des États-Unis) : "Les Russes ont trop de talent. Contre eux, il n'est pas possible de perdre le palet ou de faire des passes lentes, ou vous vous mettez dans une situation catastrophique. Il est étrange de voir comment nos joueurs, qui étaient confiants et pleins de sang-froid la semaine dernière, ont soudain perdu la face contre un adversaire plus technique. Rafalski a été de très loin notre meilleur défenseur ce soir. Les autres se sont vite fatigués, et on doit remercier Robert Esche que le score soit resté serré jusqu'au bout. Il se reposera demain, il a beaucoup donné. Nous aurons un gardien frais, mais nous aurons aussi cinq joueurs de champ frais devant lui. Certains n'ont pas été performants et nous n'avons pas le temps d'attendre qu'ils le deviennent. Il faut penser à l'intérêt général de l'équipe. On ne peut pas jouer sur sa réputation, c'est sur la glace qu'il faut jouer."

Alekseï Kovalev (attaquant de la Russie) : "Je n'ai pas vu qui était face à moi, mais j'ai eu le temps de me rendre compte que ce n'était pas un défenseur [il s'agissait de Tony Amonte] et que sa vitesse ne serait pas suffisante pour me retenir. Il m'a donc été possible de le dribbler et de tirer sous la transversale. Tout le monde a vu qu'il y avait but, l'appel à la vidéo des Américains a juste servi à nous donner quelques minutes de repos. Le patinage a toujours été la caractéristique du hockey russe, nous avons dans notre équipe des jeunes joueurs extrêmement rapides qui pourraient jouer des heures d'affilée. Je pense que personne ne s'attendait à ce que l'on tire autant au but. L'adversaire avait probablement supposé que nous jouerions notre hockey habituel fait de combinaisons. Nous l'avons fait, mais nous avons constamment attaqué les cages en suivant les recommandations de l'entraîneur."

Dainius Zubrus (attaquant de la Russie) : "Non, je ne considère pas avoir marqué le premier but lituanien en équipe de Russie. Même s'il a toujours joué sous le maillot russe, Kasparaitis est des nôtres et ses buts sont aussi lituaniens. Je pense que ceux qui me connaissent savent que je ne cherche à trahir personne [bien qu'il soit Lituanien, il peut jouer pour la Russie pendant cette coupe du monde car ce n'est pas une compétition officielle de l'IIHF]. Les sportifs savent combien il est important de participer aux compétitions de haut niveau. Il y a sûrement des gens qui me condamnent, mais je pense que ma participation à cette coupe du monde sera bénéfique pour le hockey lituanien. [...] Nous voulions être prêts dès le début car nous supposions que les Américains seraient très motivés devant leur public, mais nous ne nous attendions pas à être si supérieurs à eux pendant les dix premières minutes."

 

États-Unis - Russie 1-3 (0-0, 1-1, 0-2)
Jeudi 2 septembre 2004 à 19h00 au Xcel Energy Center de St. Paul. 18 064 spectateurs.
Arbitrage de Brad Watson et Paul Devorski (CAN) assisté de Brian Murphy et Tim Nowak (USA).
Pénalités : États-Unis 17' (4', 0', 8'+5'), Russie 41' (2', 6', 8'+5'+20').
Tirs : États-Unis 21 (4, 10, 7), Russie 45 (16, 13, 16).

Évolution du score :
0-1 à 32'20" : Zubrus assisté de Kvasha et Yashin
1-1 à 33'44" : Tkachuk assisté de Modano et Rafalski (sup. num.)
1-2 à 45'05" : Kovalev assisté de Khavanov
1-3 à 58'02" : Kozlov assisté de Samsonov
 

États-Unis

Attaquants :
Keith Tkachuk (2'+5'+20') - Doug Weight - Chris Drury
Steve Konowalchuk - Mike Modano - Brett Hull (2')
Bill Guerin (4') - Scott Gomez - Brian Rolston
Jason Blake - Craig Conroy - Tony Amonte

Défenseurs :
Brian Leetch - Aaron Miller (2')
Chris Chelios (C, 2') - John-Michael Liles
Eric Weinrich - Brian Rafalski

Gardien :
Robert Esche

Remplaçant : Rick DiPietro (G).

Réservistes : Ken Klee, Paul Martin, Jeff Halpern, Jamie Langenbrunner, Bryan Smolinski et Ty Conklin (G).

Russie

Attaquants :
Sergei Samsonov - Viktor Kozlov - Alekseï Kovalev (2')
Oleg Kvasha - Alekseï Yashin (2') - Dainius Zubrus (2')
Ilya Kolvachuk (2') - Pavel Datsyuk - Andrei Kovalenko (2')
Artem Chubarov - Aleksandr Frolov (5') - Maksim Afinogenov

Défenseurs :
Darius Kasparaitis (2') - Sergei Gonchar (2')
Vitaly Vishnevski - Oleg Tverdovsky
Aleksandr Khavanov - Anton Volchenkov

Gardien :
Ilya Bryzgalov (2')

Remplaçant : Maksim Sokolov (G).

Réservistes : Dmitri Afanasenkov, Aleksandr Ovechkin, Oleg Petrov, Dmitri Kalinin, Andreï Markov et Aleksandr Fomichev (G).

 

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