République Tchèque - Finlande (9 mai 2006)

 

Championnats du monde 2006, premier tour, groupe A.

Déjà d'une intensité exceptionnelle

Après leur nul contre la Lettonie, les Tchèques ne peuvent pas se permettre d'aborder la seconde phase avec un seul point au compteur, et ils partent à fond, aidés il faut le dire par une pénalité en zone offensive de Miettinen - qui en perdra sa place en première ligne - pour avoir chargé Michalek contre la bande. L'avantage numérique est converti par un superbe slap de Martin Erat, sur lequel Niitymäki n'a pas le temps de lever sa mitaine (1-0, 02'28"). Les Tchèques ne s'arrêtent pas là, ils remettent la pression : Jaroslav Hlinka prend son propre rebond, et au lieu de tirer à nouveau, il sert Jaroslav Balastik seul au second poteau (2-0 à 02'52"). On joue depuis moins de trois minutes et Erkka Westerlund est déjà obligé de demander son temps mort !

La Finlande compte sur sa qualité de patinage et des remontées de patinoire comme celle de Pirnes font passer le match dans une autre dimension. Car la République Tchèque répond sans attendre à cette vitesse par des mises en échec appuyées. L'intensité est à son comble quand Michalek part en prison pour coup de coude. La puissance de lancer de Mikko Lehtonen donne à Lasse Kukkonen, son collègue défenseur de Kärpät, un rebond juteux. Il prend intelligemment le gardien Hnilicka à contrepied de son déplacement (2-1, 08'19"). Cette pénalité était intercalée entre deux autres de Prorok et Hlavac, signes que les Tchèques ne maîtrisent pas encore les nouvelles consignes sur les accrochages, mais le jeu de puissance ne s'y est pas aussi bien installé.

Par contre, on se souvient que la première pénalité finlandaise avait fait mal. Attention donc à cette obstruction de Mäntylä qui envoie Erat percuter Niitymäki. Car ensuite, Jarkko Ruutu, le "grand ami" de toute la République Tchèque depuis sa charge sur Jagr aux JO, choisit mal son moment pour rejoindre la prison où il a ses habitudes. Malgré trente secondes de double supériorité numérique, les Tchèques ne trouvent pas les déviations recherchées, mais ils obtiennent bientôt une nouvelle pénalité, une obstruction de Lehtonen sur Bulis sans grand impact sur le jeu car loin de l'action qui avait avorté. Avec quarante-sept secondes de plus à cinq contre trois, c'est maintenant Alois Hadamczik qui utilise son temps mort pour donner ses consignes, mais Niitymäki ne lâche plus aucun rebond. Les coups de sifflet qui ont haché la fin de période (le dernier pour une obstruction de Skoula) ont eu le mérite de permettre à tout le monde de reprendre son souffle.

Les Finlandais reprennent le jeu en supériorité, mais ils sont aussi fébriles que quand ils étaient montés sur la glace pour la première fois. Ils se font curieusement coincer dans leur coin et Niitymäki, piégé loin de sa cage, doit même faire trébucher un attaquant. Les Tchèques installent encore leur jeu de puissance sans pouvoir aller au bout de leurs intentions. Même au retour à cinq, les Finlandais subissent et semblent peu à l'aise quand leurs adversaires forcent. Mais tout peut encore arriver. Pour preuve, même en infériorité (obstruction de Pirnes à 26'09"), Mikko Koivu part à la poursuite d'un palet, freine pour éviter le défenseur et délivre un centre du revers pour Jarkko Ruutu, qui se retrouve seul face à Hnilicka mais ne concrétise pas ce breakaway inattendu. La charge par derrière de Plekanec (2'+10' à 28'04") oblige Hadamczik à modifier ses lignes, mais Hentunen prend encore une pénalité stupide en zone offensive. Le palet rentre dans les filets de Niitymäki après le coup de sifflet. Les bleus sont quand même au bord de la rupture, et Saravo ceinture le toujours dangereux Martin Erat dans le slot. Mais là, c'est un Tchèque qui perd son sang-froid, avec un geste d'énervement malvenu de Lukas Krajicek sur Jarkko Ruutu (non, l'identité de la "victime" n'est pas une excuse).

Si la lucidité commence à faire défaut, c'est que la fatigue pèse sur les organismes, très sollicités par ces infériorités à répétition. Elle explique que le rythme du premier tiers ne puisse plus être soutenu, mais elle n'entrave pas la détermination de David Vyborny. Son entrée de zone n'est-elle pas vouée à l'échec quand l'étau de trois Finlandais se resserre ? On a tort de le croire. Le capitaine bleu Petteri Nummelin essaie de ramasser le palet, mais son alter ego blanc n'a pas fini son action : Vyborny regagne la rondelle et décale Jan Hlavac pour un but qui fait mal (3-1, 34'41"). Le travail de conservation de palet de Kallio provoque une dernière faute de Krajicek : les Tchèques terminent le tiers-temps à quatre, mais ils éreintent les Finlandais dans les coins.

La première ligne de jeu de puissance revient frais sur la glace. Les deux arrières s'y répartissent les rôles : le talentueux Petteri Nummelin est à la bleue pour servir des merveilles de tirs du poignet, et le robuste Aki-Petteri Berg est devant la cage pour imposer son gabarit. La combinaison des deux, cela donne le but de l'espoir sur une déviation (3-2, 40'30"). C'est aussi une douce revanche pour ces joueurs, car Berg, en difficulté, avait perdu pas mal de palets dans ce match. Nummelin a plus particulièrement une action à se faire pardonner, et il réalise encore une présence énorme en essayant de glisser le palet au poteau de Hnilicka, qui bloque bien sa jambière, puis en se repliant sur la contre-attaque pour récupérer le palet. On reparlera encore de lui...

Après l'accalmie de la deuxième période, le match est redevenu exceptionnel. La lutte est acharnée sur chaque palet, et aucune équipe ne veut céder dans ce défi total. La République Tchèque a confiance dans son système défensif et protège son territoire avec application, mais l'agressivité - dans le jeu - des Finlandais semble décupler à chaque minute. Ils ne veulent plus laisser sortir les Tchèques de leur zone, et cette détermination sans faille est finalement récompensée. Bien sûr, c'est le capitaine Petteri Nummelin qui propulse le palet égalisateur sous la transversale (3-3, 58'48"). La seule pénalité du troisième tiers arrive à trente-trois secondes de la fin quand Viuhkola retient Stefan devant la cage, mais les Finlandais tiennent à ce nul chèrement acquis qui équivaut à une victoire.

Était-ce réellement un simple match de premier tour d'un Mondial que certains considèrent "au rabais" ? Les deux équipes se sont livrées entièrement, sans le moindre calcul. Les réflexes défensifs d'une équipe tchèque techniquement très au point et physiquement présente dès le début du match n'ont pas suffi, balayés par la rage des Finlandais qui ont appliqué une formidable pression pour arracher ce point. L'affiche "européenne" de la soirée a largement dépassé en intensité le duel nord-américain joué au même moment. En a-t-on assez gardé sous le pied ? Sera-t-il possible aux Finlandais et aux Tchèques de hausser encore le rythme dans les matches à élimination directe, comme savent généralement le faire les Canadiens ?

Désignés joueurs du match : Tomas Kaberle pour la République Tchèque et Lasse Kukkonen pour la Finlande.

Compte-rendu signé Marc Branchu

 

Commentaires d'après-match

Alois Hadamczik (entraîneur de la République Tchèque) : "Un match d'une rare intensité dramatique. Son dénouement est décevant."

Milan Hnilicka (gardien de la République Tchèque) : "Je pensais qu'il n'y aurait rien de plus décevant dans ce championnat que le nul contre la Lettonie, mais la vie peut être vraiment décevante. Je ne comprends toujours pas comment ce troisième but a pu finir dans nos filets. Ce n'était pas le tir le plus difficile de ma carrière... J'espère que cette malchance ne durera pas au-delà du premier tour. Surtout que notre jeu ne connaît pas de sérieux problèmes, c'est évident. Nous allons nous améliorer match après match et montrer un hockey d'une qualité encore supérieure. Celui que nous avons joué il y a un an à Vienne. Je n'y avais joué qu'un seul match, certes, mais chacun se rappelle comment s'était terminé ce tournoi."

Tomas Kaberle (défenseur de la République Tchèque) : "Je pense que nous avons joué notre meilleur match pour l'instant, surtout notre entame. Je pense que nous devons jouer notre jeu et ne pas attendre de voir ce que l'adversaire va faire contre nous."

Erkka Westerlund (entraîneur de la Finlande) : "Nous avons rencontré un adversaire exceptionnellement fort qui a commencé son match très fort. Nous n'étions pas prêts à une telle pression initial, et ça, c'est peut-être ma fauite en tant qu'entraîneur. Je suis content que nous ayons arraché le nul mais nous avons pris trop de pénalités et la discipline de notre jeu était mauvaise dans les deux premières périodes."

Ville Peltonen (attaquant de la Finlande) : "Nous savons quelles sont les règles. Nous avons pris quelques pénalités stupides, toutes étaient justifiées. Nous avons su éviter les prisons dans la dernière période et nous avons mis des palets à la cage. C'est ce que nous devons faire pour réussir. C'est bien de revenir comme ça. Petteri est un joueur-clé pour notre équipe, il méritait ce but, car cela ne voulait pas rentrer pour lui jusqu'alors."

 

République Tchèque - Finlande 3-3 (2-1, 1-0, 0-2)

Mardi 9 mai 2006 à 20h15 à l'Arena Riga. 6758 spectateurs.

Arbitrage de Peter Jonak (SVK) assisté de Yuri Oskirko (RUS) et Andreï Vasko (BLR).

Pénalités : Rép. Tchèque 24' (8', 6'+10', 0'), Finlande 18' (8', 8', 2').

Tirs : Rép. Tchèque 27 (12, 9, 6), Finlande 24 (8, 3, 13).

Évolution du score :

1-0 à 02'28" : Erat assisté de Balastik (sup. num.)

2-0 à 02'52" : Balastik assisté de Hlinka

2-1 à 08'19" : Kukkonen assisté de Lehtonen et Hentunen (sup. num.)

3-1 à 34'41" : Hlavac assisté de Vyborny

3-2 à 40'30" : Berg assisté de Nummelin et Jokinen (sup. num.)

3-3 à 58'48" : Nummelin assisté de Jokinen

 

République Tchèque

Gardien : Milan Hnilicka.

Défenseurs : Tomas Kaberle (A) - Zbynek Michalek ; Jan Hejda - Lukas Krajicek ; Martin Skoula - Martin Richter.

Attaquants : Jan Hlavac - David Vyborny (C) - Martin Erat ; Jan Bulis - Tomas Plekanec - Jaroslav Bednar ; Ivo Prorok - Jaroslav Hlinka (A) - Jaroslav Balastik ; Tomas Rolinek - Patrik Stefan - Petr Tenkrat ; Petr Hubacek.

Remplaçants : Adam Svoboda (G), Zdenek Kutlak.

Finlande

Gardien : Antero Niitymäki.

Défenseurs : Aki-Petteri Berg - Petteri Nummelin (A) ; Mikko Lehtonen - Lasse Kukkonen ; Pekka Saravo - Tuukka Mäntylä ; Mikko Luoma.

Attaquants : Ville Peltonen (C) - Jussi Jokinen - Antti Miettinen [puis Hahl] ; Jukka Hentunen - Jari Viuhkola - Tomi Kallio ; Jarkko Ruutu (A) - Mikko Koivu - Tuomo Ruutu ; Riku Hahl [puis Miettinen] - Esa Pirnes - Jani Rita.

Remplaçants : Fredrik Norrena (G), Sean Bergenheim.

 

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