Amur Khabarovsk - Ak Bars Kazan (7 septembre 2006)

 

Match comptant pour la première journée de Superliga russe.

Et c'est le grand retour de la Superliga russe. Après un été orageux, fait de problèmes financiers (surtout pour les clubs moscovites qui ont vu l'abandon du Spartak), des crises de nerfs entre dirigeants fédéraux et clubs, et des rebondissements toutes les semaines.

Un grand retour qui débute, décalage horaire oblige, en Extrême-Orient, par un match des extrêmes, Amour Khabarovsk, classé dix-neuvième et dernier club au départ de la nouvelle saison, qui reçoit Ak bars Kazan, le champion en titre.

En fait, le déséquilibre n'est peut-être pas si grand. Car, si l'Amour n'est que le demi-finaliste perdant de la saison dernière en Vyschaïa Liga (la deuxième division professionnelle), le club de Sibérie orientale, repêché à la place de Perm, ne retrouve pas l'élite, deux ans après l'avoir quittée, dans de si mauvaises conditions. Tout d'abord, sa superbe patinoire ultra-moderne, la Platinium Arena, est archi-comble, avec 7 100 spectateurs, dont le gouverneur local, Viktor Ichaev, mais surtout, contrairement aux autres promus (Traktor Chelyabinsk et Krylia Sovietov Moscou), Khabarovsk s'est considérablement renforcé à l'intersaison.

Quatorze joueurs sont venus se perdre au bout du monde, à la frontière chinoise, à "deux pas" du Japon et de l'Océan Pacifique. Le nouveau gardien est, comme il se doit, étranger, il s'agit de l'ancien international slovaque du Slovan Bratistava, Pavol Rybar. En défense, le promu s'est renforcé de sept joueurs issus des "petits" clubs de Superliga, Alexeï Tézikov (Sibir Novossibirsk), Alexeï Danilov (Perm), Vitali Choulakov et l'international ukrainien Artiom Ostrouchko (feu Spartak Moscou), ou qui évoluaient l'an passé dans de clubs de haut de tableau de Vyschaïa Liga : Anton Oulianov (Krylia Sovietov Moscou), Sergueï Filine (Traktor Tchéliabinsk) et Artiom Anissimov (Léninogorsk). Même logique dans le recrutement en attaque avec Maxime Savossine (Sibir Novossibirsk), Stalinas Timakov (Vitiaz Podolsk-Tchekhov), Evgueni Pavlov (Spartak Moscou), Konstantin Kryssanov (SKA Saint-Pétersbourg), Alexandre Kryssanov (Dizel Penza) et l'ex-international estonien Toivo Suursoo, en provenance de Riga 2000 après être passé par le Danemark (Herning), déjà la Russie (les Krylia Soviétov, Nijnekamsk), la Finlande (TPS Turku), la Suède (Malmö et Luleå) et les États-Unis (AHL).

Une équipe sibérienne remaniée, renforcée et toujours aussi fortement encouragée, qui retrouve donc le sourire après deux années de purgatoire à l'échelon inférieur. Mais l'Amour reste cependant modeste face aux grosses cylindrées du championnat.

Et c'est le cas de la panthère des neiges tatare qui est la première à se taper la corvée de venir en Extrême-Orient et à subir le décalage horaire qui va avec...

Des champions de Russie qui ont été d'une discrétion absolue sur le marché des transferts. Huit nouveaux joueurs seulement, c'est d'un décevant pour Kazan qui les années précédentes alimentait la rubrique estivale des transferts. Bon, d'accord, les Tatars sont champions de Russie, donc a priori, ils ont déjà une équipe qui marche...

Dans les cages, il a fallu remplacer le Canadien Fred Brathwaite, reparti en LNH, à Atlanta. C'est un autre gardien estampillé LNH qui le remplace, le Finlandais Mika Noronen, ex-Vancouver et Buffalo. En défense, les Panthères ont été modestes dans leurs renforts : un international tchèque en provenance du Slavia de Prague, Jan Novak, et deux internationaux juniors, Mikhaïl Tiouliapkine (ex-Novokouznetsk) et Viatcheslav Bouravtchikov (ex-Khimik), encore un joueur formé aux Krylia Soviétov... En attaque, Kazan est allé cherché Dimitri Kazionov dans sa réserve naturelle, le Dynamo de Moscou, et également Igor Moussatov au Spartak Moscou, Alexandre Golovine au Sibir Novossibirsk et l'international ukrainien Andrïy Mikhnov au Lada Togliatti.

Voilà, vous connaissez tout le monde, on peut y aller... Ah non, il y a aussi la mascotte de l'Amour qui se promène dans les tribunes de la Platinium Arena. La logique aura voulu que la bêbête soit un tigre de l'amour, espèce protégée emblématique de la région. Eh bien non, c'est plus communément un gros nounours, comme "on" en rencontre fréquemment en Sibérie. Bon, ce n'est pas un ours brun, mais un ours noir...

Allez, c'est parti, et c'est parti avec un beau pressing d'entrée de la part des visiteurs. Il faut dire qu'au bout de quelques secondes seulement, les locaux sont déjà en infériorité numérique. Un mélange de tolérance zéro et de pression de débuter la saison à la maison quand on est promu face au champion en titre. Ak bars en profite donc pour faire du camping dans sa zone d'attaque, mais Pavol Rybar veille dans sa cage. C'est le début du show du gardien slovaque.

Il faut attendre la quatrième minute pour voir une première action chaude de Khabarovsk. Suite à une action confuse devant la cage, le palet est dégagé en direction de Tézikov. L'ancien défenseur des ligues mineures nord-américaines place un slap puissant, que Mika Noronen parvient à détourner. Cette action signale le réveil de l'Amour. Le public hurle à chaque attaque de ses favoris, et Alexeï Tézikov, encore lui, remet le couvert. Du coup, Ak bars fait des fautes et la pression sibérienne devient de plus en plus forte. C'est l'attaquant tatar Dimitri Oboukhov qui cause indirectement l'ouverture du score. Il prend 2'+2' en collant un marron à Alexeï Danilov, qui lui n'écope que de deux minutes pour avoir tiré après le coup de sifflet arbitral. Un tir ayant justifié le dit collage de marron.

L'Amour profite de cette nouvelle supériorité numérique pour ouvrir le score. Un but magnifique. Un "une-deux" entre Vladimir Artiouchine qui lance le palet sur la droite de la cage adverse à Andreï Kouznetsov. Ce dernier d'une superbe passe dans le dos remet à son coéquipier qui reprend sans contrôle : la flèche de l'Amour a transpercé le cœur de la panthère (1-0 à 11'19").

Et ce n'est pas terminé, deux minutes plus tard, sur la sirène d'une autre prison tatare, un tir en coin de Maxime Savossine, trouve une fois de plus le cadre : 2-0 et un champion qui souffre. Y compris dans sa chair, lorsque les bleus et blancs de Khabarovsk se "vengent" du "marron" d'Oboukhov en le séchant violemment contre la bande. Cela fait quand même cinq minutes d'infériorité pour Khabarovsk et cela permet à Kazan de ressortir la tête de l'eau. Sauf que Rybar poursuit son sans-faute dans les cages sibériennes. Le champion a du mal. Il bafouille son hockey. Témoin ces deux passes qui sortent de la zone lors de ce long powerplay. C'est peut-être le jet-lag ! C'est donc avec deux buts de retard que les champions en titre retournent aux vestiaires.

Une deuxième période beaucoup moins vivante que la première. L'Amour est timide et la Panthère des neiges pas encore réveillée, non pas de son hibernation mais de son "estivation", car les panthères qui jouent au hockey sommeillent l'été durant l'intersaison. Les locaux en blanc et bleu hésitent. Ils mènent 2-0 face au champion et se disent que s'ils se découvrent trop, ils risquent de prendre des coups de griffe mortels. Quand aux visiteurs verts et rouges, ils savent bien qu'ils doivent élever leur niveau de jeu pour recoller au score, mais ils n'y parviennent pas. Un mélange d'impréparation de début de saison et peut-être aussi de conséquences du décalage horaire. Quelle idée aussi de faire jouer Khabarovsk dans le championnat russe, y pourraient pas jouer au Japon ? Hein ? Y sont russes ? Bon d'accord...

Seules les pénalités arrivent à faire bouger les choses et à faire sortir le match de sa torpeur. Car l'Amour est vraiment prudent. Et comme Pavol Rybar tient la baraque dans les cages, les Sibériens se disent qu'ils peuvent tenter le hold-up en maintenant le score ainsi jusqu'au bout. Ils y parviennent ainsi jusqu'à la fin du tiers.

Mais cela ne va pas durer. Début de l'ultime période. Il reste encore quelques secondes de supériorité numérique à Kazan. Cela va suffire. Sur la sirène, le capitaine tatar Alexeï Morozov, resté au club à l'intersaison malgré des propositions de LNH, prend les choses en crosse. Le buteur international récupère du bout de la crosse un palet qui fuse devant la cage (2-1, 40'27"). Un but magnifique de la part du buteur-roi du dernier championnat.

L'Amour se dit peut-être que c'était une erreur d'avoir endormi le match au tiers précédent. Les Sibériens tentent alors de repartir de l'avant, mais ils ne le font pas avec assez de force (peut-être est-ce aussi les limites de cet effectif qui est lui aussi en rodage) et Mika Noronen est efficace dans les cages d'Ak bars.

Les spectateurs tremblent, mais le temps passe et ils disent que, peut-être, il y a des chances d'aller ainsi cahin-caha jusqu'à la sirène finale. Ben oui... sauf qu'il n'aurait pas fallu la prendre, cette prison à une trente de la fin ! Mika Noronen sort de sa cage et le duo terrible Morozov-Zinoviev ne laisse pas passer l'occase. Une action qui part de l'impeccable défenseur canadien, Raymond Giroux pour Alexeï Morozov qui tire. C'est renvoyé par Pavol Rybar... sur Sergueï Zinoviev (natif de Sibérie...) qui pousse le palet dans les cages. 2-2 à une minute de la fin. L'Amour est triste...

Et elle va l'être encore plus. Car ledit duo infernal remet le couvert en mort subite. Une passe rapide de Zinoviev sur l'aile gauche pour Morozov qui reprend instantanément : 2-3 !

Khabarovsk a du mal à se consoler du point pris. Les Sibériens pensaient en prendre trois. Mais le réalisme de Morozov et Zinoviev a fait le reste et sauvé le champion du faux-pas d'entrée de saison. En deux coups de cuiller à pot, juste avant la fin du match et en prolongation, les Tatars ont dit la messe (euh non, l'exemple est mal choisi...).

Le gouverneur de Khabarovsk peut bien remettre le prix du meilleur joueur du match à Pavol Rybar, cela ne redonne pas vraiment le sourire au gardien slovaque qui sent bien que son équipe est passée trop près de l'exploit, pour que l'Amour ne soit pas amer...

Étoiles du match : *** Aleksei Morozov (Kazan), ** Pavol Rybar (Khabarovsk), * Sergei Zinoviev (Kazan).

Compte-rendu signé Bruno Cadène

 

Commentaires d'après-match (dans Sport Express)

Andreï Sidorenko (entraîneur de Khabarovsk) : "L'adversaire était d'une classe supérieure. Mon équipe était nerveuse à l'idée d'affronter le champion, néanmoins elle a montré du bon hockey par moments. Je pense que nous progresserons à chaque match. Notre nouveau gardien Rybar n'a pas encore eu le temps de s'acclimater, néanmoins il a fait un bon match."

Zinetula Bilyaletdinov (entraîneur de Kazan) : "Il n'y a eu aucune forme de dédain que ce soit de notre part envers l'Amur. Nous nous sommes préparés sérieusement pour ce match. Mais nous avons raté la première période, et à 0-2 il est difficile de renverser un match. Je suis content que nous y soyons parvenus en prolongation mais j'ai des reproches à faire à nombre de joueurs."

 

Amur Khabarovsk - Ak bars Kazan 2-3 après prolongation (2-0, 0-0, 0-2, 0-1)

Jeudi 7 septembre 2006 à la Platinium Arena de Khabarovsk. 7 100 spectateurs.

Arbitrage de M. Ravodin (Moscou).

Pénalités : Khabarovsk 49', Kazan 18'.

Tirs au but : Khabarovsk 23 (9, 5, 7, 2), Kazan 20 (5, 7, 7, 1).

Évolution du score :

1-0 à 11'19" : Artyushin assisté de Kuznetsov (sup. num.)

2-0 à 12'35" : Savosin assisté de Shulakov et Krysanov (sup. num.)

2-1 à 40'27" : Morozov assisté de Giroux et Stepanov

2-2 à 58'58" : Zinoviev (sup. num.)

2-3 à 63'09" : Morozov assisté de Giroux et Zinoviev

 

Amur Khabarovsk

Gardien : Pavol Rybar.

Défenseurs : Aleksei Tezikov - Vitali Shulakov ; Artiom Ostrushko - Kirill Stepanov ; Aleksei Danilov - Artiom Anissimov.

Attaquants : Aleksandr Kryssanov - Andrei Kuznetsov - Toivo Suursoo ; Konstantin Baranov - Andrei Frolkin - Igor Kamaïev ; Maksim Savosin - Stanislav Timakov - Vladimir Artyushin ; Dmitri Uchaïkin - Stanislav Basov - Dmitri Leonov.

Remplaçant : Vitali Evdokimov (G).

Ak Bars Kazan

Gardien : Mika Noronen (sorti de 58'30" à 58'58").

Défenseurs : Raymond Giroux - Vitali Proshkin ; Ilya Nikulin - Andreï Pervyshin ; Igor Shadilov - Evgeni Ryasenski ; Jan Novak - Andrei Zubarev.

Attaquants : Danis Zapirov - Sergei Zinoviev - Aleksei Morozov (C) ; Vladimir Vorobiev - Aleksei Tereshchenko - Aleksandr Stepanov ; Andrei Mikhnov - Aleksei Badyukov - Dmitri Kazionov ; Dmitri Obukhov - Mikhaïl Zhukov - Igor Musatov.

Remplaçant : Aleksandr Eremenko (G).

 

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