Épinal - Chamonix (14 octobre 2006)
Match comptant pour la sixième journée de la Ligue Magnus.
Une tardive libération
Mal en points après six journées de championnat, les Dauphins d'Épinal n'ont plus guère le choix s'ils veulent se relancer. Il leur faut à présent engranger sous peine de s'engluer dans les eaux troubles du bas de classement, un lieu sordide où l'ICE n'envisage assurément pas de faire de vieux os. Le potentiel est pourtant bien présent, et les Vosgiens, plus consistants à l'arrière et plus sereins devant, ont des atouts et l'ont démontré en allant tenir tête à tous leurs adversaires en ce début d'exercice. Un constat d'autant plus frustrant que le succès n'est donc pas (encore) au rendez-vous. Au diable le régime, il est grand temps de mettre du beurre dans les épinards !
Pour ce faire, voilà Chamonix proposé en plat du jour. Une cuisine audacieuse où la fraîcheur de la jeunesse se marie avec l'expérience des cadres, étrangers pour la plupart. Une cuvée chamoniarde dans la plus pure tradition observée les années passées. Tantôt irrésistibles (comme face à Rouen voilà quelques semaines), tantôt insipides (il y a sept jours à peine sur la côte basque), les Chamois sont l'archétype même du trouble-fête. Face à la fougue annoncée de ces jeunes loups affamés, encadrés comme il se doit par des instructeurs chevronnés, l'ensemble spinalien devra jouer de patience et de rigueur.
Le piège est tendu. Reste aux hommes de Pierre-Yves Eisenring de l'éviter en gardant la tête froide et leurs nerfs au calme, péché mignon d'une équipe d'Épinal encore dans sa phase d'adaptation à la tolérance zéro.
"Cham" déjà dans les cordes
Soucieux de bien entamer la partie, les Spinaliens mettent d'entrée les points sur les "i" en pressant leurs visiteurs d'un soir. C'est donc sans grande surprise que l'ouverture lumineuse de Peter Listiak côté droit trouve un Luc Mazerolle qui, lancé dans l'axe, fait trembler le petit filet de Radek Lukes (1-0 à 01'26"). Lancés sur les meilleures bases possibles, les Vosgiens retombent pourtant dans leurs habituels travers disciplinaires mais parviennent néanmoins à contenir la vivacité des jeunes chamois en supériorité numérique. Les Chamoniards ont toutes les peines du monde à prendre l'arrière-garde bleue à défaut et se font logiquement prendre en contre-attaques. L'une d'entres elles, impulsée par le premier bloc spinalien, voit Michal Petrák hériter sur son flanc droit de la rondelle, accélérer puis s'amener jusque devant Radek Lukes. Cela engendre une vaste confusion dans le slot dont profite Plch pour marquer dare-dare (2-0 à 04'51"). Épinal a fait la différence en deux temps trois mouvements grâce à ses individualités fortes et prend clairement l'ascendant sur des Chamoniards visiblement sonnés et débordés à chaque accélération locale, comme sur ce break non concrétisé par Luc Mazerolle (05'12"). Autant dire que l'affaire semble mal engagée pour les Alpins...
D'autant plus mal partie que les Chamois se voient contraints à la faute pour maîtriser un tant soit peu la vista, par exemple, d'un Ján Plch de plus en plus impressionnant. Poussés en double désavantage numérique, les Chamois s'en tirent bien mais flanchent toujours devant la rapidité d'exécution slave. Ripostant comme ils le peuvent, comme sur ce bon contre de Clément Masson non cadré (08'27"), les Haut-Savoyards retrouvent progressivement leurs sensations en exploitant l'indiscipline récurrente des Dauphins. Les pénalités nivellent les débats mais rien n'y fait : Chamonix ne trouve pas de solutions face à une défense bien organisée et logiquement instigatrice de nombre de contres plus ou moins tranchants.
Tout semble donc aller au mieux pour Épinal mais voilà, un nouvel incident de jeu modifie quelque peu la donne. Auteur d'un coup d'épaule au visage d'Yven Sadoun près du rond central, Luc Mazerolle se voit lourdement sanctionné et invité à rejoindre définitivement les vestiaires (15'44"). Un coup dur, assurément, pour l'ICE qui perd ainsi sa dynamo québécoise, trahie là pour son engagement parfois un peu trop excessif. Et cela se ressent sur le moral de Dauphins commençant doucement à s'effriter et à s'user en infériorité numérique sous les coups de boutoirs adverses, malchanceux comme sur ce slap lointain de Rastislav Böhme sur le poteau (17e). Tout ceci n'altère pas un score pour l'heure favorable aux hôtes de Poissompré, qui profitent d'une dernière distribution de pensums, du côté adverse cette fois-ci, pour titiller Radek Lukes et sa garde rapprochée. Cette dernière poussée énergique pousse le portier tchèque à briller et se conclut sur un filet de Peter Slovák... une fraction de seconde hélas après le buzzer !
À jouer avec le feu...
Après une entame difficile, les Chamoniards s'enhardissent peu à peu sous l'effet du manque de discipline des hommes de Pierre-Yves Eisenring. Le technicien suisse avait pourtant prévenu ses troupes et même plusieurs fois grondé dans les colonnes d'un quotidien local contre le manque de vigilance de ses troupes à l'égard des nouveaux règlements. Force est de constater qu'il y a encore du pain sur la planche, d'autant que les Chamois eux, semblent plutôt à l'aise dans ce schéma de jeu. C'est qu'ils jouent bien le coup, les jeunes Alpins, avec même une certaine roublardise ! Mais s'il est un domaine où l'ICE n'a besoin d'aucune remontrances, c'est bien son secteur défensif où le métier conjugué de Bohácek, Slovák et Listiak bloque les initiatives d'un CHC peu inspiré. Quand ce n'est pas le casque du portier Stanislav Petrik, comme sur cette reprise à bout portant d'Yven Sadoun (23'11")... L'abnégation lorraine fait ainsi merveille et Épinal sort conforté de ces situations périlleuses. Revenue à égalité numérique, l'ICE retrouve sa position dominante et tombe alors dans une certaine routine. Dans la facilité même, comme en témoigne ce long passage à vide qui remettra Chamonix dans le match...
...on finit par se brûler !
Épinal se repose donc sur ses acquis et finit par se faire piéger, non sans quelques alertes préalables. Profitant d'un moment de latence, Richard Aimonetto punit l'apathie locale d'un joli travail conclu, après une bonne série de feintes derrière la cage, dans un trou de souris entre la botte de Petrik et son montant gauche (2-1 à 27'32"). C'était à l'évidence bien trop facile pour Épinal, et Chamonix s'escrime à exploiter l'indigence locale. Rassurés à l'arrière par un Radek Lukes intransigeant, les hommes du duo Charlet-Hrehorcak se montrent plus menaçants, à l'image d'Erwan Pain qui secoue le cocotier jusqu'à envoyer deux bleus sur le banc d'infamie (34'20"). Une situation unique pour le CHC qui arrose copieusement un Stanislav Petrik impeccable et bien secondé par son arête gauche sur une rafale de Peter Hrehorcak (34'27"). C'est dire si l'on met du cœur à l'ouvrage côté visiteur, mais rien ne semble y faire. Stanislav Petrik s'érige devant son filet, soutenu pour une défensive limitant les dégâts jusqu'à la pause, manquant de peu la passe de trois sur un bon mouvement en contre de la deuxième ligne et de l'intenable Guillaume Chassard (38e).
Mieux vaut tard que jamais
Le deuxième acte ne restera pas vraiment dans les mémoires et les Dauphins ont laissé quelques plumes dans l'affaire. Pourtant, il ne leur manquait pas grand-chose en début de match pour enfoncer le clou... Un soupçon de discipline peut-être car la fréquentation assidue du cachot rend les choses passablement plus compliquées. Ce diable de Richard Aimonetto, qui s'offre un nouveau break (43e), et ses troupes jouent crânement leurs chances pour égaliser. De manière bien trop brouillonne cependant, et sur une énième récupération spinalienne en zone défensive, le véloce Ján Simko fonce toutes voiles dehors sur le côté gauche avant de servir le caviar à Ján Plch qui, seul devant Lukes, prend son plus beau revers pour tripler la mise (3-1 à 45'38").
Épinal semble avoir fait le plus dur mais retombe une nouvelle fois dans son indiscipline coutumière. Là, c'est sûr, Eisenring n'est pas content, d'autant plus que son équipe n'économise pas son énergie pour contrecarrer les assauts, certes désordonnés, de la bande à Aimonetto. Laissant filer sa chance, à plus forte raison sur cette interception qui conduit Erwan Pain aux portes du paradis (54'29"), Chamonix semble proche de la rupture et finit par succomber sur un enchaînement magistral du trio Buda-Jelínek-Chassard en zone offensive. Un jeu à trois parachevé par le capitaine courage d'un tir limpide du poignet (4-1 à 55'17"). L'affaire est à présent classée et l'ICE, complètement libérée, déroule tout en laissant certains espaces dans sa zone défensive. Chamonix tente alors un ultime baroud d'honneur mais c'est bien Michal Petrák qui aura le dernier mot en reprenant du revers et dans le haut du filet une passe de Ján Simko venue du côté opposé (5-1 à 59'46"). La pierre finale d'un succès finalement plus long à se dessiner que prévu !
Pénible !
L'ICE aime décidément se compliquer la vie. Alors que tout semblait réuni pour une victoire confortable face à des Chamoniards dépassés par les évènements, Épinal est une nouvelle fois tombé dans le piège de la tolérance zéro. Sanctionnés plus qu'à leur tour, les Lorrains se sont ainsi fait des frayeurs inutiles, allant même jusqu'à déjouer en milieu de match. Fort heureusement, ils ont pu compter sur l'abattage coutumier de leurs cadres défensifs et d'un certain Guillaume Chassard, transfiguré depuis son replacement sur la deuxième ligne, où son potentiel, libéré de certaines contraintes, peut à présent pleinement s'exprimer. La sortie en début de partie de Luc Mazerolle a perturbé l'organigramme mais l'ICE, à défaut d'être sage comme une image, aura su faire la différence en fin de match.
Le score final est large mais malgré tout révélateur du niveau réel des deux équipes car les Chamois n'en menaient pas large après cinq minutes de jeu. Les infractions spinaliennes sont donc tombées à pic pour eux, bien qu'entre temps, la sortie d'Aram Kevorkian en milieu de match et le forfait initial du Suédois Tobias Granath ait contrarié leurs desseins. Les Chamois, volontaires mais limités, n'ont jamais vraiment trouvé leurs repères en attaque et se sont brisé les reins sur une défense regroupée et un Stanislav Petrik au meilleur de sa forme. Le capitaine Richard Aimonetto, véritable âme de l'équipe, fut l'un des plus actifs dans le jeu.
Profitant d'un rythme ralenti par la débauche de punitions, Chamonix a donné du fil à retordre à Épinal, qui est finalement parvenu, non sans mal, à s'adjuger la mise. C'est bien-là l'essentiel et ce match, comme tant d'autres depuis l'instauration de la tolérance zéro, ne restera assurément pas dans les annales. Un derby régional attend ces deux équipes le week-end prochain. Ce sera Saint-Gervais/Megève pour l'un et surtout des retrouvailles épicées avec le grand rival dijonnais pour l'autre. Ressuscités d'entre les morts, les Ducs viennent de mortifier Villard (5-3) puis Strasbourg (5-2) et songent sans nul doute à réitérer cela dans l'autre derby de l'est. Un derby Dijon-Épinal qui se voudra, comme la tradition l'exige, rugueux à souhait...
Compte-rendu signé Jérémie Dubief
Épinal - Chamonix 5-1 (2-0, 0-1, 3-0)
Samedi 14 octobre 2006 à 20h15 la patinoire de Poissompré. 908 spectateurs.
Arbitrage de Stéphane Rousselin assisté de Savice Fabre et Jérémy Rauline.
Pénalités : Épinal 53' (10'+25', 8', 10'), Chamonix 30' (10', 4', 6'+10').
Évolution du score :
1-0 à 01'26" : Mazerolle assisté de Listiak
2-0 à 04'51" : Plch
2-1 à 27'32" : Aimonetto
3-1 à 45'38" : Plch assisté de Simko (inf. num.)
4-1 à 55'17" : Chassard assisté de Jelínek et Buda (sup. num.)
5-1 à 59'46" : Petrák assisté de Simko
Épinal
Gardien : Stanislav Petrik.
Défenseurs : Jan Bohácek - Radoslav Regenda ; Peter Slovák - Peter Listiak ; Borislav Ilic - Peter Strapatý.
Attaquants : Ján Simko - Michal Petrák - Ján Plch (A) ; Luc Mazerolle [puis Guillaume Papelier] - Milan Buda - Guillaume Chassard (C) ; Lionel Simon - Anthony Maurice - Tomás Jelínek.
Remplaçants : Franck Constantin (G), Djamel Zitouni, Sébastien Geoffroy, Kevin Benchabane.
Chamonix
Gardien : Radek Lukes.
Défenseurs : Rastislav Böhme - Peter Hrehorcak ; Martin Toms - Vivien Renson ; Anders Torgersson - Maxime Claret-Tournier.
Attaquants : Alexandre Audibert - Richard Aimonetto (C) - Yven Sadoun ; Erwan Pain (A) - Clément Masson - Aram Kevorkian (A) [puis Mathieu Seguy] ; Kevin Maresca - Emil Tobiasson-Harris - Julien Lebey.
Remplaçants : Andy Foliot (G), Brice Peythieu. Absent : Tobias Granath (genou).