Épinal - Dijon (6 janvier 2007)

 

Match comptant pour la dix-neuvième journée de la Ligue Magnus 2006-2007.

À l'est, rien de nouveau

Le dernier trimestre de 2006 l'a démontré : rien ne vaut son petit "chez soi". C'est donc là que les Dauphins se sentent le mieux et restent sur plusieurs prestations de choix. C'est en revanche plus difficile à l'extérieur et les légionnaires de Pierre-Yves Eisenring cumulent, en championnat, les revers frustrants. Dernier en date à Chamonix (4-5) où l'usure, aussi bien morale que physique, se sera cruellement fait sentir. Notamment chez un Stanislav Petrik fourbu par la répétition des matchs en décembre.

Ce ballottage défavorable pour la huitième place n'est néanmoins pas le point le plus préoccupant du côté de la Cité des Images où le technicien suisse a suscité la controverse lors d'un récent entretien accordé au quotidien romand Le Matin. On le savait frustré des défaites accordées in extremis, de l'arbitrage hexagonal, voire du manque de profondeur de son contingent. On le sait désormais pressé de regagner sa riche contrée. Là où tout est plus pro et où l'intégration des jeunes se fait plus naturellement. Car dans la Cité des Images, Eisenring n'a rien de tout cela et aura eu le mérite d'appuyer là où ça fait mal pour tenter de provoquer une certaine prise de conscience.

Malgré tout, la situation actuelle des Spinaliens est loin de paraître aussi délicate que celle de leurs rivaux dijonnais. Les Ducs, contraints de jouer leur survie à chaque match par la faute de cette fameuse sanction fédérale, doivent faire avec une pression de tous les instants. Car, sans cette pénalité, les hommes de Daniel Maric n'en seraient pas là... Les voilà donc contraints de poursuivre leur course à handicap, retrouvant leurs sensations pour titiller un ou deux "gros" de temps en temps. Ce n'est en revanche pas la même musique face à leurs opposants directs au maintien et la récente raclée villardienne (3-11) ne fait qu'affirmer cet état de fait. Là est tout le paradoxe des Bourguignons, jamais aussi à l'aise dans ce rôle d'outsider qui leur sied tant, comme la semaine passée devant des Strasbourgeois en baisse de régime (3-2). Pareil défi les attend ce soir, sur une grande glace de Poissompré qu'ils connaissent tant. Mais l'influence d'un Jan Plch exceptionnel le mois passé, combinée au retour attendu des deux meilleurs défenseurs locaux (Peter Slovak et Peter Listiak), pourrait stopper la malédiction spinalienne du nouvel an... et noircir davantage un ciel dijonnais déjà bien morne.

Faut pas gâcher !

Connaissant les tenants et les aboutissants de ce tournant de la saison, la légion spinalienne l'amorce avec le mors aux dents, décidée à rapidement marquer son territoire. La première lame de fond, impulsée par un Jan Simko des grands soirs, pousse sans tarder la défense bourguignonne à la faute (00'36"). Le siège s'installe aussitôt et Vladimir Hiadlovsky essuie avec un certain brio les premières rafales adverses. Passé ce coup de chaud, les Ducs tentent de reprendre du poil de la bête mais la vétusté de l'enceinte de Poissompré en décide autrement. Après la sonorisation et la table de marque, c'est une partie de l'éclairage qui passera de vie à trépas et mettra dans le noir une grosse partie de la zone dijonnaise (03'13")... Sitôt la réparation effectuée, Vladimir Hiadlovsky, imperturbable, voit les projecteurs se braquer sur sa personne après son arrêt de la mitaine sur une reprise à bout portant de Luc Mazerolle (03'20").

Les Ducs de Dijon, un brin approximatifs, souffrent déjà le martyr devant la vitesse d'exécution des Simko & co. Trop rapides, trop vifs, les trois compagnons du premier trio se régalent et croquent à pleine dents les espaces. Sans toutefois déflorer la marque, même si les grands compas de Jan Simko forcent l'énigmatique Hiadlovsky à sauver plusieurs fois sa patrie (5e). En fait, cette domination se traduit surtout lorsque la ligne de parade vosgienne pose un patin sur le glaçon. Autrement, les débats retombent dans une certaine monotonie même s'ils paraissent plus équilibrés.

Les hommes de Daniel Maric, font avant tout avec les moyens du bord et accusent un certain déficit technique, accentué par les présences de la troïka de Jan Plch. Insaisissable pour William Mouly (10'33"), le stratège spinalien crée une nouvelle supériorité numérique et pousse de nouveau le CPHD au bord de la rupture. Enfin par séquences seulement car dans les Bleus prolongent le sursis de la lanterne rouge par leur manque d'application. En bons outsiders qu'ils sont, les tenants de la Coupe de France jouent à fond le coup mais n'inquiètent pas outre mesure Stanislav Petrik, à l'image de cette échappée de Miroslav Kristin (13'53"). Ces atermoiements retardent ainsi une échéance inéluctable, et l'ouverture du score spinalienne, cousue de fil blanc, sera enfin effective sur un tir excentré de Jan Plch. Dans le cafouillage, Hiadlovsky l'apprécie mal et relâche de la mitaine (1-0 à 16'39"). Le plus dur semble fait pour Pierre-Yves Eisenring et sa bande. Reste à rapidement se mettre à l'abri.

Car les visiteurs, bien qu'assez brouillons, n'entendent pas lâcher aussi facilement. Cependant, les locaux ont plus de cordes à leur arc et profitent d'une présence en zone offensive pour s'octroyer un double avantage numérique. Là encore, les occasions franches se succèdent, notamment ces tentatives de déviation près du slot échouant toutes d'un tout petit rien. Le salut viendra plutôt de la ligne bleue, d'où le massif Jan Bohacek, bien décalé par Peter Listiak, décoche un lancer balayé perçant la garde de Hiadlovsky (2-0 à 22'34").

Cela sent le sapin du côté des Ducs, pour leur part incapables d'exploiter dans la foulée un double avantage numérique généreusement accordé. Car, hormis ce slap flottant d'Andrej Mrena cueilli d'une mitaine ferme (24'49"), Dijon ne bousculera pas outre mesure un triangle défensif souverain et rassuré par la présence d'un Stanislav Petrik "petrikéen". L'emblématique cerbère de Poissompré se dresse avec brio devant son filet et prend même une part active dans le lancement de la fusée Simko, prenant au vol un rebond de la balustrade pour s'en aller affronter Hiadlovsky en duel singulier. Et sans cogiter, Jan Simko s'en ira déjouer son ancien coéquipier des Diables Noirs d'un tir sec entre les bottes (3-0 à 26'39").

Relâchements coupables

Vladimir Hiadlovsky peut fulminer. Livré à lui-même sur ce coup, l'ex-Tourangeau constate également l'impuissance de ses coéquipiers, médiocres offensivement et frustrés de l'état de grâce vécu par Stanislav Petrik. Couvrant les errances de ses partenaires qui sombrent inexplicablement dans la médiocrité durant de longues minutes, le Slovaque multiplie les parades de classe face aux opportunistes avants dijonnais. À l'instar de cette échappé en infériorité de Stephen Dugas qu'il repousse du bouclier (29'48"). Jusqu'à manquer de se mettre le palet au fond des filets en pivotant devant sa cage (33'32") ! C'est bien connu, la chance sourie toujours aux grands gardiens. On peut également dire que Dijon manque clairement de réalisme en ne punissant pas les nombreux cadeaux offerts, notamment, par un Borislav Ilic incapable de réussir la plus basique des sorties de zone !

Voyant le match progressivement leur échapper, les Ducs resserrent la vis et retombent dans leurs travers disciplinaires, donnant à leur hôte le bâton pour se faire battre. Certes, le danger reste soutenu lorsque Plch, Petrak et autres Simko se retrouvent dans les parages mais Épinal laisse décidément trop de munitions en contre-attaques. Ces palets perdus et autres mauvaises passes rythment ainsi ces dernières minutes et ce qui devait arriver arriva. Une énième interception enverra Stephen Dugas loin dans la zone adverse pour servir sur un plateau un Julien Aubry admirable de sang-froid pour ajuster Stanislav Petrik à bout portant (3-1 à 39'15"). À force de tendre des perches, l'ICE a partiellement relancé son rival...

Mais, soucieux de remédier au plus vite à la situation, les Spinaliens prennent sans tarder le chemin de l'offensive à l'image de cette montée de Michal Petrak et ce sauvetage digne d'un funambule de Vladimir Hiadlovsky devant Jan Simko (40'12"). La vitesse locale est ainsi sa meilleure force et les Ducs ne trouvent pas de parade efficace pour la contrer. Dépassés dans ce secteur du jeu, les hommes de Daniel Maric mettent un point d'honneur à ne rien lâcher et jouer à fond les duels, voire la carte du défi physique. Chaque palet se voit âprement disputé mais ce style engagé, surtout en ces temps de tolérance zéro, ne tardera pas à leur porter préjudice.

Le pire de leurs tourments réside néanmoins dans la supériorité intrinsèque des individualités spinaliennes, notamment du premier trio, amenant mille occasions de définitivement plier les débats. C'est sans compter sur la maladresse ou encore la vista de Hiadlovsky, malin sur cette reprise excentrée de Plch (44'31"). Ce pilonnage intensif, mais trop rarement ciblé, contraste avec l'impuissance dijonnaise lors son premier avantage numérique de la période. Plus appliqués en défensive et protégeant au mieux leur zone, les Dauphins ont ainsi une abondance de contres. Et, on le sait, abondance de contres ne nuit jamais. Enfin, sauf si on les rate... Car l'abattage constant de Stephen Dugas et de son duo fétiche Bochna-Kristin offrira une dernière chance au jeu de puissance visiteur, tentant par tous les moyens de forcer la serrure pétrikéenne. Slaps appuyés (Gillet, 52'27"), déviations et infiltrations, tout y passe mais rien n'y fait. Et pour couronner le tout, Erik Bochna se blessera peu après sur une action isolée et quittera la glace en boitant bien bas (53'46")...

Qui sème le vent récolte la tempête...

Cet "événement" sera l'élément déclencheur d'une fin de match tendue où les Bourguignons ne contiennent plus leur frustration. Nerveux à souhait, ils trouveront en Olivier Maltais un fameux exutoire. Volontiers provocateur, le Canadien symbolisera ces dernières minutes heurtées durant lesquelles le remuant Miroslav Kristin, en retard sur Michal Petrak, verra sa sanction assortie d'une méconduite (57'12")... La nervosité ducale, constamment punie par le trio arbitral, laissera ainsi le champ libre aux Dauphins et ces derniers, entre deux mouvements d'humeur, clôtureront ce match insipide sur une dernière action d'éclat. Un jeu en triangle et plus précisément un "tic-tac-toe" prenant tout le monde vitesse (y compris Hiadlovsky) et aboutissant sur un Mazerolle opportunément placé dans le slot pour conclure dans une cage vide (4-1 à 58'25"). Cette séquence limpide sera le dernier éclair de lucidité d'une partie se finissant en eau de boudin, entre provocations dijonnaises et agitation.

Certains membres du contingent dijonnais se sont même retrouvés impliqués, lors du retour aux vestiaires, dans divers incidents avec quelques tristes sires des tribunes, pas avares d'insultes et de crachats. Ainsi, Stephen Dugas écopera d'un rapport pour s'être frictionné avec un "supporter" un peu trop partisan. Quand rien ne va...

Un derby sans saveur

Au terme d'un triste derby de l'est, Épinal a logiquement eu le dernier mot sur des Dijonnais sans génie et assurément trop indisciplinés. Amoindris à l'arrière, les Bourguignons ont rapidement affiché leurs limites, se montrant incapables de hausser leur niveau pour jouer autre chose que les contres. Même en essayant de durcir le match, les Ducs n'ont jamais pu trouver le remède aux présences oppressantes de la ligne Simko-Petrak-Plch. Pour une fois efficace, Jan Simko fut une véritable casse-tête pour ses chiens de garde, trop souvent pris de vitesse par l'ailier supersonique. Le CPHD a dû se rendre à l'évidence. Ces Ducs-là n'ont plus tout à fait la même étoffe mais restent toujours aussi accrocheurs. Voire agressifs à l'instar de leur ailier des ligues mineures Olivier Maltais, excessivement rude et suspect dans son rendement.

Devant cet adversaire combatif, mais très limité, les Spinaliens ont longtemps cherché l'ouverture. Tout en gaspillant une quantité pharaonique d'occasions franches. Mais sitôt pourvus d'un matelas confortable à la mi-match, les Dauphins se sont fréquemment retrouvés en flagrant délit de suffisance. Sans toutefois tomber dans le piège de la provocation. Un piège qui se sera finalement retourné contre son instigateur, perdant-là ses nerfs en fin de match. Mais surtout son co-leader offensif Erik Bochna, touché au genou et, pire encore, ses dernières illusions...

La garnison de Daniel Maric pourra donc se mordre les doigts de n'avoir su exploiter les erreurs locales et, en ce sens, Stanislav Petrik aura remporté son duel avec son vis-à-vis Vladimir Hiadlovsky. Ce bon travail d'équipe des Dauphins se voit toutefois terni par la nouvelle blessure de Radoslav Regenda (à croire qu'il a le mauvais œil...) mais qu'importe, l'essentiel était de gagner. Et ce n'est pas Pierre-Yves Eisenring qui dira le contraire !

Compte-rendu signé Jérémie Dubief

 

Commentaires d'après-match (dans le Bien Public)

Guillaume Karrer (défenseur de Dijon) : "[Les arbitres] ne nous ont pas lâchés. Nous avons dû subir quatre ou cinq doubles infériorités durant la rencontre, c'est totalement incroyable. On s'est aperçu que nous traînions la patte et nous avons fini par nous réveiller mais c'était trop tard. Nous risquons de regretter toutes ces occasions perdues. Nous allons nous en sortir, j'en suis toujours persuadé, mais nous prenons le chemin le plus compliqué."

Stephen Dugas (attaquant de Dijon) : "On s'est fait injurier toute la soirée. Il a tenté de me frapper par-dessus le grillage [avec un drapeau], mais il ne m'a pas touché. J'ai immédiatement laissé tomber les gants et j'ai répondu par la crosse sans non plus l'atteindre."

 

Épinal - Dijon 4-1 (1-0,2-1-1-0)

Samedi 6 janvier 2007 à 20h15 à la patinoire de Poissompré. 1199 spectateurs.

Arbitrage de Didier Bocquet assisté de Mathieu Loos et Benjamin Gremion.

Pénalités : Épinal 10' (2', 4', 4'), Dijon 38' (4', 12', 22').

Évolution du score :

1-0 à 16'39" : Plch assisté de Slovak et Listiak

2-0 à 22'34" : Bohacek assisté de Listiak et Chassard (sup. num.)

3-0 à 26'39" : Simko assisté de Petrik

3-1 à 39'15" : Aubry assisté de S. Dugas (inf. num.)

4-1 à 58'25" : Mazerolle assisté de Buda et Listiak (double sup. num.)

 

Épinal

Gardien : Stanislav Petrik.

Défenseurs : Peter Listiak - Peter Slovak ; Radoslav Regenda [puis Borislav Ilic] - Jan Bohacek ; Lionel Simon.

Attaquants : Jan Simko - Michal Petrak - Jan Plch (A) ; Milan Buda - Luc Mazerolle - Guillaume Chassard (C) ; Tomas Jelinek - Anthony Maurice (A) - Guillaume Papelier.

Remplaçants : Franck Constantin (G), Kévin Benchabane, Antoine Mengin, Anthony Pernot. Absent : Peter Strapaty (côtes).

Dijon

Gardien : Vladimir Hiadlovsky.

Défenseurs : Andrej Mrena (C) - Guillaume Karrer (A) ; Aymeric Gillet - Juraj Senko.

Attaquants : William Mouly - Julien Aubry - Olivier Maltais ; Miroslav Kristin - Erik Bochna - Martin Jeannette ; Anthony Guttig - Stephen Dugas (A) - Peter Jasik.

Remplaçants : Fabien Chardon (G), Yassine Fahas. Absents : Antoine Amsellem (suspendu), Ladislav Gabris (bras), Kevin Dugas (cuisse).

 

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