Épinal - Angers (14 février 2007)

 

Finale de la Coupe de France 2007.

Le jour historique

Le premier grand rendez-vous lancé par la nouvelle Fédération Française de Hockey sur Glace n'était pas un pari sans risque. Le monde du hockey attendait tellement l'occasion de se rassembler et de prouver sa force que cette finale de Coupe de France à Bercy était trop belle. Mais la date disponible, le jour de la Saint-Valentin, et l'affiche-surprise, entre deux clubs supposés moins attracteurs, semblaient constituer autant d'obstacles. Ils n'en rendent le succès que plus flagrant. "Désolé chérie, mais le hockey passe avant tout", comme le proclamait une banderole décorée de petits cœurs déployée par un spectateur. Les observateurs, les journalistes, les dirigeants du POPB ont été bluffés par l'affluence enregistrée ce soir. Même les membres de la FFHG ont été estomaqués par le résultat de leur audace : 12 215 spectateurs, battant du même coup de mille personnes le record établi par les Volants dans les années 80 pour un match de hockey sur glace entre deux clubs français, sans évoquer les vingt mille spectateurs parfois comptabilisés dans l'ancien Vel d'Hiv il y a plus d'un demi-siècle.

Cette affluence, c'est la mobilisation de tout un sport, de tous les clubs qui ont organisé un déplacement, représentés ce soir par des joueurs, des bénévoles ou des supporters. Ils n'imaginaient pas que leur porte-drapeaux d'un jour seraient deux clubs qui n'ont jamais rien gagné, qui n'ont jamais remporté une seule médaille, même pas dans le hockey mineur. Deux clubs pour qui cette finale, déjà spéciale, représente forcément sans le moindre doute la date marquante de leur histoire. Angers et Épinal sont représentés équitablement par leurs supporters, chacun derrière un but, alors que les autres tribunes sont occupées par la foule majoritairement neutre qui a le sentiment de participer à un acte fondateur pour le renouveau du hockey français.

Qu'importe dès lors si le match lui-même n'a pas atteint des sommets, entre deux équipes évidemment rendues nerveuses par l'évènement et éprouvant des difficultés de patinage sur cette glace rarement utilisée. Angers domine territorialement mais ne parvient pas à déstabiliser une défense bien en place. Jan Bohacek en particulier, avec sa vitesse d'escargot, pose toujours sa coquille là où il faut. La meilleure occasion est même spinalienne à la sixième minute, quand Jan Simko arrive à déborder sur la droite et à centrer au second poteau pour Michal Petrak qui rate sa reprise.

Quand les Angevins essaient de forcer à deux en fond de zone, c'est un des leurs, Guillaume Rodrigue, qui se laisse emporter et est pénalisé pour cinglage (11'27"). Un numéro technique de Jan Plch provoque une autre faute de Jodoin et donne vingt-quatre secondes à 5 contre 3 à Épinal. On retrouve encore un Plch sautillant près de la cage, puis à la réception d'une passe en haut de l'enclave, mais Simon Lacroix se couche bien. Ce n'est pas fini. Milan Buda entre en zone sur la droite et contourne Drozdz qui commet un tour un cinglage. Cela fait trente-cinq secondes de plus à trois pour les Angevins, mais ceux-ci résistent à un jeu de puissance spinalien en panne. Ces cinq minutes complètes d'avantage numérique pour les Dauphins se terminent sans le moindre but. Assurément le premier tournant du match.

Le suivant a lieu au retour sur la glace. Après une reprise de Chassard arrêtée par Koivula, la contre-attaque est lancée par Mickaël Bardet. Une passe parfaite de Juho Jokinen autour du défenseur décale Radek Hovora seul au centre (1-0, 21'47"). À peine trente secondes plus tard, Tessier retient Petrak. Avec cette supériorité numérique, Épinal a donc tout de suite l'occasion d'égaliser, et une bonne passe de Strapaty dans l'intervalle ouvre la voie à Mazerolle qui bute sur le gardien angevin.

Quand la balance des prisons penche en faveur d'Angers, à quatre contre trois, Plch sait non seulement contrer mais surtout plonger pour que soit sifflée une obstruction d'Irani, dépité par cette décision. Avec trois joueurs de chaque côté sur la glace, que Bercy paraît grand ! Étonnant moment choisi de la part d'Eisenring pour mettre son septième arrière Ilic sur la glace. Il faut dire Regenda, qui a cassé sa lame de patin, a quitté ses coéquipiers. Mais c'est au retour au complet, peu après une première frayeur de Koivula sur un rebond, qu'Épinal revient à parité sur un lancer masqué de Jan Bohacek (1-1, 30'35").

L'espoir vosgien ne dure pas. Slovak part en prison, et Juho Jokinen vient couper du bout de la palette un centre de la droite de Martin Lacroix pour mettre le palet dans un trou de souris au premier poteau (2-1, 32'26"). Les Spinaliens s'adonnent alors de nouveau à quelques simulations pour faire siffler des pénalités adverses, mais cela ne leur réussit pas. Le seul gardien menacé est Stanislav Petrik, qui se fait prendre le palet par Hovora alors qu'il est sorti de sa cage. Puis à la dernière minute du tiers-temps, toujours en infériorité, c'est Rodrigue qui part en contre. Il évite bien le défenseur mais ne cadre pas son tir. Cependant Listiak a commis une obstruction sur Bellemare sur cette action. On joue maintenant à quatre contre quatre, et Jean-François Jodoin place le tir fatal du haut de l'enclave juste avant de rentrer aux vestiaires (3-1, 39'23").

Le match est plié et le troisième tiers-temps est à sens unique. Une obstruction de Simon sur Baluch permet aux Angevins de mettre la pression d'entrée sur Petrik avec quatre tirs, souvent sur déviation. Épinal ne peut plus faire illusion, et ses sorties de zone déjà difficiles sont maintenant aux oubliettes. Certains défenseurs comme Slovak atteignent franchement le point de rupture. Mais c'est la paire Listiak-Bohacek qui ne fait pas son travail - au grand dam de leur centre Petrak - quand Tomas Baluch, laissé absolument seul devant la cage, reçoit une passe du coin de Jodoin et ne fait qu'une bouchée de Petrik à bout portant (4-1, 47'40"). Il y a une vague occasion vosgienne : Petrak reçoit un centre de Plch dans l'enclave, mais il ne peut se défaire de Lahesalu. Seule une dernière supériorité numérique permet à Épinal d'attaquer un peu, pour l'honneur.

Le résultat de la finale a paru de plus en plus logique au fil des minutes. L'équipe la plus solide l'a emporté. Angers s'est révélé supérieur dans tous les domaines même si Épinal regrettera de ne pas avoir su se transcender pour cet évènement, livrant au contraire unanimement jugé médiocre par tous les observateurs vosgiens. Mais sous la pluie - le déluge plutôt - de ballons de baudruche, c'est surtout à une fête que l'on vient d'assister. Et les supporters des deux camps, qui s'applaudissent mutuellement lorsque le speaker salue les uns puis les autres, l'ont bien compris. Ils ont participé à une soirée dont on se souviendra, même quand on aura oublié les détails du match.

Désigné meilleur joueur de la finale : Simon Lacroix (Angers).

Compte-rendu signé Marc Branchu

 

Commentaires d'après-match

Martin Lacroix (attaquant d'Angers) : "C'était un match important, par le fait même de gagner la première finale à Bercy, à guichets fermés, avec une foule en délire. [...] Quand je monte sur une patinoire, je me sens très jeune émotionnellement. Je suis très impliqué. C'est la force de caractère de tous les joueurs qui a fait la différence."

Jonathan Bellemare (attaquant d'Angers) : "Tout le monde a travaillé fort pour ça et tout le monde la mérite. C'est une victoire de groupe. Personnellement, on n'a pas produit offensivement, mais on a joué contre la ligne à Plch et ils n'ont pas marqué. Vu qu'on avait pris le devants, nous avons donc fait notre travail. Comme la glace était très mauvaise, le jeu était moins clean, avec plus de batailles pour le palet. On savait que si on gagnait ces batailles-là, on aurait fait l'essentiel. Ça fait quinze minutes que je crie sur la glace, j'ai l'air tranquille là, mais je me réserve pour les vestiaires... et pour le bar ce soir."

François Dusseau (entraîneur d'Angers) : "Ça s'est joué à pas grand-chose. Nous avons fait un premier tiers moyen, nous étions un peu mieux au deuxième et nous étions plus conquérants au troisième. Même si ce n'était pas une super finale, je suis content que cette finale ait été Épinal-Angers. Beaucoup de clubs ont manqué de respect à ces équipes-là, elles ont travaillé pour en arriver là et elles ont rempli Bercy. Cela nous permettra d'aller voir la mairie pour faire un projet sur le long terme. Pour l'instant, on a 1300 places et de petits problèmes de vestiaires..."

Mickaël Juret (président de l'ASGA) : "C'est le hasard qui fait que ça arrive au bon moment au début de ma présidence, mais c'est la récompense pour toutes les équipes qui se sont succédé depuis 25 ans. Je souhaite que ce soit le début d'un cycle. On a pris du retard sur la prochaine saison, on était focalisé sur cette finale, mais dès demain on se remet à bosser."

Luc Mazerolle (attaquant d'Épinal) : "On n'a pas su gérer le match comme on l'aurait voulu. On a battu de grandes équipes pour venir ici et je suis déçu de notre performance. Il y a de la déception, de la frustration. Nous n'avons pas su mettre notre jeu en place, nous étions sur les talons, nous n'avons pas patiné. Ils ont été solides, ils nous ont frappés, ce qu'on n'a pas fait du tout du match. On a des joueurs de différentes nations qui ont déjà joué devant des grandes foules, le problème n'était pas l'amphithéâtre. C'est une question de mental, nous étions crispés."

 

Angers - Épinal 4-1 (0-0, 3-1, 1-0)

Mercredi 14 février 2007 à 20h30 au Palais Olympique de Paris-Bercy. 12215 spectateurs.

Arbitrage de Didier Bocquet assisté de Damien Bliek et Savice Fabre.

Pénalités : Angers 20' (6', 10', 4'), Épinal 26' (10', 12', 4').

Tirs : Angers 31 (9, 11, 11), Épinal 20 (8, 8, 4).

Évolution du score :

1-0 à 21'47" : Hovora assisté de Jokinen et Bardet

1-1 à 30'35" : Bohacek

2-1 à 32'26" : Jokinen (sup. num.)

3-1 à 39'23" : Jodoin assisté de Jokinen et Baluch

4-1 à 47'40" : Baluch assisté de Jodoin et M. Lacroix

 

Épinal

Gardien : Stanislav Petrik.

Défenseurs : Jan Bohacek - Radoslav Regenda (sorti, lame cassée) ; Peter Slovak - Peter Listiak ; Peter Strapaty - Lionel Simon ; Borislav Ilic.

Attaquants : Jan Simko - Michal Petrak - Jan Plch (A) ; Milan Buda - Luc Mazerolle - Guillaume Chassard (C) ; Tomas Jelinek - Anthony Maurice (A) - Guillaume Papelier.

Remplaçants : Franck Constantin (G), Anthony Pernot, Kevin Benchabane, Sébastien Geoffroy.

Angers

Gardien : Ville Koivula.

Défenseurs : Michael Irani - Simon Lacroix ; Jean-François Jodoin (A) - Lauri Lahesalu ; Guillaume Drozdz - Patrik Bärgman.

Attaquants : Guillaume Rodrigue (A) - Jonathan Bellemare - Mickaël Tessier ; Julien Albert - Martin Lacroix (C) - Tomas Baluch ; Mickaël Bardet - Radek Hovora - Juho Jokinen.

Remplaçants : Florian Hardy (G), Nicolas Deshaies.

 

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