Russie - Canada (27 août 2007)

 

Premier match de la "super série" anniversaire, pour les moins de 20 ans.

Trente-cinq après, le Canada et la Russie sont toujours nostalgiques de la série du siècle. Pour faire revivre cette rivalité, les deux fédérations se sont mises d'accord pour relancer le concept, mais en moins de vingt ans.

Les deux équipes juniors s'affronteront donc pour une série de huit matches, quatre en Russie et quatre au Canada. Un petit événement pour le pays à la feuille d'érable, doté d'une importante couverture médiatique et de rappels au glorieux but de Paul Henderson à la dernière minute du 8e match de 1972... des résumés d'ailleurs proposés aux jeunes Canadiens lors de leur camp de préparation !

Après l'échec des séries Canada-Russie de ces dernières saisons, lors desquelles les Russes n'avaient envoyé au Canada que des équipes de second rang, c'est donc l'occasion de préparer le Mondial junior de cet hiver avec une revue d'effectif. D'un côté, la star Aleksei Cherepanov, de l'autre le prodige de 16 ans John Tavares : l'occasion de retrouver un hockey de haut niveau avant même le début de saison... tout en revivant, du moins côté canadien, un patriotisme sportif. La "Super Série" sera sans doute moins guerrière que celle de la guerre froide, mais on attend du beau spectacle en dépit de la blessure d'Angelo Esposito, le capitaine canadien.

Le coach Brent Sutter, invaincu en deux championnats du monde juniors avec le Canada, a été rappelé pour l'occasion et est considéré comme le meilleur spécialiste disponible. Son vis-à-vis Sergei Nemchinov, en revanche, a peu d'expérience, et aucune avec les juniors. Il a cependant semblé soigner la préparation en travaillant spécifiquement les points forts adverses (jeu physique dans les bandes et dans le slot) et en réalisant des fiches sur les particularités de chacun des joueurs canadiens.

Mais ce qui a inquiété le plus les Russes ces derniers jours, c'est d'être prêt à temps. Organiser la série en province est une bonne idée du point de vue de l'ambiance, par contraste avec la série originelle, mais la faire débuter dans une patinoire toute neuve était un pari osé. On s'est agité jusqu'au tout dernier moment et certains travaux ont été finis juste à temps. Le plus important, c'est quand même la glace, qui a été définitivement prête... hier. Et comme il fait 34°C actuellement à Ufa, la crainte russe est que les Canadiens se plaignent de la mollesse de la glace, ce qu'ils ne feront pas trop.

La Russie première en action

Les Russes tentent de s'installer d'entrée et obtiennent immédiatement une supériorité sur un contact de Luke Schenn devant l'enclave. La ligne de la star Cherepanov est donc déjà lancée mais Egor Averin manque son tir. Le physique des Canadiens vient bloquer les tirs et leur permet de se dégager. Aleksandrov sur une mise au jeu teste la déviation d'Anisimov, mais Steve Mason sauve de justesse. Le gardien des Knights de London sort ensuite un nouveau tir lointain. Le Canada, de retour à cinq, riposte par Boychuk, mais une nouvelle pénalité est appelée sur l'échec-avant. La défense s'en sort, grâce au travail de Legein qui provoque à son tour une pénalité.

À quatre contre quatre, Godfrey puis Giroux testent le gardien russe. C'est ensuite une supériorité pendant 1'40" sans pour autant que le palet ne soit bien contrôlé : aucune occasion ne ressort. Et sur le contre, la Russie ouvre la marque. À deux contre trois, Ilya Kablukov repique dans l'axe et, après avoir brièvement perdu son palet, lance en entrée de cercle et profite de l'écran de Vyacheslav Solodukhin pour surprendre Mason (1-0). Le but est finalement attribué à une déviation de ce dernier.

Les hommes de Sutter sont sonnés à l'image d'une grosse charge sur Tavares, pendant que Turris sonne la révolte du revers. Malgré tout le jeu nord-américain est confus et brouillon, offrant un 2 contre 1 à Cherepanov pour un arrêt de Mason. Celui-ci s'en sort ensuite de justesse lorsque deux attaquants profitent d'un mauvais jeu à la bleue pour débouler seuls. Maïorov manque le duel et personne ne prend le rebond. Ce sont quand même deux minutes qui sont distribuées, et Aleksandr Ryabev ne tarde à pas à doubler la mise sur un tir lointain. Lancé dans la neutre plein axe au milieu de quatre Canadiens, il envoie un petit tir que Mason ne fait que dévier du gant pour un but facile (2-0).

Le Canada dans les cordes ?

La réaction canadienne est enfin présente avec un bon mouvement mené par Giroux et un tir de la bleue de Pyett. Ce sont deux minutes pour Zubov sur l'action. Les rouges, portés par leur public, se montrent agressifs sur le porteur alors que Doughty mène le jeu de puissance. Malheureusement Perron est puni pour avoir mis la pression sur le gardien. C'est plus ou moins la panique chez les arrières canadiens, pas rassurés par Mason qui laisse un gros rebond sur Cherepanov. Fébriles, ils parviennent à lancer Gillies en contre pour un petit tir, mais le jeu reste surtout cantonné chez les blancs. Le jeu de puissance canadien est complètement muselé et peine à aligner deux passes... jusqu'à une contre-attaque cinglante. À trois contre deux, Brandon Sutter percute dans l'axe, décale Stefan Legein à droite en entrée de zone pour un tir puissant entre les jambes (2-1). Un but complètement contre le cours du jeu mais qui renverse la situation. Fébriles à leur tour, les Rouges perdent un palet bête et Turris s'infiltre pour lancer un 2 contre 0. Il obtient ainsi un tir de pénalité lorsqu'il est accroché par Zubov. Turris s'avance, feinte et ajuste Semion Varlamov entre les jambières pour une égalisation ultra rapide (2-2). Le jeu reste quand même russe, avec une défense canadienne qui se jette en retard sur le palet. Le Canada a subi le jeu dans ce premier tiers-temps, y compris physiquement. Globalement les deux équipes peinent à maîtriser le palet sur cette glace de dernière minute...

Démarrage rapide

La deuxième période débute sur les chapeaux de roues. Les petits gabarits travaillent fort pour le Canada. Giroux et Gagner sont bloqués dans l'axe mais Brad Marchand surgit avec le palet, patiente et ajuste Varlamov au sol du revers (2-3). Puis, le duo Boychuk-Emmerton est aux avant-postes pour une longue séquence. Les Russes réagissent et vont dominer la suite. Ce sont Ryabev et Anisimov qui ratent le coche en travaillant autour du but, volés par un Mason spectaculaire. On enchaîne avec une pénalité de Tavares, sur laquelle Brandon Sutter démontre ses qualités défensives pour gêner la circulation du palet. L'occasion est toutefois très nette pour Glovatsky, à la récupération d'un palet détourné, mais il ne parvient pas à exploiter une cage ouverte à cause du retour de Giroux. L'infériorité se poursuit dans la foulée avec un retard de jeu, Alzner ayant gelé le palet volontairement devant l'enclave... Cependant la défense est mieux en place autour de Doughty. Ce sont même les Russes qui se retrouvent à un de moins lorsque Voinov est puni sur le contre. Le Canada commence à trouver son jeu. Giroux puis surtout Gagner se heurtent à un Varlamov au sommet de son art. Le jeu est de plus en plus serré et les duels féroces, avec moins d'occasions.

À la mi-match, sur une présence de Cherepanov, Legein est sanctionné pour coup de coude. Le jeu de puissance s'installe, avec un Glovatsky stoppé en deux temps par Mason. Mais les arbitres ne laissent rien passer : Ellerby rejoint le banc à son tour et offre un cinq contre trois pendant plus d'une minute. Vyacheslav Voinov, le plus jeune Russe mais sans doute le défenseur au plus gros temps de jeu, s'essaie tout comme Cherepanov, mais les hommes de Brent Sutter sauvent ce passage difficile après un gros travail défensif de Schenn. Le jeu ne quitte plus la zone des blancs qui peinent même à jouer en contre. La défense en revanche ne laisse aucun espace à Aleksei Cherepanov, muselé. Un peu trop parfois puisque Schenn est puni. L'occasion pour Legein de rater un 2 contre 1 en désavantage numérique. Le contrôle tactique est bel et bien canadien, à défaut de maîtriser la rondelle... les Russes se heurtent à un rideau bien en place. Et dans ces cas-là, le piège est toujours efficace. Sur l'une des rares présences offensives des blancs, Sam Gagner fait tourner la défense, surprend son défenseur derrière le but et trompe Varlamov en sortant ligne de fond (2-4). La deuxième période s'achève peu après.

Verrouillage

Varlamov doit s'employer rapidement devant Legein, sur un travail de Lucic, pour éviter la déroute. Les Rouges ne parviennent plus à vaincre les défenseurs en un contre un et le temps défile. Tactiquement, Brent Sutter, qui joue avec ses lignes au gré des oppositions, étouffe l'adversaire par un gros travail physique de ses lignes d'échec. Le Canada contrôle le jeu, garde le palet le long des balustrades, domine aux mises au jeu. Mason passe un début de tiers-temps tranquille... La défense se charge de rappeler sa présence aux attaquants, à l'image d'Alzner pris par la patrouille sur un contact rugueux. Anisimov inquiète Mason du cercle droit, avant de trouver la mitaine d'un tir ligne de fond. L'inquiétude survient sur une charge de Turris envers Glovatsky, mais ce dernier a glissé au sol et le Canadien percute la bande tête la première : pénalité distribuée sur l'action pour annuler le jeu de puissance russe. Immédiatement Godfrey sollicite Varlamov sur un lancer de la bleue sur la mise au jeu. Derrière, on cherche surtout à jouer l'horloge.

Du coup, il faut attendre un lancer de Kulikov pour relancer un peu la partie, puis une deuxième occasion de ce même joueur suite à un slalom de Cherepanov. Lucic prend deux minutes sur l'action. Mais les Russes ne passent pas, les joueurs de Sutter bloquant toutes les tentatives avant même Mason. L'inefficacité russe en avantage numérique se voit offrir une occasion de rachat avec une nouvelle pénalité d'Alzner pour un cinq contre trois, séquence préparée par Brent Sutter avec un temps mort... avant que son fils Brandon ne bataille ferme pour dégager son camp ! Mason fait son travail sur des tirs lointains de Voinov, Schenn bloquant les autres tirs. Sergei Nemchinov commence à manquer de solutions, changeant ses lignes sans plus de réussite. Les contres canadiens sont toujours dangereux, à l'image d'un 3 contre 2 mené par Boychuk, pendant que de l'autre côté les Russes sont cantonnés aux extérieurs, sans passer. Même Cherepanov ne passe pas face à Mason, gêné par... Tavares en personne ! Le public est de moins en moins bruyant... Même la pénalité contre Schenn, coupable d'une mise en échec jugée trop appuyée, ne suscite guère d'enthousiasme. Il est vrai qu'il ne reste qu'une minute : Varlamov sort pour un attaquant. Insuffisant, le Canada remporte la première manche 4-2.

Désigné joueur du match : Karl Alzner (Canada).

Compte-rendu signé Nicolas Leborgne

 

Commentaires d'après-match

Sergei Nemchinov (entraîneur de la Russie) : "Le match a sûrement plu aux spectateurs. Les deux équipes ont montré du beau hockey à mon avis. Elles ont supporté la chaleur. Le plus dur était peut-être de rester sur le banc : regardez dans quel état nous sommes... Après cinq à sept minutes, la glace est devenue trop molle, et le palet n'a cessé de bondir. Je n'ai rien à reprocher aux joueurs : ils ont essayé, ils ont joué avec discipline et rigueur."

Semion Varlamov (gardien de la Russie) : "Le plus important est de ne pas perdre espoir. Ce n'est que le premier match, il en reste sept. Notre équipe a bien joué et a eu l'avantage au cours du match. Nous passions tranquillement la zone neutre et nous avons passé beaucoup de temps dans leur zone. Nous aurions dû gagner. Mais le gardien de l'équipe de Russie a fait un mauvais match, c'est aussi simple que ça ! Je ne suis pas perturbé, je veux oublier ça le plus vite possible. Pour être franc, j'en ai marre de perdre contre les Canadiens. Trois des buts sont ma faute. Je ne sais pas comment j'ai fait pour laisser passer le premier but entre mes jambières. C'était le moment critique. [...] La chaleur était terrible. Après l'échauffement, l'équipement restait mouillé même dans le séchoir. J'ai probablement perdu dix kilos."

Steve Mason (gardien du Canada) : "Je suis masqué sur le premier but, mais j'ai le deuxième sur la conscience. Merci à mes coéquipiers qui ont rapidement égalisé, cela m'a aidé. À la pause, notre entraîneur des gardiens Corey Hirsch m'a décrit un de ses premiers matches en NHL, où il a raté un papillon sur un tir du centre de la glace. De telles choses arrivent à chaque gardien, il faut y survivre. Ce n'est pas la première fois que je repousse 40 tirs, il faut juste gérer ses émotions, et ce n'est pas facile quand on joue dans un pays étranger avec le public contre soi. La lumière était très forte, et la température, très chaude depuis notre arrivée, l'était aussi dans l'arena, qui était pleine. Bien sûr, nous avons tous beaucoup sué."

Stefan Legein (attaquant du Canada) : "Nous espérions gagner ce match car nous étions fatigués à cause du trajet, du décalage horaire et du travail dur à l'entraînement. Se sortir de celui-ci est un soulagement et ça va donner le ton. Certaines pénalités auraient été sifflées partout, donc ce n'est pas comme si l'arbitrage avait été horrible. C'était un peu différent car on ne pouvait pas leur poser de questions, ils ne parlaient pas anglais."

 

Russie - Canada 2-4 (2-2, 0-2, 0-0)

Lundi 27 août 2007 à 15h00 à la Ufa Arena. 8500 spectateurs.

Arbitrage de Vyacheslav Bulanov et Aleksander Poliakov (RUS).

Tirs : Russie 42 (10, 15, 17), Canada 23 (7, 9, 7)

Pénalités : Russie 14' (6', 2', 6'), Canada 30' (10', 10', 10')

Évolution du score :

1-0 à 06'49" : Solodukhin assisté de Kablukov

2-0 à 09'50" : Ryabev assisté de Vasyunov (sup. num.)

2-1 à 15'47" : Legein assisté de Sutter

2-2 à 16'32" : Turris (tir de pénalité)

2-3 à 20'58' : Marchand assisté de Giroux et Gagner

2-4 à 38'50" : Gagner assisté de Marchand

 

Russie

Gardien : Semen Varlamov

Défenseurs : Pavel Doronin - Aleksei Grishin ; Igor Zubov - Evgeni Kurbatov ; Yuri Aleksandrov (C) - Vyacheslav Voinov ; Maksim Chudinov - Ivan Vishnevsky.

Attaquants : Aleksandr Ryabev - Artem Anisimov - Aleksandr Vasyunov ; Evgeni Dadonov - Egor Averin - Aleksandr Cherepanov ; Vyacheslav Solodukhin - Ilya Kablukov - Anton Glovatsky ; Konstantin Kulikov - Maksim Mayorov - Maksim Mamin.

Remplaçant : Sergei Bobrovsky (G). En réserve : Vadim Zhelobnyuk (G).

Canada

Gardien : Steve Mason.

Défenseurs : Keaton Ellerby - Thomas Hickey ; Luke Schenn - Josh Godfrey ; Karl Alzner - Drew Doughty ; Logan Pyett.

Attaquants : Colton Gillies - Kyle Turris - John Tavares ; Cory Emmerton - Zach Boychuk - Zach Hamill ; Stefan Legein - Brandon Sutter - Milan Lucic ; Sam Gagner - Brad Marchand - Claude Giroux ; David Perron.

Remplaçant : Jonathan Bernier (G). En réserve : Leland Irving (G), Ty Wishart, Dana Tyrell.

 

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