Suisse - Italie (14 janvier 1940)

 

Compte-rendu du match dans le Journal du Jura :

Premier tiers-temps

Dès le début, le "ni-Sturm" fait plusieurs belles descentes vers le but adverse, sans toutefois arriver à vaincre la merveilleuse défense des Azzurri. Ce sont sans doute les Suisses qui mènent le jeu et notre défense se trouve par moments sans travail. De temps à autre, notre gardien Hugo Muller sauve d'une manière très élégante pour parer à une ou à l'autre des avances subites de l'adversaire. Le gardien italien Gerosa, que nous connaissons déjà depuis l'année passée, doit faire des pieds et des mains pour parer au bombardement formidable des Suisses. Gerosa se tire toutefois merveilleusement de sa situation parfois périlleuse. Il faut convenir que la chance y est bien pour quelque chose, mais si les Suisses n'arrivent pas à marquer, malgré leur supériorité, c'est bien à cause du jeu formidable de Gerosa. Celui-ci est resté dans la forme qu'on admirait déjà en lui l'année passée et qui le rend parfois invincible.

Deuxième tiers-temps

Enfin, au bout de la deuxième minute, Bibi Torriani parvient à réaliser le premier but après une formidable descente endiablée et très bien soutenue par Pic et Hans Cattini. Ce premier succès semble encore ranimer nos joueurs, qui redoublent de vitesse et qui aboutissent à une cadence de jeu pour ainsi dire insurpassable, de sorte que Gerosa n'arrive plus à suivre. Une nouvelle avance foudroyante de Bibi et Pic bouleverse une fois de plus la défense italienne. Un beau tir de Bibi devenu possible par une passe très précise de Pic porte le score à 2-0 pour la Suisse.

Le jeu continue de son rythme endiablé. Les Italiens ne parviennent plus à dégager et tous les joueurs se trouvent maintenant devant le but italien. Même notre défense se hasarde en avant pour participer au bombardement du but adverse. Gerosa ne joue plus, il fait des merveilles ! À peu près toutes les deux secondes, il est forcé de parer, mais il tient bon ! La concentration de l'équipe suisse devant le but italien est toutefois très dangereuse. Plusieurs fois, les Azzurri, qui font d'immenses efforts, parviennent à se défaire de l'étreinte. Leurs descentes, rapidement arrêtées par la défense suisse qui vole à son poste, ne sont toutefois pas couronnées de succès. Cela ne veut pas dire qu'elles ne représentent aucun danger. Par deux fois, Mathys ne peut dégager qu'à la dernière seconde et avec peine, car souvent il est le seul qui reste devant le but suisse.

Troisième tiers-temps

Le jeu débute d'une manière assez égale. La supériorité suisse est beaucoup moins marquée et les deux équipes font de belles descentes sans toutefois arriver à un succès. Mais déjà les Suisses reprennent et se remettent à cerner les Azzurri. C'est spécialement le "ni-Sturm" qui se fait remarquer à plusieurs reprises. Les passes se font à merveille de Bibi à Pic, de nouveau à Bibi, à Hans à Pic, le tout à une vitesse foudroyante. Mais Gerosa est là, et il tient bon. Peu à peu les Italiens se font littéralement submerger et, à côté du gardien formidable, on ne remarque guère autre chose qu'une rapide intervention de Rossi. À la 12e minute, les Suisses changent leurs avants et peu après, une belle combinaison entre Heini Lohrer et Reat Ruedi permet à celui-ci de tirer avec succès, portant le score à 3-0 pour la Suisse.

Les Italiens semblent maintenant être résolus de réaliser au moins un but. Ils redoublent leurs efforts. Une de leurs avances, qui ne semble pas dangereuse au premier abord, permet à Venosta de parvenir jusque devant notre but. Une passe rapide à Federici s'ensuit et déjà celui-ci a réussi à battre Muller. On compte 3-1 pour la Suisse. Les joueurs semblent se contenter du résultat atteint. Des deux côtés, on se borne plus ou moins à la défense et le jeu perd sa vitesse. Les spectateurs reprennent haleine. En effet, le résultat correspond à la valeur des équipes, qui se sont fait remarquer les deux par leur beau jeu et par leur "fair play".

Commentaire de Squibbs dans l'Impartial :

Le match de hockey sur glace Suisse-Italie avait attiré quelque 10 000 spectateurs. Pourtant, l'on savait que l'équipe transalpine n'était pas en grande forme. C'est établir la vogue inouïe de ce sport si spectaculaire. Disons d'emblée que, comme nous le prévoyions, la Suisse n'a pas donné son maximum et que le score ne correspond pas - oh ! mais pas du tout ! - à ce que nos hommes auraient pu réaliser. La manière dont ils se sont conduits au cours du deuxième tiers-temps, ils auraient pu l'employer durant toute la partie. Nous ne sommes pas de ceux qui haussent les épaules et trouvent que tout est pour le mieux puisque nous avons gagné. Nous pensons que quelles que soient les contingences extérieures, on ne doit pas limiter une équipe dans ses possibilités. C'est de cette manière qu'on "casse" le moral de sportifs qui n'ont plus jamais, par la suite, cette liberté de mouvement qui correspond à l'enthousiasme et fait du sport le plus complet des délassements. Autrement redoutables que les Italiens, seront, cette saison, les Hongrois face auxquels nous nous trouverons le 4 février à Bâle. Souhaitons qu'en cette occurrence au moins - bien qu'il y aura aussi match retour, à Budapest cette fois - on laisse à nos représentants le droit de produire leur effort maximum. En seconde ligne d'attaque, une difficulté se présente. Nous avons deux centres, aux moyens très différents, mais qui sont nos hommes actuellement le mieux en forme : Heini Lohrer et Beat Ruedi. Il faut en déplacer un à l'aile, c'est navrant mais c'est ainsi ! Nous n'hésiterons pas à dire qu'on a choisi le mauvais. "Heini" perd du 80% à ce rôle ; Beat, au contraire, qui a appris avec les "ni" à être partout, peut s'en accommoder. Notre seconde ligne a fait, dimanche dernier, une exhibition très quelconque. Elle vaut, elle aussi, beaucoup mieux que cela ! Elle le prouvera sous peu.

Suisse - Italie 3-1 (0-0, 2-0, 1-1)
Dimanche 13 janvier 1940 à 15h05 au Dolder de Zurich. 12 000 spectateurs.
Arbitres : Emil Eberle (SUI) et Enrico Calcaterra (ITA).

Évolution du score :
1-0 à 22' : Torriani assisté de F. Cattini et H. Cattini
2-0 à 23' : Torriani assisté de F. Cattini
3-0 à 51' : Ruedi assisté de Lohrer
3-1 à 54' : Federici assisté de Venosta
 

Suisse

Attaquants :
Pic Cattini - Hans Cattini - Bibi Torriani
Herbert Kessler - Beat Ruedi - Heini Lohrer

Défenseurs :
Christian Badrutt - Rudolf Mathys (ou Otto Ernst)

Gardien :
Hugo Muller

Remplaçant : Elio Romagnoli (A).

Italie

Attaquants :
Camillo Mussi - Dino Innocenti - Egidio Bruciamonti
Aldo Federici - Luigi Venosta - Arnaldo Fabris

Défenseurs :
Carlo De Mazzeri - Franco Rossi

Gardien :
Augusto Gerosa

Remplaçants : Giannantonio Zopegni (G), Luigi Bestagini (A).

 

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