Article du Dauphiné Libéré (18 novembre 2000).

Patrick Rolland pas tout à fait remis de sa déchirure aux adducteurs, Arnaud Goetz, 20 ans, gardera pour la troisième fois d'affilée les buts grenoblois. Un remplacement naturel, mais un remplacement pas tout à fait comme les autres. Car le hockey est sans doute le sport collectif où le gardien joue le plus grand rôle. N'estime-t-on pas qu'un rempart est pour 50 % des résultats de son équipe ? Un pourcentage plus élevé encore si l'ultime rempart fait partie des hommes d'exception. << Cristobal Huet, c'est plus de 60 % de notre performance >> se plaisait à dire, en 98, Jaroslav Jagr. Mais tout joueur exposé étant susceptible de se blesser, ce même Huet déclara forfait en 1/4 de finale 98, et projeta sur le devant de la scène un petit jeune à peine majeur... Arnaud Goetz. L'offrande faite à Arnaud aurait pu, à ce niveau d'un championnat que les Brûleurs de Loups remporteront, lui faire perdre ses moyens, stopper net une carrière qui commençait tout juste. Car, remplacer à ce moment le gardien titulaire indéboulonnable, reviendrait à promouvoir un anonyme gregario de l'US Postal en chef d'équipe à la place de Lance Armstrong, sur le Tour de France, à la veille d'attaquer le Ventoux. Voyez le tableau... << J'ai pris cette promotion comme une chance, dit aujourd'hui Goetz, de prouver mon potentiel et de profiter de matchs à enjeu direct. En plus, on dispute trois morts subites victorieuses >>. Depuis, Arnaud Goetz a suivi le parcours de Grenoble à la trace. Numéro 2 en 99 (derrière Rautio), titulaire l'an dernier mais en division 3, à nouveau remplaçant cette saison, il suit une trajectoire étonnante pour un garçon qui possède un potentiel qui pourrait lui permettre de revendiquer un poste de titulaire, au moins en division 1 : << Mais jusqu'à aujourd'hui, et pour la dernière année, j'ai la chance d'évoluer également au plus haut niveau juniors. Je crois, de surcroît, plus progresser avec des joueurs d'élite à l'entraînement >>. Huet, Rautio, Rolland, le trio de maîtres a énormément appris à l'élève. Il faut dire, qu'en matière d'exemples, on fait difficilement mieux : << De chacun, je retire forcément quelque chose, même si je n'ai jamais voulu en copier un >>.

Relégué en D3 avec Grenoble l'an dernier, il n'a pas le loisir de tenter sa chance ailleurs, la décision fédérale étant intervenue trop tard pour lui permettre de se << retourner. Car les équipes commencent souvent leur recrutement au poste de gardien, tôt dans l'intersaison >>. L'année ne lui apportera guère d'enseignements, << à part les phases finales >>, mis à part un championnat junior dont les jeunes Isérois sortiront 2è. Et, au moment d'aborder le présent exercice, Jean-Philippe Lemoine lui demande de rester au club : << Je savais que je restais dans l'ombre de Rolland, mais je savais aussi que j'aurai l'occasion de jouer. Elle s'est présentée face à Reims, où j'ai remplacé Pat' en cours de rencontre >>. Rentre dans un match à froid, forcément, c'est pas simple : << Si le gardien ne va pas, l'équipe ne va pas. Alors, dans notre situation, je n'ai pas le droit d'être moyen >>. Et le jeune homme a répondu aux attentes du staff, en réalisant deux bons matchs, dont le dernier à Angers, même s'il n'a pas pu empêcher la défaite. << C'est toujours pareil : on fait largement jeu égal avec nos adversaires et, au final, on s'incline pour trois fois rien. Nous n'avons d'autant plus pas le droit à l'erreur face à Anglet ce soir, et Caen mardi. Nous devons jouer 60' à fond. Il le faut >>. L'aplomb du garçon ne doit pas passer pour de la prétention. Mais le traditionnel remplaçant a pris du galon et de l'assurance. Celle dont les Brûleurs de loups ont besoin pour écarter de leur route les Angloys.

Jean-Benoît Vigny

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