Sylvain Hilby, hockeyeur diplômé

 

Article du Journal des Grandes Ecoles (juin-juillet-août 2001).

Diplômé de Sciences Po l'an passé, Sylvain Hilby a porté le maillot de l'équipe de France junior de hockey ainsi que celui de Viry (Elite). Alors qu'il se lance dans l'audit, il poursuit sa carrière de hockeyeur à Evry (national 2). Trajectoire.

Le CV de Sylvain Hilby laisse pantois. Outre sa couleur orange, ce qui attire l'œil de n'importe quel DRH, c'est davantage son contenu : diplômé de Sciences Po Paris (promotion 2000) et médaillé de bronze aux championnats d'Europe de hockey sur glace en 1996. "C'est un atout c'est certain. Aujourd'hui, quand je vois un recruteur, il me demande toujours comment j'ai réussi à concilier les deux. Et puis, dans les entreprises, les mots clés, ce sont esprit d'équipe, solidarité, dévouement. On retrouve ces valeurs dans le hockey" explique le défenseur d'Evry, équipe de national 2. Sans compter que pour répondre à la question traditionnelle "savez-vous travailler sous pression ?", le gaillard a autre chose à faire valoir que sa réussite scolaire. "Je réponds toujours qu'avec le maillot de l'équipe de France sur les épaules, on a forcément quelques comptes à rendre" sourit Sylvain Hilby.

A 23 ans, Sylvain Hilby a su concilier au mieux les deux activités : "je n'ai jamais voulu choisir. Si j'ai réussi dans les études, c'est aussi grâce au hockey". Ce brun au physique de déménageur n'a pas perdu son temps : sa scolarité est linéaire, sans aucune anicroche jusqu'à l'obtention du diplôme de l'IEP l'an passé ; sa vie sentimentale est bien réelle et sa carrière de hockeyeur tout à fait intéressante. Il a ainsi longtemps joué en Elite (la division 1 de Hockey) à Viry avant de rejoindre depuis l'an dernier les rangs d'Evry.

Son secret ? Une organisation sans faille. "Il y a vraiment des fois, on s'est demandé comment il faisait", explique Catherine sa mère. Lorsqu'il jouait à Viry, Sylvain Hilby entamait sa deuxième année à Sciences Po. Pas vraiment une année calme au niveau scolaire. "Cela m'est arrivé d'avoir un match le soir et d'avoir une dissertation d'économie politique à rendre pour le lendemain. Dans ce cas, je veillais un peu plus tard que d'habitude" explique Sylvain. Jamais, il ne s'est servi de ce prétexte pour rendre un devoir en retard : "les professeurs ne font pas attention à ces choses-là. Ce qui compte pour eux, ce sont les galops d'essai, les exposés". Même la prep'ENA n'a pas rompu son infaillible organisation : "En prep'ENA, c'est même plus facile qu'à Sciences Po de concilier les deux. Tu n'as rien d'obligatoire à rendre. Le seul problème, ce sont les galops. Si j'ai pu aller jouer un match à Toulon sur un week-end, je n'ai en revanche pas pu jouer la rencontre à Pralognan". Seul le championnat d'Europe en 1996 l'a poussé à faire l'école buissonnière : "j'ai dû manquer un mois de cours en avril l'année du bac. Tout s'est bien terminé puisque j'ai finalement eu le diplôme dès la session de juin".

Le soutien de sa famille a aussi été déterminant pour mener de front ces deux activités : "mon mari a assisté à tous les entraînements jusqu'à ce que Sylvain ait son permis. Il s'est mis à l'arbitrage. Et puis le mercredi, la grand-mère prenait le relais" indique sa mère.

Aujourd'hui, Sylvain Hilby cherche à repousser le plus loin possible l'échéance : celle du choix définitif entre sport et emploi. "Je ne m'imagine pas arrêter le hockey. Mais je sais qu'un jour, fatalement... Maintenant, j'ai toujours eu les pieds sur terre. Je sais que ce n'est pas avec le hockey que tu gagnes ta vie. Si tu joues ans les plus grands clubs comme Reims ou Rouen, tu gagnes 8000 ou 9000 francs par mois. Mais après ta carrière tu fais quoi ? Un joueur de football a un nom mais un joueur de hockey ?". Lucide, très lucide l'ancien élève de la section service public qui n'a jamais touché le moindre denier de son sport : "le hockey, c'est vraiment une passion" sourit-il.

Il porte un regard un peu désabusé sur l'avenir de ce sport dans lequel tous les champions de France des dix dernières années - à l'exception de Brest et de Reims - ont déposé le bilan : "le hockey n'a même pas une fédération indépendante. On dépend de la fédération des sports de glace. Les médias ne s'y intéressent pas. C'est dommage car lorsque les gens viennent à la patinoire, cela leur plaît généralement. Et puis, il n'y a même pas une patinoire publique à Paris".

Outre son activité en club, Sylvain Hilby utilise son réseau de relations et pige au Journal du Hockey : "je suis correspondant régional. Cela me prend bien trois jours par mois". Il n'a finalement pas passé les concours de la fonction publique après avoir trouvé un poste d'auditeur dans un cabinet : "je commence comme auditeur. Par la suite, je souhaite évoluer vers le conseil et monter ma boîte". L'ambition aussi, c'est une valeur que l'on retrouve sur la glace.

L.A.

 

 

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