Itinéraire d'un enfant gâté

 

Article du Bien Public de Dijon (24 janvier 2003).

Déjà adversaire de Dijon en première phase, Brest accueille Dijon samedi pour le compte du Top 8. L'occasion de faire mieux connaissance avec Loïc Sadoun.

Après plus d'un an d'absence en équipe de France, Loïc Sadoun, l'attaquant néo-brestois, adversaire du CPHD Hockey Club demain, deux fois champion de France avec Reims, vient de réaliser à 25 ans un come-back remarqué sous le maillot frappé du coq lors du challenge européen et du tournoi du Mont-Blanc avec trois buts à son actif. Rencontre avec le fils aîné de Kader Sadoun (ex-international) redevenu un des maillons forts de Leime.

- En fait, cette sélection n'est qu'un retour aux sources puisque dès le début de votre carrière vous avez eu pour habitude de côtoyer les sommets.

Loïc Sadoun : "Effectivement, dès l'âge de 18 ans, alors que je jouais aux Français Volants, j'ai eu la chance d'être recruté par le rouennais Benoît Laporte. C'était ma première véritable expérience de joueur de hockey. Même si à la fin de la saison, on m'a viré pour rendement insuffisant, j'en conserve un excellent souvenir car c'est certainement grâce à ça que j'en suis arrivé là aujourd'hui. Je me suis endurci. Encore maintenant, aller rencontrer Rouen, où je garde pas mal de bons contacts, me procure un sentiment spécial."

"Rouen, une usine à gagner !"

- Reims profite de l'occasion et vous enrôle.

"Tout à fait, j'ai eu la chance que Monsieur Marcelle (président du club rémois) me fasse confiance. L'entraîneur Laksola m'a dit ce qu'il fallait que je travaille, ça n'a pas été facile, loin de là, mais, je savais ce que valais, je n'ai pas douté. Vous savez, je ne suis pas le seul à ne pas avoir réussi à Rouen, là-bas c'est un peu une usine à gagner !"

- C'est alors le début d'une formidable aventure avec deux titres de champion de France à la clé.

"C'était génial. Je pense d'ailleurs que si on avait continué, on aurait encore glané pas mal d'autres trophées. On était tellement solide défensivement que rien ne pouvait nous arriver. On était une véritable bande de copains. Si Reims avait survécu à ses difficultés financières, j'y serais certainement encore."

- Seulement voilà, les 'Flammes bleues' disparaissent, et vous vous retrouvez au chômage. Quel est votre état d'esprit à ce moment précis ?

"En fait, le dépôt de bilan fut officiellement déclaré début juillet. On ne s'y attendait pas trop. A cette époque de l'année toute les équipes ont déjà réalisé leur recrutement si bien que je n'ai reçu aucune proposition sérieuse. Pour 2 000 balles, j'aurais pu trouver des clubs mais il faut tout de même bien vivre ! Puis, il y a eu Dijon qui s'est manifesté, malheureusement, on ne s'est pas entendu sur le plan financier, il manquait 3 000 francs par mois par rapport à la proposition initiale. Je veux bien me prostituer pour pratiquer mon sport mais pas à ce point ! D'ailleurs, c'est à cette époque que j'ai conseillé à un de mes amis, Mathieu Bouché, de venir en Bourgogne car je connaissais Maric qui m'avait entraîné à Rouen."

- Finalement, Brest fait appel à vous, comment cela s'est-il passé ?

"Le président Bounoure m'a téléphoné, mon frère Yven faisant partie du voyage, je n'ai pas trop hésité."

- Regrettez-vous ce choix ?

"Absolument pas. De toute manière, je n'avais pas trop le choix. Avec une équipe construite initialement pour la D1, on s'est retrouvé en élite avec des résultats extraordinaires."

- Brest est tout de même un club en marge dans le monde du hockey, sa réputation n'est pas très flatteuse, comment le vivez-vous ?

"Il est clair que jouer avec 14 étrangers, ce n'est pas évident, mais, on s'y fait, on parle anglais, on se débrouille. Il faut faire la part des choses. Ici, on doit se donner à fond, ce n'est pas un club comme les autres. Ce qui est dommage c'est qu'aujourd'hui, certains joueurs savent qu'ils ne feront plus partie du prochain effectif, et ils font la tête. L'ambiance en pâtit forcément."

"L'équipe de France ? Que du plaisir !"

- Malgré ces difficultés actuelles, l'excellent parcours des 'Albatros' durant la première phase vous a permis de renouer avec la sélection, je suppose qu'il s'agit là d'un beau cadeau de Noël.

"Ce n'est que du plaisir. À Brest on dispose d'une équipe très jeune, à 25 ans, je dois être un des plus vieux, j'ai donc logiquement pris plus de responsabilité, ça a payé. C'est une récompense."

- Toutefois, par le passé, votre histoire avec l'équipe de France pourrait s'intituler 'Je t'aime moi non plus' tant vos rapports furent souvent orageux.

"Il faut replacer dans le contexte, j'ai connu ma première sélection à 19 ans après le championnat du monde juniors en Ukraine en 97, j'étais jeune et j'ai envoyé balader un peu tout le monde. De l'eau a coulé sous les ponts, puis, il y a un an, avec quelques Rémois, j'ai de nouveau été appelé. Cette fois-ci, je n'ai pas fait ma tête de grognon et tout s'est bien passé."

- Cette année, le Super 16 a vu le jour, quel regard portez-vous sur ce championnat ?

"C'est une formule qui est vraiment bien. Je souhaite que d'autres équipes nous rejoignent avec une formule style football avec une poule unique et les huit premiers qualifiés pour les quarts de finale. Je regrette simplement que la Fédération Française des sports de glace continue à faire sa petite mayonnaise, ce n'est pas sérieux. Vivement une fédération de hockey indépendante !"

- Samedi, vous jouez un match capital pour votre équipe.

"Un seul objectif : gagner, peu importe la manière. Si on veut faire quelque chose, on doit battre Dijon pour revenir à deux points, dans le cas contraire, on sera à six longueurs, et il nous faudrait réaliser trop d'exploits pour revenir".

Propos recueillis par Jérôme Roblot

 

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