Interview de Valentin Claireaux

 

À l'occasion de la venue à Helsinki de Lukko Rauma, club de Liiga de Valentin Claireaux, pour une rencontre contre HIFK, nous avons pu rencontrer l'international français et lui poser quelques questions.

- Première saison en Liiga, comment se passe le début de saison ?

Pour moi, ça se passe bien, c'était un peu plus difficile pour l'équipe en début de saison pour obtenir de bons résultats. On a eu un changement de coach, on a remis des choses en place. Depuis deux semaines, on commence à récolter des points au fur et à mesure des matches et c'est tant mieux pour nous car je pense que nous ne sommes pas à notre place. Ce soir on a bien joué défensivement mais je ne me m'attendais pas à gagner 4-0 contre HIFK. Nous étions bien regroupés devant notre gardien, nous les avons gardés à la périphérie, nous avons été opportunistes.

- Tu joues au centre de la 4e ligne, quel rôle te demande-t-on ?

Mon rôle est d'être solide défensivement, de mettre de l'intensité, de gratter quelques palets. Marquer, c'est en bonus. J'ai réussi à marquer un peu en ce début de saison mais ce n'est pas mon objectif premier. Je n'ai pas la pression de ce côté-là, je me concentre à jouer simplement. Je joue aussi un peu en infériorité, notamment en début de saison, un peu moins ces derniers-temps. Ça m'avait un peu surpris car je ne m'attendais pas à cela mais je prends ce qu'on me donne.

- Ton rôle a changé par rapport à celui que tu avais en Mestis ces deux dernières années ?

J'avais un peu plus de responsabilités offensives. Mais l'an dernier, j'ai eu un excellent coach, Ville Nieminen, et il m'a vraiment appris ce qu'est le hockey professionnel. Il ne m'a pas mis plus de pression offensivement, mais dans le jeu il fallait que je sois solide autant défensivement qu'offensivement. Donc je n'avais pas non plus un rôle de pur buteur comme on peut le voir pour d'autres étrangers.

- Comment es-tu arrivé à Rauma ?

Keupa, le club où j'étais en Mestis, est le club ferme de Rauma, ils y envoient les joueurs qui ne jouent pas en Liiga. Ça m'a permis de me faire remarquer.

- Raconte-nous un peu ton parcours depuis tes débuts à ton arrivée en Finlande...

J'ai commencé à Saint-Pierre-et-Miquelon, à côté du Canada, je voulais vraiment jouer au hockey. J'ai eu l'opportunité de partir en France à Amiens à 15 ans en sport-étude. J'ai joué jusqu'à la Ligue Magnus. Je m'étais fixé comme objectif de progresser à chaque saison et de voir où cela allait m'emmener. J'ai toujours eu l'envie de partir dans un pays de hockey comme la Finlande.

- Il y a une tradition de hockey à Saint-Pierre-et-Miquelon, tu n'étais pas plus attiré pour jouer au Canada ou au Québec ?

Si, j'ai regardé, j'avais quelques contacts étant jeune du côté de Moncton mais c'était très cher et au niveau scolaire, mes parents voulaient que je continue mes études, alors j'ai choisi la France. On m'a dit Amiens. Je ne connaissais rien du hockey en France. Ensuite j'ai eu l'opportunité de venir faire un essai en Finlande et ça a été concluant malgré une année très compliquée la première saison à LeKi. C'était toujours resté dans le coin de ma tête, je voyais de plus en plus de Français qui partaient à l'étranger.

- Comment trouves-tu le niveau de la Mestis par rapport à la Magnus ?

C'est différent, ce n'est pas le même hockey. Certains pensent que la Ligue Magnus est meilleure car il y a plus d'argent, mais individuellement les joueurs en Finlande ont un patinage incroyable. C'est difficile de comparer, ce sont deux types de hockey différents, avec plus de duels ici.

- Et la Liiga, c'est comme la Mestis ?

Oui, c'est pareil mais avec des joueurs beaucoup plus techniques, beaucoup plus intelligents, les supériorités numériques sont plus dangereuses.

- Visiblement tu as réussi à t'y adapter ?

Oui mais je ne pensais pas réussir à m'adapter comme ça. On me demande de jouer simplement et c'était ce à quoi je m'étais habitué depuis plusieurs années, donc ça m'aide.

- Comment te caractériserais-tu, quelles sont tes spécificités ?

Je joue centre mais j'ai aussi joué ailier, on peut me bouger. Je suis un attaquant défensif, capable d'appuyer l'attaque, mais ma force première est d'être solide défensivement, d'être capable de jouer dans les deux sens de la glace. J'aime beaucoup jouer les infériorités numériques.

- Il y a eu une arrivée massive de joueurs français en Finlande il y a quelques années, aujourd'hui vous n'êtes plus que deux.

Oui et aussi quelques autres dans les catégories de jeunes. Il y en a un qui est parti en NHL, lui, il s'est vraiment bien adapté... Charles Bertrand est dans le système finlandais depuis un bon moment. D'autres ont joué en Liiga, je pense à Teddy Da Costa ou Anthony Guttig, mais ils ont fait d'autres choix personnels. Ils n'avaient pas forcément envie de rester en Finlande.

- De ton côté hors du hockey, ça se passe bien ?

Ça se passe bien, je viens de Saint-Pierre, c'est très petit. Pour moi, c'est à peu près la même chose : il n'y a pas grand-chose à faire. Du moment qu'il y a juste le hockey, je suis partant avec ça.

- Tu as appris à parler finnois ?

Quelques mots mais c'est encore difficile.

- Tu as intégré une équipe de France établie en groupe A. Après un premier Mondial discret, tu as fait un très bon Mondial la saison dernière à Saint-Pétersbourg, quel bilan tires-tu sur le plan individuel ?

Je suis satisfait, j'avais le même rôle qu'en club, j'avais une ligne avec Nicolas Ritz avec qui on s'entendait très bien. Cela fait un moment que je le connais avec les équipes de France jeunes. On a l'habitude jouer ensemble, pas besoin de temps d'adaptation. Ça compte quand on sait que le championnat du monde est court. Notre ligne s'est bien débrouillée et il faut continuer.

- Le TQO ne nous a pas souri en revanche...

Ça s'est joué à un rien. Ça aurait pu basculer de notre côté. Nous sommes tous déçus car ce sont des échéances qui n'arrivent pas tous les jours mais il faut se concentrer sur ce qui vient. Nous avons un gros championnat du monde à faire en France. Il faudra faire la meilleure saison possible en club et montrer quand on est sélectionné qu'on répond présent. J'espère y aller si on m'appelle.

- Pourquoi le numéro 12 ?

Je l'ai gardé d'Amiens. Je n'étais pas là au moment du choix et quelqu'un a choisi pour moi. Depuis je l'ai gardé.

- Avais-tu des idoles étant jeune ?

J'étais très fan (et je le suis encore) du Canadien de Montréal. Je n'avais pas de joueurs en particulier. J'adore Patrice Bergeron, c'est un centre qui joue très bien en infériorité, en supériorité. Très complet.

- Ton meilleur souvenir en hockey ?

Peut-être l'année dernière avec Keupa. Quand je suis arrivé, nous étions derniers au mois de novembre et nous avons fini cinquièmes, puis en demi-finale de Mestis. Cette année avec Ville Nieminen a été incroyable. Il nous a tellement donné de toute son expérience en NHL. C'était un coach très dur mais il y avait un très bon esprit d'équipe.

- Suis-tu aussi la Ligue Magnus ?

Je regarde les résultats. Je regarde ce que font les copains en équipe de France.

- Quel est ton objectif à ce moment de ta carrière ?

Déjà de performer jusqu'à la fin de cette saison avec Lukko, bien m'installer sur la ligne et donner le meilleur de moi-même, en espérant que les coachs soient contents de moi. À plus long terme, on a toujours envie de plus, mais dans l'immédiat, j'ai encore beaucoup à apprendre, alors j'essaye de ne pas me projeter trop loin, je suis très content d'être ici, c'est une très bonne ligue.

- Quels sont les joueurs, avec qui ou contre qui tu as joué, qui formeraient ton équipe-type idéale, en t'y incluant ?

[gardien] Cristobal Huet (Lausanne HC)

J'ai beau chercher, c'est le seul gardien qui me vient à l'esprit, par son professionnalisme, sa gentillesse, l'efficacité qu'il a devant le but.

[arrière droit] Brent Burns (San José Sharks)

J'ai joué contre lui à mon premier championnat du monde en Tchéquie et il m'a vraiment impressionné. Il est énorme sur la glace, il est très grand, très mobile. On voit en NHL comme il appuie les attaques, il est capable de mettre des buts, c'est un défenseur complet.

[arrière gauche] Yohann Auvitu (New Jersey Devils)

Pour son éthique de travail, son intensité sur la glace, son aisance dans le patinage. Il voit très bien le jeu, il prend les bonnes décisions avec le palet, il a dominé ici avec HIFK, c'était impressionnant. Il a franchi le pas de la NHL et s'y débrouille très bien. Je suis très content..

[centre] Pierre-Édouard Bellemare (Philadelphia Flyers)

C'est le joueur typique que j'adore. Défensivement, offensivement, il est très complet. C'est mon modèle, j'apprends beaucoup de lui. Il est patient et lis bien le jeu. Il coupe les passes, il bloque les shoots. Il aide ses défenseurs, il est prêt à remonter le palet s'il le faut et fait de l'espace pour ses ailiers.

[ailier droit] Valentin Claireaux (Lukko Rauma)

J'avais pensé à un centre, donc comme je suis polyvalent, je me mets à l'aile droite.

[ailier gauche] Patrik Laine (Winnipeg Jets)

Il joue à droite comme à gauche. J'ai joué avec lui la première saison à LeKi et j'ai rejoué contre lui au dernier Mondial. J'ai pu voir sa progression. Déjà il était doué, il avait une aisance technique, il avait un shoot d'adulte alors qu'il avait 16 ans. Il décoche très vite, sans avoir besoin de beaucoup d'espace. Quand j'ai rejoué contre lui, c'était incroyable. Là, en NHL, ça ne fait que confirmer.

 

Propos recueillis en décembre 2016 par Benoît Mantel (Twitter @BenoitMantel)

 

Retour au sommaire