Canada - Russie (25 août 1996)

 

Match amical.

Les Russes ne font pas grand-chose pendant les dix premières minutes et l'équipe locale ouvre le score par Vincent Damphousse. Pour réveiller l'ours qui dort, il faut une pénalité (faire trébucher) contre Claude Lemieux, dont la sélection pour porter le maillot frappé de la feuille d'érable a fait grincer quelques dents au Canada en raison de son geste honteux en finale de la dernière Coupe Stanley - il avait chargé par derrière Kris Draper qui rejoignait son banc et qui s'écrasa le visage contre la balustrade.

Sur l'infériorité numérique, Ed Jovanovski tente de marquer son territoire. S'il est là, c'est parce qu'Al MacInnis souffre d'une gastro-entérite qui ne l'a pas laissé s'entraîner depuis le deuxième jour du camp d'entraînement et qui lui a fait perdre six kilos. Pour le sélectionner, Glen Sather, en panne de défenseurs valides, a même enfreint le règlement de la coupe du monde qui veut que les réservistes de la liste des sélectionnés n'aient pas le droit de disputer les matches de préparation. Alors, le jeune arrière canadien, qui reste sur une excellente première saison en NHL, charge Tverdovsky avec beaucoup d'entrain. Mais le défenseur offensif russe réussit à glisser le palet vers Mogilny, et maintenant que Jovanovski est hors de position pour avoir privilégié une mise en échec digne des ralentis de la télévision canadienne, Alekseï Zhamnov se retrouve tout seul face à Martin Brodeur pour l'égalisation.

Tout le monde a droit à une seconde chance. C'est sans doute ce que s'était dit Glen Sather en alignant Brodeur ce soir. Certes, le gardien des New Jersey Devils avait laissé passer le premier tir en entrant en jeu contre les États-Unis lors du premier match amical de la sélection canadienne. Mais il méritait de montrer ses qualités en étant titulaire d'entrée. Malheureusement, ce premier tiers-temps ne lui est pas favorable, les Russes enchaînent les actions d'éclat conclues par Kovalev et Kovalenko, et Brodeur rentre aux vestiaires avec trois buts encaissés en six tirs, et le sentiment d'avoir conforté la position de n°1 de Curtis Joseph. Il reste toutefois en jeu et aura ainsi l'occasion de se montrer plus solide.

La deuxième période est l'occasion pour les Canadiens - qui perdent malheureusement Steve Yzerman qui quitte la glace avec un étirement ligamentaire au genou droit - d'intimider physiquement les Russes comme ils en avaient l'intention. On assiste alors à un show Lindros. Tout d'abord, il pose sa lourde carcasse devant Trefilov et masque ainsi un tir de Paul Coffey en supériorité numérique. Ensuite, le centre de Philadelphie met en échec dangereusement Gonchar contre la balustrade, revanche d'une charge par derrière qu'il avait subie plus tôt dans le tiers-temps. Darius Kasparaitis, qui a lui-même une réputation d'expert en charge vicieuse, vient alors le défier et échanger quelques amabilités.

Mais à force de répondre aux provocations canadiennes, les Russes perdent les fondements de leur jeu. Ils entrent dans le jeu d'un Eric Lindros et lui donnent un environnement confortable, qu'il exploite en égalisant à un peu plus de onze minutes de la fin. Ce sont les Canadiens qui apposent désormais leur patte sur le match, et c'est leur "checking-line", celle de Graves, Messier et Verbeek, qui leur donne l'avantage. La Russie paie d'être la seule pénalisée dans ce dernier tiers-temps, mais, alors que Yashin est en prison pour accrocher, Andreï Kovalev s'échappe pour son deuxième but de la soirée et obtient ainsi un match nul équitable.

Marc Branchu

Commentaires d'après-match

Glen Sather (entraîneur du Canada) : "Cette coupe du monde, ça va être quelque chose d'exceptionnel. Lindros est effrayant, n'est-ce pas ? C'est un grand joueur, ça ne fait aucun doute. Il ressemble à un train de marchandises, impossible à arrêter. Et il ne paraît jamais se fatiguer. Je lui ai donné des doubles présences au dernier tiers-temps et ça a semblé ne rien lui faire. Je n'ai pas été surpris que les Russes répondent et cherchent les embrouilles. Ils ont probablement été trop longtemps en NHL."

Martin Brodeur (gardien du Canada) : "Ce Tverdovsky, je n'avais pas joué tant que ça contre lui. Il est incroyable. J'ai dû me défoncer. Il arrive lancé avec une telle vitesse qu'il crée toujours une bonne occasion. Dans ces rencontres internationales, le jeu est meilleur. L'opposition est meilleure, mais votre équipe aussi, donc il y a plus de tirs de qualité de part et d'autre. En saison régulière, il n'y a pas de tir si le palet n'est pas juste sur la crosse. Mais avec ces gars, le palet peut-être partout, même en train de rebondir dans les airs, et ils peuvent quand même le contrôler et l'envoyer au but. [...] Les Russes ont joué comme on le fait à New Jersey. Le palet arrivait dans notre zone mais personne ne venait. Ils ont joué en contre, attendant les interceptions. Ils étaient très patients. C'est surprenant de la part d'une équipe russe. Peut-être qu'ils essaient de jouer à nous perturber l'esprit."

Boris Mikhaïlov (entraîneur de la Russie) : "Je considère ce match nul comme une victoire. Beaucoup de nos meilleurs joueurs [Khabibulin, Zubov, Fetisov, Fedorov, P. Bure et Nemchinov] étaient au repos aujourd'hui. C'était un bon match et le meilleur sur glace a été l'arbitre."

Andreï Trefilov (gardien de la Russie) : "Qu'est-ce qu'il [Lindros] est imposant ! Il était devant moi sur le but de Coffey, et tout ce que j'ai vu, c'est un gros numéro 88. J'aime ce genre de joueur. Dommage qu'il soit canadien."

Darius Kasparaitis (défenseur de la Russie) : "Ce Lindros, on aurait dit un ordinateur programmé pour tuer des Russes. Je ne sais pas, peut-être qu'il n'aime pas les Russes. Peut-être que c'est politique. C'est OK, c'est un grand joueur, on fera avec. Je prend les journaux en Amérique du nord, et c'est toujours Canada premier et États-Unis deuxièmes. Et nous alors ? Nous ne sommes pas si mauvais. Peut-être pourrons-nous montrer au monde entier que le hockey russe est encore bon. Sûr, les Canadiens ont de grands noms. Messier, Gretzky, Lindros. Les meilleurs joueurs du monde. Mais nous sommes confiants. Si nous jouons à la russe, en passant le palet, en prenant les espaces, nous pouvons gagner le tournoi. Mais si nous jouons à la façon nord-américaine, comme nous l'avons fait en deuxième période, le Canada nous battra, et les États-Unis aussi. Ça dépend de nous."

 

Canada - Russie 4-4 a.p. (1-3, 1-0, 2-1, 0-0)
Dimanche 25 août 1996 au Saddledome de Calgary. 19989 spectateurs.
Arbitrage de Dan Marouelli (CAN) assisté de Brad Lazarowich et Wayne Bonney (CAN).
Pénalités : Canada 26' (8', 14', 4', 0'), Russie 24' (6', 12', 6', 0').
Tirs cadrés : Canada 41 (9, 14, 16, 2), Russie 28 (6, 9, 10, 3).

Évolution du score :
1-0 à 06'50" : Damphousse assisté de Gretzky et Fleury (sup. num.)
1-1 à 11'56" : Zhamnov assisté de Mogilny et Tverdovsky (sup. num.)
1-2 à 17'48" : Kovalev assisté de Gonchar et Kasparaitis
1-3 à 18'24" : Kovalenko assisté de Tverdovsky
2-3 à 26'33" : Coffey (sup. num.)
3-3 à 48'50" : Lindros assisté de Gretzky et Niedermayer (sup. num.)
4-3 à 53'43" : Graves assisté de Verbeek et Messier
4-4 à 56'07" : Kovalev assisté de Kovalenko (inf. num.)
 

Canada

Attaquants :
Vincent Damphousse - Wayne Gretzky - Theoren Fleury
Rod Brind'Amour - Steve Yzerman - Trevor Linden
Brendan Shanahan - Eric Lindros - Claude Lemieux
Adam Graves - Mark Messier - Pat Verbeek

Défenseurs :
Scott Stevens - Rob Blake
Scott Niedermayer - Paul Coffey
Adam Foote - Ed Jovanovski

Gardien :
Martin Brodeur

Russie

Attaquants :
Vyacheslav Kozlov - Igor Larionov - Andreï Kovalenko
Andreï Nikolishin - Aleksei Zhamnov - Aleksandr Mogilny
Alekseï Kovalev - Alekseï Yashin - Valeri Bure
Sergueï Berezin - Aleksandr Semak

Défenseurs :
Darius Kasparaitis - Sergueï Gonchar
Vladimir Malakhov - Oleg Tverdovsky
Dmitri Yushkevich - Alekseï Zhitnik
Igor Kravchuk

Gardien :
Andreï Trefilov

 

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