Match comptant pour la trente-quatrième journée de la Vysshaya Liga 2003/04, poule ouest.

Et un derby, un ! Entre deux équipes moscovites toutes deux descendues de Superliga à l'intersaison, mais au parcours diamétralement différent en Vyschaya Liga. Le Spartak est leader invaincu, et les Krylia Sovietov neuvièmes sur seize. Balayés 8-2 la veille sur leur glace et déjà battus 3-2 et 4-2 lors des deux premiers matches sur la patinoire du Spartak, les Krylia Sovietov n'ont donc pas le choix dans cette ultime manche du derby moscovite de deuxième division professionnelle : il faut sauver l'honneur devant un public toujours aussi fidèle.

Une mission quasi-impossible tellement le Spartak domine outrageusement cette poule occidentale avec vingt-huit victoires, trois nuls et... zéro défaite, alors que les Ailes Soviétiques sont à la peine. Après être tombées au fond du classement en début de saison, elles se sont au moins envolées vers le milieu de tableau. Il ne faut pas tout demander pour un club en pleine reconstruction.

Pourtant, malgré l'enjeu, la partie débute plutôt pianissimo, le Spartak n'a pas à faire le jeu, il est leader et joue à l'extérieur. Les KS semblent encore traumatisées par le match de la veille où les "Aviateurs" ont encaissé des séries de buts en quelques secondes. Il faut donc attendre la troisième minute pour voir la première action de la partie digne d'être signalée : une attaque des KS... qui ne donne rien. Quarante secondes plus tard, c'est au tour du "Spartakiste" Dimitri Outkine de tirer sur la cage de Sergueï Mylnikov. Le match est enfin lancé.

Malheureusement pour les Rouges et Bleus des KS, leur élan est coupé (en plein vol, normal pour les Ailes Soviétiques...) avec 2'+10' pour le Bélarussien Andreï Maximenko (qui a joué à Brest, mais au Bélarus...). Cela permet au Spartak de prendre les choses en mains, mais dans les cages des Krylia Sovietov, Sergueï Mylnikov est parfait. Petit à petit, profitant de la première pénalité infligée au Spartak, les KS reviennent dans le match et Dimitri Semenov trouve le poteau d'Andreï Medvedev.

À la douzième minute, la patinoire connaît une "invasion" d'une centaine de (très) jeunes supporters du Spartak, visiblement habitués au football (la saison de foot est terminée en Russie). Cheveux courts, se voulant fiers et agressifs, sans rien comme vêtements qui laisse penser qu'ils sont supporters, à part des écharpes du Spartak camouflées, ils ont visiblement été autorisés à entrer une fois le match commencé pour des raisons de sécurité. La milice les tient d'ailleurs à l'œil ! Et les supporters du Spartak (hockey) qui sont là depuis le début du match ne les regardent même pas !

Un joueur de chaque côté en prison (Posnov pour le Spartak et Kroutov pour les KS) et cela permet de décanter le jeu. Suite à une belle domination, les Krylia Sovietov ouvrent la marque : entrée de zone en deux contre un, passe de Mokhov pour l'intenable Semenov, but ! Les Krylia Sovietov sont déchaînées en cette fin de tiers et se créent encore deux grosses occasions en supériorité numérique à 16'26 et à 18'05 après trois tirs consécutifs.

Le jeu redevient équilibré en début de deuxième période. Le Spartak ne s'affole pas. Les Rouges et Blancs n'accélèrent pas vraiment, ils continuent à se protéger d'abord et à se dire que l'ouverture arrivera bien à un moment. Alors, les KS reprennent leur domination. À 28'56, toute la patinoire se lève (enfin, les supporters des KS...) en pensant qu'Artem Vostrikov a marqué. En fait, son tir passe tout juste à côté de la cage de Medvedev. En réaction, les "footeux" du Spartak se mettent à chanter...

Cela semble réveiller les joueurs du Spartak qui haussent le ton. Ils sont à deux doigts d'égaliser à 23'11, mais un défenseur des KS se couche sur le premier tir et le gardien arrête le second. Les Ailes Soviétiques ont deux réactions vives, un poteau de Voronov et un tir juste à côté de Kotcherov. Mais alors qu'on se dirige vers ce 1-0 à la deuxième pause, le Spartak égalise sur un tir que le gardien des KS croit avoir arrêté. L'arbitre n'étant pas certain, il vérifie à la vidéo et accorde le but. Les supporters du Spartak-foot allument deux fumigènes de joie ! Cela a deux conséquences. La première, on ne voit plus grand-chose, la seconde, cela réveille la milice qui à la fin du tiers fouille un à un tous les supporters de cette tribune pour vérifier qu'il n'y a plus d'autres fumigènes. Certainement satisfaits de leur prestation, la majorité de ces "fans" quittent la patinoire. Arrivés au bout de douze minutes, ils seront partis après quarante minutes de jeu. Et toujours dans l'indifférence des supporters du Spartak-hockey !

Sur la glace, rien n'est fait. Le rythme s'accélère donc en début de dernière période. Dès la trente-cinquième seconde, Mylnikov sort d'ailleurs un chaud palet d'une superbe mitaine. Le Spartak domine, mais les KS répliquent... jusqu'à cette minute décisive. 47'01, tir sur Mylkinov qui renvoie...sur Samokhanov : 1-2 ! 47'21, mauvais renvoi de la défense des KS, tir instantané d'Ivanov : 1-3 ! Le Spartak a eu raison de ne pas s'énerver, comme la veille, la faille est venue d'un seul coup dans la défense d'une équipe des KS encore inexpérimentée.

En vingt secondes, le Spartak a tué le match. Que nenni ! Quarante et une secondes plus tard, les Krylia Sovietov reviennent dans le coup avec un but rageur de Trofimov. De joie, la sono passe une musique au moins aussi entraînante que celle de l'Armée Rouge ! Les KS sont déchaînées, Sémonov met le feu d'un tour de cage à la cinquantième. Poussés par leur public, les locaux tentent l'égalisation, mais le Spartak ne s'affole toujours pas, et avec une maîtrise impressionnante, il réussit toujours à calmer le jeu en faisant tourner le palet dans sa zone et en attendant le moment idéal pour la contre-attaque.

Un dernier tir à bout portant de Kroutov (de la compagnie KS, pas de la KLM...) magnifiquement arrêté par Medvedev, et on en reste là. Le Spartak est toujours invaincu, il se promène en tête de la poule, loin devant les deux clubs Neftianik de l'industrie pétrolière du Tatarstan (Almetievsk et Leninogorsk) et devant le Vityaz Podolsk. La remontée en Superliga se profile à l'horizon du Spartak. En revanche, la pilule doit être amère pour les Krylia Sovietov qui ont perdu les quatre derbies, dont trois fois de peu. Mais les Ailes Soviétiques ont un passé : deux titres de champions d'URSS en 57 et 74, quatre places de deuxième dans ce même championnat en 55, 56, 58 et 75, et des anciens joueurs prestigieux comme Oleg Tverdovsky, revenu à la patinoire des KS avec la Coupe Stanley pour la montrer à ses anciens fans.

Les KS ont aussi un présent avec une jeune équipe qui se démène et un public incroyablement fidèle, et donc les KS ont un futur avec en plus une équipe-réserve dans le haut de tableau de son championnat. La remontée en Superliga n'est pas pour demain, mais le club se reconstruit. En fait comme un post-scriptum au dernier volume du journal d'un fou de hockey, c'est peut-être les Krylia Sovietov que je préfère à Moscou... Qui a dit c'est parce qu'ils jouent en rouge et bleu ?

Compte-rendu signé Bruno Cadène

Krylia Sovietov Moscou - Spartak Moscou 2-3 (1-0, 0-1, 1-2)

Samedi 13 décembre 2003 au Palais des sports des Krylia Sovietov. 2500 spectateurs.

Arbitrage de M. Semenov assisté de MM. Kamurkin et Olenin (tous de Moscou).

Pénalités : Krylia Sovietov Moscou 16', Spartak Moscou 10'.

Évolution du score :

1-0 à 13'28" : Semenov assisté de Mokhov

1-1 à 38'13" : Belousov assisté de Shevtsov et Samokhvalov

1-2 à 47'01" : Samokhvalov assisté de Shevtsov

1-3 à 47'21" : Ivanov assisté de Shandurov

2-3 à 48'02" : Trofimov assisté de Kocherov

Gardien : Sergueï Mylnikov.

Défenseurs : Oleg Shargorodsky - Sergueï Voronov ; Anton Ulianov - Sergueï Bautin ; Stepan Mokhov - Renat Mamashev ; Sergueï Zuborev - Sergueï Dorofeïev.

Attaquants : Andreï Maksimenko (BLR) - Andreï Krutov - Artem Vostrikov ; Roman Volochenko - Mikhaïl Yunkov - Valentin Morozov ; Andreï Stepanov - Evgueni Pasternatsky - Dmitri Semenov ; Aleksandr Trofimov - Pavel Kocherov - Mikhaïl Deïev.

Remplaçant : Vladimir Kulikov (G).

Gardien : Andreï Medvedev.

Défenseurs : Sergueï Rechetnikov (c) - Evgueni Shaldybin ; Viktors Igantjevs (LET) - Alekseï Komarov ; Mikhaïl Donika - Sergueï Zimakov ; Andreï Pervyshin - Vladimir Korsunov.

Attaquants : Igor Shevtsov - Andreï Samokhvalov - Andreï Posnov ; Dmitri Shandurov - Aigars Cipruss (LET) - Mikhaïl Ivanov ; Viktor Gordyuk - Dmitri Semin - Sergueï Shikhanov ; Dmitri Utkin - Aleksandr Tatarinov - Matveï Belousov.

Remplaçant : Oleg Glebov (G).

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